Tension de marché

28 novembre 2012

Autour de 9 hl AP/ha, dans une fourchette de 8,5 à 9,5… Les « pleins de cuviers » étant fait, c’est ce qui semble ressortir du rendement
Cognac 2012. Ce qui n’exclue pas des extrêmes à 4 ou 12 de pur. Des situations minoritaires.

A 9 de pur ha, peut-on parler d’une mauvaise année ? Objectivement non. Une petite récolte se rapprocherait davantage des 6 ou 7 de pur ha. Malgré les conditions difficiles de l’année, l’essentiel aura donc été préservé. Mais les viticulteurs se sont fait peur. « Beaucoup de gens ont pris une claque » confirme un homme de terrain. « De nombreux viticulteurs sont en train de remettre en question leur façon de travailler. La récolte 2012 a servi d’électrochoc. » Le même estime que « finalement, il y a une justice. Ceux qui ont travaillé dans leurs vignes obtiennent des rendements corrects. Ceux qui ont moins travaillé ou consacré moins de temps à leur vignoble sont sanctionnés ». Jugement un peu moins manichéen de la part d’un autre : « Ne nous moquons pas de certaines contre-performances. Des gens qui travaillent très bien habituellement ont pu se faire avoir par le mildiou ou d’autres attaques. Ils l’ont payé cash. » Cela dit, tout le monde s’accorde sur un point : « il va falloir retourner dans les vignes ». Et le retard de productivité ne se résorbera pas de si tôt. « Avant de produire 12 ou 13 de pur à l’ha, il faudra du temps. »

Ce contexte n’est évidemment pas propice à faire retomber la pression de marché. Pas plus que l’annonce de prix à la hausse sur les vins et eaux-de-vie nouvelles (voir articles plus loin). Mais on ne va pas se plaindre « que la mariée est trop belle ». Il suffit de se rappeler les années de vaches maigres, pas si lointaines, où les prix affichaient un encéphalogramme plat ou presque. D’ailleurs, chacun en convient. La notion de rattrapage est centrale pour expliquer la progression des prix 2012. Certains y ajoutent un autre élément : celui de la nécessaire couverture des coûts de production. Face à une récolte déficitaire, ce que les volumes n’ont pu apporter, il a bien fallu que les prix le compensent.

Reste que sur le marché contractuel et plus encore sur le marché libre, des niveaux de prix suscitent quelques frayeurs. Certains évoquent des amalgames coupables – et donc rarement innocents – entre prix des eaux-de-vie nouvelles et prix des vins ; des négociants parfois « pompiers-pyromanes » ; et, plus généralement, un environnement de marché où, à tout instant, « les prix peuvent partir en vrille ». Le principe est toujours le même : trois camions et un opérateur font le buzz. L’information, reprise en boucle, se trouve démultipliée.

Existe aussi des raisons plus structurelles à cette tension de marché. « Voilà deux ou trois ans que le commerce stocke 20 ou 30 % de plus que ses achats, non en fonction de ses besoins réels mais dans la perspective d’une progression de ses ventes futures. » Un schéma ultra classique à Cognac mais dangereux. « Un retournement de marché et ce serait la catastrophe » commente un observateur averti. « A long terme, la situation ne paraît pas tenable » confirme un autre, rejoint par un troisième : « il ne faudrait pas un fort ralentissement pour que tout se bloque. »

Cependant, la terre tourne et la vie va. A l’image du jeune officier Drogo, du roman de Dino Buzzati, on ne va pas attendre, l’arme au pied, le Grand Evénement, en l’occurrence l’invasion des Tartares… qui ne surviendra jamais. Non. Pour les viticulteurs, l’une des préoccupations actuelles, c’est de voir se creuser le différentiel entre les prix du marché libre – pour les vins et eaux-de-vie jeunes et plus encore pour les rassises – et les prix du marché contractuel. Jusqu’où les viticulteurs sont-ils prêts à aller au nom de l’engagement contractuel ?

 

 

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