Dynamisme à tous les étages à la Sica Cognac et chez Marnier-Lapostolle. Alors que le liquoriste vient d’investir 10 millions d’€ dans son projet industriel (dont la distillerie d’écorces d’oranges à Bourg-Charente), la Sica a fait évoluer son approvisionnement ainsi que les prix d’achat. Grand-Marnier manifeste le même appétit d’innovations sur les marchés.
Faut-il le préciser ! La salle de réception du château de Bourg-Charente était comble ce vendredi 15 février. Comme toujours pourrait-on dire. Mais peut-être encore plus que d’habitude. Pour plusieurs raisons. Les adhérents de la Sica étaient invités à découvrir en avant-première la nouvelle distillerie d’écorces d’oranges installée en contrebas du site (inauguration officielle le 18 avril 2013). Patrick Raguenaud, directeur production de Grand Marnier, a fait office de guide, lui qui accompagne au plan technique tout ce programme d’investissements. Une autre raison plaidait pour cette forte mobilisation : le départ à la retraite de Nicole Chaillat, le « point fixe » et ô combien chaleureux, attentif et efficace de la Sica depuis 30 ans. Tous les adhérents, jeunes et moins jeunes, ont tenu à venir lui témoigner leur amitié.
Dans une première partie de réunion dense et documentée, Jean-Bernard de Larquier a brossé l’évolution de la Sica et, au-delà, de la région. La Sica tout d’abord. Sur l’exercice 2011-2012, clos au 31 août, la Sica aura rentré 5 114 hl AP, ce qui en fait le volume le plus élevé de ces dernières années. C’est la conséquence d’une augmentation moyenne de 5 % l’an depuis deux ans déjà. Et ce n’est pas fini. Au cours du dernier exerce, le conseil d’administration de la Sica a décidé d’élargir les parts proposées aux sociétaires mais aussi de s’ouvrir à de nouveaux adhérents.
L’idée ! « Rester dans le mouv. », trouver une réponse à la concentration des exploitations, apporter du sang neuf à la structure.
Evolution du sociétariat
Cette évolution du sociétariat va se traduire par 1 300 hl AP supplémentaires. Dès l’an prochain, les apports devraient représenter un peu plus de 6 000 hl AP pour atteindre 6 400 hl AP en 2014. D’ores et déjà, 10 nouveaux livreurs ont rejoint les rangs de la coopérative, ce qui porte à 78 le nombre des viticulteurs-bouilleurs de cru adhérents de la Sica Cognac. J.-B. de Larquier s’est réjoui de cette vitalité. « Une politique contractuelle ne se décrète pas. Elle se pratique, elle se vit, elle s’assume, avec le grand avantage d’offrir une visibilité à long terme. Ici, nous savons ce qu’une politique contractuelle durable veut dire. »
Endossant son costume de responsable professionnel – il est vice-président du BNIC – le viticulteur a décrit la tension de marché à l’œuvre en ce début d’année 2013. Lui, le représentant viticole, a procédé à une sorte d’autocritique collective : « Décider d’un rendement Cognac de 8,12 hl AP/ha en 2010 fut une grosse erreur dont nous payons les conséquences aujourd’hui. » Pour l’avenir du Cognac, il a souligné la nécessité de « mettre les bouchées doubles » en matière de replantation. « Sur une exploitation de 25 ha, il faudrait renouveler 1 ha 48 par an. » Il n’en doute pas : « La productivité du vignoble représente la condition indispensable pour investir sereinement dans le marché. » En ce sens, Jean-Bernard de Larquier donne quitus au négoce. De même, il ne s’est pas dérobé à la question des plantations nouvelles. S’il accepte le principe d’un accroissement des surfaces, il l’assortit de conditionnalités. « Cela ne pourra se faire sans aborder les solutions en cas de crise. C’est la seule façon de réfléchir sérieusement à l’évolution du vignoble. » Il a cité deux pistes de travail : la mise en place d’un rendement plancher, à la charge du négoce, et l’instauration d’une clause contractuelle interprofessionnelle qui intéresserait les TPE et les PME du Cognac « afin que se nouent des relations durables ».
« Proches du prix des leaders »
Dans son intervention, le directeur production de Marnier-Lapostolle, Patrick Raguenaud, s’est longuement attardé sur les prix d’achat. « Nous souhaitons être encore plus proches du niveau de prix des leaders. C’est pourquoi nous allons poursuivre notre politique des “coups de pouce”. C’est un sujet sur lequel nous échangeons régulièrement avec votre conseil d’administration. » Sur les eaux-de-vie rassises, la revalorisation moyenne effectuée sur la campagne s’est élevée à 7 % (compte 0) et 13 % sur le compte 1. Sur les eaux-de-vie jeunes, deux leaders régionaux ont annoncé très tôt une hausse de 9-10 %. Effet d’entraînement assuré. Sur le compte 00, Marnier-Lapostolle a augmenté ses prix de 10,5 % en Grande-Champagne et de 12,5 % en Bons Bois, avec une volonté nette de réduire l’écart entre les crus, en valeur constante. « C’est un message fort que nous adressons à la viticulture. » L’autre message fort, comme l’a répété P. Raguenaud, « c’est de pratiquer une politique de rattrapage des prix. Nous avons bien compris ce que nous ont dit votre conseil et votre président. »
Un débat, sans tarder
Le directeur production de la société Marnier-Lapostolle est intervenu sur un sujet plus transversal : l’approvisionnement du marché du Cognac. « Faut-il planter des vignes pour satisfaire la croissance de demain ? » s’est-il interrogé sans faux-semblants. Adepte du « parler vrai », il s’est dit partisan qu’un débat s’engage sur le sujet et même assez rapidement. « Le négoce de Cognac n’échappe pas à la règle. Il a besoin de visibilité. » En agronome qu’il est, il pense que le potentiel du vignoble charentais ne va pas croître, bien au contraire. En cause la baisse des intrants, une inflexion de la courbe des rendements, observés un peu partout dans le monde. « Si le Cognac ne répond pas à ses besoins, d’autres catégories le feront à sa place. » Bien sûr, « un tel programme ne s’improvise pas et il n’est pas question de reproduire les erreurs du passé. Libérer des surfaces d’un seul coup serait dangereux. On ne peut y aller qu’étape par étapes, en réalisant à chaque fois un bilan. » « Et naturellement, rajoute le manager, il n’y a que la confiance entre les deux filières qui pourra conduire à un tel accord. »
La Sica a fêté l’an dernier son 40e anniversaire. A cette occasion, tous les adhérents furent invités par la famille Marnier-Lapostolle à visiter le vignoble de Sancerre où elle possède un domaine. Patrick Raguenaud a formulé le vœu « que les 40 prochaines années se déroulent aussi bien que celles qui viennent de s’écouler ».
Grand-Marnier Performances 2012
l Etats-Unis : + 4,3 % (+ 2,5 % en 2011).
l Asie : + 21 % (+ 32 % en Chine, + 14 % autres pays).
l Croissance globale de la marque : + 2,5 %.
l Répartition des ventes par zones (en vol.) : Amérique du Nord 50 %, Europe 30 %, Asie 20 %.
Marnier-Lapostolle – Le moteur de l’innovation
Etre « trendy », innover… C’est devenu un leitmotiv, une seconde peau chez Grand-
Marnier qui y voit un bon moyen de maintenir l’attention des distributeurs, des consommateurs.
Penser que la marque « iconique » – bouteille satinée, cordon rouge – nourrit une quelconque ressemblance avec une vieille dame « empoussiérée » serait une grossière erreur. Sur son marché phare, les Etats-Unis (un peu plus de la moitié de ses ventes en volume), Grand-Marnier dégage une image tendance, dynamique, très liée à son mode de consommation principal, le cocktail. Pourtant, la marque passe à la vitesse supérieure. On connaissait déjà les cuvées (centenaire, cent-cinquantenaire, cuvée 1888) et ses éditions limitées. Aujourd’hui, l’innovation devient son moteur stratégique. Explications de Tom Van Lambaart, directeur général adjoint de la société : « La stratégie d’une marque ne change pas tout le temps. Elle repose sur deux grands axes : le bon réseau de distribution – nous estimons l’avoir aujourd’hui (1) – et la demande consommateur. L’innovation représente un bon moyen de maintenir l’attention des distributeurs, des consommateurs. »
Tous les ans, la société Marnier-Lapostolle va sortir un nouveau produit. Premier en date, un Grand-Marnier à la cerise. Patrick Raguenaud et son équipe (Adeline Loizeau, Joseph Antkowiak) ont été mobilisés sur le sujet. « Nous gardons la base Grand-Marnier – Orange, Cognac – mais nous travaillons sur des assemblages inédits. Pour la cerise, nous avons réussi à trouver une cerise rouge, profonde, très goûteuse. Pour 2013-2014, le produit est déjà prêt et nous planchons sur celui de 2015-2016. C’est un concept très intéressant » affirme P. Raguenaud. Le prix consommateur s’élève à 42 $ (2 $ au-dessus du Cordon rouge). Le produit est destiné à séduire une nouvelle frange de consommateurs.
Avec Grand-Marnier Titanium, on passe sans conteste à la dimension supérieure. Le produit a été pensé, voulu par Alexandra Marnier-Lapostolle, fille de Jacques Marnier-Lapostolle et présidente de la branche US de la marque. Même si la bouteille « iconique » a été conservée, la boîte métallique, un peu fluo, très tendance, tranche avec l’univers habituel. Et que dire de son contenu ! Certes Orange et Cognac demeurent mais on y a ajouté une touche d’épice et des agrumes dont le calamansi, un petit citron vert au goût oscillant entre citron et clémentine. Surtout, l’on n’y trouve pas une once de sucre. Ce n’est donc plus une liqueur mais un spiritueux. On l’accrédite « d’un côté un peu frais, une belle longueur en bouche ». Sa cible est à l’évidence masculine. On le trouve aux Etats-Unis à 48 $, prix de vente consommateur. A noter que Navane, la liqueur à la vanille, « qui n’était pas une franche réussite », a été abandonnée. « Nous en avons tiré les enseignements » affirme la marque.
« Quintessence, l’expression ultime du savoir-faire de la maison Marnier et du produit lui-même ». C’est ainsi qu’est décrite cette magnifique liqueur, à base de très vieilles eaux-de-vie de Grande Champagne et d’oranges. Tiré à 2 400 exemplaires numérotés, la cuvée s’est vendue 800 $ l’unité, moitié aux Etats-Unis, moitié en Asie.
* Distributeurs Grand-Marnier : Diageo, Moët-Hennessy, Pernod-Ricard.
0 commentaires