Pineau des Charentes dans le vif du sujet en 2017

29 août 2016

L’année 2017 sera à coup sûr une année charnière pour le Pineau des Charentes. Arriveront en production les premières plantations du Plan de Sauvegarde. Se dévoileront les perspectives export sur deux marchés cibles, la Chine et les Etats-Unis. Et les modifications du cahier des charges devraient être actées par l’INAO. Traduction pour la filière ! Une année 2016 « au taquet ».

Tous les chantiers s’ouvrent de front. Et comment faire autrement, tellement ils sont imbriqués. Pour le Pineau des Charentes, la relance de sa production se traduit ipso facto par une recherche de nouveaux débouchés  qui, elle-même, passe par plus de possibilités offertes aux opérateurs, en termes de segmentation de l’offre…Etre partout, en même temps, tel est le challenge du Pineau aujourd’hui. Car le vin apéritif, comme nombre de ses confrères, connaît une stagnation voire une régression de ses ventes sur les marchés matures. Dans ces conditions, il n’a guère d’autre choix que de dynamiser sesactions commerciales, donner envie. Le constat ne date pas d’hier. Des réflexions interprofessionnelles intenses ont d’abord débouché sur un Plan de sauvegarde de la production. Parce « que l’on ne peut vendre que ce que l’on a produit » et que le calendrier commandait de démarrer par là.

 

Le 12 mai, lors de l’assemblée générale du Syndicat des producteurs de Pineau des Charentes, Philippe Guérin, son président et Emilie Billote, la directrice du syndicat ont procédé à un état des lieux précis, point par point. En ce qui concerne les plantations, c’est « carton plein » a indiqué E. Billlotte. Sur les trois campagnes 2012-2015, les producteurs ont souscrit à 399 ha 25 ares et 44 centiares d’autorisations de plantation. Les J.A ont déposé 39 dossiers et ont obtenu 35,30 ha. Sur les 472 dossiers de demandes déposés par les autres viticulteurs, ont été octroyé 365 ha.

 

En 2015, il s’est fabriqué 105 000 hl vol de Pineau. Un volume en hausse de + 13 %, à relier non aux plantations nouvelles, pas encore arrivées en production mais aux conditions de l’année. Par contre, en 2017, le syndicat s’attend à un premier ajustement de la récolte dû au plan de sauvegarde. «Pas mal de gens me demandent si l’on ne risque pas de trop produire ? » a signalé en toute transparence Philippe Guérin. « Bien sûr, si nous ne faisons rien, à moyen terme, nous nous retrouverons dans une situation de déséquilibre. Mais n’oublions pas que, sur dix ans, le Pineau a déstocké plus de 100 000 hl vol. Par ailleurs, nous souhaitons développer un nouveau segment   de milieu de gamme – Pineaux de 3 à 7 ans vieillis sous bois – ainsi que rallonger la durée de vieillissement pour le Vieux Pineaux, qui passerait de 10 à 12 ans. Ces modifications appellent d’avoir plus de disponibilités. Par ailleurs, si nous voulons partir à la conquête de nouveaux marchés, je pense que nous devrons reconstruire un stock raisonnable. Depuis 2008, nous disposons d’un outil, la réserve de production. Certes, elle n’a pas vocation à rester dans les chais éternellement mais elle peut accompagner efficacement le marché. »  

 

Le 20 avril dernier, une commission d’enquête INAO s’est déplacée en Charentes. Philippe Pellaton, président du syndicat des vignerons des Côtes du Rhône en faisait partie. Objectif ? Examiner la demande d’ouverture du cahier des charges Pineau, requête formulée en juillet 2015 par le syndicat des producteurs reconnu ODG. Car, comme l’a précisé Philippe Guérin, la filière Pineau souhaite offrir de nouveaux outils de développement aux opérateurs. Parmi les modifications, figure l’introduction du Chauchet, un cépage historique des Charentes. L’Institut national des appellations d’origine s’avère plutôt ouvert à l’idée, avec une restriction cependant : que la démarche soit progressive. « Oui, acquiescent les producteurs, à condition que le curseur ne soit pas placé trop bas. Si les attributions se soldaient par 3 ares de plantations nouvelles accordées à chaque demandeur, ce ne serait pas la peine ». Côté segmentation, la création d’une nouvelle catégorie, celle d’un cœur de cible entre 3 et 7 ans, intermédiaire entre la catégorie « Pineau des Charentes » et la catégorie « Vieux Pineau » a été plutôt bien comprise et acceptée par la commission d’enquête. Là où le bât blesse, c’est sur le nom choisi par la filière pour désigner ce nouveau segment. La commission semble y voir un critère géographique alors que, pour la profession, ce nom renvoie de façon très claire à un critère d’âge. Le « dogme » INAO sera-t-il soluble dans la vision filière ?  La profession le souhaite de tout cœur.

 

Une autre demande de modification concerne le rendement maximum Pineau « produit fini » : que ce rendement passe de 42 à 52 hl vol ha. La profession justifie cette requête par un effet « cliquet »  : la propre évolution du rendement butoir du Cognac, aujourd’hui de 16 de pur ha. Car il n’aura échappé à personne que le Pineau des Charentes est une mistelle, issu du mutage entre jus de raisin et Cognac. Ainsi, pour calculer le rendement maximum Pineau « produit fini », se base-t-on sur le rendement brut des moûts et  le rendement brut du Cognac (même chose pour le calcul du rendement annuel mais avec les chiffres des années concernées). Ne pas tenir compte de la progressivité du rendement Cognac reviendrait à désavantager les producteurs de Pineau ; leur dénier le droit de fabriquer autant de Cognac que les autres ressortissants du cahier des charges Cognac. Les membres de la commission d’enquête semblent avoir bien saisi le raisonnement. Jean-Bernard de Larquier, président de l’interprofession du Cognac et producteur de Pineau a fait remarquer que ce rendement brut « produit fini » de 52 hl vol ha (+ 24 % par rapport au niveau précédent) était assez théorique, dans la mesure où les 16 de pur ha de Cognac ne sont pas d’actualité. « Entre les attentes sociétales et le plan Eco-phyto, on voit mal comment le rendement Cognac pourrait atteindre 16 de pur ha. S’il doit augmenter un jour, il sera sans doute capé à 12 de pur ha. »

 

Les modifications du cahier des charges Pineau pourront-elles être validées par le Comité vins et eaux-de-vie de l’INAO avant la fin de l’année 2016 ? Philippe Guérin le souhaite, lui qui verrait bien une application de la nouvelle mouture en 2017.

 

L’exportation, une chance pour le Pineau ! En tout cas, la profession en fait un axe de développement majeur. Sans rentrer vraiment dans les détails – trop tôt – Jean-Marie Baillif a bien sûr évoqué les deux pays pressentis pour un accompagnement collectif de l’interprofession, la Chine et les Etats-Unis. Surtout, il a plaidé devant les opérateurs pour une stratégie spécifique Pineau et non une stratégie complémentaire ou annexe au Cognac. « Le Pineau n’est pas un vin classique. Il ne s’agit pas non plus d’un spiritueux  Comment le positionner ? Peut-être comme un vin + ». Le Comité a confié à une agence le soin de mener des enquêtes de terrain sur les deux marchés cibles, afin de se poser les bonnes questions…Les résultats sont attendus avant l’été. A partir de là et si le projet « d’y aller » est validé, « il en ressortira un programme complet » a promis le président du Comité national du Pineau. « Quand nous aurons les retours suffisants, nous reviendrons vers les entreprises pour permettre à ceux qui le souhaitent, grands ou petits, de tenter l’export. » Pour Philippe Guérin comme pour Jean-Marie Baillif, cela ne fait ps de doute – « en 2017, nous entrerons dans le vif du sujet ». 

 

 

                                                 Expériences Pineau

Communiquer c’est bien, goûter c’est mieux. Alors que la tendance cocktails s’affirme, même pour le vin de liqueur, le Pineau multiplie les occasions de rencontres directes. Effet viral recherché. 

 

« Qu’ils nous gouttent, nous re-gouttent, nous sur-gouttent ». Avec son sens de la formule rigolote, Claire Floch, la directrice du Comité, exprime un sentiment largement partagé au sein de la profession. Partir de « l’expérience Pineau » pour faire parler du vin de liqueur. Que les consommateurs et plus encore les « influenceurs » – barmen, sommeliers, blogueurs…- découvrent ou redécouvrent ce produit de tradition qui sait s’exprimer au présent. Et aujourd’hui quoi de mieux, pour être tendance, que la thématique cocktails. L’an dernier déjà, le Comité avait noué un partenariat avec la cave parisienne Lavinia – une des plus belles offres de vins et spiritueux dans la capitale – pour lancer ses ateliers cocktails, tout en  proposant des dégustations avec les opérateurs. Bis reptita cette année, toujours chez Lavinia mais aussi à travers un nouveau rendez-vous baptisé «Les jeudis du Pineau ». De quoi s’agit-il ? Sur trois dates à partir de juin, proposer à une quarantaine d’invités tirés au sort sur le site Facebook de l’appellation de découvrir dans un bar parisien le Pineau sous toutes ses formes. Pour participer à l’opération ont été sélectionner neuf bars, dans trois arrondissements (10 ème, 17 èm, 18 ème). A chaque date, trois bars sont concernés (120 consommateurs). La profession compte sur l’effet viral pour démultiplier le message et, si ça marche, l’opération pourrait se dupliquer à d’autres grandes villes.  En fin d’année, toujours à Paris, il est prévu d’organiser une soirée de « grande rencontre » avec une centaine d’invités ainsi qu’une Master class Pineau des Charentes pour les sommeliers.

Pineau des Charentes, singulièrement pluriel…L’accroche introduite en 2015 pour la nouvelle campagne de communication France est reconduite cette année. Les trois visuels – ville, phare, chai – occupent aujourd’hui de pleines pages dans plusieurs journaux nationaux : Le Point, L’Express, l’Obs, les Echos, Paris Match, Midi Libre…En tout, de juin à décembre, 49 parutions sont prévues, afin de renforcer la notoriété du vin de liqueur. La communication digitale va également être boostée par l’achat de bannières. En région, l’affichage se poursuit, dans les gares, sur la côte royannaise, La Rochelle, Oléron. Depuis de nombreuses années, le Pineau participe à deux salons, Le Grand Pavois à La Rochelle et les Gastronomades d’Angoulême.  Le P de Pineau a été revisité. Exit le nœud marin, pas vraiment plébiscité par les opérateurs. Claire  Floch a encouragé tout le monde à s’emparer du nouveau logo. « Ce logo, j’espère que vous allez l’aimer et l’utiliser. Il est à votre disposition. »

Belgique 2016 – « On change tout ». Nouvelle agence de communication, nouvelle campagne. Le Pineau devient « so classic, so in ». Là aussi, le projet est de rajeunir la cible consommateurs mais aussi solliciter davantage le pays flamand (à peu près la moitié de la population). La Course des garçons de café va sûrement se réinventer aussi. Un bar à cocktail a déjà été installé.

 

Repères

 

Opérateurs actifs recensés en 2015 : 475 opérateurs

Dépôt de déclaration de revendication 2015 : 282 opérateurs

Surfaces en moûts 2016 : 1 200 ha

Réserve de production 2015 : 10 000 hl vol

 

 

 

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