Le suivi de la maturité

10 août 2011

La Rédaction

La réalisation d’un suivi régulier de l’évolution de la maturation des raisins sur une propriété est un acte œnologique à part entière. C’est la première démarche que doit réaliser un vinificateur pour appréhender le contenu qualitatif des raisins avant même de les récolter et de les traiter. En 2011, le contexte de sécheresse quasi-permanent depuis 6 mois a eu un impact fort sur le cycle végétatif de la vigne. Toutes les vignes ont souffert du déficit hydrique depuis quatre mois mais l’effet de la sécheresse ne s’extériorise pas visuellement avec la même intensité. Les conséquences de cette situation se font sentir au niveau de la charge de récolte qui est à la fois hétérogène en quantité et au niveau des stades de développement des raisins. Deux générations de grappes se côtoient sur les souches depuis la floraison, ce qui va avoir des conséquences pendant la phase de maturation. La véraison et l’évolution du contenu qualitatif des baies risquent de se dérouler de façon hétérogène, ce qui peut rendre complexe la détermination de la bonne date de vendange. Dans un tel contexte, réaliser un suivi de la maturation tenant compte des spécificités de chaque îlot de terroir pour optimiser la date de récolte sera un acte qualitatif à part entière.

Pendant la phase de maturation, les raisins subissent une transformation importe de nature et leur état de maturité à la récolte joue un rôle très important sur la qualité finale des productions. La période du début de la véraison au début des vendanges est capitale vis-à-vis du contenu qualitatif des baies. C’est durant ces quelques semaines que se fait ou se dégrade la qualité d’un millésime. Se donner les moyens à l’échelle d’une propriété de suivre l’évolution de la maturité est essentiel pour cueillir les raisins au bon moment, organiser judicieusement le chantier de récolte et le pilotage des vinifications.

Depuis quelques années, les messages d’information de tous les acteurs techniques autour de la connaissance du potentiel de qualité des raisins dans les semaines précédant les vendanges sont devenus fréquents : « Aller voir comment mûrissent vos raisins dans les parcelles pour être en mesure de mieux les vinifier ensuite ». En effet, entre le 20 juillet et le 5 septembre, la nature des raisins change profondément. Etre attentif au contenu qualitatif des baies dans les parcelles doit devenir un acte œnologique aussi important que la maîtrise de l’hygiène ou le pilotage des fermentations.

Avant de « lancer » les machines à vendanger dans les parcelles, il est capital de connaître la structure qualitative des raisins pour ensuite extraire ce potentiel de qualité dans les meilleures conditions.

La mise en place d’un suivi de l’évolution de la qualité des raisins dans les trois semaines précédant la récolte à l’échelle de chaque propriété doit devenir plus systématique. Les informations de suivi de maturité émanant de sondages régionaux (la Station Viticole du BNIC, les Chambres d’agriculture, l’IFV, les œnologues de terrain) constituent des sources d’informations intéressantes pour apprécier la tendance « maturité du millésime » à l’échelon régional, mais elles ne sont pas suffisantes pour donner « le top départ » du timing de récolte idéal de chaque propriété. Chaque viticulteur doit se tenir informé des tendances régionales d’évolution de la maturation pour justement aller voir comment mûrissent ses raisins dans les parcelles.

Comment se présente la maturation du millésime 2011 ?

Le millésime 2011 possède une précocité exceptionnelle de quinze jours à trois semaines quels que soient les cépages et cela induit que la phase de maturation va se dérouler pendant le mois d’août dans une période théoriquement de chaleur plus intense. Si l’effet de sécheresse se poursuit, la maturation sera perturbée. Dans le Blayais, le début véraison a commencé vers le 10 juillet sur les sauvignon et les merlot mais leur évolution semble se fait lentement en raison de la sécheresse persistante. En Charentes, les premières baies de chardonnay ont véré entre le 10 et le 14 juillet mais les autres cépages, merlot, colombard, n’ont pas encore évolué. L’épisode pluvieux du 15 au 21 juillet (variable de 35 à 60 mm selon les zones avec des orages de grêle) va accélérer le processus de maturation. Au niveau des ugni blancs, le stade fermeture de grappes est atteint depuis début juillet et dans les situations précoces, il paraît envisageable que la véraison intervienne entre le 20 et le 25 de ce mois. L’état des grappes très hétérogène d’une parcelle à l’autre mais aussi à quelques dizaines de mètres près est une source d’inquiétude vis-à-vis du déroulement de la maturation. Le climat d’août 2011 va « faire ou défaire » la qualité du millésime. S’il reste tempéré et normalement arrosé, le processus se passera plus normalement et un démarrage des vendanges entre le 5 et 10 septembre est probable. A l’inverse, si le mois d’août est très chaud, la maturation sera accélérée comme en 2003 ou en 2005

L’évolution du contenu des baies au cours de la maturation

Le raisin est un fruit pulpeux sensible qui réagit fortement aux aléas de la climatologie à partir de la véraison. Les excès d’eau, de chaleur, de fraîcheur ou, à l’inverse, la clémence et la régulation du climat interfère fortement sur le contenu qualitatif des baies.

Durant la maturation, l’augmentation de la teneur en sucres dans les baies s’accompagne d’autres transformations chimiques qui contribuent fortement à l’équilibre qualitatif final des productions. Au fur et à mesure que mûrissent les baies de raisins, elles deviennent aussi fragiles aux agressions extérieures et tout particulièrement aux attaques de botrytis. La maîtrise qualitative de la maturation englobe à la fois la concentration des baies en sucres, arômes, polyphénols, azotés, précurseurs de saveurs herbacées… et leur état sanitaire.

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Comme dans tous les fruits, les baies sont sensibles durant leur maturation à diverses altérations dont la plus préjudiciable est la pourriture grise. Le contenu des baies est naturellement protégé par leurs pellicules qui ne résistent pas toujours aux agressions du botrytis. Une baie altérée par le botrytis a perdu son contenu qualitatif et elle constitue un danger pour les fractions de raisin encore saines lors des vinifications

Les éléments permettant d’apprécier l’évolution de la maturation

Au cours du processus de maturation, l’évolution qualitative des raisins peut être observée et quantifiée en appréciant le degré potentiel, l’acidité et le pH, l’état sanitaire, les arômes et la matière colorante, la richesse azotée des moûts et la qualité gustative des baies.

Réaliser 3 ou 4 contrôles de maturation au niveau de sa propriété avant les vendanges représente un acte œnologique important pour ensuite conduire les vinifications.

Utiliser la fiche de suivi de maturation détachable présente dans le « Guide de la vinification 2011 ».

Le degré potentiel
Estimation une fois par semaine à partir du moût issu des prélèvements par des mesures avec des réfractomètres ou des densimètres.
L’évolution du TAV potentiel est directement liée au climat d’août et de septembre.

L’acidité totale, le pH, l’acide malique
L’évolution de l’acidité totale est un élément important, conférant aux vins une charpente qui joue un rôle dans leur aptitude à se conserver et sur le plan gustatif.
Les niveaux d’acidité trop élevés à la récolte traduisent la sous-maturité et à l’inverse les seuils trop bas attestent d’une sur-maturité. Trouver le juste équilibre en matière d’acidité est un critère essentiel pour déclencher la récolte.
Estimation une fois par semaine à partir du moût issu des prélèvements.
Mesures de l’acidité totale sur l’exploitation avec de petits équipements.
Les dosages du pH et de l’acide malique sont réalisés dans des laboratoires.

L’état sanitaire

Le développement du botrytis sur les raisins au cours de la maturation engendre toujours des déviations qualitatives majeures : pertes d’arômes, fragilité de la couleur, sensibilité des vins aux altérations bactériennes… La plupart des viticulteurs mobilisent des moyens au vignoble pour limiter l’apparition de la maladie, mais certaines années ce n’est pas suffisant.
Le botrytis et les pourritures associées quand elles se développent au cours de la maturation sont un danger majeur pour la qualité.
La réalisation d’observations visuelles hebdomadaires durant les contrôles de maturité est importante.
Comptages sur les échantillons de baies prélevées pour les contrôles de maturation et sur des souches identifiées.
Test laccase et dosage de l’acide gluconique réalisés sur les moûts.
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Les arômes et la structure phénolique

Cépages blancs et rouges destinés à l’élaboration de vins de bouche aspect visuel de la couleur des baies, des pédicelles et des rafles.

Plus la couleur des baies s’intensifie, plus leur maturation progresse :
– en blanc, on passe de la teinte verte au jaune parfois bien doré ;
– en rouge, la teinte des baies s’intensifie au cours des semaines.
La dégustation des baies :
– en blanc et en rouge, les saveurs herbacées diminuent progressivement et les saveurs de fruit s’intensifient ;
– en rouge et en blanc, la diminution progressive d’intensité des notes d’astringence liées aux pépins.
La matière colorante :
– mesures analytiques de la concentration en matière colorante et d’extractibilité (pépins et pellicules) réalisées dans des laboratoires d’œnologie ; une à deux analyses en fin de maturation.

La richesse azotée des moûts

Au dernier contrôle de maturité, le dosage de l’azote assimilable apporte une information intéressante sur le « réservoir » d’aliments pour les levures (uniquement sur les parcelles potentiellement sensibles aux situations de carence).
Les œnologues de terrain proposent des suivis de maturation complets intégrant un dosage de l’azote assimilable lors du dernier prélèvement.

 

 

 

 

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