Pesticides, et leur impact sur la santé et l’environnement

4 juin 2013

Sénatrice de Charente et conseillère générale du Ruffecois (canton de Mansle), Nicole Bonnefoy a été alertée sur la question des pesticides par l’agriculteur Paul François, de l’association Phyto-Victimes. Elle a très vite pris conscience de l’ampleur du sujet. Début 2012, elle a obtenu la création d’une mission d’information parlementaire qui a publié un rapport en deux tomes. Son titre : « Pesticides : vers le risque zéro ». Voté à l’unanimité, le rapport a débouché sur une centaine de recommandations, dont quelques-unes peuvent s’appliquer rapidement. « Maintenant, il faut faire vivre ce rapport. C’est là que tout commence » dit la sénatrice.

En marge de la présentation officielle au Sénat, le 23 octobre 2012, Nicole Bonnefoy a tenu à présenter le rapport parlementaire en Charente, p38.jpgen début d’année 2013. En guise de lieu d’accueil, elle choisit la Chambre d’agriculture de La Couronne, comme pour témoigner qu’il n’était pas dans ses intentions de « montrer du doigt les agriculteurs ». « D’abord ce sont eux les premières victimes » dit-elle.

« Notre souci n’a pas été de faire le procès des uns ou des autres mais d’aller dans le sens d’une agriculture plus propre. »

« Le rôle du Parlement, poursuit la sénatrice, est bien sûr de voter des lois mais aussi de contrôler le Gouvernement. On peut le faire de diverses façons : par des questions écrites, des questions orales mais aussi par des missions d’information ou d’expertise.

Un « droit de tirage »

Chaque groupe politique dispose d’un « droit de tirage » de ces missions d’information. J’ai demandé au président du groupe socialiste au Sénat d’obtenir l’ouverture d’une mission d’information sur les pesticides et leur impact sur la santé et l’environnement. »

En tant qu’initiatrice du projet, Nicole Bonnefoy a été désignée comme rapporteuse de la mission. « Je signe ce rapport. Il m’engage » déclare-t-elle. Par principe, toute mission de ce genre intéresse l’ensemble des groupes politiques. Au final, la mission fut composée de 27 sénateurs, placés sous la présidence de la sénatrice UMP des Yvelines, Sophie Primas. Des administrateurs du Sénat, au nombre de huit, sont venus conforter la mission pendant la durée de l’étude, de février à septembre 2012. Au total, ce furent plus de 200 heures d’auditions ; des déplacements en Charente, Lot-et-Garonne, Morbihan, Rhône ; des journées d’entretien avec les organisations chargées de la surveillance, dont l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) ; des rencontres avec des groupes phytosanitaires, des firmes de l’agrochimie, l’UIPP (Union des industries de la protection des plantes). « Pourquoi ai-je demandé la création de cette commission d’information ? » s’est interrogée N. Bonnefoy. « Parce qu’il m’a semblé important et même nécessaire que le politique se saisisse de ces questions. En tant que citoyenne et élue, je suis sensibilisée depuis longtemps à l’environnement, la santé et l’éducation nutritionnelle (1). Par ailleurs, je fus alertée par l’histoire de Paul François, agriculteur à Bernac, dans le canton de Villefagnan. En 2004, il a été victime d’un accident en manipulant un herbicide. Il a intenté avec succès un procès à Monsanto mais la bataille continue. »

Un sujet sensible

p39.jpgC’est avec un sens des réalités certain que la sénatrice et ses collègues se sont attaqués au sujet. Un sujet qualifié de « sensible, pas gagné d’avance ». « Nous ne partions pas d’une feuille blanche. Plein de choses ont déjà été faites. Une prise de conscience existe, ne serait-ce qu’à travers le Plan Ecophyto lancé en 2008. Notre mission n’a pas pour but de révolutionner la matière mais d’apporter sa contribution pour s’engager dans une nouvelle voie. » La conviction de Nicole Bonnefoy : « L’économie doit se mettre au service de l’écologie et pas l’inverse. »

Le rapport a été voté à l’unanimité. « Ce qui lui donne une force certaine » estime la sénatrice de Charente. Parmi la centaine de recommandations proposées, beaucoup concernent la meilleure connaissance du risque sanitaire (renforcement des contrôles, généralisation du registre des cancers dans tous les départements…) ; le renforcement du suivi des autorisations de mise sur le marché des pesticides ; la reconnaissance des maladies professionnelles (réduction du délai de classement en maladie professionnelle…) ; la prévention du risque (réduction de l’exposition, équipements de protection individuelle (EPI), cabines filtrantes plus performantes, étiquettes plus explicites…) ; l’adoption d’une loi contre les conflits d’intérêts ; l’indépendance de l’expertise et de l’alerte (adoption d’un statut de « lanceur d’alerte » doté d’une protection légale) ; la séparation à terme de la prescription et de la vente des pesticides ; et, bien sûr, l’intensification des recherches en vue de solutions alternatives à l’emploi de pesticides…

Le rapport parlementaire se termine par une conclusion à valeur de manifeste : « Les malades ne sauraient être au fait des données de la science, des subtilités des méthodologies d’évaluation et de la complexité des techniques. Mais ils ont la conviction que leur état de maladie est la preuve des risques non acceptables de l’impact des pesticides sur leur santé.

En matière d’évaluation de risque de pesticides sur la santé, deux exigences s’imposent :

− davantage de transparence et de volontarisme dans la mesure des effets des pesticides sur la santé humaine ; la remontée des données sanitaires ; leur analyse et les alertes à lancer ;

− placer la santé au cœur de l’évaluation de l’impact des pesticides ; en faire une priorité.

Il s’agit-là d’un renversement de la hiérarchisation existant jusqu’alors entre pesticides et santé. Ce nouveau principe doit être promu et débattu largement. »

(1) Sensibilisée à l’éducation nutritionnelle et à la lutte contre l’obésité, N. Bonnefoy a participé dans son canton à l’introduction de produits bio dans les cantines ainsi que de fontaines à eau.

 

 

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