Une arracheuse pelle rétro

26 mai 2015

L’arrachage des souches dans les vignes en place avec une mini-pelle équipée d’un fer à U est reconnu être comme étant le moyen le plus efficace d’extraire les souches et de bien préparer le sol. Par contre, les mini-pelles se déplacent lentement, ce qui nuit à la productivité des travaux. Le montage d’un bras de mini-pelle à l’avant d’un tracteur serait un compromis idéal mais personne n’avait eu jusqu’à présent relevé ce défi. David et Hervé Bitaud, deux viticulteurs de Criteuil-la-Magdeleine, ont soumis cette idée à leur concessionnaire qui a concrétisé le projet. La pelle rétro montée à l’avant d’un tracteur fruitier donne pleine satisfaction après deux campagnes.

 

 

p19.jpgL’arrachage des ceps morts dans les vignes en place est aujourd’hui effectué mécaniquement avec une diversité d’équipements, des tarières avant ou arrière, des mini-pelles équipées de fer à U, des préparracheuses (Delorier), des arracheuses rotatives (Boisumault)… Tous ces matériels effectuent deux interventions distinctes, l’arrachage des ceps et la préparation des sols en vue de la plantation dont les principes de fonctionnement présentent tous des avantages et des inconvénients.

Une propriété où le chantier d’entreplantation est raisonné et organisé

David et Hervé Bitaud, qui exploitent un vignoble de 80 ha à Criteuil-la-Magdeleine, pratiquent l’entreplantation de façon systématique depuis 5 à 6 ans. Chaque année, 30 à 40 % de la surface de la propriété est entreplantée en prenant le soin de bien organiser les travaux d’arrachage et de plantation. Aussitôt les vendanges, les ceps morts sont coupés à la tronçonneuse à 20 cm au-dessus le sol et, ensuite, l’arrachage intervient en tout début d’hiver (courant novembre). Le fait de pratiquer un arrachage tôt permet de laisser la terre des trous de plantation s’aérer et se restructurer pendant deux à trois mois avant de mettre en terre les greffés-soudés. La plantation des greffés-soudés intervient entre la mi-mars et la mi-avril, quand les sols sont à la fois encore humides et assez bien réessuyés. Ces viticulteurs attachent beaucoup d’importance au respect du sol au niveau du trou de plantation.

Arracher les ceps et préparer le sol, deux interventions indissociables

D. et H. Bitaud considèrent que l’entre-plantation nécessite beaucoup de travail qu’il convient d’effectuer dans les meilleures conditions pour faciliter la réussite des plants : « La mise en oeuve d’un chantier d’entreplantation mobilise beaucoup de travail que nous essayons d’aborder en faisant preuve de sérieux et de cohérence. L’étape qui nous paraît être très importante est l’arrachage des souches. L’extraction des souches doit s’effectuer en essayant
de sortir le maximum de grosses racines. Dans les parcelles très pierreuses, l’arrachage nécessite un matériel puissant. L’outil utilisé pour arracher doit également bien préparer le sol au niveau du trou de plantation. Il faut intervenir en conditions pas trop humides pour éviter les phénomènes de lissage et favoriser l’aération et l’ameublissement de la terre. Le fait de réaliser l’arrachage en début d’hiver, courant novembre, laisse le temps au sol de bénéficier des périodes de froid qui restructure la terre. L’ensemble de ces éléments contribue ensuite au bon développement ultérieur du jeune plant. Chez nous, la nature des sols (des terres de champagne) ne facilite pas les choses, surtout suite à des périodes de pluies. La diversité de nature des sols au sein des parcelles est aussi fréquente. Nous pouvons être confrontés à de petites terres très pierreuses et superficielles en sommet de coteaux et, 30 m plus bas, à des sols plus profonds et argileux. »

Les tarières préparent mal le sol et les mini-pelles pas assez rapides

p201.jpgL’ensemble des vignes du domaine du Grand Fief fait l’objet d’un entretien du capital souches régulier. Plus de la moitié du vignoble est constitué de vignes à 2,50 m d’écartement, qui représentent le standard actuel de la propriété. L’effort d’entreplantation est concentré en priorité sur toutes les vignes de 15 à 25 ans. D. et H. Bitaud ont testé une diversité d’équipement d’arrachage avant de trouver l’outil le plus adapté aux caractéristiques de leurs sols : « Comme beaucoup d’autres viticulteurs, nous avons testé et utilisé plusieurs types d’arracheuses. Comme chaque année nous arrachons et entreplantons 5 000 ceps sur la propriété, nous sommes devenus très attentifs aux conditions d’arrachage. Au départ, on a travaillé avec une tarière arrière deux rangs dont l’utilisation s’avérait fatigante pour le chauffeur. La position dans le siège du tracteur au ¾ retourné devenait au fil des heures pénible. Nous avons donc demandé à notre concessionnaire d’adapter la tarière à l’avant d’un tracteur. Ce montage s’est avéré beaucoup plus facile à conduire et le débit de chantier était intéressant. On arrivait à arracher 80 à 100 ceps/heure. Par contre, la qualité des trous de plantation ne nous convenait pas. Suite à des pluies, le principe de la tarière engendrait des phénomènes de lissage. Ensuite, le centre des trous était trop dégagé. Il fallait repasser les reboucher avant de planter, ce qui engendrait des interventions manuelles supplémentaires assez lourdes en temps. Il y a quelques années, nous avons demandé à un prestataire de services de venir arracher les souches avec une mini-pelle équipée d’un fer à U. La qualité du travail du sol effectué avec cette machine nous a tout de suite plu. Les ceps étaient bien arrachés et les deux ou trois allers et retours du U dans le sol préparaient bien la terre sans trop la déplacer, même en conditions humides. Par contre, le débit de chantier n’excédait pas 40 à 50 ceps/heure en raison de la lenteur des déplacements de la mini-pelle dans les rangs. Le transport de la mini-pelle d’un îlot à un autre nécessitait une remorque routière et des temps de chargement et de déchargement importants. Par ailleurs, le fait de devoir faire appel à un prestataire extérieur posait aussi un problème de disponibilité du matériel pour pouvoir intervenir dans les périodes idéales. La qualité du travail de la mini-pelle nous convenait, mais le coût de son utilisation était trop important et contraignant. »

Monter une pelle rétro à l’avant d’un tracteur, une idée judicieuse concrétisée

p202.jpgForts de ces expériences, les deux viticulteurs se sont dit que le matériel d’arrachage idéal pour leur exploitation n’existait pas encore. Concilier les avantages de qualité de travail de la mini-pelle et les performan-ces de maniabilité et de vitesse de déplacement d’un tracteur dans les rangs de vigne leur paraissait à la fois souhaitable mais impossible. Le hasard d’une discussion sur les limites de l’utilisation de la tarière avant avec Jean-Pierre et David Brun, de la Sodismag, a fait évoluer les choses. Sous forme d’une boutade, les deux viticulteurs interpellent leur concessionnaire : « Quand allez-vous monter un bras de mini-pelle à l’avant d’un tracteur frui-tier ? » Ce propos plein de bon sens avait été enregistré par les deux techniciens en machinisme. Au cours de l’été 2013, la livraison d’une pelle rétro adaptable sur le trois points arrière d’un tracteur standard à un agriculteur qui souhaitait faire des tranchées et des fossés a été le déclic. J.-P. et D. Brun ont questionné leur fournisseur, la société française Cochet, pour savoir si une adaptation à l’avant d’un tracteur avec des commandes implantées dans la cabine pouvait être envisageable. La réponse positive du constructeur laissait envisa-ger que, moyennant des adaptations, une possibilité de montage à l’avant d’un tracteur était possible. Il fallait juste que le tracteur soit équipé d’une prise de force avant pour faire fonctionner la centrale hydraulique indépendante de la pelle rétro. Le projet a pris forme avec l’adhésion de D. et H. Bitaud qui était prêts à tester et ache-ter cet équipement. J.-P. et D. Brun se sont mis au travail pour monter la pelle rétro sur le tracteur de cette exploitation équipé d’un relevage avant : un Landini 100 F.

La pelle rétro Cochet transformée en arracheuse montée à l’avant d’un tracteur

Les pelles rétro de la société Cochet, destinées à être montées à l’arrière d’un tracteur, sont équipées d’une centrale hydraulique indépendante, de deux béquilles de travail et d’un poste de conduite autonome. Les techniciens de l’atelier de la Sodismag ont choisi de monter une pelle ayant une puissance d’arrachement de 2,6 t. Le poste de conduite intégré à la pelle a été enlevé et le système d’attelage modifié. Les bras du relevage avant du tracteur ont été remplacés par une pièce d’adaptation fixe permettant d’atteler et de dételer facilement le matériel. La prise de force avant (mécanique) fait fonctionner la centrale hydraulique indépendante de la pelle. Les commandes de la pelle ont été transférées dans la cabine du tracteur, juste au-dessus le volant. Deux joysticks permettent d’assurer le fonctionnement du bras télescopique et du fer à U. Le pilotage de l’hydraulique de la pelle a été modifié et asservi au tracteur afin d’automatiser certaines fonctions. Avant un arrachage, l’enclenchement de la commande de baisse du relevage avant provoque automatiquement la descente des deux béquilles de la pelle sur le sol. L’appui au sol des deux béquilles empêche que le pont avant du tracteur ne soit soumis aux efforts du bras télescopique lors de l’arrachage. La machine pèse 700 kg avec la centrale hydraulique. Le bras télescopique est monté sur une potence à l’avant du tracteur qui permet une translation latérale de tout le module d’arrachage sur plus d’un mètre. Cela permet d’arracher les souches dans deux rangs à la fois. Le godet de la pelle a été remplacé par un fer à U identique à celui utilisé sur les mini-pelles.

Deux années d’utilisation très satisfaisantes de l’arracheuse rétro avant

Le prototype de cet équipement est utilisé sur le domaine du Grand Fief depuis deux hivers. Plus de 10 000 ceps de vigne ont été arrachés avec la pelle rétro avant, et D. Bitaud, qui conduit le tracteur équipé du matériel, est pleinement satisfait de cette arracheuse : « Pour moi qui ne m’étais jamais servi d’une mini-pelle, la prise en main du bras télescopique m’a demandé deux à trois jours. Une fois les mouvements nécessaires à l’arrachage bien maîtrisés, l’appareil a donné pleine satisfaction. De la cabine, j’ai une très bonne visibilité sur les ceps à arracher et le travail dans les deux rangs est très facile à gérer. La puissance de la pelle permet de réaliser de beaux trous quelles que soient les situations de sols. Cet outil ameublit et prépare bien la terre sans que le centre des trous de plantation soit dégarni. Dans les rangs, les déplacements sont faciles et jamais le tracteur ne subit les efforts de traction du bras télescopique au moment de l’arrachage. Les béquilles qui se posent automatiquement au sol dès que l’on actionne la commande du relevage avant facilite la conduite du matériel. Le tracteur ne bouge pas au moment de l’arrachage et le pont avant ne subit pas d’efforts. Enfin, le débit de chantier avec cet appareil est comparable à celui d’une tarière avant, soit environ 80 à 100 souches/h. Dans nos conditions de sols, cet équipement représente un bon compromis qualité/performances et coût utilisable dans toutes les vignes de 2 à 3 m d’écartement. L’appareil reste monté sur le tracteur une grande partie de l’hiver. »

Un niveau d’investissement de 11 000 à 12 000 € HT

La conception innovante de cette arracheuse et le recul d’utilisation sur la propriété de D. et H. Bitaud confortent l’intérêt de cet équipement. C’est une solution astucieuse permettant de bien préparer le sol et d’avoir un débit de chantier performant. La seule contrainte réside dans le fait qu’il faut disposer d’un tracteur équipé d’un rele-vage avant assez puissant compte tenu du poids de la machine (700 kg). De plus en plus de propriétés de la région utilisent des tracteurs fruitiers équipés de relevage avant avec des prises de force pour réa-liser des travaux combinés au cours du cycle végétatif. L’investissement dans un tel matériel est-il accessible économiquement pour une propriété individuelle ? La Sodismag commercialise l’équipement monté entre 11 000 et 12 000 € HT selon le niveau de pré-équipement du tracteur. À titre de comparaison, les prix de vente des tarières avant 2 rangs se situent entre 8 000 et 9 000 € HT et ceux des mini-pelles entre 25 000 et 30 000 € HT. On peut donc penser que ce nouvel équipement risque d’intéresser les domaines de surfaces importantes, des CUMA et des prestataires de services.

Les points clés de l’arracheuse pelle rétro Cochet/Sodismag
l Une pelle rétro Cochet d’une puissance de 2,6 t montée sur un Landini Rex 100 F.
l Le tracteur doit disposer d’un relevage avant et d’une prise de force avant.
l Une pièce d’adaptation s’installe à la place du relevage avant pour atteler et dételer la pelle rétro.
l La pelle dispose de sa propre centrale hydraulique et de deux béquilles d’appui au sol.
l Les commandes de la pelle rétro ont été implantées dans la cabine du tracteur.
l Le chauffeur dispose d’une bonne visibilité sur l’outil au travail.
l L’arrachage est réalisé sur deux rangs à la fois, ce qui permet d’optimiser le débit de chantier : 80 à 100 ceps/heure comme une tarière avant double rang.
l Deux campagnes d’utilisation et plus de 10 000 souches arrachées sans problème mécanique au niveau du tracteur.
l Un coût d’investissement de 11 000 à 12 000 € selon le niveau de pré-équipement du tracteur.

 

 

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