Vinification des pineaux blancs, rosés et rouges : L’importance des interventions pré-fermentaires

2 octobre 2014

Le Pineau des Charentes blanc, rosé ou rouge possèdent une typicité spécifique et une structure qualitative complexe et fragile. La qualité des raisins associée aux pratiques de vinifications jouent un rôle majeur sur les caractéristiques aromatiques et gustatives finales des qualités commerciales. Les bons et aussi, malheureusement, les mauvais composés contenus dans les baies extraites au cours de la vinification représentent environ les 3/4 de la structure des pineaux qui seront mis en vieillissement.

Sortir le meilleur des raisins contribue à développer la typicité des pineaux qui sera ensuite bonifiée par un élevage cohérent et spécifique à l’identité de chaque produit.

Au sein de la filière Pineau, la qualité des raisins a été pendant longtemps une préoccupation plus importante pour les cépages rouges, mais, depuis quelques années, elle concerne aussi celle des cépages blancs.

La prise en compte de nouvelles exigences des consommateurs en matière de vins plus aromatiques, plus fruités et avec des saveurs sucrées moins dominantes, a amené la filière Pineau à réfléchir à de nouveaux process de vinification. L’enjeu n’est nullement de renier la typicité des produits existants qui ont fait la renommée du Pineau, mais d’étoffer l’offre de produits pour essayer de capter l’intérêt d’une frange de nouveaux consommateurs.

 

l’importance des interventions pré-fermentaires

PRINCIPES GÉNÉRAUX
L’élaboration des pineaux ne peut être envisagée sans l’obtention de raisins parfaitement sains, équilibrés en teneurs en sucres et en acidité, et pleinement mûrs sur le plan de la couleur (pour les rouges) et des arômes. La conduite du vignoble influence beaucoup la tenue des raisins sur les souches lors d’années où l’évolution de la maturation est irrégulière. Attendre la maturité est toujours la meilleure stratégie dans le mesure, bien sûr, où l’état sanitaire ne se dégrade pas. Le développement du botrytis devra être surveillé de près dans les parcelles pour organiser le planning de récolte.

Conditions de maturité optimales à la récolte

Les priorités pour les pineaux blancs

Attendre la maturation optimale en mettant en œuvre des pratiques viticoles préventives, protection botrytis, rendement maîtrisé, effeuillage, vendange verte.

La pleine maturité correspond au compromis idéal entre le bon état sanitaire, des teneurs en sucres suffisantes, des niveaux d’acidité corrects et un potentiel aromatique adapté au type de produit recherché.

Le suivi de l’acidité totale et du pH lors des deux derniers contrôles de maturité est important pour la conservation ultérieure des pineaux. En dessous des valeurs de pH de 3,40, la conservation des pineaux devient problématique.

La présence de botrytis constitue un danger majeur pour la structure et la richesse aromatique des pineaux blancs.

Les priorités pour les pineaux rosés

Attendre la pleine maturation en mettant en œuvre des pratiques viticoles préventives, protection botrytis, rendement maîtrisé, effeuillage.

La pleine maturité correspond au compromis idéal entre l’état sanitaire parfait, des teneurs en sucres suffisantes, des niveaux d’acidité pas trop bas (vis-à-vis des risques de conservation) et une concentration en matière colorante adaptée au type de produit recherché.

Adapter la recherche de maturité phénolique aux différents types de Pineaux rosé ou rouge produits :
❶ Pineaux rouges ou rosés classiques non fermentés ➞ Ne pas rechercher de maturités phénoliques extrêmes pour conserver le caractère fruité des jus de raisins.
❷ Pineaux rosés ou rouges vineux ayant subi un début de fermentation alcoolique ➞ Recherche d’une maturité phénolique et en sucres très poussée.
La présence de botrytis est un danger majeur vis-à-vis de la tenue de la couleur dans les pineaux rosés.

Le suivi de l’acidité totale et du pH lors des deux derniers contrôles de maturité est important pour la conservation ultérieure des pineaux. En dessous des valeurs de pH de 3,70, la conservation des pineaux devient problématique.

Maîtriser les opérations pré-fermentaires des pineaux blancs

Les priorités

Protéger de l’oxydation la vendange le plus tôt possible et ensuite tout au long de la chaîne technologique par un inertage ou un sulfitage (associé à de l’acide ascorbique).

Adapter la cadence de récolte aux performances technologiques du chai en terme de débit de la chaîne de traitement de la vendange et aux capacités de maîtrise thermique.

Conduire les cycles de pressurage avec douceur.

Parfaitement maîtriser les débourbages.

Assurer une excellente hygiène au niveau de l’ensemble de la chaîne de traitement de la vendange.

La protection de la vendange

Eviter l’oxydation de la vendange et des moûts.

Le soufre demeure un produit très efficace pour protéger la vendange et les moûts de l’oxydation, et éliminer les populations de levures indigènes.

– L’inertage avec du CO2 présente de l’intérêt en complément du soufre, pour protéger les structures aromatiques..

La conduite du pressurage

La phase d’extraction des jus à basse pression doit être privilégiée et une sélection des jus de goutte est indispensable. Protéger les jus de l’oxydation dès leur écoulement (par un sulfitage ou un nouvel inertage). Ne jamais surcharger une cage de pressoir car cela favorise l’extraction de bourbes dans des proportions importantes.

La conduite d’opérations pré-fermentaires

Il est possible d’envisager des interventions pré-fermentaires avec des cépages possédant naturellement des arômes variétaux affirmés. Le colombard semble particulièrement adapté à de telles démarches.

La réalisation de stabulations liquides à froid (comparables à celles réalisées pour la vinification des vins blancs secs) et de macérations pelliculaires (d’une durée variant de 12 à 36 heures selon la température) peut permettre d’extraire des précurseurs d’arômes qui conféreront ultérieurement aux pineaux une structure aromatique et gustative beaucoup plus généreuse.

Le syndicat des producteurs souhaite conduire des essais de démarrage de la fermentation alcoolique sur des lots de moûts riches en sucres et ayant été enrichis en précurseurs d’arômes grâce à des opérations pré-fermentaires. Le mutage interviendrait après la fermentation de 1 à 2 % d’alcool en respectant la limite légale de l’appellation de plus de 170 g/l de sucres. Le lancement de la fermentation alcoolique aurait l’avantage de fixer plus durablement les arômes variétaux des cépages et de réduire la perception de la sucrosité naturelle du produit.

La conduite des débourbages

Indispensable vis-à-vis de l’extériorisation des caractéristiques aromatiques des moûts et des pineaux.

L’intensité du débourbage doit être suffisante pour éliminer les particules (végétales) indésirables mais pas trop intense pour que les moûts conservent leurs structures qualitatives.

Maîtriser les opérations pré-fermentaires des pineaux rosés et rouges

Les priorités

Récolter des lots de vendange sains et d’une qualité homogène pour optimiser la conduite des extractions phénoliques.

Conduire des macérations pré-fer-mentaires (à froid, à chaud, à l’alcool, avec des enzymes) pour extraire la couleur.

Les macérations pré-fermentaires

La réalisation des macérations pré-fermentaires est le seul moyen d’extraction de la couleur. C’est une opération incon-tournable.

Diverses techniques de macérations existent : à froid avec des enzymes, à chaud ou à l’alcool.

Chaque procédé d’extraction se montre efficace pour l’élaboration de style de pineaux rosés différents.

S’entourer des compétences de son œnologue pour conduire et maîtriser les macérations et l’intensité des extractions de couleur recherchée.

La conduite d’une démarche d’extraction de la couleur est une opération complexe qui nécessite beaucoup de surveillance et de maîtrise.

Des durées de macérations de 24 heures permettent de fixer au niveau des pellicules le cuivre en excès lié à la protection du vignoble en fin de saison.

La conduite du pressurage

La phase d’extraction des jus à basse pression doit être privilégiée et une sélection des jus de goutte est indispensable. Protéger les jus de l’oxydation dès leur écoulement (par un sulfitage ou un nouvel inertage).

La conduite des débourbages

Indispensable vis-à-vis de l’extériorisation des caracté-ristiques aromatiques des moûts et des pineaux.

L’intensité du débourbage doit être suffisante pour éliminer les particules (végétales) indésirables mais pas trop intense pour que les moûts conservent leurs structures qualitatives.

Des pineaux rosés et rouges élaborés après un début de fermentation
De nouveaux protocoles d’élaboration de Pineaux rosés ont été testés depuis trois ans sous la tutelle du syndicat des producteurs. Un partenariat technique a été mis en place entre quelques chais pilotes et des œnologues pour « vinifier » des rosés et des rouges dans un état d’esprit différent. L’objectif est d’élaborer des pineaux rosés plus pâles, d’une teinte rose plus affirmée, avec des saveurs fruitées plus présentes en bouche et présentant un niveau de sucres moindre (et peut-être aussi des TAV plus bas se situant autour de 16,5 % vol.).
Le fait de vouloir réduire la sucrosité est abordé avec sagesse en ayant le souci de ne pas casser le profil de qualité des pineaux. Les essais ont été conduits depuis 3 ans à partir de vendange de merlot parfaitement saine, ayant atteint des niveaux de maturité poussés au niveau des teneurs en sucres (12,5 à 13 % vol.) et en polyphénols. Des macérations enzymatiques assez courtes sont effectuées pour extraire un potentiel de couleur véritablement rose et non pas rouge intense. Ensuite, après un débourbage d’intensité moyenne, un ensemencement en levure (des souches de LSA aromatiques) permet de démarrer la fermentation alcoolique. L’objectif est de limiter la fermentation à 1 à 1,5 % vol. pour que le produit soit conforme aux obligations légales de teneurs en sucres (plus de 170 g/l de sucres dans les moûts). La surveillance du démarrage de la fermentation alcoolique demande une attention particulière (prise de densité toutes les deux heures) pour réaliser le mutage dans de bonnes conditions. Les pineaux rosés élaborés selon ce principe représentent depuis trois ans des volumes conséquents. La dégustation de ces produits a permis d’observer que le début de fermentation alcoolique fixait bien la couleur rose vive et apportait des caractéristiques aromatiques et gustatives différentes. Les arômes variétaux des cépages sont plus présents et en bouche la structure concilie des notes vineuses à des saveurs fruitées. L’impression de sucrosité est de richesse alcoolique est en quelque sorte atténuée par le caractère plus vineux du produit. L’élevage est conduit de façon traditionnelle en utilisant le rôle bonificateur des lies qui sont constituées en majeure partie par la flore de levure détruite lors du mutage. Les tests consommateurs ont révélé que ces produits permettaient de capter une frange de consommateurs moins adeptes des pineaux traditionnels extériorisant une plus forte sucrosité. Les vignerons qui ont élaboré ces pineaux rosés « fermentés » ne cachent pas que la principale difficulté est de trouver le bon moment pour réaliser le mutage.

Réaliser un débourbage judicieux

La priorité

La finalité d’un débourbage est de procéder à une décantation maîtrisée, conciliant l’élimination des débris végétaux, des bourbes grossières, des levures indigènes, et la conservation du potentiel aromatique. Des mesures de turbidité
permettent de contrôler le processus de décantation et de gérer avec une meilleure maîtrise l’efficacité et la durée des débourbages.

L’élaboration de pineaux blancs et rosés ayant une bonne typicité repose sur le mutage de moûts débourbés qui soient à la fois « propres » et pas trop dépouillés. Des débourbages très poussés peuvent nuire à l’expression aromatique au cours de l’élevage. Un mutage de moûts trop bourbeux peut être à l’origine de déviations qualitatives (arômes et saveurs herbacées, présence de micro-organismes indésirables…). Le débourbage des moûts destinés au mutage nécessite une grande technicité pour conserver seulement la matière bénéfique à la qualité.

Les débourbages statiques

C’est la pratique la plus couramment mise en œuvre au niveau des propriétés du fait de sa simplicité.

L’adjonction de soufre

Apports de soufre sur la vendange en cas de macération pelliculaire ou sur des moûts aussitôt le pressurage.

Doses variables selon l’état sanitaire et les moyens utilisés pour débourber : de 4 à 8 g/hl.

L’utilisation du froid

Refroidissement des moûts entre 8 à 10 °C dans les heures qui suivent le pressurage.

Les basses températures retardent le départ en fermentation mais ne facilitent pas la décantation.

Procédé intéressant pour diminuer les doses de soufre, dans la mesure où un inertage est réalisé.

Le contrôle de la turbidité

Le contrôle de la qualité du débourbage est une opération capitale pour s’assurer que le niveau de décantation souhaité est atteint.

Le contrôle visuel de la limpidité des moûts au moment du soutirage est une pratique courante mais pas suffisante.

Un contrôle analytique en laboratoire par des mesures de turbidité (en NTU unité de trouble) pour quantifier le niveau de trouble des moûts : vins blancs secs de bouche 50 à 120 NTU.

Le mutage

Le suivi de post-mutage

Réaliser plusieurs homogénéisations (par pompage ou avec un brasseur) pendant les 2 semaines suivant le mutage.

Un premier contrôle analytique est indispensable dans le mois suivant le mutage (TAV, sucres, pH).

Au cours de l’élevage des pineaux, un suivi de la stabilité micro-biologique doit être mis en place pour pouvoir anticiper d’éventuelles déviations qualitatives. Deux à trois fois par an, le dosage des teneurs en acidité volatile, en acide L-Lactique et du pH permettent d’apprécier la stabilité et le bon état de conservation des pineaux. Lors d’enclenchement d’un début de fermentation malolactique, la concentration en acide L-lactique fluctue immédiatement. De telles démarches doivent être abordées en s’entourant des compétences d’un œnologue. C’est le seul moyen efficace de maîtriser la tenue des pineaux dans le temps et de raisonner judicieusement les sulfitages. Les apports de soufre sont effectués en tenant compte d’une évaluation du risque d’altération et non plus selon des principes rigides et systématiques.

Formules de calcul

● TAV des eaux-de-vie : …………………..% vol. ● Volume du pineau à élaborer : ……………hl

● TAV souhaité du pineau : ………………% vol. ● Alcool pur de pineau : …………………..hl AP

● Quantité d’eau-de-vie à rajouter à 1 hl de moût :

TAV pineau ………………………………………………….. % vol.

TAV eau-de-vie ………. % vol. -TAV pineau ……….. % vol.

● Quantité d’eau-de-vie nécessaire à la fabrication de …………. hl de pineau :

Alcool pur de pineau …………………………….

TAV des eaux-de-vie ……………………. % vol.

Les priorités

Utiliser des contenants ayant une capacité parfaitement connue pour réaliser le mutage.

Pratiquer de nombreuses homogénéisations dans le mois suivant le montage.

Contrôler analytiquement les TAV aussitôt le mutage.

Le suivi durant les premiers mois d’élevage

Les priorités

Avant la mise sous bois des pineaux, réaliser un premier inventaire qualitatif (analyse et dégustation) pour ensuite optimiser les conditions d’élevage.

p72b.jpgLe niveau des pH des pineaux jeunes conditionne parfaitement leur stabilité microbiologique dans le temps :

Au cours de l’élevage des pineaux, un raisonnement judicieux des sulfitages est un moyen efficace de stabiliser la tenue des lots dans le temps s’entourer des conseils de son œnologue est impératif.

S’entourer des compétences d’un œnologue pour maîtriser la démarche d’élevage des pineaux.

 

 

A lire aussi

Campagne PAC 2024 : Tout ce qu’il faut savoir 

Campagne PAC 2024 : Tout ce qu’il faut savoir 

Depuis le 1er avril et jusqu’au 15 mai 2024, les télédéclarations de demande d’aides au titre de la campagne 2024 sont ouvertes.Voici tout ce qu’il faut savoir pour préparer au mieux sa déclaration.

La Chine et le cognac : un amour inséparable

La Chine et le cognac : un amour inséparable

Avec plus de 30 millions de bouteilles officiellement expédiées en Chine en 2022, la Chine est le deuxième plus important marché du Cognac. De Guangzhou à Changchun, ce précieux breuvage ambré fait fureur. Plutôt que se focaliser sur les tensions actuelles, Le Paysan...

error: Ce contenu est protégé