Quand, à Revico, la distillerie à colonne du Buisson tournait à plein régime avec les vins de la distillation communautaire de l’article 28, sa production est montée jusqu’à 130 000 hl AP. Tout le biogaz des méthaniseurs était autoconsommé, c’est-à-dire utilisé sur place. Brûlé dans des générateurs de vapeur, le biogaz servait à plusieurs fins : à alimenter en énergie la distillerie à colonne (pour 30 à 60 % de la vapeur produite), à chauffer les serres de Cognac, à réchauffer les digesteurs, à faire fonctionner l’évapo-concentrateur des effluents. Avec la mort de l’article 28, l’exutoire de la distillation s’est tari. Car, pour continuer à distiller des alcools viniques, l’usine n’a pas la ressource de la pollution « fatale » des marcs (rafles et pépins de raisins), elle qui ne collecte que les lies et pas les marcs. Ainsi le modèle technico- économique de Revico exigeait d’être repensé. Nicolas Pouillaude s’y est penché, lui qui dirige le site de Revico depuis
2005. En 2004, son prédécesseur Marcel Ménier avait déjà initié la réflexion de l’électricité mais à l’époque les tarifs de rachat de l’électricité issue du biogaz n’avaient pas permis de pousser plus loin l’étude de faisabilité. En 2006, la sortie de nouveaux tarifs EDF, bien plus élevés que par le passé, a changé la donne. Du coup, la production d’électricité devenait rentable. C’est ainsi que Revico s’est engagé dans la cogénération, un projet qui sera opérationnel début de campagne 2009-2010, sachant que des essais vont être réalisés en fin de campagne 2008-2009. Qu’est-ce que la cogénération ? Il s’agit d’utiliser des microturbines pour produire deux sources énergétiques, de l’électricité et de la chaleur, à partir du biogaz (que ce biogaz soit issu des vinasses, du charbon, du graphite, de la biomasse, des stations d’épuration…). Ce procédé, la société Verdesis le maîtrise bien. Créée il y a sept ans en Belgique, l’entreprise est devenue depuis filiale à 68 % du groupe EDF Energies Nouvelles. C’est avec l’entité Verdesis France que Revico SNC a conclu un accord de partenariat pour valoriser le biogaz issu de la méthanisation des vinasses. La production devrait s’élever à 2 700 MWh (mégawatt/heure), ce qui représente bon an mal an la consommation électrique de 600 foyers. La chaleur dégagée par les fumées d’échappement sera elle aussi récupérée (principe de la cogénération). Elle servira à faire fonctionner un des trois évapocentrateurs du site ainsi qu’au chauffage des serres de Cognac, voisines de l’usine. Lors de la visite de Ségolène Royal sur le site de Revico en juillet dernier, Nicolas Pouillaude a indiqué que cette réalisation permettrait d’éviter le rejet annuel dans l’air d’environ 5 000 tonnes de CO2, soit l’équivalent de 5 millions de km de voitures. Le site industriel de Saint-Laurent-de-Cognac va se voir doté d’un transformateur, d’une cellule haute tension ainsi que d’une ligne haute tension qui rejoindra la ville de Cognac. La cogénération à partir du biogaz va se développer sur un autre site de méthanisation, celui de Sainte-Sévère, centre de stockage des déchets de l’Ouest Charente. Par contre, ce que Sainte-Sévère ne pourra jamais produire, c’est de l’eau de consommation ! Jamais à court d’innovation, Revico est en train d’étudier un projet de récupération d’eau de consommation à partir du condensat des évapocentrateurs. Ce projet, développé par une société américaine, aurait pour finalité de mettre en bouteilles de l’eau destinée aux Emirats Arabes Unis. Mais pas n’importe quelle eau, une eau de luxe, baptisée « eau de vin ». De l’eau-de-vie à l’eau-de-vin, le pas est vite franchi.