Une année 2021 déjà fortement mouvementée

26 janvier 2021

Au sein d’un monde en pleine transformation (voire transe-formation), l’agriculture voit son rôle évoluer. À la croisée des chemins, le monde viticole est au centre de plusieurs préoccupations, et notamment la restriction des utilisations de produits phytosanitaires – en quantité comme en nombre de matières actives disponibles. L’équation présentée est une équation à deux inconnues : le bilan carbone va forcément s’alourdir avec le recours plus large au travail du sol ; et, en face, l’agriculture demeure l’un des meilleurs moyens de captation dudit carbone – élément chimique dont il y aurait beaucoup à dire. Nous y reviendrons lors du premier trimestre 2021.

L’agriculture rencontre donc toutes les contradictions du monde moderne, où la vérité d’un jour n’est plus celle du lendemain. Si la consommation de produits trop transformés ou chimiques pose légitimement question, l’intégration de corps étrangers et méconnus (notamment les nanoparticules) dans les veines par les vaccins semble poser moins de soucis aux dirigeants et aux diverses associations.

La robotique à l’orée du monde viticole

Face à ces pressions et ces dénégations, le monde de la viticulture poursuit ses recherches et ses innovations, avec de nombreux logiciels d’aides à la décision qui voient le jour, et l’arrivée de la robotique dans les chais et les vignes. S’il s’agit, pour le moment, de « cobot », des robots collaboratifs, les robots pourraient devenir, à terme, des entités à part entière, semi-autonomes ou quasi autonomes. Cela poserait de nombreuses questions quant à la sécurité, la prévention des accidents, la responsabilité juridique, la surveillance, ou encore l’autonomie réelle de ces machines.

Outre les améliorations techniques qui limitent les intrants ou en récupèrent les dérives, la possibilité de limiter la pénibilité du travail pousse de nombreuses entreprises à se pencher sur cette option. Le manque de main d’œuvre et d’attractivité du milieu agricole, et même viticole, favorisent également les investissements en piochant idées et approches dans le monde de l’industrie.

Le vœu de la souveraineté alimentaire

Lors de ses vœux à la presse et de la présentation du plan d’action agricole pour 2021, le ministre de l’Agriculture et l’Alimentation, Julien Denormandie, a mis en avant le danger de la dépendance de plusieurs pans du système agroalimentaire français. Il a parlé, expression à la mode, de souveraineté alimentaire, et a mis en avant une « écologie de la science, de la raison, de la réalité des territoires » contre « une écologie de l’injonction », qui peut « tuer une filière » et permettre l’importation de produits de bien moindre qualité environnementale (les tensions autour de la betterave et de l’utilisation des néocotinoïdes sont le dernier exemple en date). Le ministre mise sur le « regain de la souveraineté » via le Plan de relance et le 1,2 milliard d’euros alloué à l’agriculture.

Le lancement de la plateforme fraisetlocal.fr entre dans cette optique. Un mouvement déjà largement implanté dans les provinces charentaises, comme le montre le dossier des circuits courts au cœur de ce numéro.

Les États-Unis, entre évolutions fiscales et changements de présidence

L’annonce de l’élargissement des taxes américaines sur l’importations de vins et spiritueux européens, et notamment français, touche, finalement, le Cognac, depuis le 12 janvier dernier. Premier marché pour l’eau-de-vie charentaise, les États-Unis ont donc augmenté les droits de douane de 25% sur les brandies de France et d’Allemagne. Après avoir échappé aux premières taxes à l’octobre 2019, la tension économique pourrait se faire sentir plus durement sur les bords de la Charente, au-delà de la volonté des entreprises d’absorber cette augmentation, sans la faire ressentir au consommateur final. Les relations entre les familles du négoce et de la viticulture évolueront-elles dans ce nouveau contexte fiscal ?

Les relations diplomatiques après la relative tendance isolationniste du gouvernement Trump, une non-intervention militaire et une guerre économique à travers les entreprises multinationales, et notamment l’aéronautique, vont très probablement être bousculées avec l’arrivée à la présidence de Joe Biden. Quelles politiques économique et étrangère ce dernier mettra-t-il en place avec son équipe ? Une autre philosophie politique revient au pouvoir – plus proche des équipes de Bill Clinton et de Barack Obama en leur temps –, des changements seront donc à prévoir.

Le rôle des monnaies dollar et euro, et leurs taux de change, sera un des éléments essentiels. Dans les affaires, « ce qui nous embête le plus aujourd’hui, c’est un dollar faible et un euro fort. L’année dernière à la même époque, l’euro était à 1,12$ aujourd’hui à 1,27$, c’est surtout cela qui va augmenter le prix », explique un importateur américain de vins français aux États-Unis.

Si le négoce n’est – pour le moment – guère inquiet, les viticulteurs demeurent plus mesurés. Au-delà des interprofessions et syndicats lancés dans les négociations, ils se posent la question de la pertinence de campagnes de plantation toujours aussi soutenues (3474 hectares pour 2019, 3398 hectares pour 2020 et 2306 hectares pour 2021). Ces hectares trouveront-ils des vignerons, puis des négociants et des consommateurs finaux ?

De plus, cela demandera toujours plus d’investissement de la part des viticulteurs, ou de grands domaines toujours plus importants, dans la large tendance de concentration des entreprises agricoles. L’accès au foncier demeurant de plus en plus difficile (même dans lors des successions familiales), qui profitera réellement de ces plantations nouvelles ?

Hommage à Lionel Ducom

Nous finissons cet éditorial en rendant hommage à Lionel Ducom, qui vient de prendre sa retraite après plus de 37 années de bons et loyaux services au sein de la rédaction du Paysan Vigneron. Après avoir traversé nombre d’époques de la revue et du microcosme des vins et des eaux-de-vie charentais, le voici donc parti couler des jours paisibles dans les provinces de Saintonge et d’Angoumois. La rédaction lui souhaite une bonne retraite, et ne saurait oublier – à l’instar de Catherine Mousnier – l’implication et le professionnalisme dont il a fait preuve tout au long de ces décennies au service du Paysan Vigneron et de la viticulture charentaise.

La rédaction du Paysan Vigneron souhaite à tous ses collaborateurs et ses lecteurs une très bonne année 2021. Qu’elle puisse être un millésime réussi, même face aux difficultés et injonctions contraires.

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