Le cycle végétatif 2005 a été marqué par un déficit de pluviométrie constant depuis le débourrement et comme l’hiver avait été déjà très peu « arrosé », une situation de sécheresse est apparue au cœur de l’été. La vigne a globalement bien supporté cette climatologie car il n’y a pas eu de canicule estivale et la plupart des viticulteurs ont su adapter leurs pratiques d’entretien des sols. Les fortes chaleurs du mois de juin et l’absence de pluie en juillet ont entraîné un arrêt de croissance précoce et le développement foliaire 2005 est l’un des plus faibles depuis une dizaine d’années. Sur le plan du parasitisme, le mildiou s’est montré très discret (hormis un peu de pression fin mai sur certains secteurs plus arrosés) et seul l’oïdium a été plus présent. Les techniciens ont observé quelques dégâts uniquement dans les parcelles mal protégées entre la fin mai et la mi-juillet. Les conditions climatiques depuis le mois de juin ont été très peu propices au développement du botrytis et l’état sanitaire des raisins en ce début de mois de septembre est parfait. Le déficit de pluviométrie et le niveau d’ensoleillement exceptionnel ont conféré à la vigne une certaine précocité, et la véraison est intervenue nettement plus tôt qu’en 2004. Le climat extrêmement sec des mois de juillet et d’août n’a cependant pas été aussi « brûlant » qu’en 2003 et les vignes ont donné l’impression de mieux s’adapter à cette sécheresse. Les sols à faibles réserves hydriques et les plantations confrontées à une forte concurrence hydrique, les zones très peu arrosées depuis le début juillet ont tout de même décroché. D’une manière générale, beaucoup de viticulteurs observent une hétérogénéité d’évolution de la maturité de leurs parcelles. Au cours de l’été 2005 les niveaux de températures n’ont pas atteint les sommets de 2003 et surtout les nuits ont été fraîches, ce qui est caractéristique de l’influence océanique de notre vignoble. Ce climat a permis aux raisins de mûrir plus progressivement en conservant de l’acidité qui contribue à l’équilibre de toutes les productions et à l’expression de la typicité traditionnelle de nos terroirs. Les résultats des contrôles de maturation attestent de niveaux d’acidités nettement supérieurs à ceux de 2003 à même niveau de maturité et par ailleurs les teneurs en acide tartrique sont élevées. Les très fortes chaleurs des premiers jours de septembre ont cependant fait souffrir un bon nombre de parcelles et l’arrivée d’un épisode pluvieux entre le 5 et le 7 est à la fois porteur d’espoir et d’inquiétudes.
L’espoir repose sur la précocité du millésime 2005, le très bon état sanitaire au 5 septembre (quels que soient les cépages) et le potentiel de qualité des raisins déjà prometteur. L’inquiétude est liée bien sûr à la climatologie des deux dernières semaines précédant la récolte qui est toujours déterminante. L’installation d’une période fortement pluvieuse serait bien sûr favorable à une évolution rapide du botrytis et à une dilution du potentiel qualitatif. Néanmoins, beaucoup d’œnologues et de viticulteurs semblent assez optimistes vis-à-vis du millésime 2005, qui s’annonce concentré sur le plan qualitatif et moyen au niveau des rendements. Les premiers Chardonnay déjà récoltés confirment cette tendance avec des TAV généreux, des niveaux d’acidités intéressants et une structure aromatique riche et typique. Les contrôles de maturation au niveau des Sauvignon vont dans le même sens et les premières vendanges sur les terroirs précoces du Bordelais laissent espérer de très beaux vins. Les dégustations de baies augurent d’un beau potentiel aromatique en phase avec la typicité traditionnelles de nos vignobles. En Charentes, la récolte des Sauvignons devrait intervenir à partir de la mi-septembre, en tenant compte des spécificités de sols et du type de vins blancs recherché. L’élaboration de vins frais et vif nécessite une récolte plus précoce alors que les vins plus structurés destinés à des élevages prolongés (sur lies, dans le bois) doivent être vinifiés à partir de raisins beaucoup plus mûrs. Les Merlot présentent aussi un très beau potentiel qualitatif et déjà les teneurs en matière colorante atteignent des niveaux bien supérieurs à ceux de 2004. Les dégustations de baies laissent aussi espérer de belles choses mais l’impact des effets terroirs, sécheresse, et charge de récolte est souvent marqué. Les premières vendanges de Merlot sur les terroirs les plus précoces du Libournais devraient intervenir autour de la mi-septembre et le gros des vendanges interviendra autour du 25. Les Cabernet sont encore loin de la récolte mais leur état de maturité actuel laisse augurer de belles choses si le soleil continue d’être généreux. Les Ugni blancs ont aussi connu de très bonnes évolutions des conditions de maturation et le millésime se présente bien. L’état sanitaire des raisins parfait, la bonne tenue de l’acidité, un titre alcoométrique proche de 8 % vol. au 5 septembre représentent des éléments très positifs. La réaction des sols aux effets de la sécheresse se matérialise par une hétérogénéité de la maturation dans le parcellaire des propriétés. Les zones ayant eu la chance de bénéficier de précipitations en août semblent être encore plus précoces et certains domaines envisagent de commencer la récolte vers le 0 septembre. A l’inverse, les parcelles extériorisant des symptômes de sécheresse sont littéralement « bloquées » et on peut se demander si l’arrivée de précipitations sera en mesure de relancer le processus de maturation. L’un des seuls sujets d’inquiétude concerne actuellement les teneurs en azote dans les moûts qui semblent faibles et insuffisantes pour assurer les besoins alimentaires des levures. La réalisation d’une complémentation préventive avant la fermentation sera sûrement un gage de réussite pour la conduite des fermentations alcooliques, surtout si les TAV potentiel dépassent 9 % vol. L’évolution de la climatologie jusqu’au 20 septembre prochain sera donc déterminante vis-à-vis de la qualité, du volume de récolte et de la date des vendanges. Un petit épisode pluvieux suivi du retour du beau temps serait sans doute le scénario idéal pour bonifier le potentiel de qualité déjà prometteur en ce début de mois de septembre.
La récolte du millésime 2005 va commencer d’ici une, deux, trois semaines… et toute l’équipe de la Revue Le Paysan Vigneron s’est mobilisée pour mettre à disposition de ses lecteurs un nouveau « Guide de la Vinification » dont l’ambition est de nourrir la réflexion technique nécessaire à l’extraction du potentiel de qualité contenu dans les raisins. Cette nouvelle édition est à la fois accessible, fonctionnelle et plus ouverte au dialogue technique. Notre ambition est de proposer un outil d’information supplémentaire permettant aux viticulteurs d’acquérir une bonne maîtrise technique préventive au niveau de la conduite des vinifications. Les meilleures productions de vins, de pineaux et d’eaux-de-vie sont toujours élaborées à partir de raisins récoltés à maturité idéale, qui libèrent naturellement les composés les plus intéressants. Le travail de vinification commence donc à la vigne en essayant d’apprécier de manière juste le niveau de maturité de chaque parcelle. Cela permet ensuite de moduler les pratiques de vinification pour tirer le meilleur profit de chaque lot de vendange. Nous proposons dans ce « Guide de la Vinification 2005 » des fiches de vinification spécifiques à chaque production – les jus de raisins, les vins blancs, les vins rouges, le Pineau des Charentes et les vins de distillation – qui nous l’espérons vous aideront à mieux gérer les vinifications 2005. Bonnes Vendanges.
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