Passer par la case « décideur »

27 février 2009

Le stage 6 mois où comment acquérir les compétences d’un décideur ! Dans l’idéal, c’est l’état d’esprit qui devrait animer cette période probatoire, étape obligée du parcours à l’installation aidée. Objet de polémique, souvent contesté par les candidats à l’installation tentés d’y voir une perte de temps, le stage 6 mois a dû rabattre sa voilure. Par un système de validation des expériences, sa durée moyenne réelle n’est plus que de trois ou quatre mois.
L’esprit du stage 6 mois

Le stage 6 mois le mal nommé. Non seulement il dure que très exceptionnellement 6 mois mais le terme de « stage » n’est pas vraiment adapté à son égard. Avec lui, exit le terrain scolaire, bonjour celui de l’expérience. Acquérir les compétences d’un décideur au contact d’un autre chef d’entreprise ; comprendre le pourquoi et le comment des choses ; se mettre en situation de chef d’exploitation ; copiloter une exploitation…voilà le véritable propos du « stage 6 mois ». Créé après 1971, le stage 6 mois engendra de nombreuses polémiques. Les candidats à l’installation y voyaient plus une source de gênes que de profits, des réfractaires allant jusqu’à dire « qu’ils préféraient s’installer sans aide plutôt que de faire le stage 6 mois ».

A qui s’adresse-t-il ?

Le stage 6 mois s’impose aux candidats à l’installation aidée nés après 1971. Ceux dont la date de naissance est antérieure à 1971 n’ont pas l’obligation de faire leur stage 6 mois, comme est admis pour eux un diplôme de niveau V, de type BEPA (Brevet d’étude professionnel agricole), contrairement aux autres qui doivent justifier d’au moins un BTA (Brevet de technicien agricole).

Sa durée

Depuis le 19 avril 2004, la réglementation permet une diminution de la durée du stage par validation des expériences. A l’extrême, un candidat à l’installation aidée peut être totalement dispensé de stage 6 mois. Qui en décide ? Dans un premier temps, cette tâche revient à l’animateur du stage 6 mois (Chambre d’agriculture en Charente-Maritime, Point info installation en Charente). Il va dégager « le parcours antérieur » du candidat afin de mesurer son éligibilité à une diminution de durée. Chaque cas est un cas unique. Il passe par le tamis d’une grille d’évaluation qui attribue des points en fonction des expériences acquises : formation initiale égale ou supérieure au BTSA, stage dans le cadre de l’acquisition de la capacité professionnelle en formation continue, expérience de salarié agricole, activité para-agricole, activité hors secteur agricole… En plus du recours à une grille de notes, l’animateur apprécie l’aptitude du candidat à décider, ses compétences de futur chef d’entreprise. Et formule un avis, soumis à une commission départementale « six mois » composée de représentants de l’Administration et de professionnels.

Qui décide ?

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Norbert Dulong, conseiller d’entreprise à la Chambre d’agriculture 17.

C’est la commission qui statue en dernier ressort. « Quand nos arguments sont honnêtes et crédibles, la commission a tendance à valider notre proposition mais elle peut aussi formuler un avis différent qui débouche sur une durée soit plus courte soit plus longue », note Norbert Dulong, conseiller d’entreprise à la Chambre d’agriculture 17, plus spécialement chargé du stage 6 mois. D’une façon générale, la tendance est au raccourcissement du temps de stage. En Charente-Maritime, sa durée moyenne est de trois-quatre mois. La Charente suit une pente similaire. « Le plus souvent, les gens viennent me voir dans l’optique de faire le moins de stage possible » expliquait la responsable du Point info installation. Ceci explique-t-il cela ? N. Dulong observe depuis quelques années un meilleur ressenti du stage 6 mois. « Les jeunes prennent conscience qu’il s’agit d’une opportunité pour s’ouvrir aux autres, sortir de son contexte habituel. » Et les moins réceptifs ne sont pas forcément ceux que l’on croit. « C’est paradoxal mais les jeunes fraîchement sortis de l’école traînent un peu des pieds pour faire leur stage 6 mois. »

Construire son stage

Une distance d’au moins cinquante kilomètres doit séparer le lieu de stage du domicile familial. On comprend aisément pourquoi. Parfois, cette distance s’élargit à plusieurs milliers de km, lorsque le stagiaire choisit de partir à l’étranger avec Sésame. Car si certaines obligations administratives encadrent le stage 6 mois, la démarche entend favoriser autonomie et volontarisme. La première rencontre entre le « référant 6 mois » et le candidat à l’installation a justement pour but de « débroussailler les intentions du jeune, cerner son projet ». A partir de là, un lieu et une activité vont être recherchés. Chaque département possède un fichier de maîtres de stage, un vivier de 90 ou 100 personnes assez bien réparties géographiquement et par nature d’activités : viticulture, élevage, diversification, bio… Si le jeune dit vouloir faire son stage dans son département d’origine, il va pouvoir puiser dans la liste d’exploitations, en fonction de l’orientation technico-économique choisie mais aussi la structure souhaitée : petite ou grande exploitation, sociétaire ou individuelle, avec diversification ou sans diversification… Pour les demandes hors département, les référants 6 mois disposent d’un fichier central d’adresses géré par l’APCA mais souvent, ils font appel à leur propre réseau de connaissances et interrogent directement le département concerné. Pour la troisième option – les stages à l’étranger – Sésame, répétons-le, constitue l’interlocuteur unique. Que ce soit dans son propre département ou dans un autre département, la même démarche s’impose au jeune : avec les noms et adresses qui lui sont fournis, c’est à lui de se débrouiller pour établir le contact avec son maître de stage. Une fois l’accord scellé entre les deux parties, l’aspect administratif prend le relais.

Sur place ou ailleurs ?

En Charente-Maritime, on estime que la moitié des stagiaires restent dans le département. Parmi ceux qui partent (l’autre moitié), 10 à 15 % vont à l’étranger. Les viticulteurs se taillent une réputation de globe-trotters. Des destinations comme la Floride, la Californie, la Nouvelle-Zélande, l’Afrique du Sud, voire le Japon sont très prisées. Certains stagiaires prennent l’option de diviser leur stage en deux, avec une partie découverte et une autre plus centrée sur leur futur domaine d’activité. Ainsi, en dehors de la durée, qui est imposée, le contenu du stage est à la carte.

Les conditions matérielles

Des règles existent mais, dans la réalité, tout est affaire de compromis. L’obligation de travailler par exemple. Elle est bien réelle, c’est la moindre des choses. Le stagiaire doit travailler mais durant combien d’heures ? S’applique à lui la durée légale des 35 heures hebdomadaires. Parfois cependant, le maître de stage a tendance à faire « comme pour lui » et le compteur tourne. Dilemme ! « En début de stage, je plante toujours le décor explique Norbert Dulong. J’insiste sur la notion de réciprocité. » Ainsi, un dépassement pour « coup de bourre » peut se justifier s’il est compensé par de la « récup. ». D’une façon générale, cela se passe plutôt bien. A côté de petits « frottements » toujours possibles, le summum du mauvais déroulement – la rupture de stage – reste l’exception. S’il y en a un par an et par département, c’est bien le bout du monde. Le stagiaire est rémunéré, faiblement mais il l’est tout de même. Le maître de stage doit lui verser une indemnité minimale de 58 heures de Smic par mois. Parallèlement, le stagiaire reçoit une bourse d’étude versée par le CNASEA, d’un montant de 228,67 € mensuels dans le cadre général (montant porté à 381,12 € par mois dans le cas d’un stage effectué à l’étranger ; ou si le stagiaire a eu une activité salariée pendant au moins 6 mois au cours des 12 mois précédant le début de son stage).

Maître exploitant

N’est pas « maître exploitant 6 mois » qui veut. Il faut en passer par une procédure d’agrément, délivrée par la commission départementale 6 mois pour une période de 5 ans, renouvelable. Le maître exploitant doit être installé depuis au moins 4 ans, tenir une comptabilité de gestion, ne pas afficher de déficit de main-d’œuvre criant, ni bien sûr être sous le coup d’une procédure de liquidation judiciaire. Par ailleurs, il s’engage à suivre une formation pédagogique spécifique. En contrepartie, il perçoit une indemnité de tutorat de 91,74 € par mois, en présence d’un stagiaire, cela va sans dire. Certains maîtres exploitants, de par leur nature d’exploitation, ne recevront qu’un ou deux stagiaires durant leurs 5 années d’agrément tandis que d’autres en accueilleront 6 ou 7, un chiffre très variable.

Validation du stage

Aucun formalisme n’est attaché la fin du stage. Notamment, il n’y a pas de rapport à rédiger car il ne s’agit pas d’une étape scolaire. En général cependant, l’équipe encadrante dresse un petit bilan, avant que la commission valide le stage. Une fois effectué, le stage ne présente pas de durée d’éligibilité. L’installation peut intervenir n’importe quand. Pourtant on l’aura compris ! L’intérêt consiste à ce que stage à l’installation et installation soient assez resserrés dans le temps.

Statistiques

Dans un département comme la Charente-Maritime – et l’on peut penser qu’une certaine similitude existe entre départements – les stagiaires 6 mois sont à 88 % des hommes et à 12 % des femmes. Leur niveau d’étude est à 70 % Bac pro et 30 % BTS et plus. Pour moitié, ils réalisent leurs stages dans le département d’origine. La Charente a validé 40 stages 6 mois en 2004, 55 en 2005, avec une répartition assez homogène entre les régions. Chaque année, la Charente-Maritime valide une cinquantaine de stages 6 mois.

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