Restriction du désherbage chimique et obligation d’enherbement
Sur la voie de la Certification Environnementale Cognac (CEC), l’intégration de mesures agro-environnementales dans le cahier des charges de l’eau-de-vie des Charentes s’inscrit dans la politique du BNIC.
Publié le jeudi 27 janvier dernier au Bulletin officiel, le nouveau cahier des charges Cognac intègre désormais trois mesures agro-environnementales (MAE) et des dispositions sur les pieds morts et manquants.
Ces dispositifs obligatoires peuvent mener à des sanctions en cas de non-respect. Directeur du pôle contrôle au BNIC, Younes Tarari a explicité la position de la filière Cognac.
« Le Paysan Vigneron » – Comment furent définies et choisies ces MAE pour leur intégration dans le cahier des charges Cognac ?
Younes Tarari – Il s’agit d’un choix concerté des professionnels de la filière. Ce choix est porté depuis 2018. En intégrant ces dispositions agro-environnementales de l’INAO, la filière Cognac affirme sa volonté de s’engager dans la démarche environnementale.
Ces pratiques, évidentes, étaient déjà bien ancrées. L’idée était de les généraliser à l’ensemble des professionnels de la filière. Un travail est en cours pour évaluer quelles autres DAE pourront être proposées à l’ajout au cahier des charges.
« Le Paysan Vigneron » – Et quelles en seront les conséquences directes et indirectes pour les viticulteurs ?
Younes Tarari – Depuis deux ans déjà, le BNIC a été missionné pour ce travail. Les équipes de l’ODG font beaucoup de pédagogie sur le terrain. Il n’y a pas de surprise pour les professionnels de la filière. Ce travail en amont a permis une généralisation de l’intégration de ces MAE. Il ne reste qu’une minorité de viticulteurs qui doivent franchir le pas. A priori, cela ne représentera aucune difficulté.
Le but de ces dispositions est l’abandon de l’immense majorité de l’usage des herbicides. (Il reste possible d’en utiliser sous le rang). Le fait que ces mesures soient publiées dans le cahier des charges fait qu’il s’agit désormais d’une obligation. Les contrôles sont nécessairement aléatoires. Il faut que nous soyons certains, que nous puissions voir tous les domaines. Il est possible qu’il y ait des contrôles ciblés, des cadres très strictes, déterminés par l’INAO.
« Le Paysan Vigneron » – Ne craignez-vous pas un risque de perte d’appellation pour certains viticulteurs ?
Younes Tarari – Pour ces mesures comme pour les autres, nous sommes vraiment dans l’incitation par le cahier des charges. Les professionnels se mettent toujours au diapason. Il n’y a jamais eu de retrait d’habilitation.
« Le Paysan Vigneron » – Quels conseils donneriez-vous aux viticulteurs vis-à-vis de ces MAE ?
Younes Tarari – Être accompagné. Si des questions subsistent par rapport aux modalités de mise en œuvre, il ne faut pas hésiter à contacter les équipes du BNIC, au service des professionnels. Elles connaissent les dossiers.
Certains s’interrogent – ils sont minoritaires – sur les conséquences de l’arrêt des herbicides. Il ne faut pas hésiter à demander aux autres viticulteurs, à leurs voisins. Ce sont les meilleurs conseillers. L’immense majorité a arrêté de désherber en plein et les tournières. Les verrous psychologiques qui peuvent subsister ne sont pas justifiés.
« Le Paysan Vigneron » – Comment se calculent et se mesurent les contrôles quant aux pieds morts et manquants (PMM) ?
Younes Tarari – Les calculs se font selon la densité de plantation : à moins de 2 500 pieds/hectare, la limite est de 20 % ; entre 2 500 et 2 900 pieds/ha, la limite est de 25 % ; au-dessus de 2 900 pieds/hectare, la limite est de 35 %. Ce type de contrôle se fait au même moment que les audits terrain, en corrélation avec la mise en œuvre des dispositions agro-environnementales. Les deux volets sont arrivés en même temps, par l’annonce de la mise en place des MAE et du respect des réglementations des PPM. La pédagogie a l’air de faire son chemin. Il y a un intérêt pratique et professionnel à bien entretenir ses parcelles.
« Le Paysan Vigneron » – Quels conseils donneriez-vous aux viticulteurs pour bien intégrer ces mesures agro-environ-
nementales ?
Younes Tarari – Au-delà du cahier des charges, l’objectif de la filière Cognac est d’aller vers la CEC. La volonté de la filière est que l’entièreté des viticulteurs soient certifiés d’ici 2028. Nous devons être particulièrement vigilants sur cette approche.
Propos recueillis par Florian Toumit
Younes Tarari, directeur du pôle contrôle au BNIC.
La temporalité et le détail des MAE
Le 4 octobre 2018, la Commission nationale des boissons spiritueuses a publié la « modification du cahier des charges de l’AOC Cognac : proposition d’intégration de mesures agro-environnementales ».
Le 23 novembre 2016, le Comité national a approuvé les 8 mesures-types proposées par la commission environnement :
1. Obligation d’enherbement des tournières.
2. Interdiction du désherbage chimique en plein des parcelles de vigne.
3. Enherbement des vignes.
4. Améliorer l’efficience du matériel de pulvérisation.
5. Réduction des quantités de produits phytosanitaires.
6. Limitation des apports d’azote minéral de synthèse.
7. Maintien des murets, bosquets, terrasses…
8. Respect de la séquence morphologique originelle des sols.
Les trois premières MAE (en gras) sont donc entrées officiellement dans le cahier des charges le 27 janvier 2022, à la suite de l’homologation par l’arrête du 14 janvier 2022 pris par le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et le ministre délégué auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance.
Les évolutions en termes de contrôle
par les opérateurs habilités de l’ODG de l’AOC Cognac
■ Mise en œuvre des sanctions relatives aux pieds morts
et manquants (PMM)
• Premier constat : avertissement, renforcement d’audit documentaire, réfaction de rendement d’un volume équivalent.
• Récidive : réfaction de rendement d’un volume équivalent, renforcement d’audit.
• Récurrence : réfaction de rendement d’un volume équivalent, renforcement d’audit, suspension d’habilitation.
■ Application des sanctions en cas de non-respect des dispositions agro-environnementales
• Premier constat : avertissement.
• Récidive : demande de mise en conformité et contrôle(s) supplémentaire(s) sur d’autres parcelles ou la totalité des parcelles.
• Récurrence : retrait du bénéfice de l’appellation pour la parcelle concernée et/ou une suspension d’habilitation (activité production de raisin).