ODG Cognac : Un Accouchement Difficile

8 mars 2009

philippe.jpgDans le cadre de la réforme de l’INAO, toutes les régions viticoles d’AOC ont reçu la même feuille de route : accoucher d’un organisme de défense et de gestion, qui se substituera en partie au Syndicat de défense de l’appellation. Pour le Cognac, comme pour le Pineau des Charentes d’ailleurs, la composition de l’ODG prête à débat. Explications du président du CRINAO, Philippe Boujut.

 

 

« Le Paysan Vigneron » – A quelle date doivent être mis en place ces nouveaux ODG (Organismes de défense et de gestion de l’appellation) ?

Philippe Boujut – Avant la fin d’année 2006, les régions viticoles devront s’être prononcées sur la composition de leur ODG. L’INAO a notamment demandé aux actuels syndicats de défense de dire si, oui ou non, ils souhaitaient devenir ODG. La mise en route du nouveau dispositif est attendue pour le printemps 2007. La date du 31 mai 2007 a même été évoquée pour la création officielle des ODG mais certains commencent à dire que le calendrier sera difficilement tenable.

« L.P.V. » – Comment cela s’organise-t-il ?

Philippe Boujut – Dans toutes les régions, ce sont les syndicats viticoles qui revendiquent la qualité d’ODG. La Champagne de Reims avait manifesté quelques velléités pour que le CIVC – l’interprofession champenoise – devienne ODG mais aux dernières nouvelles, c’est le SGV Champagne, le Syndicat de défense de l’appellation, qui se porte comme unique candidat.

« L.P.V. » – Et à Cognac ?

Philippe Boujut – En tant que président du CRINAO, j’ai transmis la demande aux deux familles concernées, celle du Cognac et celle du Pineau. Si vous le voulez bien, je n’évoquerai ici que le cas du Cognac, laissant aux gens du Pineau le soin de s’exprimer sur leur situation (voir encadré NDLR).

« L.P.V. » – La composition de l’ODG Cognac soulève des questions ?

Philippe Boujut – En effet c’est peut-être un peu moins simple qu’ailleurs. Certes nous avons des syndicats de défense reconnus, d’abord la FVC, puis la FSVC et aujourd’hui le SGV Cognac. Ce dernier siège en tant que tel au conseil d’administration de la CNAOC, organisme regroupant tous les syndicats de défense de France. Mais quand la commission d’enquête INAO est descendue dans la région délimitée pour traiter du cas Cognac, elle a souhaité rencontrer tous les syndicats de la filière, syndicats viticoles, syndicats de négociants, syndicat des bouilleurs de profession… Après les réunions du Comité permanent du BNIC le 30 août dernier et du CRINAO le jour suivant, les deux organismes, d’un commun accord, ont décidé de créer une commission de travail au sujet de l’ODG. Cette commission s’est réunie pour la première fois le 13 septembre dernier.

« L.P.V. » – Qu’en est-il ressorti ?

Philippe Boujut – Chacun a exprimé sa vision des choses. Dans un premier temps, le négoce souhaitait, semble-t-il, que ce soit l’interprofession qui devienne ODG. Le 13 septembre, ce n’est plus cette position qui prévalait mais une ODG loi 1901, sous forme associative donc, qui missionnerait le BNIC pour différentes missions ayant trait à la défense de l’appellation. Cette solution nous convient très bien. Mais là où nous ne pouvons pas suivre le négoce, c’est quand il demande la parité au sein de l’ODG. Selon lui, l’organisme de défense et de gestion de l’appellation devrait se composer à 50/50 de représentants de la viticulture et du négoce. En tant que président du CRINAO, il me paraît difficilement admissible que la parité s’exerce au sein de l’ODG Cognac, surtout si l’on s’appuie sur les décrets d’appellation Cognac, actuels ou à venir.

« L.P.V. » – Pourquoi ?

Philippe Boujut – Si l’agrément du Cognac se faisait juste avant la mise en bouteille, je pourrais le comprendre. Mais dans la mesure où il a toujours été dit que l’agrément s’arrêtait à la sortie de l’alambic, toute la partie d’amont concerne la viticulture et, pour la part qui leur revient, les bouilleurs de profession. C’est à un ODG majoritairement composé de représentants viticoles qu’il revient de veiller au respect des conditions de production : élaboration du cahier des charges, détermination des points clés à contrôler, des méthodes d’évaluation. Si l’agrément du Cognac s’étendait jusqu’à la mise en bouteille, je suppose que le négoce verrait d’un mauvais œil la viticulture contrôler le process de fabrication. Dans tout cela, une certaine logique doit prévaloir.

« L.P.V. » – Le projet d’ordonnance concernant les organismes de défense et de gestion ne prévoit-il pas qu’une interprofession puisse devenir ODG. Et par définition, une interprofession fonctionne sur un mode paritaire.

Philippe Boujut – Si les mots ont un sens, nous parlons bien d’une possibilité et non d’une obligation. Et, à ma connaissance, aucune autre région viticole n’a retenu cette option. Il convient d’avoir à l’esprit un point très important : dans la région délimitée, la composition du CRINAO est paritaire. En France, cette exception n’est partagée que par une autre région, la Champagne. Et comme les avis de l’ODG remontent systématiquement au CRINAO, je ne vois pas où est le problème. A un moment donné, la parité trouvera à s’exercer.

« L.P.V. » – Dans le nouveau régime, qui fixera le rendement Cognac ?

Philippe Boujut – Le rendement constituant un élément économique déterminant, nous avons convenu depuis plusieurs mois déjà qu’il continuerait de relever des missions de l’interprofession, c’est-à-dire du BNIC. Par contre, la proposition de rendement passera par l’ODG puis par le CRINAO avant de remonter au Comité national INAO pour une fixation, in fine, par le ministère de l’Agriculture. Cette façon de procéder ne me gêne pas. Depuis six ou sept ans, j’ai toujours constaté que viticulture et négoce arrivaient à trouver un compromis et, quand il a fallu trancher, le ministère a régulièrement arbitré en faveur de la viticulture. Concernant le niveau de production, il est normal que la viticulture veuille serrer le frein et le négoce le relâcher. La méthode objective de calcul dont nous nous sommes dotés en février 2005 devrait nous aider à trouver plus facilement un terrain d’entente. A ce niveau-là, la parité ne me gêne pas, elle présente même quelque chose de sain. C’est le contraire qui serait dangereux, de quelque bord que l’on se place.

« L.P.V. » – Une majorité viticole au sein de l’ODJ n’est-elle pas motivée par des impératifs financiers ?

Philippe Boujut – Personne n’ignore que le financement des structures viticoles va devenir un gros problème. Assumer des responsabilités professionnelles coûte très cher aujourd’hui, comme de former des jeunes ou recruter des administratifs compétents. Même le négoce l’a compris. Toutes les régions viticoles sont confrontées à un tel défi et l’ODG apparaît en effet comme une solution pour que l’ensemble de la viticulture finance ces structures représentatives. Mais il convient aussi de limiter autant que faire se peut les coûts supplémentaires à la viticulture. C’est pour cela que l’ODG pourrait missionner l’interprofession pour un certain nombre de missions relevant de la valorisation du produit. Si l’ODG peut missionner une autre structure, l’inverse n’est pas possible.

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