Un cycle végétatif 2007 précoce et inquiétant !

12 mars 2009

belle_vgtation_opt.jpegLes débourrements précoces sont-ils annonciateurs de récoltes généreuses ? Cette question est d’actualité en cette fin mai 2007 puisque après les mois de mars et d’avril exceptionnellement beaux, la vigne a eu jusqu’à 10-15 jours d’avance selon les cépages. Cependant, la très belle apparence de production dans le vignoble ne semble pas pleinement valorisée par le climat frais et pluvieux de la fin du mois de mai. La floraison ne commence pas dans les meilleures conditions; le vent a fait beaucoup de dégâts et le mildiou « pointe son nez » dans un certain nombre de parcelles !

Un peu plus de deux mois après le débourrement, le cycle végétatif 2007 est déjà contrasté du fait d’une climatologie toujours surprenante qui confère à la vigne un développement particulier. Ce propos devient presque banal si on se réfère à la succession des événements climatiques inhabituels au cours des derniers millésimes, un hiver et un printemps extrêmement pluvieux en 2000, une succession de printemps doux et propices à des débourrements précoces en 2001, 2002, 2003 et 2005, des hivers insuffisamment arrosés en 2003, 2004 et en 2005, des étés brûlants en 2003 et 2005, et un mois d’août extrêmement pluvieux et frais en 2006.

Le début de la décennie 2000 semble être marqué par une succession de cycles végétatifs précoces qui suscitent beaucoup d’interrogations ? Le cépage Ugni blanc, réputé pour son débourrement tardif et sa capacité à mûrir tardivement dans notre région, semble avoir changé de comportement au cours des trois dernières décennies. Les raisins sont désormais plus souvent récoltés à la fin septembre qu’à la mi-octobre et l’équilibre sucres/acidité des moûts durant les vendanges est très différent de celui des années 70 et 80. Le début de cycle végétatif 2007 s’inscrit dans la continuité des précédents, toujours précoce et soumis à des séquences climatiques marquées.

Un débourrement très précoce

L’hiver 2006-2007 a été marqué par des niveaux de pluviométries tout à fait normaux et un nombre de jours de froid très réduits. L’abondance des pluies en février et la douceur des températures ont entraîné une levée de la dormance précoce. Les cépages destinés à la production de vins de pays comme le Chardonnay, le Merlot, les Colombard ont vu leurs bourgeons « bouger » et éclater durant la première décade de mars dans les terroirs qui se réchauffent facilement. Le Cabernet franc, réputé plus tardif, a suivi de très peu le Merlot et seul le Cabernet Sauvignon a eu un développement décalé mais nettement en avance par rapport aux époques moyennes. A la faveur d’un mois de mars chaud et bien arrosé, les premiers bourgeons d’Ugni blanc ont atteint le stade pointe verte entre le 25 mars et le 4 avril, ce qui atteste d’un débourrement légèrement plus en avance que ceux des millésimes jugés jusqu’à présent très précoces comme 2003, 2001, 1997, 1999 et 1990. La sortie des premiers bourgeons en 2007 est donc un nouveau record de précocité à battre. C’est un élément à relier à la succession d’autres débourrements précoces (2001, 2002, 2003, 2005) qui attestent des conséquences de l’évolution climatique dans notre vignoble. La présentation des différents stades végétatifs repères de l’Ugni blanc depuis 1979 (dans les tableaux ci-après) enregistrés par la Station Viticole du BNIC permet de caractériser le déroulement des cycles végétatifs sur plus d’un quart de siècle. Les dates de débourrement, de floraison… bien qu’ayant été toujours effectuées avec le même protocole et sur les mêmes parcelles, ne représentent pas des repères de stades moyens absolus de la région délimitée, mais cela permet de comparer les années entres elles et d’observer l’influence du climat sur le déroulement de chaque millésime.

Un climat d’avril exceptionnellement beau qui a « boosté » la croissance

Au niveau des cépages précoces, le taux de débourrement a été bon alors que sur les Ugni blanc il se situe dans la moyenne (autour de 80 %) à un niveau légèrement inférieur à celui de 2006. Les conditions climatiques exceptionnellement chaudes du mois d’avril ont par contre accéléré la pousse qui s’est développée de façon homogène. Les phénomènes de fenêtre souvent observés dans les parcelles conduites en tailles longues ne se sont pas extériorisés cette année en raison de la stabilité du climat dans les trois semaines suivant le débourrement. Par contre, les parcelles taillées tard (début mars) ont accusé un retard notable de développement qui deux mois après est encore visible. Les techniciens expliquent ce phénomène par le fait que la taille est intervenue après une montée de sève rapide importante dans l’ensemble des rameaux (de l’année précédente), ce qui a littéralement « réduit » l’énergie des ceps. Plus localement, des dégâts d’escargots ont détruit partiellement des jeunes pousses qui, elles aussi, ont ensuite accusé un certain retard. D’une manière générale, la vigne a très bien réagi au beau temps d’avril qui a favorisé un allongement rapide de la végétation. Le SRPV de Cognac réalise un suivi de croissance hebdomadaire des rameaux sur un réseau de parcelles d’Ugni blanc qui met en évidence le développement rapide de la végétation en avril.

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Synthèse des stades phénologiques de l’Ugni blanc de 1979 à 1991 (Station Viticole du BNIC).

Entre le 8 et le 29 avril, l’allongement des rameaux a été important et régulier, et à cette époque la vigne avait un développement végétatif proche de celui qu’on lui connaît habituellement à la mi-mai. Les techniciens de la région estimaient qu’au 1er mai , le cycle végétatif avait 12 à 15 jours d’avance par rapport à une année moyenne. Les premières observations au niveau de la charge d’inflorescences laissaient espérer un potentiel de récolte relativement élevé dans les Ugni blancs et les autres cépages.

Une fin de mois de mai fraîche et pluvieuse inquiétante à l’approche de la floraison

Par la suite, un temps moins ensoleillé et entrecoupé de précipitations localement abondantes s’est installé jusqu’à la mi-mai. Au cours de cette période instable, les viticulteurs ont commencé leur protection pour prévenir l’apparition des premières contaminations de mildiou et d’oïdium. La vigne a continué sa croissance à un rythme moins soutenu mais le cycle végétatif restait toujours très en avance. La deuxième quinzaine de mai a été beaucoup plus contrastée sur le plan climatique avec une succession de pluies, de journées exceptionnellement fraîches et de courtes périodes chaudes et ensoleillées.
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La croissance de la vigne a nettement pâti de cette climatologie défavorable et inhabituelle à cette époque. La précocité du cycle végétatif s’est alors contractée et à l’approche de la floraison l’avance était de l’ordre 8 à 12 jours selon les cépages. Les premières fleurs de Chardonnay ont été repérées le 17 mai, celles de Merlot vers le 20 et celles d’Ugni blanc autour des 24-25 mai. L’abondance des pluies et la brutale chute des températures (à moins de 15 °C ) à partir du 24 mai ont coïncidé avec la période pleine floraison des Chardonnay, des Merlot, des Colombard. De telles conditions risquent de perturber la pollinisation et d’engendrer des phénomènes de coulure dont il est bien difficile de prévoir l’importance. Dans les sols très calcaires, l’alternance de pluies fréquentes et de niveaux de températures bas pour la saison a favorisé l’extériorisation d’un jaunissement de la végétation qui atteste d’une alimentation des souches irrégulière. Si ces phénomènes de carences et de chloroses « climatiques » venaient à durer à l’approche de la floraison, leurs conséquences pourraient devenir inquiétantes.

Au niveau des Ugni blanc, le démarrage précoce de la floraison n’est pas forcément non plus de bon augure car les prévisions météo de la semaine du 28 mai au 4 juin annoncent une nouvelle période pluvieuse et fraîche. Les vents très forts des 26, 27 et 28 mai, qui ont fait beaucoup de dégâts d’essolage, risquent aussi de réduire les perspectives de production. La climatologie de la troisième décade de mai a été défavorable au développement des Ugni blancs qui a perdu une partie de sa précocité (ramenée à une semaine), mais la dizaine de jours à venir sera capitale vis-à-vis du déroulement de la floraison. Cette phase du cycle végétatif démarre tout juste et pour l’instant il est bien difficile de faire des pronostics fiables. Souhaitons que les prévisions météo ne soient pas totalement fiables et que le beau temps revienne rapidement pour qu’une majorité de parcelles puissent fleurir dans de bonnes conditions.

L’oïdium « attendu » supplanté par un mildiou en pleine montée en puissance

Sur le plan du parasitisme, le début de cycle végétatif 2007 est aussi particulièrement contrasté. Après une année 2006 marquée par une pression d’oïdium historique, beaucoup de techniciens et de viticulteurs ont surveillé de près cette maladie dès le débourrement.

Le climat d’avril très beau a renforcé cette inquiétude en raison de la pousse très rapide, mais les recherches de symptômes précoces (dont l’intensité quantifie la puissance de l’épidémie) par les techniciens dans des parcelles de référence ont révélé un faible niveau d’infestation. Néanmoins, la protection oïdium a été commencée d’une manière beaucoup plus précoce qu’en 2006, d’autant que le stade boutons floraux séparés a été atteint vers les 15-20 mai. L’oïdium, qui était en quelque sorte « attendu », ne s’est pas extériorisé et à l’inverse le mildiou est monté régulièrement en puissance depuis le début du mois. La fréquence des pluies depuis les 5-6 mai a relancé la dynamique de contaminations de cette maladie dont le niveau de risque potentiel était bas en début de saison. Malgré une maturation des œufs d’hiver précoce (le 23 mars), l’absence de pluie en avril avait empêché toutes contaminations. Les premières tâches sur les cépages précoces ont été repérées le 23 avril et sur l’Ugni blanc le 7 mai. La fréquence des pluies entre le 7 et le 27 mai a ensuite créé des conditions très favorables à de nombreuses contaminations, et depuis le 20 mai des foyers de mildiou sur feuilles et de rot gris ont été repérés. MM. Patrice Rétaud, du SRPV de Cognac, M. Lionel Dumas Lattaque, de la Chambre d’agriculture de Charente-Maritime et Yoann Lefèbvre, de la Chambre d’agriculture de la Charente, sont aujourd’hui unanimes pour dire que le niveau de risque mildiou est aujourd’hui (au 28 mai) important.
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Toutes les parcelles mal protégées ont en théorie été contaminées par des cycles de mildiou même si, pour l’instant, les premières tâches sont peu visibles. Dans les réseaux de témoins traités, les sorties de mildiou sont assez généralisées depuis le 20 mai. Les niveaux de températures extrêmement bas pour la saison allongent les durées d’incubation mais n’empêchent pas les nouvelles contaminations. Dans un tel contexte, la protection dans les parcelles doit être irréprochable car, à l’approche de la floraison, les jeunes grappes sont très réceptives aux attaques de mildiou. Le contexte parasitaire qui s’annonçait très calme au début du mois de mai a littéralement basculé en quelques semaines. Il ne faut pas sous-estimer la capacité épidémique du mildiou ! tableau_3.jpg

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