Une nouvelle démarche de production pour les vignerons de Tutiac

13 juin 2012

Les vendanges 2011 ont été importantes pour la Coopérative des Vignerons de Tutiac puisque la récolte a été organisée en fonction du système d’affection parcellaire préalable. Toute la production des adhérents a été segmentée en 8 profils de vins qui correspondent à la fois à des caractéristiques qualitatives différentes et à des débouchés commerciaux connus. Les conditions climatiques excessives et contrastées du millésime 2011 ont aussi eu une grande influence sur la structure qualitative des vins blancs, rosés et rouges. Après cette année historique, le début du cycle végétatif 2012 ne commence pas sous les meilleurs auspices, du fait des fortes précipitations d’avril et de la fraîcheur des trois premières semaines de mai.

 

 

La Coopérative des Vignerons de Tutiac a vinifié en 2011 235 000 hl dont 50 000 hl de vins blancs secs (essentiellement du sauvignon). La perpective au début du mois juillet dernier de vinifier des raisins ultra-concentrés récoltés très précocement s’est totalement inversée à la faveur d’une fin d’été maussade. Le climat des mois d’août et de septembre dernier frais et pluvieux a rendu la maturation difficile. Les sauvignon très précoces et bien suivis par les viticulteurs (protégés par deux traitements anti-botrytis) ont conservé un bon état sanitaire qui a permis de les récolter au moment optimum début septembre. Cela a permis d’élaborer des vins blancs secs frais, équilibrés, riches en arômes dont la commercialisation s’est effectuée dans de bonnes conditions. Les merlot ont eu une maturation plus compliquée et l’effet charge de récolte a joué un rôle majeur sur l’aptitude de ce cépage à concentrer les polyphénols. Des pratiques viticoles comme l’effeuillage et la vendange verte se sont aussi avérées très bénéfiques pour élaborer des profils de vins conciliant fruité et structure. Le suivi précis de la maturité au sein du parcellaire a permis de bien anticiper l’évolution de la qualité des raisins pour extraire le meilleur de chaque îlot de terroir. Les cabernet sauvignon ont connu une maturation tardive qui, lorsque l’état foliaire des parcelles était sain, a bénéficié du beau temps d’octobre. 2011 fait partie de ces millésimes « qui ont mis à vif les nerfs » des viticulteurs et des œnologues. Il a fallu à la fois faire preuve de réactivité et de patience pour récolter au moment opportun.

Une affectation préalable pour produire les volumes que la cave est en mesure de vendre

p6lib.jpgL’affectation parcellaire de la production des parcelles qui est intervenue au printemps dernier a permis d’aborder les vendanges 2011 d’une tout autre manière. Cette évolution de la démarche de production est particulièrement importante au niveau des vins rouges qui représentent 70 % de la production de la cave. En effet, la production de vins blancs secs à base essentiellement de sauvignon est organisée depuis longtemps par rapport à des débouchés commerciaux connus et contractualisés en grande partie avec le grand négoce bordelais. La volonté des responsables du conseil d’administration a été de développer cette stratégie de production dans l’objectif de produire les quantités de vins réellement adaptées aux différents débouchés commerciaux de la coopérative. Pourquoi inciter les vignerons à produire des vins que l’entreprise aura ensuite des difficultés à valoriser correctement, d’autant que certaines pratiques viticoles pour optimiser la qualité engendrent des charges supplémentaires significatives. Le fait d’élaborer en quantités trop importantes des profils de vins difficiles à vendre pénalise l’équilibre économique de la cave et des exploitations viticoles. Le changement de l’organisation de la production a pu être envisagé grâce au dialogue de confiance qui existe depuis de nombreuses années entre les vignerons et la cave.

Un système pensé de manière équitable au niveau des revenus/ha

Le souhait des administrateurs a été de proposer une approche équitable et de tenir un discours transparent sur le plan des revenus/ha. La segmentation de la production en 8 profils de vins intègre un volet économique majeur concernant la rémunération des apports. La notion de revenu/ha dégagé par chaque profil de produit a pris le pas sur le niveau de valorisation de chaque hl. Il est bien évident qu’un vin rouge AOC haut de gamme atteindra un niveau de valorisation/hl élevé, mais par contre le rendement/ha sera moindre et les charges de production plus fortes (en raison des interventions en vert). A l’inverse, pour des profils de vins plus génériques, le niveau de valorisation à l’hl plus faible sera compensé par des charges de production moindres et des rendements élevés. L’historique de production de chaque parcelle (ou d’îlots homogènes) qui correspond aux potentialités des terroirs a servi de base pour la mise en place de l’affectation parcellaire. A chaque profil de produits correspond un cahier des charges de production plus ou moins contraignant (hauteur de palissage, réalisation ou pas d’anti-botrytis, effeuillage, vendange verte, rendement) dont le respect est pris en compte dans la rémunération finale.

Un suivi de la maturité pour planifier les apports

A l’approche des vendanges, l’organisation de la récolte a tenu compte des attentes de maturité spécifiques à chaque produit, grâce à la mise en place systématique de contrôles de maturité sur l’ensemble des îlots terroirs affectés. La cave a organisé des contrôles de maturation dans chaque parcelle pour être en mesure de déclencher la récolte au moment opportun. Les contrôles de maturité (TAV, pH, acide malique, acide gluconique, anthocyanes) sont gérés par un système complètement informatisé. Cela a permis de planifier les chantiers de vendanges et les apports 48 heures avant la récolte. Le travail des équipes de vinificateurs sur les différents sites s’en est trouvé grandement facilité dans le cadre d’un millésime 2011 où la maturité était hétérogène. Les différents sites de vinification ont été dotés d’infrastructures technologiques (depuis 5 ans) leur permettant d’élaborer prioritairement certains types de produits. Par exemple, tous les vins blancs et les rosés sont vinifiés à Marcillac, les vins rouges traditionnels et structurés à Anglade et Périssac, les vins rouges fruités de thermo-vinification à Marcillac et à Générac. Le planning de récolte des différents îlots est établi et communiqué aux vignerons deux jours avant la date de vendange souhaitée. Dans un rayon de 15 km autour du site d’apport de vendange, ce sont les viticulteurs qui transportent la récolte. Au-delà cette distance, des bacs multi-bennes sont posés au bout des parcelles et ensuite transportés par camions vers le site de vinification. Jérôme Ossard, le responsable des actions viticoles, considère que la mise en place de cette nouvelle organisation s’est plutôt bien passée : « Le changement d’organisation pour les vendanges 2011 s’est globalement bien passé car les viticulteurs ont adhéré à la démarche d’affectation. Le transport de vendanges avec les bacs pour les secteurs éloignés des sites de vinification s’est déroulé dans de bonnes conditions. Sur le plan qualitatif, l’intérêt du suivi de la maturité s’est avéré très important en 2011 pour récolter les raisins au bon moment, compte tenu de l’humidité des mois d’août et de septembre. Cela a permis de mieux calibrer les volumes par qualité et de piloter les vinifications avec plus de réactivité. Il ne faut pas nier que cette nouvelle organisation a bousculé les habitudes mais, malgré quelques incidents, les vendanges 2011 se sont bien déroulées. Nous pensons néanmoins que dans l’avenir il faudra associer plus les adhérents au suivi de la maturité et la planification de la récolte. On a besoin de leur ressenti qualité des raisins dans les parcelles. »

Une croissance végétative limitée et hétérogène

Le cycle végétatif 2012 commence de façon assez normale après un hiver sec, mais les fortes précipitations du mois d’avril (plus de 200 mm en moyenne) ont perturbé le débourrement. Sur la grande zone du Blayais Bourgeais, le débourrement des merlot, qui avait débuté entre le 5 et le 10 avril, s’est éternisé. Fin avril, des bourgeons encore au stade pointe verte côtoyaient des pousses de 5 à 10 cm. Très localement, quelques dégâts de gel de printemps ont été observés dans les situations basses, mais leur incidence s’avère marginale. Une certaine hétérogénéité de développement est apparue et le décalage naturel de stade entre les cépages merlot, sauvignon et cabernet sauvignon semble moindre cette année. Mme Marie-Charlotte Micheaud, la technicienne de l’Adar des Hauts de Gironde, considère que l’hétérogénéité de cycle végétatif constatée début mai perdure quatre semaines plus tard : « On constate que cette année, un certain nombre de bourgeons ont eu du mal à sortir, ce qui provoque un décalage de phénologie au sein des mêmes souches. En cette fin mai, des rameaux de 50 cm côtoient des pousses au stade 5 à 6 feuilles étalées. La croissance végétative n’a pas été forte et l’état végétatif des parcelles reste pour l’instant assez réduit par rapport à la saison. Les chaleurs de la dernière semaine de mai ont quand même boosté la croissance végétative. A Fronsac, les merlot sont en pleine floraison alors que dans le Blayais et le Bourgeais, on a trouvé les premières fleurs à partir du 29 mai. La charge de grappes ne semble pas excessive mais par contre de fortes différences de taille des inflorescences existent d’une parcelle à l’autre. L’époque de floraison nous laisse à penser que ce millésime est pour l’instant assez proche des conditions de début de saison de 2009. La principale inquiétude réside dans l’hétérogénéité des stades végétatifs qui risque de perdurer tout au long de l’été si le climat reste versatile. »

Au niveau du parasitisme, le millésime semble pour l’instant propice au mildiou puisque depuis le 22 mai, des tâches ont été trouvées dans les parcelles pas assez protégées (avec aussi quelques attaques sur grappes). L’oïdium est aussi présent sur les parcelles réputées sensibles et des symptômes de black-rot sont également apparus à partir du 20 mai. D’une manière générale, le cycle végétatif est pour l’instant « en manque d’ensoleillement », ce qui pénalise la croissance végétative et le rend propice au développement des maladies cryptogamiques. Le maintien d’une protection du vignoble parfaite durant tout le mois de juin sera essentiel, surtout si des précipitations se produisent régulièrement.

Une action de confusion sexuelle sur 200 ha avec les diffuseurs Isonet LE

La coopérative a mis en place une action de confusion sexuelle sur plus de 100 ha en utilisant un nouveau diffuseur de phéromones pour lutter contre l’eudémis et la cochylis par confusion sexuelle. Il s’agit d’un support unique, l’Isonet LE, qui a été conçu par la société japonaise Shin-Etsu. Le diffuseur unique pour les deux insectes se présente sous la forme de deux tubes en polyéthylène soudés, l’un contenant la phéromone attirant les papillons mâles d’eudémis et l’autre contenant la phéromone attirant les papillons mâles de cochylis. La conception des diffuseurs sous la forme d’un fil souple facilite leur pose dans les parcelles (500 diffuseurs/ha). Le fabricant indique que le système Isonet LE assure une diffusion de phéromones pendant 180 jours. Le prix de ce nouveau dispositif de lutte est proche de 175 € ht/ha, ce qui le rend assez compétitif par rapport aux couvertures insecticides traditionnelles. Le produit a été testé de 2001 à 2003 en Suisse par l’Agroscope de Changins dans le canton de Vaud. Les conclusions de cette expérimentation sur un territoire de vignes de 680 ha ont confirmé l’efficacité de ce nouveau dispositif de lutte par confusion sexuelle. La diffusion des phéromones s’est avérée très régulière et très constante dans le temps durant toute la saison. La société Terra-Fructi, dirigée par deux vignerons, commercialise en France les diffuseurs Isonet LE depuis le 15 février dernier, date à laquelle le produit a été homologué.

 

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