Des Changements Pour s’Adapter Aux Circonstances

15 mars 2009

Là où Revico utilisait 30 % de son biogaz pour distiller des vins de l’article 28 dans sa distillerie du Buisson, demain cet exutoire aura disparu, réforme de l’OCM vin oblige. Pour continuer de valoriser au maximum son process, l’usine doit trouver un nouveau modèle technico-économique. Son directeur, Nicolas Pouyaude, échafaude des pistes.

 

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Nicolas Pouyaude.

« Le Paysan Vigneron » – Ces dernières années, 100 % du biogaz produit à partir de vos méthaniseurs était employé sur le site, qui pour maintenir la température des méthaniseurs à 37°, qui pour faire fonctionner la distillerie à colonne du Buisson, qui pour chauffer les évapoconcentrateurs. Qu’en sera-t-il demain avec la suppression annoncée de la distillation communautaire de l’article 28 ?

Nicolas Pouyaude – En effet, nous allons nous retrouver dégager plus de biogaz que nos besoins. La solution envisagée est de produire de l’électricité grâce à la cogénération, c’est-à-dire l’alimentation d’un moteur couplé à un alternateur qui fabriquera de l’électricité, les gaz d’échappement du moteur pouvant éventuellement servir à chauffer les méthaniseurs. Cependant, pour que le système soit rentable, il faut pouvoir produire de l’électricité non pas six ou sept mois de l’année mais 365 jours par an. Nous devons donc trouver une source supplémentaire de matière organique.

« L.P.V. » – Où allez-vous la chercher ?

N.P. – Dans un premier temps, nous avions pensé aux IAA (industries agro-alimentaires). Mais finalement, est-ce la bonne solution ? Dans nos méthaniseurs, la matière organique tirée des IAA risque de se comporter différemment de celle des vinasses ! La piste la plus rationnelle consisterait sans doute à tirer parti du gisement des bouilleurs de cru, si tant est que ces derniers adhèrent à l’idée bien sûr. D’un point de vue technique, Revico est d’ores et déjà largement capable de traiter l’ensemble des vinasses produites dans la région délimitée, soit 6 à 7 millions d’hl, puisqu’il est d’usage de considérer que les vinasses de vins, vinasses de bonne chauffe et eaux de lavage représentent grosso modo dix fois la production d’alcool pur. Ou encore, dit autrement, qu’un hl de vin génère un hl de vinasse.

« L.P.V. » – L’usine Revico traite quel volume aujourd’hui ?

N.P. – Nous traitons bon an mal an 3 millions d’hl vol. de vinasses, une quantité qui au rythme de la production régionale. En 2006-2007, nous avons réceptionné 3,15 millions d’hl et cette année, nous tablons sur environ 2,9 millions d’hl. C’est vrai qu’en grande majorité nos clients sont des distillateurs de profession mais tous les ans, 4 ou 5 nouveaux bouilleurs de cru nous rejoignent.

« L.P.V. » – L’épandage des vinasses apparaît comme le mode de dépollution le plus pratiqué par les bouilleurs de cru, car le moins onéreux. Qu’est-ce qui pourrait les conduire à changer leur fusil d’épaule ?

N.P. – Revico n’a pas la prétention d’être la seule alternative au traitement des vinasses charentaises. Malgré tout, nous pouvons mettre en avant quelques avantages concurrentiels, comme la tranquillité d’esprit par exemple. Les bouilleurs de cru qui recourent à notre prestation de service n’ont pas à se préoccuper de plan d’épandage, de surveillance, de déclaration. En fin de campagne, ils reçoivent un certificat prouvant qu’ils ont bien livré leurs vinasses à Revico.

« L.P.V. » – Votre prestation a un coût.

N.P. – Tout à fait. Son coût s’élève à 74 cents d’€ l’hl vol. dépollué. Pour une exploitation mettant en œuvre 3 000 hl de vin, cela représente une facture annuelle de 2 200 €. A l’échelon d’une exploitation viticole, je pense que la facture reste « digérable ». Qui plus est, cette campagne 2007-2008, nous instaurons une double tarification, tenant compte de la date de livraison des vinasses. Le tarif « haute saison » de 74 cents d’€ l’hl dépollué – applicable du 15 novembre au 29 février – cohabite avec un tarif basse saison de 63 cents d’€ l’hl vol. dépollué.

« L.P.V. » – Pourquoi cette nouvelle grille tarifaire ?

N.P. – A travers elle, nous tentons de répondre à la problématique évoquée plus haut : pour que la production d’électricité soit rentable, il faut que l’approvisionnement en matière organique soit constant toute l’année. Or le problème des vinasses, c’est justement leur saisonnalité. Elles sont normalement disponibles que 5 ou 6 mois dans l’année. Pour étendre cette durée, nous avons pensé jouer la carte du partenariat avec nos clients, afin qu’ils se dotent d’outils de stockage supplémentaires. C’est cette politique que nous essayons d’enclencher avec la nouvelle grille tarifaire.

« L.P.V. »- Vous pourriez investir dans de nouveaux concentrateurs.

N.P. – Ce ne serait ni raisonnable financièrement ni techniquement faisable. Il faudrait augmenter démesurément la puissance de nos lignes électrique, ou en créer de nouvelles. Rien d’envisageable. Par contre Revico peut épauler ses clients pour les aider à se doter de bacs à vinasses plus grands, envisager avec eux les problèmes d’étanchéité de membranes… Des solutions techniques simples nous aideraient à résoudre notre problème de flux de matière première.

« L.P.V. » – Quels intérêts vos clients y trouveraient-ils ?

N.P. – En plus de l’argument tarifaire, un autre argument existe, celui du développement durable. Revico met en œuvre la technique la plus économique en terme de bilan énergétique. Quand un traitement aérobie classique coûte environ 40 à 45 cents d’€ par hl de vinasse dépollué, le process Revico est de l’ordre de 15 cents d’euro. Ces notions d’économie d’énergie, nous ne pouvons pas les ignorer. Aujourd’hui, les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel) retiennent l’attention mais, ne nous y trompons pas, demain ce sera au tour de l’énergie électrique. Ce fut un peu le but de ces « journées portes ouvertes » que de mettre en avant ces notions d’énergies renouvelables, importantes pour la planète bien sûr mais aussi pour la région.

Distillations alcool de bouche
L’Espagne largement en tête

Cette campagne encore, l’Espagne se taille la part du lion en matière de distillation « alcool de bouche » de l’article 29. Selon des sources professionnelles, le pays va distiller 5,5 millions d’hl vol., contre 275 000 hl vol. pour la France (sources professionnelles) et 590 000 hl vol. pour l’Italie. Pour obtenir ce score et alimenter le marché d’alccol de bouche, l’Espagne aurait accepté de surpayer les vins, servant jusqu’à 2,80 € le ° hl, alors que le prix officiel – le prix obligatoirement payé aux viticulteurs par les distillateurs – est de 2,49 € le ° hl.

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