Des raisins 2011 par « faciles » à traiter

26 janvier 2012

2011 fait partie de ces millésimes qui resteront gravés dans la mémoire des viticulteurs. La sécheresse, les pluies estivales, une maturation précoce et difficile, des vendanges et des vinifications compliquées, des conditions de conservation des vins atypiques auront eu un impact fort sur la qualité des eaux-de-vie. Le contenu des raisins « fragiles » a rendu le traitement de la vendange difficile à conduire mais, au final, la qualité des moûts a souvent fait celle des vins. Un certain nombre d’installations de traitement de la vendange ont montré leurs limites technologiques. Adapter la cueillette, moduler le remplissage et la conduite des pressoirs nécessitaient cette année à la fois des moyens technologiques adaptés et un véritable savoir-faire. C’est surtout lors de la conduite des pressurages, l’étape ultime de la chaîne de traitement de la vendange, que s’est révélée la difficulté à prendre en compte l’effet « nature » des raisins. Or, dans le process de vinification des vins de distillation, la phase d’extraction des jus joue un rôle capital vis-à-vis de la qualité des eaux-de-vie. Aucune intervention corrective de clarification des moûts ne permet de minimiser l’impact d’intervention de traitements de la vendange inadaptées.

 

 

La climatologie totalement atypique du millésime 2011 a eu une incidence très forte sur la structure qualitative des raisins et la conduite des vinifications. Les raisins d’ugni blanc ont commencé à verrer très tôt fin juillet mais ensuite le processus de maturation ne s’est pas déroulé dans des conditions optimales. Les effets cumulés du stress hydrique lié à cinq mois de sécheresse et un mois d’août extrêmement pluvieux et frais ont perturbé le déroulement de l’étape ultime du cycle végétatif : la phase de maturation. La réaction des vignes à ce climat excessif a été amplifiée ou modulée par les effets parcelles, la nature du sol, du sous-sol, l’entretien agronomique et la charge de récolte. Dès la mi-juin, les différences d’états végétatifs déjà visuellement importantes n’ont cessé de s’amplifier jusqu’à la récolte.

Des raisins ayant un équilibre qualitatif « jaloux »

p18.jpg2011 est vraiment un millésime paradoxal car le déroulement de la maturation très précoce s’est effectuée de façon comparable aux conditions d’une année à la maturité tardive et incertaine. L’autre spécificité du contexte 2011 a été la forte pression de botrytis qui s’est implanté à la mi-août et à littéralement explosé à partir de la mi-septembre. Ensuite, l’organisation du déroulement des vendanges a été profondément marquée par le climat de début septembre humide et relativement chaud. A cette époque, des raisins mûrs côtoyaient des raisins encore verts dont le retard de véraison de certaines baies était spectaculaire. La maturité très hétérogène a compliqué l’organisation des chantiers de récolte qui ont souvent été avancés en raison de la dégradation de l’état sanitaire. Indéniablement, les raisins du millésime 2011 présentaient un équilibre qualitatif beaucoup plus « jaloux » que ceux de 2010 ou de 2009. Trouver le moment idéal de récolte n’était pas simple : « Fallait-il attendre une maturité plus complète, intéressante sur le plan de la structure aromatique et aussi très risquée vis-à-vis du botrytis ou au contraire récolter plus tôt des raisins sains, moins mûrs et potentiellement plus riches en notes aromatiques de sous-maturité (note de verdeur) ? ». Actuellement, les dégustations des eaux-de-vie nouvelles expriment l’importance, des effets dates de récolte et de la maîtrise technologique des itinéraires de vinification et de conservation des vins.

Vinification et conservation des vins en conditions chaudes

p19.jpgLes vinifications ont été délicates à conduire toujours en raison du climat et du contexte d’urgence dans lequel se sont déroulées les vendanges. Les températures chaudes durant les vendanges n’ont pas facilité le contrôle des températures de fermentation en dessous 25 °C. Dans leur grande majorité, les unités de vinification ne sont pas équipées de moyens de maîtrise thermique performants pour réguler des batteries de cuves (souvent de grandes capacités) implantées à l’extérieur. L’impact des après-midi à 30-35 °C et des nuits douces (autour de 15 °C) sur la thermie des citernes extérieures a été fort et logique du fait de la précocité de l’année. Les cinétiques fermentaires se sont déroulées de manière « explosives ». Très peu d’arrêts de fermentation ont été observés en raison, d’une part, des efforts d’hygiène des viticulteurs et, d’autre part, des niveaux de richesse alcoolique potentiels moindres (inférieurs en moyenne à 1 % vol. par rapport à 2010.) Les fermentations alcooliques se sont déroulées de manière très rapide en trois ou quatre jours maximum et souvent les malo. se sont enclenchées dans la foulée. La persistance d’un climat toujours tempéré et chaud en octobre et novembre a eu des conséquences sur la conservation des vins « juste faits » qui sont restés à plus de 25 °C pendant plusieurs semaines. L’absence de refroidissement rapide et naturel n’a pas créé des conditions favorables à une bonne conservation des vins.

Des défauts liés à l’hétérogénéité de maturité et le mauvais état sanitaire

p20.jpgCette année, la conjonction d’éléments difficiles à maîtriser, une nature de raisins hétérogènes et fragiles, des conditions de vinification en situations chaudes et une première phase de conservation des vins pas idéale se ressentent au niveau de la qualité des vins et des eaux-de-vie. Les œnologues voient beaucoup d’échantillons qui présentent des anomalies spécifiques à ce millésime. Les premières inquiétudes sur le plan de la qualité des vins sont apparues tôt en saison. Certains lots de vins avaient, dès la mi-octobre, des teneurs en acidité volatile supérieures à 0,35 g/l et leur distillation a dû être envisagée rapidement. D’une manière générale, la dégustation des bons vins révèle une structure aromatique correcte mais moins riche qu’en 2010. Parmi les défauts les plus fréquents, les dégustateurs observent des nez de type « champignon, voire un peu terreux » (en relation avec la présence de botrytis) et des notes herbacées assez marquées. Les analyses des échantillons présentant ces anomalies révèlent des teneurs en alcools supérieurs souvent fortes et aussi des concentrations élevées en cis-3 hexénol. Ce dernier marqueur (issu de la sous-maturité et de la trituration de la vendange) est globalement plus fréquent dans des lots de vins issus de vendanges précoces (présentant des TAV faibles, des niveaux d’acidité corrects) ou de parcelles à gros rendements. Ce constat est assez logique car les teneurs en cis-3 hexénol diminuent régulièrement au cours du processus de maturation. Par ailleurs, en 2011, la cueillette de raisins plus ou moins mûrs a nécessité des efforts qui ont amplifié les effets de trituration au niveau de la MAV et ensuite lors du traitement de la vendange. Un œnologue nous faisait remarquer aussi que des teneurs plus élevées en cis-3 hexénol étaient présentes dans des lots de vins ayant un titre alcoométrique compris entre 9,5 % et 10,5 % vol., ce qui interpelle. La maturité aromatique des raisins était-elle atteinte ? La présence de botrytis n’a-t-elle pas provoquée une concentration accrue de particules végétales dans les moûts ? L’origine des teneurs élevées en alcools supérieurs peut être corrélée à deux causes principales inhérentes à ce millésime : des concentrations de bourbes accrues dans les moûts (dues à la présence de botrytis et à un traitement de la vendange plus agressif) et à des températures de fermentation élevées.

La nature « fragile » des raisins était difficile à traiter

p201.jpgDans un tel contexte, l’étape du traitement de la vendange a été souvent capitale vis-à-vis de la maîtrise globale du process de vinification. Les différences de nature de vendange d’une parcelle à l’autre ont posé de véritables problèmes aux vinificateurs. Traiter des raisins pas assez mûrs, bien équilibrés ou altérés par le botrytis nécessite des approches bien différentes de la cueillette à la fin du cycle de pressurage. Or, cette année, les contraintes logistiques et les fortes disparités de rendements n’ont pas toujours permis de tenir compte de la variabilité de nature de la vendange. La récolte s’est effectuée en général précocement, en présence de volumes à traiter parfois importants et en plus les conditions climatiques chaudes durant les vendanges n’ont pas facilité les choses. Comme dans le process de vinification charentais aucune intervention de clarification corrective n’est possible en matière de maîtrise de l’équilibre qualitatif des moûts (la maîtrise de la turbidité des moûts), le soin à apporter au traitement de la vendange prend une importance capitale.

Comment apprécier la qualité du traitement de la vendange et celle des moûts à l’issue du pressurage ? Dans ce domaine, les études de la Station Viticole du BNIC ont permis de faire progresser considérablement les connaissances.

Quelques principes semblent incontournables au niveau du traitement de la vendange : respecter la vendange, minimiser les effets mécaniques, ne jamais créer des conditions favorables à une sur-extraction, obtenir des moûts équilibrés en bourbes et traiter la vendange dans des délais propices à une mise en fermentation rapide (ne laissant pas le temps aux levures indigènes de coloniser le milieu).

A chaque nature de raisins correspond un mode de traitement

p22.jpgOr, en 2011, la grande variabilité de nature des raisins et leur contenu plus « fragile » ont rendu le déroulement du traitement de la vendange à la fois délicat et déterminant. L’utilisation judicieuse des divers équipements est toujours le résultat d’un compromis permanent entre les objectifs de qualité, les exigences de productivité et la capacité technologique de chaque chai à s’adapter aux spécificités de chaque millésime. Cette année, certaines propriétés ont préféré anticiper la récolte en privilégiant l’absence de botrytis, d’autres ont essayé de construire un calendrier de vendanges en fonction de l’état de maturité réel des différentes parcelles et enfin des viticulteurs ont pris le risque d’attendre une maturité beaucoup plus complète. La diversité des situations a rendu plus complexe le pilotage du traitement de la vendange. Au début des vendanges, les fréquences de secouages des MAV souvent plus élevées pour cueillir des raisins encore en sous-maturité ont engendré des conséquences sur l’état des raisins récoltés. Le respect de l’intégrité des baies a été moins bon ; une fraction de jus libres plus importante a été libérée et parfois la présence de particules végétales était plus importante. A l’inverse, en fin de vendange, les grappes décrochaient facilement mais leur état sanitaire souvent dégradé provoquait une libération importante de bourbes et de jus libres. L’évolution très différente de la maturation sur chaque terroir nécessitait une véritable réactivité au niveau du traitement de la vendange. Les paramètres de réglages du secouage des MAV, le degré de remplissage des pressoirs, la conduite des cycles de pressurages… auraient nécessité une adaptation beaucoup plus fréquente.

La filtration dans la masse de vendange est à l’origine de l’action de pressurage

Cette difficulté à traiter la vendange a été souvent extériorisée au cours de la conduite des cycles de pressurage. Le principe de fonctionnement d’un pressoir est très proche de celui d’un filtre qui est toujours un équipement complexe à utiliser. Un pressoir, quelle que soit la technologie mise en œuvre – pneumatique, plateaux mobiles ou vis d’Archimède –, réalise l’extraction des jus en exerçant une pression sur une matière semi-solide plaquée contre une cage ajourée. L’extraction des jus s’effectue en profitant d’un phénomène d’auto-filtration dans la masse de vendange qui naturellement retient une certain nombre de composés indésirables. Dans l’univers de production Cognac, l’effet de filtration dans la masse de vendange est capital pour obtenir des jus équilibrés en bourbes. En effet, l’interdiction d’utiliser du soufre rend impossible toute intervention corrective de clarification tel qu’un débourbage statique. La notion d’efficacité d’un cycle de pressurage repose donc à la fois sur la recherche de critères qualitatifs propres à la filière Cognac et sur une bonne productivité économique du travail (la recherche d’un débit horaire de coulage des jus). C’est pour cette raison que les constructeurs conçoivent le déroulement des cycles de pressurage de façon évolutive afin de s’adapter au contenu qualitatif des baies. Le fonctionnement de l’outil pressoir est également très dépendant des interventions de traitement de la vendange en amont, la récolte, le transport et le transfert. La qualité de la récolte, la vitesse et le mode de remplissage des pressoirs ont une incidence forte et directe sur le déroulement des cycles de pressurage. La récolte mécanique des ugni blancs modifie profondément la nature des raisins qui devient semi-solide, avec une proportion de baies éclatées et de jus libres importantes.

Les jus libres filtrés par le « gâteau de vendange »

Lors du déroulement du pressurage, le phénomène de filtration qui se produit au travers du gâteau de marcs n’est ni constant, ni homogène dans le temps. Une mauvaise maîtrise de l’effet de filtration conduit à un colmatage rapide de la masse de vendange solide qui devient totalement imperméable. Les jus sont en quelque sorte « bloqués » dans le pressoir et ne peuvent plus être extraits à des niveaux de pression normaux. Leur extraction serait toujours possible mais en mettant en œuvre des pressions très élevées qui provoqueraient la libération de composés indésirables (des bourbes, des composés issus de la trituration, des précurseurs des notes aromatiques herbacés, des teneurs en potassium fortes…) et un allongement important des temps de pressurage. Lors du déroulement d’un cycle de pressurage, les montées en pression aboutissent toujours à un phénomène de colmatage de la masse filtrante. L’effet de colmatage devient préjudiciable pour la qualité des moûts quand il intervient très tôt en début de cycle, à des niveaux de pression élevés. Il se produit alors un phénomène de sur-extraction. L’état de colmatage du gâteau de marcs est réversible en réalisant un émiettage (un rebêchage) qui permet ensuite de reconstituer une masse filtrante opérationnelle. Une fois cette intervention accomplie, une nouvelle séquence de filtration par une action de pressurage raisonnée peut être relancée.

Les raisins, un support de filtration naturel et hétérogène

La masse de vendange à l’intérieur des cages de pressoirs n’est pas un support de filtration inerte comme peuvent l’être des plaques, des cartouches ou des membranes. C’est au contraire un substrat naturel et hétérogène dont la nature varie fortement d’une année à l’autre, selon le cépage et en fonction de l’itinéraire agronomique de chaque parcelle. La variabilité de nature du support de filtration rend l’action de pressurage complexe à mettre en œuvre. Un cycle de pressurage bien conduit repose principalement sur la juste appréciation de la capacité de filtration de la masse de vendange. L’autre élément très important pour le déroulement du processus de filtration est la manière dont les phases de montées en pression sont exercées au cours du cycle de pressurage. Créer les conditions d’une extraction des jus progressive représente un enjeu qualitatif majeur. Lors du déroulement d’un cycle de pressurage, le colmatage de la masse filtrante de vendange est inévitable. L’objectif final d’un cycle de pressurage est d’atteindre un niveau d’assèchement correct de la vendange (autour de 80 %). Les enjeux économiques de débit horaire de coulage de jus représentent également en Charentes une contrainte non négligeable car, dans la plupart des propriétés, les durées de cycle ne doivent pas excéder 2 heures à 2 h 15. La conjonction de tous ces éléments intervient sur « l’agencement » des séquences successives de pressurage qui débouchent sur la construction de cycles complets. Enfin, les opérations de traitement de la vendange précédant l’action de pressurage, la récolte, le transport et le transfert interfèrent aussi sur les performances ultérieures « du filtre naturel de raisins » pendant la phase ultérieure de pressurage. Depuis que l’on vendange mécaniquement, la proportion réduite de rafles dans les pressoirs a modifié la capacité de filtration des gâteaux de marcs.

L’égouttage des jus libres au moment du remplissage des pressoirs : une étape clé

Les conditions de remplissage du pressoir doivent permettre « de doser » judicieusement les proportions entre la fraction de jus libres et l’apport de matière solide. Tout déséquilibre entre ces deux éléments rend complexe le déroulement des phases de pressurage à basses pressions au cours desquelles sont extraites les quantités de jus les plus importantes. Un apport trop important de jus libres (en début de remplissage) limite le phénomène d’auto-filtration des jus dans la masse de vendange. Les phases d’égouttage statique et dynamique (à basse pression) des jus libres représentent une étape clé du déroulement des cycles de pressurage. Le développement des systèmes de remplissage axial des pressoirs pneumatiques est très apprécié des viticulteurs car, d’une part, la répartition de la vendange dans les cages est complètement automatisée et, d’autre part, le taux de remplissage des cages est augmenté (par des rotations de cages). Le seul inconvénient du remplissage axial est qu’il ne permet pas d’apprécier visuellement la qualité du remplissage : la vitesse d’écoulement des jus libres et l’effet d’auto-filtration dans la masse de la vendange. Pour pallier ce problème, les constructeurs ont installé des pressostats sur les vannes axiales qui détectent une sur-pression témoignant du niveau de remplissage de la cage. A l’usage, ce système même bien réglé n’apporte pas réellement une information sur la qualité du remplissage. L’élément le plus important en matière de qualité de remplissage est la vitesse qui joue un rôle déterminant sur le juste dosage entre les fractions de jus libres et de matières solides. Dans un certain nombre de chais de la région de Cognac, le souci d’accroître les débits de la chaîne de traitement de vendange conduit à remplir les pressoirs très vite en utilisant des pompes sur-dimensionnées. Des pressoirs de 50, 80 ou 100 hl peuvent être remplis en seulement 10 minutes, ce qui perturbe fortement le déroulement ultérieur du pressurage. La capacité d’égouttage des cages est littéralement « saturée » en quelques minutes. L’apport trop rapide de jus libres pénalise leur écoulement et limite l’effet d’auto-filtration dans la masse de vendange. Réaliser des rotations de cage devient alors indispensable pour décolmater le pressoir. Dans de telles conditions, l’égouttage statique devient insuffisant et l’extraction des jus, suite aux rotations de cage, s’accompagne d’une libération de bourbes importantes. Or, comme la récolte mécanique du cépage ugni blanc engendre naturellement une libération de jus libres plus importante, il convient de conduire le remplissage de manière régulière pour limiter les rotations de cage. C’est le seul moyen de laisser le temps aux jus libres de s’écouler en bénéficiant de l’effet naturel de filtration dans la masse de vendange.

Qualité des moûts et qualité finale des vins : une forte inter-action

En 2011, la variabilité de nature de la vendange ne permettait pas d’aborder la conduite des cycles de pressurage de manière standardisée. Il n’était pas rare sur une même propriété de récolter des raisins sains en état de sous-maturité le matin, ensuite de collecter des raisins plus mûrs et de traiter en fin de journée des lots altérés par le botrytis. Ces trois états de vendange auraient nécessité la mise en œuvre de cycles d’extraction des jus différenciés pour essayer à la fois de sortir le meilleur des raisins et de « filtrer » les composés indésirables. La structure qualitative des moûts à l’issue du pressurage joue un rôle déterminant vis-à-vis de l’équilibre aromatique et organoleptique final des vins. Les déficiences technologiques éventuelles au niveau de la récolte, du transport et du transfert de la vendange ne pourront pas être « corrigées » par l’opération de filtration que représente le pressurage. Au contraire, la bonne maîtrise des premières interventions de traitement de la vendange contribue à faciliter la conduite du pressurage. Les viticulteurs qui ont fait l’effort en 2011 de modifier leur approche de traitement, en tenant compte de la nature des raisins, n’ont pas rencontré de problèmes de pressurage et la qualité des vins s’en est trouvée bonifiée.

Dans la région de Cognac, la mise en œuvre d’un cycle de pressurage adapté à la nature de la vendange représente un acte qualitatif important.

Des constructeurs réceptifs aux exigences de progressivité des phases basses pressions

Les constructeurs de pressoirs pneumatiques ont pris la juste mesure des attentes qualitatives formulées par les prescripteurs de la région de Cognac. La vendange d’ugni blanc récoltée mécaniquement n’est pas la plus facile à traiter compte tenu de la proportion importante de jus libres et de baies éclatées. Cela engendre des contraintes au moment du remplissage et lors des séquences d’extraction à basses pressions.

Tout d’abord, le remplissage axial doit être géré en limitant les rotations de cage et leur mise en œuvre doit intervenir régulièrement au cours de remplissage. La durée de remplissage doit être corrélée à la vitesse d’écoulement des jus libres et l’observation visuelle de la turbidité des moûts est un moyen simple d’observer l’incidence de la vitesse de pompage. Le niveau de remplissage des cages joue un rôle important sur l’écoulement des jus pendant les phases d’extraction à basses pressions (entre 0 et 1 bar). Un pressoir trop rempli rendra plus difficile la mise en œuvre d’un cycle d’extraction progressif. Ensuite, la nature de la vendange modifie profondément la capacité des jus à s‘écouler. Lors de l’année à maturité très hétérogène 2011, la relation entre le niveau de remplissage et le bon écoulement des jus était forte. Une vendange très mûre devenue grasse en raison des dégâts de botrytis libère ses jus plus difficilement dès les séquences d’extraction à basses pressions. Il était donc important à la fois de ne pas surcharger les cages et d’augmenter la progressivité des paliers de pressions. Les lots de vendange à sous-maturité n’étaient pas plus simples à traiter car des débuts de cycles un peu rapides limitaient les effets de filtration dans la masse de vendange.

Dans les pages suivantes, une présentation plus détaillée des cycles de programmation des quatre principaux constructeurs de pressoirs va être développée.

D’une manière générale, les constructeurs de pressoirs pneumatiques ont pris conscience de l’importance de la progressivité des séquences d’extraction à basses pressions dans la région de Cognac. Elles ont une influence directe sur les capacités de filtration du gâteau de marcs et interfèrent directement sur l’équilibre qualitatif final des moûts.

Les réalités économiques du traitement de la vendange

La réalité du fonctionnement des chaînes de traitements de la vendange en Charentes n’est pas toujours pleinement en phase avec toutes ces exigences qualitatives. En effet, les investissements conséquents que nécessite le traitement de la vendange ont amené beaucoup de viticulteurs à aborder l’agencement des chais de manière pragmatique. Une recherche de productivité a été imposée par le contexte économique difficile de la décennie passée. Ce n’est pas un hasard si les pressoirs mobiles de grandes capacités ont eu autant de succès. En Charentes, les performances du pressurage pneumatique ont été optimisées. La conception de chaîne de traitement de la vendange entièrement mobile, associant benne avec ou sans pompe, conquets et pressoirs est aussi une spécificité de la région de Cognac. Cela permet d’amortir des investissements lourds sur des surfaces importantes en déplaçant l’ensemble des équipements d’une propriété à l’autre.

Une philosophie de rationalisation d’organisation du travail pendant les vendanges s’est imposée au fil des années. Confier l’ensemble des travaux de récolte et de pressurage à un prestataire permettait-il de récolter en 2011 toutes les parcelles à bonne maturité ? Ne pas disposer de suffisamment de temps pour remplir régulièrement un pressoir était-il adapté à la fragilité de la nature des raisins ? Assurer le pressurage de 20 à 35 ha de vigne avec une seule cage de grande capacité (80 ou 100 hl) facilite-t-il l’adaptation des cycles à la nature de la vendange ?… Toutes ces organisations issues d’une réflexion technico-économique fondée fonctionnent assez bien dans des contextes de millésimes faciles comme 2009 et 2010 et deviennent plus problématiques en année difficile comme 2011.

Enfin, l’évolution climatique, qui a une incidence sur la précocité des cycles végétatifs et la nature de la vendange, semble accentuer la fréquence des récoltes difficile à traiter. Souhaitons que l’embellie économique actuelle se pérennise pour permettre aux viticulteurs de faire évoluer leurs unités de vinification.

 

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