Zoom arrière. Le 3 juillet 1998, dans la moiteur d’une soirée d’été, les mines sont tendues dans la salle annexe de la sous-préfecture de Cognac qui sert de bureau centralisateur des votes. A 1 heure du matin, le sous-préfet de Cognac et Alain Philippe, directeur du BNIC, annoncent enfin les résultats. Sur les 16 sièges de la famille viticole au BNIC, la FSVC en obtient 8, la FVC 5, l’OV-CR 1, la Confédération paysanne 2. C’est la première fois qu’un test de représentativité syndicale est organisé pour le renouvellement d’une interprofession. « Faire bouger les lignes » était sans doute l’objectif visé. Bien vu. Deux ans plus tard, en 2000 et sous l’effet accélérateur des « réunions de barrages » de 1998 naît le SGV. Il fédère toutes les formations syndicales, à l’exception du Modef. Désormais on peut parler d’une unité viticole charentaise. Mais cet « état de grâce » ne dure pas plus qu’un printemps. En 2001, la scission est consommée avec l’émergence d’un nouveau syndicat, le SVBC. Dix ans plus tard, ce sont ces deux formations, SGV et SVBC, qui se mesurent sur le terrain des élections à l’ADG. Qu’en sortira-t-il ? Un aggiornamento ou une rigidité supplémentaire des positions ? En tout cas les deux syndicats « sortis des urnes » auront vécu le mois de juin 2008 comme une période d’intense négociation : discussions internes au sein des états-majors, négociations entre les deux formations. A l’extérieur, bien peu d’informations auront filtré, les uns et les autres évitant de par trop se découvrir. D’autant que le calendrier, en marche, recélait quelques bombes à retardement : 24 juin, constitution de l’ADG Cognac ;
27 juin, remise des listes de viticulteurs devant participer à l’assemblée plénière du BNIC ; 23 juillet, renouvellement du BNIC et désignation de son président. A la mi-juin, après les élections mais avant le vrai départ des « hostilités », écoutons ce que disaient les syndicalistes au sujet de l’unité viticole. Un « jalon témoin » dans une histoire en construction.
Jean-Bernard de Larquier (propos recueillis le 12-06 et le 18-06) – « De ces élections, je retiens entre autres que les candidats libres réalisent presque 19 % des voix. Les syndicalistes que nous sommes devons entendre ce message. J’y vois l’expression d’un ras-le-bol de la division syndicale. Les gens nous disent : “défendez-nous et débrouillez-vous pour être unis”. Peu importe la forme que cela peut prendre. L’important, c’est de ne jamais oublier que la filière Cognac compte deux familles et que le rapport entre ces deux familles se doit d’être équilibré. La viticulture aurait tout à perdre si elle arrivait divisée face au négoce. Le coup porté, en 2002, à l’unité viticole, il faut absolument l’effacer, le réparer. Le SGV est là pour construire, en accord avec le négoce : approvisionner le marché, alimenter les ventes. Il est aussi là pour donner la liberté de parole aux viticulteurs. »
Christophe Véral (propos recueillis le 17-06 et le 18-06) – « Notre but, c’est vraiment que la viticulture revienne unie, qu’elle n’apparaisse pas divisée devant le négoce. Pour autant, notre syndicat a recueilli presque 50 % des voix aux élections à l’ADG Cognac, de manière très démocratique. Le SGV doit en tirer les conséquences qui s’imposent. Notre objectif, c’est de travailler de manière constructive mais en étant reconnu à notre juste place, sans passer à côté de tout ni être considéré “comme la dernière roue du carrosse”. Si nous avions pris une “grande claque” à 15 ou 20 % des voix, d’accord, mais ça n’est pas le cas. Nos gars ne comprendraient pas de continuer d’être mis à l’écart. »
Olivier Louvet (propos recueillis le 17-06) – « Evidemment, l’unité syndicale c’est une réflexion qui court depuis un certain temps. Nous en parlons en comité restreint mais il est hors de question de prendre une quelconque décision sans que la base nous donne son aval. Nous retournerons devant nos adhérents pour les consulter. Même si, durant la campagne électorale, beaucoup de “battage” a été fait autour de l’union, je ne sais pas si un seul syndicat est vraiment “la” solution. L’émulation créée par la pluralité syndicale n’est jamais mauvaise. Il y a de la place pour des idées différentes. Aux viticulteurs ensuite de choisir. A l’origine, en 2000, un seul syndicat existait. S’il y a eu scission à un moment donné, ce n’est pas sans raison.”