C’est un partage familial qui a mis Frédéric Lemay à la tête de terres, de vignes et de bâtiments à Salles-d’Angles. Ce charentais d’origine, architecte à Paris depuis longtemps, a su relever le gant…
Lorsqu’il entre en possession du Maine des Treillis il y a 20 ans, Frédéric Lemay décide de créer une véritable exploitation viticole. « C’était en pleine crise du cognac, se souvient-il, on m’a dit « vous n’y arriverez pas. » Le domaine possédait des vignes mais pas de distillerie. Pour atteindre mon objectif, il fallait un alambic. » Il a donc rénové des bâtiments existants pour y installer une distillerie, « comme si elle avait toujours été là ». Sa distillerie, il l’imaginait comme un bel outil. « Je voulais reproduire l’alambic que j’avais vu sur une carte postale ancienne, dans le bureau de tabac de la place François1er. C’était une vue d’une ancienne distillerie Martell. » Dans son métier d’architecte, il lui était souvent arrivé de rénover de vieilles bâtisses, il connaissait donc bien les matériaux de l’époque. Il a trouvé des tomettes anciennes pour le sol, et préféré la pierre à la brique pour le massif « La Charente n’est pas une région de brique ». Son alambic de 25 hectos n’a que 20 ans, il l’a acheté neuf, « peut-être le seul livré par Chalvignac cette année-là ». S’il paraît plus ancien, c’est que Frédéric Lemay lui a fait ajouter des collerettes de cuivre, une porte et des boîtes à fumée en fonte. En revanche, la distillerie dispose bien sûr de toutes les avancées de la technique …mais dans un local voisin. « Le bâtiment où est installé l’alambic était un garage : l’ensemble du domaine relevait de l’architecture rurale paysanne, avec des agrandissements plus ou moins heureux au fur et à mesure des besoins. Des bâtiments sains avec de gros murs en moellons, bien construits, mais qu’on avait cherché à rendre fonctionnels en retirant les portes d’origine, les portails…Pour créer la distillerie, j’ai dû démolir des cuves, enlever les portes métalliques… »
Aujourd’hui Frédéric Lemay est donc tout à la fois architecte à Paris et dirigeant d’une société viticole en Charente, dont il gère lui- même le quotidien : il travaille en direct avec un chef de culture, quelques salariés et quelques saisonniers pour l’exploitation des vignes. Un distillateur rejoint l’équipe six mois par an, « quelqu’un qui avait des chaudières qu’il a laissées à ses enfants mais qui a la distillation dans le sang ». A la tête de 40 hectares aujourd’hui, il alimente largement sa chaudière de 25 hectos, « c’est un peu court surtout les années où la récolte a été bonne, mais il faudrait au moins 10 hectares de plus pour justifier un second alambic. Quand la taille du vignoble sera suffisante, la seconde distillerie sera très différente de l’actuelle. J’imagine un bâtiment moderne avec des matières actuelles, un très beau béton banché, de beaux bois, de l’inox… très différent mais toujours esthétique. »