Rénover la technologie des pressoirs à plateaux à un coût acceptable

4 janvier 2009

pressoir_a_plateaux.jpg La remise à niveau de la technologie de pressurage des pressoirs horizontaux pour un coût abordable est désormais possible grâce aux équipements que propose la société SETIV. Cette petite société a mis au point un automate basse pression et un système de drains central qui permettent de raisonner différemment la conduite de l’extraction des jus. Ces équipements permettent d’extraire les jus à des niveaux de pression équivalents à ceux des pneumatiques et dans des délais généralement comparables. Il est donc désormais possible de redonner « une seconde jeunesse » aux bons pressoirs à plateaux qui sont encore utilisés dans de nombreuses exploitations.

 

L’amélioration qualitative des techniques de vinification pour les vins de distillation est devenue une priorité depuis maintenant quinze ans et, dans un premier temps, les efforts se sont portés au niveau de la maîtrise de l’hygiène vinaire et de la conduite de la chaîne d’extraction des jus. L’agencement des chais doit être abordé d’une manière globale en essayant de cerner les points forts et les points faibles de chaque installation. D’une façon générale, les chais de vinification étaient assez sous-équipés en Charentes mais, depuis dix ans, les choses ont considérablement changé. Les viticulteurs ont acquis de la technicité pour vinifier leurs vins en investissant dans la formation et en réalisant des investissements rationnels. Le contexte économique peu porteur de la région oblige néanmoins les viticulteurs à avoir une approche « raisonnée et raisonnable » dans leurs approches d’agencement des chais. Sur le plan strictement technique, les œnologues et tous les responsables techniques des organismes techniques et des maisons de négoce pensent de façon unanime que l’adaptation du débit de la chaîne de traitement de la vendange aux cadences de récolte, les conditions de stockage des moûts et des vins (en matière d’hygiène) et la maîtrise de la cinétique fermentaire (sur les plans microbiologique et thermique) sont des éléments prioritaires.

Le poste de pressurage a toujours nécessité des investissements importants

L’aménagement des ateliers de pressurage a toujours constitué un poste d’investissement conséquent en Charentes, en raison des tonnages/hectare élevés de vendange à traiter et de la recherche de niveaux d’assèchement forts. La diminution du niveau de productivité/ha du vignoble ne concernait jusqu’en 1999 que les exploitations qui avaient privilégié des raisonnements économiques, mais avec l’introduction de la nouvelle réglementation régionale le volume de vendange à traiter tend à baisser. Le recours à des prestataires de services pour réaliser les travaux de vendange et de pressurage est une solution de plus en plus controversée par le fait que, désormais, il faut souvent décanter les moûts aussitôt leur extraction et gérer le calendrier de récolte en tenant compte d’exigences de maturité de plus en plus précises. En effet, un certain nombre d’observations récentes laissent à penser que l’optimum de maturité pour des raisins d’Ugni blanc destinés à l’élaboration d’eaux-de-vie aromatiques se situe à la fin de la phase de maturation physiologique, ce qui correspond à un bon équilibre sucres/acidité (attention aux niveaux d’acidité trop bas dans les moûts et les vins). L’introduction des limitations de rendement/ha depuis quelques années a eu aussi des effets pervers sur les dates de récolte qui, sur certaines exploitations, sont de plus en plus tardives. Pour bon nombre de viticulteurs, le fait de retarder leur date de vendange pour rentrer en chais le maximum d’alcool pur dans 110 ou 120 hl/ha est une décision de bonne gestion qui supplante la logique qualitative « Cognac » .

Réactualiser la technologie des pressoirs horizontaux pour un coût acceptable

La maîtrise des coûts au niveau des investissements de chais est donc un sujet de pleine actualité en Charentes et l’initiative de la société SETIV (1) dans l’Aude, qui propose une démarche de réaménagement du fonctionnement des pressoirs horizontaux, répond à cette attente. MM. Serge Martinez et François Lavé ont créé cette entreprise en 1996 avec comme objectif prioritaire de développer une série d’équipements abordables pour améliorer les performances des pressoirs horizontaux sur les plans qualitatif et technologique. Il existe un parc important de pressoirs à plateaux dans les exploitations et au niveau des distributeurs de matériel vinicole dont l’état global n’est peut-être plus en phase avec les attentes qualitatives récentes. La société SETIV commercialise une série d’équipements qui sont en mesure de réactualiser la conduite de l’extraction des jus en proposant à la fois une nouvelle programmation à basse pression et le montage de drains de collecte des jus au centre de la cage. La programmation habituelle des pressoirs est remplacée par un automate basse pression (fabriqué avec des composants électroniques utilisés dans l’industrie) et les ensembles de rebêchage (cercles et chaînes) à l’intérieur des cages sont remplacés (ou fortement réduits) par le système de drains centraux Sétinox. Ces deux systèmes, d’un coût abordable (de l’ordre de 4 000 E HT), permettent de conduire le pressurage à des niveaux de pressions pratiquement identiques à ceux des pneumatiques, ce qui est intéressant sur le plan qualitatif et pour la longévité mécanique des pressoirs. Les points d’usure traditionnels des pressoirs horizontaux que sont la vis, les plateaux et la cage seront soumis à des efforts moindres et la durée de vie des matériels s’en trouvera nettement améliorée. Les niveaux de pressions maximum mis en œuvre pour assurer l’extraction des jus se situent entre 1 et 3 bars, et le nombre de rebêchages est considérablement réduit.

Des niveaux de pression maximum de 3 bars avec l’automate basse pression

automate_basse_pression.jpgL’automate basse pression monté seul sur un pressoir permet de conduire l’extraction des jus à un niveau de pression inférieur à 1 bar pendant la première heure, et en fin de cycle les niveaux de pression ne dépassent pas 3 bars alors qu’avec la programmation traditionnelle ils atteignent 6 bars et parfois 8 à 9 bars. Il faut savoir que sur des pressoirs horizontaux, plus le diamètre de la cage est important, plus les niveaux de pression sont élevés pour extraire les jus durant les fins de cycles de pressurage. L’automate SETIV permet de travailler dans la première heure de pressurage à des paliers de pression qui se situent entre 300 et 750 g, et la montée en pression lente laisse le temps aux jus libres de traverser le gâteau de marc et évite les phénomènes de blocage. Cela permet de limiter le nombre de rebêchages (deux complets et un partiel sont suffisants) pour obtenir des niveaux d’assèchement corrects au bout de 1 h 45 à 2 heures de cycle sur de la vendange blanche. A l’issue du pressurage, les marcs ont encore un aspect vert (comparable à celui des pressoirs pneumatiques) et ils ne sont pas aussi oxydés qu’après 4 ou 5 rebêchages sur les programmations traditionnelles. Le constructeur estime que le niveau d’assèchement sur de la vendange blanche après un cycle de moins de 2 heures est équivalent à celui d’une programmation traditionnel à l’issue de la P4. L’automate est livré avec neuf cycles de pressurage programmés et son utilisation très simple permet aux utilisateurs d’intervenir facilement sur le système pour modifier un cycle ou carrément réaliser leur propre programmation. Le graphique ci-dessous atteste parfaitement des différences de fonctionnement entre une programmation traditionnelle de pressoirs Vaslin et l’automate basse pression. L’installation d’un automate basse pression peut être envisagée sur tous les modèles de pressoirs à plateaux, les cages bois à programmateurs, les cages fibre de verre à programmateur ou électronique, les modèles à vis fixe et à vis tournante et même sur les CEPS. Le coût de l’installation de l’automate se situe autour de 2 750 E HT (environ 18 000 F HT).

L’association draineur central et automate ouvre plus de possibilités

Le montage au centre de la cage du draineur SETIV permet d’optimiser le fonctionnement de l’automate en créant un écoulement permanent des jus dans la zone où s’exercent les plus fortes pressions. Le constructeur considère que l’utilisation du draineur Sétinox permet de faire fonctionner l’automate à des niveaux de pression encore plus bas (de l’ordre de 1 bar maximum pour de la vendange rouge cuvée et de 2 bars maximum pour de la vendange blanche), et, selon ses observations, 85 % des jus peuvent être extraits dans les 35 premières minutes de pressurage. Les draineurs se présentent sous la forme de plusieurs tubes inox perforés de 100 mm de diamètre qui traversent la cage dans sa partie centrale. Une surface d’égouttage supplémentaire de 1,10 m2 est créée au centre de la cage et les jus s’écoulent sans contrainte pendant toute la durée du pressurage. M. Martinez nous expliquait que l’extraction d’un volume important de jus dans la partie centrale d’une cage de pressoirs horizontal durant la première demi-heure de travail est capitale pour le déroulement ultérieur du cycle de pressurage. Plus la fraction de jus extraite sera importante, plus il sera facile par la suite d’obtenir un niveau d’assèchement satisfaisant dans des délais corrects (1 h 30 à 2 heures) et à des niveaux de pression réduits. L’utilisation conjointe du draineur Sétinox et de l’automate crée les conditions favorables à des montées en pression graduelles de 100 g en limitant les phénomènes de blocage des jus dans la cage. Les jus libérés sous de faibles pressions ont le temps de migrer vers les éléments de drainage et s’écoulent beaucoup plus facilement durant toute la durée du cycle de pressurage. Au bout d’une heure de fonctionnement, le niveau de pression maximum de 1 bar est atteint et le seul rebêchage complet intervient. Par la suite, les cycles se succèdent à des niveaux de pression identiques (compris entre 650 g et 1 bar) et un seul rebêchage partiel est réalisé pour émietter le gâteau de marc. La succession de cycles à des niveaux de pression équivalents est préférable à des montées en pression successives qui ont tendance à « bloquer » les jus dans des phénomènes de poches au centre des cages. La vitesse de rotation de la cage est lente pendant toutes les phases de montées en pression et les rebêchages sont effectués en grande vitesse (en petite vitesse seulement sur les modèles à vis tournante). Il est possible de laisser deux cercles de rebêchage (ceux situés les plus proches des plateaux) pour optimiser les conditions de rebêchage, mais les constructeurs proposent de carrément les enlever. L’ensemble automate basse pression plus draineur Sétinox coûte environ 4 000 E HT (26 000 F HT) hors frais d’installation.

Une centaine d’automates basse pression en service en France

Actuellement, plus de 100 automates basse pression fonctionnent en France dans plusieurs régions viticoles (le Languedoc-Roussillon, les Côtes-du-Rhône, le Chablis, le Sud-Ouest) et sur des natures de vendange très différentes. L’utilisation conjointe de l’automate et du draineur Sétinox a permis de concevoir des programmations très souples susceptibles de pouvoir traiter toutes natures de vendanges, des raisins entiers vendangés à la main, de la vendange fraîche égrappée ou pas et de la vendange cuvée.
draineur.jpg

La présentation de ce nouveau dispositif aux vendanges dernières semble avoir séduit les vignerons puisqu’une cinquantaine d’appareils sont à ce jour vendus. Il est indéniable que le fait de pouvoir utiliser des pressoirs à plateaux à des niveaux de pression équivalents à ceux des pneumatiques constitue une mise à niveau technologique qui ne peut pas laisser indifférent. Par ailleurs, le fonctionnement quasi permanent des pressoirs à petite vitesse et sans efforts va contribuer à améliorer leur longévité mécanique. L’usure de la vis, des écrous de plateaux et les déformations des cages seront très limitées. En Charentes, trois viticulteurs ont fait équiper des pressoirs de l’automate basse pression et à la demande de la société Juttaud, la Station viticole du BNIC a réalisé au cours des vendanges 2001 un suivi technique de ces matériels.

Le témoignage de trois utilisateurs en Charentes au cours des vendanges 2001

M. Alain Papineau, de La Cotinière dans l’île d’Oléron, rencontrait depuis plusieurs années des difficultés pour presser des vendanges grasses de Sémillon, de Colombard, de Montils et même d’Ugni blanc très mûr en fin de vendange. Il était confronté à des problèmes de blocage des jus dans la cage malgré une conduite des premiers cycles en petite vitesse. Le principe de l’automate basse pression l’a séduit et il l’a fait installer sur un pressoir 32 hl et ses propos témoignent de sa satisfaction : « Le pressurage de cépages comme le Colombard, le Montils et surtout le Sémillon s’est déroulé sans difficulté et j’ai atteint un niveau d’assèchement équivalent à celui d’un pressoir pneumatique. La durée du cycle de pressurage a été réduite de 20 à 30 minutes et les jus sont beaucoup moins bourbeux. Une fois le pressurage terminé, les marcs ont un aspect vert peu oxydé et les graines les moins mûres ne sont pas éclatées. »

M. Claude Bargier; de Blanzac-Porcheresse, utilise lui aussi l’automate basse pression depuis les vendanges 2001 sur deux pressoirs, un 32 hl et un 22 hl. Ce sont les difficultés à presser des raisins d’Ugni blanc de plus en plus mûrs au fil des années qui l’ont amené à s’intéresser à ce matériel : « Depuis que j’ai introduit l’enherbement sur le vignoble, les titres alcoométriques moyens des raisins au moment de la récolte ont augmenté et le pressurage des Ugni blanc est devenu plus difficile. L’année dernière, je n’ai rencontré aucune difficulté et l’automate m’a permis de gérer beaucoup plus facilement la conduite de mes cycles de pressurage. L’assèchement est du même niveau qu’auparavant et en présence de vendange grasse, le pressoir extrait les jus sans forcer en ne réalisant qu’un seul rebêchage complet et un partiel. Les durées de pressurage varient entre 1 h 30 et 1 h 45 sur de la vendange facile et il faut 30 minutes de plus sur des raisins difficiles. Visuellement, les jus me paraissaient moins bourbeux et le taux de lies nettement inférieur dans les cuves me l’a confirmé, mais pour l’instant je n’ai tout de même qu’une seule année de recul. »

M. Gérard Foliot, à Saint-Fort-sur-Gironde, exploite un vignoble de surface importante et son chai est équipé de deux pressoirs, un 66 hl à vis tournante et un 40 Cognac. Il a fait équiper le 40 Cognac de l’automate basse pression car la conception de la cage de ce matériel rendait la conduite du pressurage plus difficile à maîtriser par rapport au modèle 66 hl VT. Ce viticulteur porte un regard technico-économique plein de bon sens sur l’utilisation de ce matériel : « Le plus de cet appareil réside dans le principe même de l’automate dont l’utilisation et les réglages des cycles de pressurage sont faciles. Le pressurage se déroule à des niveaux de pression plus faibles et le drainage des jus à l’intérieur de la cage s’effectue plus facilement qu’auparavant. Je n’ai pas constaté de gain de temps en matière de durée totale de pressurage et l’automate permet au 40 Cognac de fonctionner dans des conditions comparables au modèle 66 hl VT qui est un bon matériel. Sur le plan qualitatif, cela me semble intéressant car le fait de presser à des niveaux de pression plus bas ne peut être que bon pour la qualité. Néanmoins, les résultats des essais du BNIC apporteront sans aucun doute des éléments plus concrets. Globalement, l’installation de l’automate basse pression me paraît être un investissement raisonnable et rentable qui va dans le sens de la qualité et de la maîtrise des coûts de production. »

graphique_comparant_pressions.jpg

Les premiers résultats vont dans le sens de la qualité

M. Bernard Galy, le responsable des expérimentations œnologiques au niveau de la Station viticole du BNIC, a réalisé un suivi technique du fonctionnement de l’automate basse pression au cours des vendanges 2001 chez les trois viticulteurs cités précédemment. Le dispositif d’étude prévoyait des prélèvements d’échantillons de moûts et de vin après la fermentation alcoolique et juste avant leur distillation pour réaliser une comparaison sur le plan analytique avec le référentiel régional d’observation de la qualité. Sur l’un des trois sites d’expérimentation, la démarche a été poussée jusqu’à une distillation pilote, une caractérisation analytique des eaux-de-vie nouvelles et une dégustation comparative. Bien que pour l’instant tous les résultats ne soient pas encore disponibles, les premières conclusions semblent encourageantes. D’une manière générale, M. B. Galy considère que le fait d’extraire des jus à des pressions plus faibles et en réalisant moins de rebêchages sont des éléments qui vont dans le sens de la qualité. L’enregistrement des paramètres des programmations d’un cycle de pressurage par les techniciens de la Station viticole du BNIC sur une vendange d’Ugni blanc confirme bien que les pressions mises en œuvre au cours d’un cycle de pressurage sont nettement inférieures.

dosage_du_tdn.jpgLe graphique ci-contre permet de se rendre compte qu’une fraction très importante de jus est extraite à des pressions inférieures à 1 bar et avant de réaliser le premier rebêchage, c’est-à-dire au bout de 1 h 10 de pressurage. La durée de cycle de 2 h 20 sur le pressoir 40 Cognac a permis d’obtenir un assèchement des marcs suffisant. Les premiers résultats analytiques obtenus concernent les teneurs en TDN dans les distillats des microdistillations. Le TDN est un des marqueurs de la trituration de la vendange au cours des opérations de traitement de la vendange. Le graphique ci-contre permet de se rendre compte que l’utilisation de l’automate permet de réduire légèrement les teneurs en TDN sur deux sites, et sur le troisième elle reste équivalente à la référence qui est un pressoir d’un modèle différent et donc difficilement comparable.

Par ailleurs, les teneurs en TDN des pressoirs équipés d’automates basse pression sont tout à fait cohérentes par rapport aux résultats obtenus dans le cadre de l’Observatoire régional de la qualité qui regroupe à la fois des installations avec des pressoirs horizontaux et des pressoirs pneumatiques.

Bibliographie :

– M. Bernard Galy, Station viticole du BNIC.
– Société SETIV.
– Société Juttaud.

 

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