La réglementation aux jumelles et à la loupe

2 octobre 2009

En terme de réglementation viticole pure, 2009-2010 s’inscrit dans la parfaite continuité de la campagne précédente. A une surface correspond un débouché, pris parmi les quatre destinations suivantes : Cognac, Pineau, Vins de pays, Autres débouchés. A ce titre, 2009 n’introduit aucune nouveauté. Par contre, à des niveaux différents, le contexte économique, les aléas climatiques et la réforme de l’INAO se chargent d’apporter leurs lots de changements, à la marge et parfois tatillons. L’année 2009 signe la grande arrivée de la réserve climatique, qui profite à la fois d’espérances de récolte plus consistante et d’un rendement Cognac revu à la baisse ; la grêle du 11 mai se traduit par tout un arsenal autour de l’achat de vendanges fraîches et de moûts ; enfin, la réforme de l’INAO déboule dans le paysage Cognac, avec son cortège de nouvelles obligations déclaratives. Tout cela se traduit par une somme de détails qu’il va falloir intégrer, maintenant et dans les mois qui viennent. Après un tour d’horizon un peu général, « aux jumelles » la présentation s’appesantit sur quelques points, « à la loupe ». La Journée des Courtiers le 14 septembre dernier et la réunion des Vendanges du SGV Cognac le 18 septembre ont permis de faire le point sur les dernières évolutions.

 

 

Pas de volume sans surface en face

Comme l’an dernier, la récolte se raisonne par destination. C’est le sens de la réforme de l’affectation, reprise par la nouvelle déclaration de récolte, applicable depuis 2008. Sont prévus quatre cadres bien distincts : Cognac, Pineau, Vins de pays, Autres débouchés. En clair, il n’y a pas de volume sans surfaces en face. Pour être plus précis, si l’on veut faire des jus de raisin ou des moûts de vinification, il faudra y consacrer les ha « qui vont bien ». Les jus de raisin pris sur les excédents appartiennent à une époque révolue. A oublier. Pour des raisons extérieures à la région, l’affectation se fera comme l’an dernier à la déclaration de récolte. Dans la réalité physique des choses, il va sans dire que l’affectation se joue en grande partie durant les vendanges. Plus que jamais, la réactivité est de mise durant cette période cruciale.

Les rendements

Sur la campagne 2009-2010 en cours, le rendement maximum annuel du Cognac est fixé à 8,12 hl AP/ha (rendement validé par l’ADG Cognac et transmis à l’INAO). Ce volume ha représente un sérieux rétropédalage vis-à-vis de la précédente récolte, où il plafonnait à 10,85 hl AP/ha, sans grand impact d’ailleurs, par manque de matière première.

Le rendement du produit fini Pineau s’élève à 37,7 hl vol./ha. Le rendement moût Pineau demeure sans changement à 72 hl vol./ha mais la quantité mise en réserve progresse d’un iota. Elle passe de 12 à 14 hl vol./ha. Cette quantité de 14 hl vol./ha fait l’objet d’une mesure de blocage temporaire, par l’application d’un mécanisme de régulation de marché piloté par le Comité du Pineau.

Les rendements Vins de pays charentais ne bougent pas : sur les blancs, 80 hl vol./ha + 20 hl vol. pour les bourbes, lies et non-vin ; sur les rouges et rosés, 80 hl vol./ha + 15 hl supplémentaires pour les mêmes bourbes, lies et non-vin. Le TAV minimum reste de 9,5 % vol., avec un degré maximum acquis de 11 % vol.

Un changement à signaler toutefois sur le rendement des Vins de pays de l’Atlantique. Il atteint cette année 120 hl vol./ha de vins clairs + 10 hl de bourbes et lies (sans non-vin), à un degré maximum acquis de 10,5 % vol.

Comme chacun sait, les « Autres débouchés » (vins sans IG, moûts de vinif., moûts pour jus de raisin…) ne connaissent pas de limites de rendement, sauf à respecter les « limites physiologiques de la vigne ». Il semblerait qu’un consensus s’établisse pour dire qu’au-delà de 300 hl vol./ha, « c’est peut-être pousser le bouchon un peu loin ». A noter que la notion de « vignes autres » pour les exploitations élaborant des Vins de pays n’existe plus.

Les excédents à la destruction

Sur les ha Cognac comme Pineau, les excédents ont vocation à être livrés à la destruction hors consommation humaine (distillation à plus de 92 % vol.), sans rémunération, auprès d’une distillerie agréée. C’est pourquoi, selon la situation, il peut être judicieux de penser réserver quelques surfaces aux autres débouchés et/ou pratiquer un peu de réserve climatique.

Surfaces : compter les feuilles de vigne

Normalement, une vigne est considérée en production – et participe donc au rendement – lorsqu’elle atteint sa troisième feuille (pour la campagne 2009-2010, vigne plantée avant le 31 juillet 2007). C’est le cas pour les vignes moûts Pineau et les vignes consacrées aux Vins de pays charentais ou d’Atlantique. Cependant, cette règle souffre deux exceptions : une exception permanente pour les vignes supportant les « Autres débouchés » (vin sans IG, jus de raisins, moûts de vinif, moûts vins vinés…), réputées entrer en production à partir de la deuxième feuille et une exception temporaire pour les vignes Cognac. Ainsi, cette année, toutes les vignes vins blancs Cognac plantées avant le 31 juillet 2008 (vignes en 2e feuille) auront le droit de produire du Cognac. C’est en 2010-2011, lors de la prochaine campagne, que le régime général de la troisième feuille s’appliquera à elles. Pour l’heure, la région profite encore d’un régime de transition. Il faut tout de même se souvenir que jusqu’en 2007-2008, les vignes Cognac étaient censées produire dès l’année de leur plantation.

Réserve climatique : sur la rampe de lancement

L’an dernier, faute de marchandise disponible, la réserve climatique avait manqué son entrée. Très peu de volumes y avaient été consacrés. En 2009-2010, les pronostics lui sont beaucoup plus favorables. Est annoncé un renouveau d’intérêt autour de la climatique, pour des raisons assez disparates d’ailleurs. L’expliqueraient sans doute la foi dans le Cognac mais aussi une récolte hétéroclite, qui, techniquement, ne permettrait pas dans tous les cas de figure l’affectation aux autres débouchés. La climatique se présenterait donc comme une solution de repli, pour trouver un exutoire à de petits volumes en surplus. Compte tenu des trésoreries, le conseil est d’ailleurs de pratiquer la climatique par « petits bouts », à coup de 0,5 ou 1 hl AP/ha, plutôt que de vouloir l’alimenter en entier en une seule fois. Prise au-delà du rendement annuel (cette année, au-delà des 8,12 hl AP/ha), la réserve climatique ne peut pas dépasser 5 hl AP par ha en cumulé. Par exemple, si un viticulteur avait fait 2 hl AP/ha de réserve climatique en 2008, il ne disposerait cette année que d’un potentiel de 3 hl AP/ha. Logée sous matériau inerte (inox L 316), la réserve climatique rentre et sort en 00. Il est possible et même conseillé de la rafraîchir chaque année. Par contre, dans la perspective d’un contrôle physique au chai, il convient de laisser le moins longtemps possible une cuve en vidange. Si l’eau-de-vie en réserve climatique n’est pas à proprement parler une eau-de-vie de Cognac (il lui manque le vieillissement), elle ne s’assimile pas non plus à une eau-de-vie lambda. Janine Bretagne, juriste au BNIC, la qualifie « d’eau-de-vie en attente de revendication », la revendication constituant, dans la nouvelle doctrine des signes de qualité, le véritable sésame pour accéder au monde des appellations. Pour couper court aux « on-dit », la réserve climatique n’est pas susceptible de transactions entre viticulteurs. Hors cas particuliers, la sortie de réserve climatique n’est possible que lorsque le viticulteur, une année donnée, a un rendement inférieur au rendement annuel. Objectif de la réserve climatique individuelle : compenser un déficit de rendement annuel.

Achat/vente de moûts ou de vendanges fraîches : conséquence de la grêle du 11 mai

Face à la pénurie de volume qui risquait de pénaliser gravement les exploitations touchées par la grêle, profession et administration se sont mobilisées non seulement pour autoriser en toute transparence la circulation de moûts et de vendanges fraîches entre viticulteurs mais aussi pour permettre aux ressortissants qui souhaiteraient céder de la marchandise de pouvoir dépasser le rendement annuel des 8,12 hl AP/ha. A noter que cette possibilité de dépassement ne joue que pour le Cognac. Les vins de pays et le Pineau n’ont pas souhaité l’activer. Explication du Syndicat des producteurs de Pineau : « Nous étions bloqués par l’enregistrement des parcelles un an et demi à l’avance et, pour des raisons qualitatives, il nous paraissait difficile de passer outre au rendement de 72 hl vol./ha. » La facilité octroyée à la région fonctionne dans un cadre bien précis. Le demandeur (pour ne pas dire l’acheteur) de moûts ou de vendanges fraîches doit être situé dans une zone sinistrée affichant un taux de perte supérieure à 30 % (arrêté préfectoral Charente sur la précédente publication du « Paysan Vigneron » – arrêté préfectoral Charente-Maritime du 3 août 2009 en renvoi*) et la somme de la vendange (ou des moûts) produits et achetés en 2009 ne peut pas dépasser 80 % de sa production moyenne des 5 dernières années. Chaque ressortissant Cognac potentiellement concerné va recevoir ou a déjà reçu du BNIC le chiffrage de son volume théorique à ne pas franchir. Le transfert s’opérera dans le cru considéré (pas de possibilité de déroger à la notion de cru).

En ce qui concerne le vendeur, des critères s’imposent également à lui. Le dépassement de rendement ne doit pas dépasser 5 hl AP/ha. En fait cette possibilité de dépassement joue dans le cadre réglementaire de la réserve climatique. Pour être précis, sur l’exploitation du vendeur, dépassement de rendement + réserve climatique déjà constituée sur les surfaces Cognac ne peuvent pas aller au-delà des 5 hl AP/ha. Dit autrement, quel que soit le cas de figure, le « droit de tirage » ne dépassera pas les 5 hl AP/ha. Techniquement parlant, le transfert de moûts s’avérera certainement beaucoup plus facile que celui de vendanges fraîches, ne serait-ce que pour apprécier les volumes. Le degré des moûts à retenir sur la déclaration de récolte correspond à un degré forfaitaire de10 % vol., quel que soit le degré réel. Le transfert de marchandise s’accompagnera d’un certain nombre d’obligations déclaratives et de documents de transport .
* Charente-Maritime – L’Arrêté préfectoral du 3 août 2009 autorise l’achat de vendanges fraîches et de moûts aux communes de Charente-Maritime suivantes : Saint-Martial-sur-Né, Germignac, Cierzac, Sainte-Lheurine, Archiac, Arthenac, Chevanceaux, Le Pin, Mérignac, Bran, Vanzac, Léoville, Montguyon, La Genétouze, Chepniers, Cercoux.

Le casse-tête chinois des prestations viniques

Cela peut paraître bizarre mais, au seuil des vendanges, le Charentais ne résiste jamais à se livrer au jeu délicieux des arguties sur le mode de calcul des prestations viniques. La livraison des sous-produits de la vinification a toujours fait gloser mais plus encore aujourd’hui où un texte (du 16 février 2009 modifié le 6 avril), sous prétexte d’éclaircissement, est venu obscurcir une matière déjà bien complexe. Essayons, autant que faire ce peut, d’introduire un peu de rationalité sur le sujet. On ne raisonnera ici que sur le Cognac et sur la partie Vins sans IG des « Autres débouchés ». Car les autres destinations – Vins de pays, Pineau et les moûts pris dans les « Autres débouchés » – répondent à une problématique un peu particulière. En effet, le rendement des Vins de pays (y compris de l’Atlantique) intègre déjà les bourbes et lies. Les Vins de pays ne seront donc redevables que des marcs. Même chose pour les moûts Pineau et les moûts « autres débouchés », pour la bonne et simple raison que, ne subissant pas de vinification, ils n’ont pas de bourbes et lies à livrer mais seulement des marcs.

Considérons d’abord le cas des ha Cognac. Lorsque la récolte dépasse le rendement annuel (les 8,12 hl AP/ha cette année), le viticulteur a tout intérêt à prélever ses prestations viniques au-delà du rendement annuel, puisque c’est permis. Dans ces conditions, il y aura livraison de la totalité des marcs et des lies. L’obligation s’élève à 10 % du volume vinifié, calculé sur la base d’un degré moyen de 9 % vol., degré applicable à la zone C 1, la zone communautaire incluant les Charentes. In fine, l’obligation correspond donc à 90 cl AP par hl vol. vinifié. Cette livraison au taux plein s’applique en cas de vinification directe. Elle sera de 5 % lorsque le viticulteur livrera ses moûts à une cave ou à un négociant vinificateur. De cette clé de répartition 50/50, on a tiré la règle qui veut que pour la livraison au taux plein, les lies représentent environ 45 cl AP par hl vol. vinifié (la moitié de 90 cl AP) et que les marcs fournissent le solde. Si le viticulteur n’était pas en mesure d’apurer son obligation de 90 cl AP par ha, le principe voudrait qu’il livre le complément en vin. Mais, de tout temps, il a été dit que la distillation des vins Cognac venait « parfaire » ces volumes, en clair, dispensait de livraison de vin complémentaire. A noter au passage que la réserve climatique n’est pas dispensée de prestations viniques.

En restant sur la destination Cognac, existe maintenant le cas où la récolte s’avère inférieure au rendement annuel. Même si cette situation risque de se rencontrer moins souvent que lors des deux dernières campagnes, elle se présentera forcément, notamment chez les viticulteurs sinistrés. Le viticulteur concerné n’aura alors d’autres choix que de ponctionner ses prestations viniques à l’intérieur de son rendement annuel. Et c’est là que des divergences d’interprétation surgissent. A la lecture des textes sus-cités, le service juridique du BNIC considère sans ambiguïté que le bouilleur de cru, à domicile ou à façon, n’aura pas à livrer ses lies s’il apporte la preuve que ses lies sont effectivement distillées. « Il s’agit tout de même d’une avancée pour ceux qui pratiquent la distillation avec lies commente Janine Bretagne qui confirme : « A ce titre-là, les viticulteurs ne seront pas inquiétés par les Douanes pour non-livraison de leurs lies. » La preuve matérielle de la distillation avec lies résultera du rapprochement entre la Déclaration de récolte – où les vins figurent bourbes et lies comprises – et le registre de Comptabilité matière vitivinicole, à remettre aux Douanes avant le 31 juillet. « Si le solde tombe à zéro, la preuve sera apportée par le simple suivi matière » note la juriste du BN. « Il n’y aura pas de document particulier à fournir. » A noter que la livraison des marcs ne souffre pas d’exception, sauf à pouvoir pratiquer le retrait sous contrôle (voir article page 16).

Maintenant la vérité commande de dire que certains contestent la lecture faite par l’interprofession du Cognac du texte sur les prestations viniques. Présent à la réunion des courtiers, le 14 septembre dernier, Bernard Nau, distillateur agréé à Chevanceaux (Distillerie CVE), a fait part de sa vision des choses. « A mon sens, le texte ne prévoit pas de dérogation à l’obligation de livrer les marcs et lies. Il se contente de confirmer le fait que la distillation de vins Cognac « parfait » à l’obligation éventuelle de livrer des vins en complément de la livraison des marcs et lies. Et c’est tout. Les viticulteurs qui ne respecteraient pas le texte prendraient leurs responsabilités vis-à-vis des Douanes. » Si le débat n’est pas tranché, on voit au moins où penche l’analyse collective des professionnels.

Reste le cas des vignes destinées aux « Autres débouchés », plus particulièrement aux vins sans IG. Pour elles, il n’y a pas d’échappatoire. Les volumes vinifiés sont bien soumis au taux plein des prestations viniques, sans possibilité d’y déroger. Comme déjà dit, les moûts livrés dans le cadre « Autres débouchés » n’ont que des marcs à livrer, puisqu’ils ne subissent pas de vinification.

Déclaration d’affectation préalable 2009 : pour le « fun »

A l’ADG, tout était prêt début juillet, les imprimés d’affectation préalable, les notices explicatives. Sauf que le top départ devait être donné par la publication du cahier des charges Cognac mais que, pour d’obscures raisons administrativo-administratives, ce document, comme les cahiers des charges de pratiquement toutes les AOC viticoles de France, s’est retrouvé bloqué sur le bureau du ministre de l’Agriculture et qu’il doit l’être encore. Fin de la partie. L’affectation préalable ne s’applique pas cette campagne. Promis, juré, la « vraie » affectation préalable se fera au 1er juillet 2010. A titre d’exercice pédagogique, l’interprofession propose tout de même à ses ressortissants de se « faire la main » sur l’imprimé 2009, renvoyé comme exemple. Naturellement, le document n’est pas à retourner.

Les plantations anticipées, pour mémoire

Qu’on se le dise ! Les plantations anticipées ne produisent rien. Quand elles figurent sur les documents, elles sont consignées « pour mémoire ». Ce n’est que quand la vigne support est arrachée qu’elles peuvent porter des fruits. Autorisées depuis la campagne 2007-2008, les plantations anticipées, en tout état de cause, ne produisent du vin blanc Cognac qu’à la troisième feuille, c’est-à-dire, pour les premières, en 2010-2011. Par contre, à condition que la vigne support ait été dûment arrachée, rien n’empêche les vignes en seconde feuille de produire des vins « Autres débouchés ». En 2009, les plus anciennes plantations anticipées peuvent dont être affectées aux « Autres débouchés », à la réserve expresse indiquée plus haut : que la vigne support soit arrachée.

Plantations anticipées et arrachage de la vigne support

La vigne servant de support à la plantation anticipée doit obligatoirement être arrachée au cours de la troisième campagne suivant la mise en terre des plants. Arracher avant reste toujours possible mais fait perdre une partie de l’avantage associé au système. Par contre, si l’arrachage ne s’effectuait pas à temps, il entraînerait la perte du chèque de caution ou de la caution bancaire, une obligation d’arrachage et une amende pour plantation illicite d’un montant très élevé.

L’injonction de respecter les crus

Les crus, les crus, les crus ! C’est devenu un leitmotiv depuis que le Cognac est rentré de plain-pied dans le monde des appellations. Exit les replis ou les ha baladeurs d’un cru à l’autre. Désormais le rendement annuel se calcule par cru, la réserve climatique de même et pas question que les transactions de moûts ou de vendanges fraîches dérogent à la notion de cru. Ils devront se réaliser sur le cru de l’exploitation sinistrée. « Il n’y a pas de hiérarchie de cru. On ne monte ni ne descend à l’intérieur des crus » martèle-t-on urbi et orbi. L’ADG en appelle à toute la chaîne de fonctionnement pour que cette injonction soit respectée.

Hectare Cognac – Dépassement de rendement hors réserve climatique : la destruction

Par rapport à l’ancienne QNV, il s’agit de l’évolution essentielle, d’aucuns diront « monumentale » introduite par le nouveau régime. Hors réserve climatique, les volumes excédentaires sur les hectares Cognac et Pineau doivent être détruits, c’est-à-dire livrés aux distilleries agréées en vue d’un débouché industriel. Sinon le viticulteur encourt la suspension d’habilitation voire le retrait d’habilitation, en cas de manquement « majeur et récurrent ». La notion d’habilitation touche au droit à produire une appellation (voir ci-dessous). D’où, en cas d’excédents, l’intérêt évident d’envisager l’affectation à d’autres débouchés (avec les surfaces correspondantes) et/ou à la réserve qualitative.

Habilitation : la base du droit à produire une appellation

Dans le nouveau dispositif INAO, il s’agit véritablement de la base du droit à produire une appellation, en l’occurrence du Cognac ou du Pineau, et maintenant des IGP Vins de pays charentais et de l’Atlantique. A ce jour, tous les opérateurs de la région délimitée Cognac sont habilités de fait. Cependant, en guise de validation, les ressortissants sont invités à remplir un document, la Déclaration d’identification. Côté Pineau, c’est déjà fait. Côté Cognac, l’ADG attend la publication du cahier des charges Cognac (imminente) pour envoyer le document à ses ressortissants. Car, avec la déclaration d’identification, les opérateurs s’engagent à respecter les conditions de production. D’où la nécessité d’avoir le texte sous les yeux pour s’engager. La déclaration d’identification comporte quatre ou cinq feuillets où l’exploitant décrit ses outils de production : vignoble, chai de vinification, distillerie, chai de stockage. Reste enfin son engagement à respecter les conditions de production, à réaliser les auto-contrôles, à se soumettre aux contrôles internes et externes et à supporter le coût de ces contrôles. Il est dit que ce document est « obligatoire et important » et qu’il convient vivement d’encourager les ressortissants à le remplir. Comme déjà signalé, il arrivera chez les opérateurs dès signature du cahier des charges.

La déclaration de revendication : un acte volontaire

La réforme des signes de qualité, lancée en 2006 et en passe d’être finalisée fin 2009, comporte une série de changements, dont un très important, matérialisé par la Déclaration de revendication. Avant, que se passait-il ? Grosso modo, les ressortissants Cognac faisaient de l’appellation sans le dire. Aujourd’hui, ils vont devoir revendiquer le droit à l’appellation Cognac, c’est-à-dire se manifester par un acte volontaire. La réforme va s’appliquer à la région délimitée dès cette campagne. Renversement de valeur assuré mais qui, dans le concret, restera assez soft. Produit très contrôlé, l’alcool s’accompagne déjà de tout un arsenal documentaire (déclaration de récolte, déclaration d’avant et d’après travaux de distillation, suivi matière, titres de mouvement, DRM…). A Cognac, l’idée qui a guidé la réforme fut de travailler à partir des documents existants, en évitant, autant que faire ce peut, d’en créer de nouveaux.

Pour produire du Cognac (ou du Pineau), il faut d’abord élaborer du vin apte à la production d’eau-de-vie, une étape incontournable. Logiquement, la Déclaration de revendication de l’appellation Cognac (ou Pineau) prend en compte cette première étape. Tous les viticulteurs, qu’ils soient livreurs de vin, bouilleurs de cru à domicile, bouilleurs de cru à façon vont souscrire une Déclaration de revendication du vin apte à la production d’eau-de-vie. Elle va s’appuyer sur un document existant – le registre de Comptabilité matière des produits vitivinicoles – et plus particulièrement sur l’extrait du feuillet 3 de ce registre. Le registre de Comptabilité matière des produits vitivinicoles – celui avec les grandes feuilles, qui permet le suivi au jour le jour de l’écoulement de la récolte avec, derrière, la DRM vitivinicole – a vu son édition 2009 remaniée, justement pour intégrer la Déclaration de revendication. Important ! Il faut se procurer le nouveau registre dans les recettes locales. Comme déjà dit, le registre nouvelle formule comporte, dans sa partie comptabilité-matière, un 3e feuillet qui va s’autoremplir sur son côté gauche. En fin de campagne de distillation, avant le 31 mars, l’assujetti devra simplement penser à comptabiliser en AP les volumes de vin mis en œuvre pour la production d’eau-de-vie, par cru. Puis, de manière formelle, il revendiquera ces volumes à l’aide d’une phrase type du style « je revendique x hl AP de vins mis en œuvre pour la production d’eau-de-vie ». Ce document, qu’il ne faudra pas oublier de signer, sera à adresser à l’ADG Cognac (au BNIC) au plus tard le 31 mars, date de fin d’écoulement des vins Cognac. Dans le même esprit, le bouilleur de profession qui achète du vin, remplira une déclaration de revendication pour les volumes qu’il sera amené à distiller.

Pour l’élaborateur de Cognac, l’étape de la distillation suit toujours celle du vin. Après avoir revendiqué le droit à l’appellation pour le vin apte, le ressortissant va devoir accomplir une seconde démarche : revendiquer le droit à l’appellation pour ses eaux-de-vie. Deux cas de figure sont à considérer : le bouilleur de cru à domicile et le bouilleur de cru à façon (à noter qu’avec la réserve climatique, le livreur de vin acquiert automatiquement la qualité bouilleur de cru à façon).

Pour le bouilleur de cru à domicile, rien de plus simple : sa revendication de l’appellation passera par deux documents existants, bien connus de lui : la Déclaration d’avant travaux de distillation et la Déclaration d’après travaux. Sur la Déclaration d’avant travaux, il notera simplement en bas de page « je revendique par anticipation à l’AOC Cognac tant d’hl AP en AOC Cognac ». Même logique sur l’après-travaux de distillation, où il mentionnera qu’« il revendique la fabrication de tant d’hl AP ».

Pour le bouilleur de cru à façon, ça se complique un tant soit peu dans la mesure où il n’a pas été possible de s’appuyer sur un document existant. Il a fallu en créer un nouveau, de couleur jaune, intitulé Déclaration de revendication en AOC pour les vins distillés à façon. Spécifique à la revendication, il sera à remplir par tous les viticulteurs recourant à la distillation à façon (en plus du registre 3 vu plus haut). Envoyé directement aux viticulteurs, il sera à déposer au plus tard le 31 juillet, pour prendre en compte les dates réelles de retours des eaux-de-vie, qui ont parfois tendance à déborder. Sur cet imprimé, le viticulteur indiquera les retours à façon, soit retours à façon à domicile, soit retours à façon en chai collectif (chez le bouilleur de profession par exemple). Si le viticulteur ne possède pas toutes les informations nécessaires, il devra les demander à son bouilleur de profession.

Réserve climatique et comptabilité matière

Tous les mouvements relatifs à la réserve climatique doivent être consignés dans un registre de comptabilité matière différent du registre normal. Il s’agira d’une petite comptabilité matière spécifique, pour laquelle un simple cahier d’écolier suffit. Seront ainsi suivis tous les volumes d’entrée et de sortie de la réserve climatique. Aujourd’hui, la DRM (Déclaration récapitulative mensuelle) Cognac devrait comporter une ligne spécialement dédiée à la réserve climatique et au stock de réserve climatique. Cette ligne ne figure pas sur la DRM (l’oubli sera réparé lors des prochaines éditions du document). Cela ne doit pas empêcher les ressortissants de mentionner la réserve climatique et son stock sur la DRM, de même que sur l’inventaire d’Avant travaux pour les bouilleurs de cru à domicile ou sur l’inventaire des bouilleurs de cru à façon.

Réserve climatique et titres de mouvements

Tout titre de mouvement qui concerne la réserve climatique doit être clairement identifié. Ainsi le titre de mouvement qui accompagnera les vins partant en distillerie – du chai du viticulteur à la distillerie du bouilleur de profession – portera la mention « Vins aptes à la production d’eaux-de-vie de réserve climatique ». Pour le retour d’eau-de-vie du bouilleur de profession chez le viticulteur, le titre de mouvement indiquera « Eau-de-vie de réserve climatique en attente de revendication ». De la même façon, lorsqu’il s’agira de la véritable sortie de la réserve climatique en vue de la vente, le titre de mouvement mentionnera « eau-de-vie sortie de réserve climatique » pour bien montrer que l’eau-de-vie qui rentre en 00 chez le négociant pourra retrouver à partir du 1er avril suivant le cours normal de son vieillissement.

Réserve climatique et coopératives

Le principe veut que pour faire de la réserve climatique, il faille souscrire une déclaration de récolte. Les coopératives pratiquant l’apport total – Coopératives de Ré et d’Oléron par exemple – ont obtenu le droit de pouvoir pratiquer de la réserve climatique au titre de leurs apporteurs totaux. Cette possibilité ne concerne en aucun cas les Sica de stockage.

Réserve climatique et chais collectifs

Il est dûment établi que la réserve climatique puisse être stockée en chais collectifs (Sica, coopératives mais aussi chais de négociants, marchands en gros, bouilleurs de profession). Ceci dit, la réserve climatique reste la propriété du viticulteur et figurera dans ses stocks, y compris lorsqu’elle sera logée en chais collectifs. Si la Douane autorise une gestion globale du stock d’eau-de-vie (par cru tout de même), les opérateurs-stockeurs devront produire des états individuels, par viticulteurs.

Réserve climatique individuelle : les possibilités de sorties

A priori, il n’en existe qu’une, pour compenser le déficit de rendement annuel. Un viticulteur qui, une année, ferait une mauvaise récolte, pourrait prélever dans sa réserve climatique, à due concurrence du rendement Cognac de l’année. Cependant, des exceptions assortissent à ce principe. Elles visent les cas de cession totale ou partielle de l’exploitation ainsi que la cessation d’activité. Si l’exploitant arrête son activité ou cède en totalité son exploitation, il aura quatre ans pour réaliser sa réserve climatique, qui, durant cette période, demeurera toujours en 00. S’il loue ou vend une partie de son exploitation et si la surface ainsi libérer le conduit à dépasser les 5 hl AP/ha, il pourra réaliser partiellement sa réserve climatique, au prorata des surfaces cédées.

Régime fiscal et social de la réserve climatique

Sur le sujet, les rumeurs vont bon train. Examinons le cas fréquent du viticulteur au réel normal. La réserve climatique, pendant la période où elle reste la propriété du viticulteur, ne génère aucun prélèvement fiscal et social pour les assujettis. Entrée en stock en 00 au prix de revient (coût de production et de stockage), elle en sortira au même prix, toujours en 00. D’où, en absence de création de résultat, un bénéfice imposable zéro et pas de prélèvement MSA.

Par contre, là où il peut y avoir une incidence fiscale et sociale, c’est sur l’impact de la climatique sur le coût de production de l’année. Car, en augmentant les volumes qui servent de diviseur aux charges, la réserve climatique a pour effet mathématique de diminuer le prix de revient des quantités en stock, que ces quantités participent ou non de la réserve d’ailleurs. Ainsi, au moment de la vente, la marge brute dégagée sur les eaux-de-vie sera automatiquement plus élevée. Mais il faut bien voir que sans la climatique, les quantités en excédent seraient allées à la destruction. Un groupe de travail réuni sous l’égide de l’interprofession se penche sur la fiscalité de la réserve.

Vente/achat de moûts ou de vendanges fraîches : les obligations administratives à remplir

Cas du vendeur de moût ou de vendanges fraîches : pour franchir le seuil des 8,12, le cédant doit déposer auprès de l’INAO une demande d’autorisation accompagnée du nom des acheteurs, dans le délai maximum de cinq jours avant la date de mise en circulation du produit. Par contre, il peut très bien formuler sa demande par anticipation, sans conséquence pour lui si son projet n’aboutissait pas. Sur sa Déclaration de récolte (case en bas à droite du document), le cédant portera le volume ainsi que le nom et le n° de CVI de son acheteur, comme s’il vendait à un négociant vinificateur. Même si ce sont des produits exonérés, moûts comme vendanges fraîches voyagent sous DSA, titre de mouvement à « lever » à la recette locale.

Cas de l’acheteur de moût ou de vendanges fraîches : avant de se lancer dans l’opération, il fera une demande d’autorisation d’achat de moûts ou de vendanges fraîches auprès des Douanes. Sur sa Déclaration de récolte, il indiquera le volume, le ou les noms des vendeurs ainsi que leurs n° de CVI. 

Prestations viniques
Extrait de l’arrêté du 16 février 2009 modifié
par arrêté du 6 avril 2009
Article 2
« Les personnes physiques ou morales ou groupes de personnes qui ont procédé à une vinification sont tenus de livrer à la distillation la totalité des sous-produits de cette vinification.
Elles satisfont à cette obligation en livrant à la distillation :
a) La totalité des marcs et des lies et,
b) Eventuellement, du vin si la distillation des marcs et des lies ne permet pas d’obtenir la quantité minimale d’alcool fixé au paragraphe 2, sauf pour les producteurs de vin apte à la production d’eau-de-vie de vin à appellation d’origine contrôlée, pour la partie de leur production issue de la vinification des raisins aptes à produire de l’eau-de-vie de vin à appellation d’origine contrôlée effectivement livrée à la distillation dans le cadre de la production de cette eau-de-vie. »

 

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