Château de Beaulon : Christian Thomas, distillateur aventureux

A la barre du domaine de Beaulon depuis 1965, Christian Thomas est un saintongeais pur jus que son envie de voyage avait attiré vers la marine avant qu’il ne revienne à la tradition viticole familiale. Et pour mener son entreprise, l’ancien marin a su préserver son goût pour l’aventure…

Il est 9h55 à Lorignac, au lieu-dit de la distillerie du Moulin, où est installée la distillerie du château de Beaulon. Une sonnerie retentit : L’une des chaudières arrive en fin de chauffe. « C’était programmé pour 9h54, une minute de retard, ça n’est pas anormal » commente Christian Thomas, qui note soigneusement l’information sur le « livre de bord » de la distillerie, vieille habitude de marin.

Beaulon ne possédait en 65 qu’un seul alambic, déjà installé à Lorignac, mais avec l’extension du vignoble- 90 hectares aujourd’hui sur les deux communes de Saint-Dizan-du-Gua et de Lorignac -il a fallu voir plus grand et transformer la distillerie. Christian Thomas gardait le souvenir du bouilleur de cru qui passait de village en village dans son enfance, s’installant sous un « ballet », un hangar, pour distiller le vin qu’on lui amenait et que tout le monde venait voir travailler. Il avait aussi visité, lors de ses voyages à l’étranger, des industries agro-alimentaires dont les appareils de productions étaient visibles derrière des vitres. Il a donc décidé de ne pas cacher ses 4 magnifiques alambics, des chaudières à l’ancienne aux massifs de briques cuites au feu de bois, et de les installer derrière de grandes baies vitrées. « A l’époque, fin des années 60, les alambics ne se montraient pas, ça n’était pas bien vu, peut-être parce que l’on distillait quelque fois un peu en cachette, mais surtout parce que ça n’était pas bien vu de « se montrer… pourtant un alambic c’est une œuvre d’art. » Claire et accueillante, avec ses bancs, ses tables et sa boutique la distillerie est si belle que, l’été, bien des touristes peinent à croire que c’est un outil de travail en activité. « Aujourd’hui, c’est rentré dans les mœurs, sourit Christian Thomas, mais cela a créé pas mal de jalousie, c’était assez mal vu, j’étais le monsieur qui montre ses alambics. » Dans le même ordre d’idée, la distillerie de Lorignac fût l’une des premières à « oser » le gaz. « J’ai toujours été un aventureux, s’amuse le maître de lieux. »….

Éloge de la diversité

« Pour moi, distiller, c’est la finalité du métier, affirme Christian Thomas. Il est essentiel d’aller jusqu’au bout de la chaîne qui va du grain au verre, de produire de l’eau de vie, de la goûter, de la laisser vieillir et de la voir évoluer… Ce qui fait surtout du cognac de Beaulon un cognac à part, en plus de quelques secrets, de quelques astuces que j’ai glanées chez les anciens, c’est que nous n’utilisons, pour les bouteilles, que les cépages anciens cultivés sur le domaine, Colombard, Montil et Folle Blanche. L’Uni blanc est réservé à l’eau-de -vie destinée au mutage du pineau. Cela fait moins de volume mais la combinaison de la rusticité du colombard à l’élégance du Montil et à la subtilité très florale de la Folle blanche donne des eaux de vie à la saveur et aux parfums différents, des eaux-de-vie qui se démarquent…. Une diversité essentielle à la richesse du cognac… »