Le pineau mise sur l’export et diversifie les modes de conssomation

6 septembre 2018

Après 3 années de mandat, Jean Marie Baillif vient de céder sa place de Président de l’interprofession du Pineau des Charentes au Négociant Xavier Briois, directeur des filiales viticoles de la Coopérative Océalia. Les chantiers de cette nouvelle mandature s’inscrivent dans la droite ligne de la précédente avec la volonté affichée de dynamiser les ventes en capitalisant sur les marques et leurs valeurs. Dans les campagnes promotionnelles sur la France, la Belgique et le Canada, l’interprofession va s’efforcer de rajeunir l’image de l’apéritif charentais en misant sur les nouveaux modes de consommation. Une plateforme numérique de commercialisation devrait aussi être proposée gratuitement à tous les opérateurs de la filière avant la fin de l’année. Aux états Unis, les investissements promotionnels seront maintenus dans plusieurs grandes villes pour développer ce marché à fort potentiel. Au sein de la filière, il prône l’unité, souhaite des débats à parité sur les conditions de production et que la possibilité soit donnée au négoce de fabriquer son propre Pineau.

Le 22 juin 2018 s’est tenue l’assemblée générale du Comité du Pineau qui officialisait la fin du mandat de Jean Marie Baillif, viticulteur à St Palais de Phiolin. Alternance oblige, c’est un négociant qui a été élu pour lui succéder. Xavier Briois, est le directeur des filiales viticoles d’Océalia (Jules Gautret et AE d’Or). Cet homme de 55 ans, est encore peu connu à Cognac puisqu’il est arrivé dans la région il y a seulement un an et demi et pour être tout à fait transparent, sa candidature ne fût pas vraiment spontanée compte tenu des traces laissées par les guerres fratricides autour des prix et des appels d’offre de la grande distribution ces dernières années. Difficile dans ces conditions de s’accorder autour d’une vision commune pour construire l’avenir de la filière. La famille du Pineau a donc dû argumenter et convaincre pour faire émerger un représentant qui soit à la fois disponible et consensuel. Disponible, car la fonction de président de la deuxième interprofession du vignoble Charentais implique un engagement conséquent tant pour assumer les réunions internes que régionales et cette faculté n’est malheureusement pas toujours compatibles avec les obligations de chacun. Consensuel, car  la crise que traverse la filière ne pourra se résorber qu’en unissant les forces autour d’un projet partagé collectivement.

 

Des points de vue divergents pour endiguer la crise

La filière subit une baisse lente mais régulière de ses ventes depuis 2012 (- 15 % sur la période) et les initiatives ne se sont, pour l’instant, pas avérées concluantes pour enrayer cette tendance. Les causes de cette décroissance sont multiples : On y retrouve entre autres l’effet diminution du nombre de vendeurs directs et le retour de bâton, chez les leaders du marché, d’une stratégie un trop dépendante de la grande distribution française. Côté consommation, les modes ont évolué. La part de marché des apéritifs et des vins doux baisse continuellement et même si le Pineau des Charentes fait encore partie des produits qui s’en sortent le mieux dans la catégorie, force est de constater que les entreprises n’ont pas su anticiper la tendance. L’heure est aujourd’hui à la remise en question. La filière s’attache donc à moderniser ses gammes et les modes de consommation dans un marché toujours plus dynamique et en quête d’innovation. Jusqu’ici, dans l’interprofession, deux cultures manifestement incompatibles cohabitaient : Certains, minoritaires, prônaient une stratégie de développement par le volume, alors que les autres, majoritaires, envisageaient plutôt la croissance par la montée en gamme. Dans ce contexte, il est évident que l’élection d’un nouveau président, qui plus est, représentant les négociants, revêtait un caractère symbolique…

 

Un homme de consensus

Si Xavier Briois est plutôt « jeune » dans le milieu cognaçais, il n’en demeure pas moins un homme d’expérience qui a des convictions et des idées claires pour prendre à bras le corps les challenges de la filière. « Mon parcours est clairement orienté grande distribution, c’est un secteur que je connais bien. Mais mon leitmotiv, c’est la marque et ses vertus affiche-t-il d’emblée comme pour poser le ton et sa vision des choses. ». Cet ancien directeur de la cave de Vouvray a aussi conscience de la dimension politique de ses nouvelles attributions. « J’aurai besoin d’une équipe à mes côtés et nous allons devoir nous mettre autour de la table pour travailler ensemble à redresser la barre ». Deux vice-présidents épauleront Xavier Briois à la tête de l’interprofession du Pineau : Jean-Marie Baillif, le président sortant et Mickaël Bouilly, le maître de chai de la société H.Mounier. Les deux chefs de famille qui joueront aussi un rôle stratégique dans les échanges sont Vincent Chappe de la maison Bisquit, pour représenter les négociants, et Philippe Guerin, président du Syndicat des producteurs pour la viticulture.

 

Comité du Pineau

Election du 22 juin 2018

 

Collège du Négoce

Collège de la viticulture

Président : Xavier Briois

Jules Gautret (UniCognac)

 

2ème vice-président : Mickael Bouilly

Sté H Mounier

1er Vice-président : Jean Marie Baillif 

St Palais de Phiolin

Chef de Famille : Vincent Chappe

Sté Bisquit Dubouché & cie

Chef de Famille : Philippe Guerin

Chenac

Secrétaire Adjoint : Olivier Petit

Distillerie des Moisans

Secrétaire : Jean Jacques Enet

St Clément des Baleines

Trésorier Adjoint : Christian Gabrielsen

Sté Bache Gabrielsen

Trésorier : Jean-Bernard de Larquier

Arthenac

 

 

Le Chantier de la Parité ré-ouvert

Le premier chantier ouvert par le président est celui de la parité dans les décisions qui concernent le cahier des charges. Jusqu’ici, les discussions relatives aux conditions de production relevaient du syndicat des producteurs désigné organisme de défense et de gestion (ODG) par l’INAO. Le négoce qui représente 1/3 des voix de l’ODG depuis la réforme de 2007, considère qu’il est sous-représenté dans les décisions stratégiques. A compter de la rentrée 2018, trois groupes de travail vont débattre de sujets majeurs jusqu’ici réservés aux instances de l’ODG. Le premier concernera le rendement et les réserves avec l’objectif de planifier sur plus long terme les tendances (une sorte de business plan à la « sauce Pineau »). Le second traitera du projet de marque collective (cf notre édition n°1200 page 16). Enfin, le dernier travaillera aux dénominations géographiques complémentaires (notamment île d’Oléron et Ré). « Nous avons besoin de reconstruire une relation de confiance entre tous les acteurs de la chaine explique Jean-Marie Baillif. Nous devons aller au-delà de nos propres barrières ou de nos préjugés sur les questions de représentativité. Par exemple, nous étudions de près la possibilité, de donner aux négociants la possibilité de produire du Pineau dans le respect du cahier des charges, c’est à dire avec du moût et du Cognac qui provienne d’une même exploitation. Ce sera, nous l’espérons, un moyen pour le négoce de construire une relation plus forte avec le produit et de se différencier d’une maison à l’autre.

 

Une progression modeste mais porteuse d’espoirs aux USA.

Les ventes américaines représentent aujourd’hui à peine quelques centaines d’hectolitres de Pineau par an répartis chez une petite trentaine d’exportateurs. Et pourtant, la filière Pineau a foi en ce marché. L’étude réalisée en 2016 avait évalué un sérieux potentiel sur le premier marché du Cognac mais chacun a conscience que le processus d’implantation est lent et nécessite des moyens importants. Pour ses premiers pas, l’interprofession a fait le choix de mettre en valeur les marques déjà présentes sur la zone en investissant 250 000 € dans des actions de promotion collectives.  Certes, la démarche est loin d’être rentable a vu des volumes commercialisés à ce jour, mais les retombées médiatiques sont déjà intéressantes aux dires de Claire Floch, la directrice du comité.  Le positionnement cible en priorité le segment des vins et des cocktails avec des prescripteurs comme les sommeliers, les journalistes et les blogueurs ou les barmen. Dans un premier temps les actions sont limitées aux villes de New York et de Los Angeles puis s’ouvriront à Portland, Austin et la Nouvelle Orléans. « L’avenir se construit à l’export ! » affirme le nouveau Président, Xavier Briois avant d’être complété par Jean-Marie Baillif, « Aujourd’hui, les productions « crafts » ont le vent en poupe et le Pineau des Charentes véhicule l’ensemble de ces codes à lui tout seul. C’est une production artisanale, de grande qualité, qui a une histoire à raconter. Nous allons simplement mettre en valeur toutes ces vertus sur des marchés en quête de nouveautés ».

 

L’accent est mis sur les nouveaux modes de consommation.

La tendance est au glaçon et au cocktail ! Exit les préjugés qui consistent à dire que la dilution est un sacrilège du Pineau des Charentes avec un glaçon est un sacrilège. Les producteurs et les commerçants ont pris acte que le consommateur attendait du renouveau dans le mode de consommation. Le glaçon ajoute un côté « fun et estival » dans le verre de Pineau et permet accessoirement de légèrement diluer le caractère alcooleux et sucré que les consommateurs ont tendance à bouder en ce moment. Sur les marchés traditionnels, les campagnes promotionnelles mettent aussi l’accent sur la mixologie, un marché en plein essor. Qui permettent de donner un sérieux coup de jeune à l’image du produit.

 

Une e-vitrine dédiée.

« Assurer la promotion des marques est une chose mais que faire lorsqu’un Parisien a adoré un produit mais que ce dernier est introuvable dans la capitale ? ». Pour Jean-Marie Baillif, la diversité des marques de Pineau des  Charentes est une richesse mais elle souffre d’une trop faible couverture sur le territoire national. Le Comité national a donc pris l’initiative de créer à sa charge une  plateforme numérique dédiée à la vente des marques de Pineau de ses ressortissants. Cet outil devrait voir le jour au dernier trimestre 2018 et constituera une offre complémentaire aux circuits traditionnels en proposant notamment aux consommateurs l’expérience d’un sommelier virtuel. Ce dernier pourra suggérer une sélection de produits en lien avec les goûts et les envies de l’internaute. Vincent Chappe, le chef de famille du négoce, explique que chaque entreprise pourra présenter gratuitement à la vente, 3 produits de son choix sur le site, mais pas dans n’importe quelle condition. « Nous souhaitons que chacun s’engage au travers d’une charte à respecter les valeurs de la filière, c’est un point très important à nos yeux», insiste-t-il.

 

2 ambassadeurs pour parler du Pineau « entre Américains »

 

Franky MARSHALL et Hoke HARDEN ont été recrutés par l’agence Sopexa USA et formés au Pineau des Charentes en 2017 afin de le promouvoir auprès des professionnels américains. Les actions se manifestent sous la forme d’opérations de presse ou de « Master class » (classe de maître); un cours intensif dédié aux professionnels et prescripteurs.

Franky MARSHALL : est spécialisée dans le monde du bar. Elle est membre de la United States Bartenders Guild (USBG), et actuellement Mixologiste et gestionnaire des boissons au Boudoir à Brooklyn.

Hoke HARDEN est spécialiste du monde du vin. Il est membre de la « Society of Wine Educators «  et professeur à la « French Wine Society »

 

 

 

 

 

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