Un banc d’essais d’itinéraires culturaux d’entretien mécanique du cavaillon

29 juin 2010

Le travail mécanique au niveau du cavaillon suscite auprès des viticulteurs un véritable regain d’intérêt depuis quelques années, mais encore peu d’entre eux franchissent le pas et se remettent à cultiver mécaniquement le dessous des rangs. Les constructeurs ont considérablement fait évoluer les équipements interceps qui semblent aujourd’hui plus adaptés à des interventions de reprises des sols après une longue période de non-culture. Quels sont le ou les itinéraires culturaux susceptibles de permettre une reprise des cavaillons désherbés depuis 15 ou 20 ans ? Cette interrogation est à l’origine de l’essai mis en place sur le domaine de Gallienne par Matthieu Sabouret et Grégory Martonnaud, de la Chambre d’agriculture de la Charente. Un banc d’essais d’itinéraires culturaux d’entretien mécanique du cavaillon a été mis en place en tenant compte des contraintes et des réalités des exploitations viticoles de la région.

 

 

Après 15 à 20 ans d’entretien du cavaillon avec le désherbage chimique, le retour partiel ou total à du travail mécanique peut-il être envisagé de façon réaliste sur les plans technique et économique ? Cette question que se posent beaucoup de viticulteurs actuellement a été à l’origine de l’essai qui a été mis en place sur le domaine de Gallienne (les Vignobles Jean Martell). L’apparition d’une nouvelle génération d’équipements d’entretien mécanique du cavaillon est selon les constructeurs en mesure de rendre le retour au travail mécanique beaucoup plus compétitif par rapport au désherbage chimique. Indéniablement, les lames interceps et les décavaillonneuses de la fin des années 80 ont profondément évolué et sont devenues des équipements dotés de moyens technologiques les rendant à la fois polyvalent et plus performants. L’offre d’équipements qui s’est considérablement étoffée repose sur quatre principes d’outils, les décavaillonneuses, les lames interceps, les outils rotatifs et les tondeuses. Quels sont les avantages et les inconvénients de ces divers équipements ? Quels peuvent être le ou les meilleurs itinéraires techniques pour entretenir mécaniquement des sols propres tout au long d’une saison ? Quel sera au final le coût d’un itinéraire d’entretien de sols 100 % mécanique ? L’association d’un désherbage chimique à deux interventions mécaniques ne serait-il pas une approche plus judicieuse ? Le fait de rechercher une propreté parfaite du dessous des rangs tout au long de la saison est-il une nécessité ? Ne faut-il pas concentrer les efforts d’entretien mécaniques dans les périodes où les effets de concurrence « alimentaire » des herbes sont avérés ? Reprendre des sols après 15 ans de non-culture ne va-t-il pas engendrer des conséquences physiologiques et agronomiques négatives (chlorose, sensibilité au gel) et positives (vie des sols, réduction des intrants…) ?

Désherbage chimique et travail mécanique : Faut-il opposer ces pratiques !

Toutes ces interrogations attestent de la problématique large que soulève un retour à plus d’interventions mécaniques sous le cavaillon. Si le désherbage chimique du dessous des rangs couvre aujourd’hui 90 % des surfaces de la région, ce n’est pas tout à fait par hasard. C’est une pratique à la fois pas encore trop coûteuse (son coût a été multiplié par deux en dix ans), facile à mettre en œuvre, présentant des avantages agronomiques notamment vis-à-vis de la chlorose, des risques de gel de printemps, et qui permet d’apporter beaucoup de souplesse dans la réalisation des travaux entre la mi-mars et la fin juin. La majorité des viticulteurs n’envisagent pas à court terme de se passer de cette pratique mais ils sont aussi conscients que, dans un avenir plus ou moins proche, l’entretien du cavaillon va devoir évoluer. Le prix de revient des programmes de désherbage chimique sous le rang est devenu plus coûteux ces dernières années, 70 à 85 € ht/ha de charges liées aux herbicides auxquels il convient de rajouter 25 à 30 € ht/ha de main-d’œuvre et de traction (1 heure/ha pour 2 traitements). Par ailleurs, la gamme d’herbicides plus restreinte et l’apparition de plantes résistantes à plusieurs matières actives rendent la mise en œuvre du désherbage plus technique et plus difficile. Tous ces éléments associés aux aspects environnementaux plaident en faveur d’autres approches d’entretien des sols. Un retour à 100 % de travail mécanique et l’association désherbage chimique ponctuel au printemps et travail mécanique le reste de la saison représentent deux pistes de réflexions souvent évoquées et plus ou moins faciles à mettre en œuvre selon les structures d’exploitation, la surface en vignes, la nature des sols, les disponibilités en personnel…

Tester plusieurs itinéraires culturaux durant une saison entière

martonnaud.jpgL’essai mis en place par les deux techniciens de la Chambre d’agriculture de la Charente, Matthieu Sabouret, conseiller en machinisme et Grégory Martonnaud, technicien viticole, a comme objectif de comparer différents itinéraires culturaux d’entretien mécanique du cavaillon tout au long de la saison sur une parcelle conduite en désherbage chimique depuis plus de 15 ans. Le choix des équipements pour la conduite de l’essai a reposé sur une volonté de tester des principes d’outils différents, les décavaillonneuses avec le matériel Egretier (dans sa dernière version le porte-interceps auto-stable), des lames interceps avec les équipements Clemens Radius SL (fonctionnant avec l’hydraulique d’un tracteur) et Arrizza Doppio Full (fonctionnant à partir d’une centrale hydraulique indépendante), d’outils rotatifs avec deux matériels, le Discomatic de la société Boisselet et le Wilcep de la société Boisumault, et enfin deux tondeuses interceps, le système roto-fil d’Avif 33 et la tête de fauchage à couteaux de Boisselet. Le protocole assez lourd et la nécessité de mettre tous les équipements dans un même contexte représentaient deux conditions majeures indissociables qui n’ont pas permis d’intégrer plus de modalités dans cette expérimentation. Chaque matériel a été testé dans un bloc de 6 rangs de vignes (d’environ 150 ceps), un témoin enherbé de 2 rangs et 4 rangs destinés à être cultivés (2 rangs pour permettre de régler les outils et
2 rangs destinés aux essais proprement dits). Il a été demandé aux constructeurs d’assurer l’entretien mécanique de leurs blocs jusqu’à la fin de la saison en fonction de la vitesse de repousse de l’herbe.

Un essai piloté par les techniciens de la Chambre d‘agriculture de la Charente

Après la première intervention de reprise des sols qui a eu lieu le 5 mai dernier, les autres passages d’outils seront effectués en laissant le choix aux constructeurs d’utiliser l’équipement qu’ils jugent adapté à la situation. Au moment de chaque intervention, la démarche d’évaluation de chaque stratégie reposera sur une méthode d’observations identique reposant sur une évaluation de la flore d’herbes avant et après les passages, des mesures de vitesse d’avancement, de profondeur de travail, d’approche des souches et de taux de blessures. Ce sont les constructeurs qui ont pris en charge l’utilisation et le réglage des matériels au moment de chaque intervention. Un jury, constitué de quatre personnes – les deux techniciens Grégory Martonnaud, Matthieu Sabouret et de deux viticulteurs –, a effectué et effectuera les observations avant et après les passages des outils. En fin de saison, une synthèse de l’ensemble des interventions mécanique de chaque bloc sera effectuée et cela débouchera sur une analyse technique et économique de chaque itinéraire cultural.

Remettre en culture en réalisant des interventions superficielles

sabouret.jpgAprès une longue période de non-culture, le système racinaire des ceps est souvent remonté et le passage d’outils en profondeur risque de sectionner de nombreuses racines et de fragiliser le développement des souches. La remise en culture du cavaillon ne doit pas s’apparenter à un labour mais se limiter à une intervention superficielle sur moins de 10 cm de profondeur. Le test a été mis en place pour essayer de répondre à cette exigence en ayant une approche de culture mécanique sur l’ensemble de la saison. Les conclusions et les résultats recueillis à l’issue de cette expérimentation seront directement liés à la nature des sols à travailler et à la climatologie de l’année. Dans la région, quatre types de sols principaux existent : des terres de champagnes difficiles à reprendre lors de printemps humides, des doucins à forte réserve hydrique et à la portance délicate (s’ils sont cultivés), des terres de groies légères, filtrantes, superficielles faciles à travailler, et des terres profondes de pays bas.

Les techniciens ont préféré tester les différents principes d’équipements dans une situation de sol difficile, d’où le choix de la parcelle de terre argilo-siliceux profonde avec de nombreux silex. Le site présente l’avantage d’être homogène sur le plan de la nature des sols et d’avoir une topographie plane. La climatologie froide de l’hiver, suivie d’une période sèche en avril a été peu propice à un développement précoce et abondant de l’herbe au printemps.

Les premiers résultats après l’intervention mécanique du 5 mai dernier

Dans la parcelle d’essai, la flore d’adventices a connu une évolution régulière au fil des semaines, avec une présence d’herbes très représentative de la région, du géranium, du ray-grass, du pâturin, des pissenlits, du trèfle nain, un peu de liseron… Au cours du mois d’avril 2010, les pluviométries sur le site de Gallienne ont été de 16 mm et la flore d’herbe a connu une « vigueur » moins importante que certaines années humides comme 2007 ou 2008. Les conditions sèches ont permis de retarder la première intervention assez tard en saison. La reprise des sols a eu lieu le 5 mai dernier dans des conditions de sol très dures même si trois jours avant une petite averse de 4 mm avait légèrement « ramolli » la terre en surface.

Dans les jours qui ont suivi les interventions mécaniques, la climatologie dans un premier temps humide (20 mm de précipitation) a ensuite continué d’être fraîche et sèche, puis chaude et sèche, ce qui a favorisé la destruction des herbes. Deux semaines plus tard, la repousse du couvert végétal reste très limitée. Les premiers résultats de l’opération de reprise des sols du 5 mai dernier sont présentés dans les pages suivantes pour chaque matériel et en fin de saison un bilan complet de l’itinéraire cultural de chaque bloc sera établi et publié ultérieurement dans nos colonnes.

Pour consulter les résultats des essais d’entretien mécanique (Arrizza, Boisselet, Boisumault, Clemens Egretier, …), cliquer sur le lien ci-dessous :

Essai Entretien Mécanique

 

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