Vins Cognac/Replantations : Une piste pour introduire une clause de restriction aux transferts

4 novembre 2016

A l’occasion d’une révision des règles financières communautaires relatives à l’OCM vitivincole de 2013, une piste existe peut-être pour introduire une clause de restriction à la replantation pour les zones de vins aptes à la production d’eaux-de-vie sous signe de qualité (Cognac, Armagnac…). Outre le bénéfice immédiat en termes de maîtrise du potentiel de production, cela signerait, implicitement, une sorte de reconnaissance  de la catégorie « sui generis (*)» à laquelle appartiennent les vins aptes à produire des eaux-de-vie sous signe de qualité : la catégorie des vins à IG (Indication géographique).

Toute l’année 2016 a bruissé de l’impuissance à s’interposer aux transferts d’autorisation de replantation opérés par des viticulteurs peu scrupuleux. Profitant d’une brèche ouverte par la nouvelle réglementation applicable aux plantations et replantations – suppression de la règle des 70 kms pour interdire les transferts – ils ont pu rapatrier en toute impunité et hors contingent des surfaces extérieures à la région. Facile ! Si la nouvelle OCM prévoit une clause de restriction interdisant ces transferts pour les zones de vins AOP et IGP, elle n’en fait rien pour les zones de vins sans indication d’origine (VSIG). Or c’est bien dans cette catégorie que se classent actuellement les vins Cognac. Mais les lignes vont peut-être bouger.

Actuellement, une procédure de révision des règles financières communautaires est en cours de discussion à Bruxelles. Un des textes concernés est le Règlement (UE) 1308/2013 relatif, entre autres, au contrôle du régime des autorisations de plantation de vignes. Une procédure somme toute assez classique, où les Etats membres sont invités à faire valoir leurs demandes, afin de combler les manquements constatés. C’est au détour de cette révision qu’une petite phrase pourrait être glissée. Elle préciserait que la clause de restriction aux replantations s’appliquera  – aussi – aux zones de vins aptes à la production d’eaux-de-vie sous signe de qualité (En France, Cognac , Armagnac…). De l’avis du Ministère de l’agriculture chargé de porter les desiderata français auprès de la Commission européenne, la proposition a des chances de passer. Elle n’est pas lourde d’enjeux, concerne peu de pays, hormis peut-être le Portugal…Surtout le Ministère est bien conscient de la faille apparue en Charentes, qu’il convient de refermer au plus vite. En cela, cette réforme du Règlement 1 308/2013, ouverte à tous les états membres, représente une opportunité. Qui pourrait penser que l’on puisse modifier un texte européen au bénéfice exclusif d’une région, même si elle s’appelle Cognac ?

En termes de calendrier, la révision du Règlement européen pourrait être bouclée fin 2017. Un délai court, qui constitue une chance. Sinon, pour disposer d’un nouveau « véhicule législatif », il semblerait qu’il faille attendre 2020 et la réforme de la PAC. Le temps risque d’être long.

Pour l’heure, on l’aura compris ! il n’est pas explicitement question de modifier le statut du vin Cognac. Pourtant, quelque part, c’est bien de ça dont il s’agit…aussi. Car si la proposition est adoubée par la Commission, cela officialisera le lien entre le vin apte à produire l’eau-de-vie et l’eau-de-vie elle-même qui, au niveau européen, a la qualité d’IG, d’Indication géographique (voir le Règlement européen sur les spiritueux **). De là à dire que le vin Cognac est une IG, il n’y a qu’un pas.

Un expert de ces questions commente  – « cette reconnaissance permettrait de légitimer le fait que notre cahier des charges va de la plantation jusqu’à la sortie des chais de vieillissement, ce qui est effectivement le cas aujourd’hui. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à consulter notre plan de contrôle, qui court bien de la vigne au chai. » Le même estime « qu’il s’agirait juste de la validation de ce qui aurait dû être affirmé  depuis bien longtemps. Au moins depuis 2008, qui a vu disparaître le régime des distillations obligatoires et réformer les signes officiels de qualité. »  « Si elle était admise, précise-t-il, une telle évolution permettrait de sécuriser les outils dont s’est dotée l’interprofession pour piloter la filière, sans pour autant entraîner de modifications au vignoble. »

 

 

  • suis generis : en lien avec, qui dépend de…

  • Règlement européen des spiritueux : Le règlement européen 110/2 008 relatif aux boissons spiritueuses reconnaît aux spiritueux la possibilité d’être protégés en tant qu’IG (indication géographique), à condition de déposer devant la Commission européenne une fiche technique. Au niveau des signes de qualité, que signifie la notion d’IG ? Que la boisson spiritueuse est originaire du territoire d’un pays. Pourquoi les signes de qualité AOP ou IGP ne s’appliquent-ils pas aux spiritueux, contrairement aux vins. Si des eaux-de-vie comme l’Armagnac ou le Cognac pourraient légitiment y prétendre (lien au terroir), ce serait plus compliqué pour les Whiskies par exemple. C’est ainsi qu’il a été décidé de s’arrêter à la notion d’IG pour les spiritueux.


    Transferts d’autorisations de replantations : Des bâtons dans les roues


     Les candidats aux transferts hors région n’auront pas la vie facile. Une série de mesures est en train d’être adoptées pour juguler le phénomène.


     Un pool réunissant UGVC, CNAOC, Ministère de l’agriculture, Direction nationale des Douanes a réfléchi à la question. Sa proposition !  Modifier la circulaire du 5 avril 2016 relative aux mutations ou transferts d’autorisations de plantations de vignes, dans le cadre de la gestion du potentiel. L’objectif est que l’acquéreur d’une terre plantée en vigne à l’extérieur de la région soit obligé d’apporter la preuve d’une exploitation durable du bien dans sa zone d’origine.


    Par ailleurs, le Conseil de Bassin Charentes-Cognac du 4 juillet a formulé un voeu : l’inéligibilité aux aides à la restructuration, tant individuelles que collectives, pour les parcelles plantées à partir d’autorisations issues d’autres régions. Avec effet rétroactif. En effet la mesure s’appliquerait aux parcelles déjà plantées. Pour rendre la décision valide, l’accord du Conseil spécialisé Vins et eaux-de-vie de FranceAgriMer est nécessaire (point inscrit à l’ordre du jour du prochain Conseil, réuni en octobre). Commentaire des professionnels charentais – « Rien n’est acquis avant la décision définitive.  Mais les assurances reçues nous rendent confiants. »

     

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