Organisation Régionale : l’Accouchement difficile

13 mars 2009

L’Assemblée générale du SVBC le démontre à l’envi. Le débat autour de la double fin n’est pas clos, malgré les engagements formels de la région pour un régime d’affectation de surfaces (voir la « grand-messe » de Matignon le 17 décembre 2003). Manifestement, la région a du mal à passer « par le chas de l’aiguille », à se faire à l’idée d’un basculement dans un régime inconnu. On peut le comprendre même si, en son temps, on a dit pis que pendre de la double fin. Mais à la veille de l’abandonner, on lui trouve soudainement des vertus. Et voilà la région repartie dans un questionnement récurrent : qui veut la mort de la double fin ? Il y a ceux qui parlent d’éléments tangibles concourant à la disparition de la distillation article 28. « Bien avant la mission Zonta, la Commission européenne a dénoncé un système anachronique, “d’une autre époque” conduisant à une économie régulée, administrée, régentée par l’Etat. Une des manifestations de cette attitude critique à l’égard de la double fin fut le contrôle FEOGA et l’obligation faite à la région de respecter la QNV “historique”. Dans ce contexte, le ministère de l’Agriculture français a plutôt tenté de sauver la double fin, à coup de dérogations, d’abord en 2001 puis en 2003. Son objectif : permettre à la région de fonctionner “quand même” sans plonger dans la dérégulation. Sachant que des mesures dérogatoires ne peuvent durer ad vitam aeternam, il a bien fallu chercher une “porte de sortie” et c’est l’affectation des ha qui a été trouvée. Ce système permet d’avoir un cadre réglementaire crédible – il offre une sécurité juridique – tout en permettant de conserver de la souplesse. On ne parle pas d’identification parcellaire mais d’affectation, ce qui permet des allers-retours. Par ailleurs, l’INAO a accepté le principe de la fixation d’un rendement annuel en hl d’AP inférieur au rendement qualitatif inscrit dans le décret d’appellation, une procédure dérogatoire. Reste qu’aucun système n’est parfait. Et d’ailleurs, doit-on attendre d’une réglementation qu’elle est un rôle de pilotage économique ? »

Et puis il y a ceux qui, comme Christian Baudry, sont des défenseurs « historiques » de la double fin, même s’ils n’ont pas répugné à quelques adaptations. La filière Pineau en apporte tous les jours la preuve, elle qui, dans un système double fin, met en œuvre l’affectation des surfaces Pineau depuis des années. Ch. Baudry se montre sceptique quant à la disparition programmée de la double fin. « Pour qu’elle passe à la trappe, il faudrait que soit supprimé l’article 28 et avant cela, que l’OCM viti-vinicole soit modifiée. On préjuge que les politiques se mettent d’accord pour qu’elle le soit. La modification de l’OCM vitivinicole ne me paraît pas inéluctable. J’ai dit un jour que la fin de la double fin était gravée dans l’airain… autant qu’une décision qui ne s’appliquerait pas. La double fin présente le gros avantage d’être gérée par la région sans que les autres y mettent leur nez. Si un dérapage du volume Cognac se produit une année, on peut y mettre bon ordre l’année suivante. Par ailleurs, je vois mal les autres régions accepter que les Charentes produisent des jus de raisin à 180 hl vol./ha alors qu’elles ne pourraient pas le faire. Enfin, un argument consiste à dire que la distillation de retrait de l’article 28 coûte cher à l’Union européenne… sauf qu’elle coûte trois fois rien. Durant les cinq dernières années, quelles quantités de vin furent livrées à l’article 28 ? La Communauté subventionne davantage les jus de raisin mais personne ne songe à remettre en cause cet avantage. C’est vrai que la subvention va aux opérateurs et non aux producteurs. Beaucoup voient dans un régime de séparation des surfaces “la “solution. A travers ce régime, les gens espèrent bien se doter de vignes “éponges”. Or, le concept de vignes éponges est antinomique de celui d’affectation. Il faut savoir que depuis des années, ministère de l’Agriculture et INAO n’ont qu’un souci en tête : bloquer les vignes éponges. C’est tout le sens de la limite de rendement des “vignes autres”. Ces vignes éponges que l’on pourchasse ailleurs, veut-on les créer en Charentes ? »

Si Christian Baudry défend la double fin, il ne se fait pas pour autant le contempteur de l’arrachage. « Je remarque, dit-il, que ceux qui, aujourd’hui, veulent maintenir la double fin, parlent tous d’arrachage : “il n’y a qu’à arracher 10 % du vignoble !” Légalement, il faut d’abord qu’ils fassent passer leur position. Je sais bien que dans cette région, de tout temps, tout le monde a toujours pensé que la solution au problème consistait à ce que le voisin s’en aille. Via l’arrachage, les négociants espèrent faire monter le rendement Cognac. Effectivement, le rendement Cognac peut grimper à 8 ou à 9 hl AP/ha. Mais une fois qu’il se sera arraché 10 000 ha, il faudra encore augmenter la production pour conserver, in fine, ce volant de 10 000 ha nécessaires pour empêcher que les cours s’envolent. Sinon il se passera ce qu’il est advenu en 1989-1990 : la flambée des prix et le “casse-gueule” à l’arrivée. Les viticulteurs se satisferaient tout à fait d’une remontée très substantielle des prix mais pas forcément le négoce. Même avec 10 000 ha en moins, il fera toujours en sorte de conserver un volant de flexibilité, quitte à lever le pied. Depuis le phylloxera, la crainte du négoce de Cognac fut toujours la même : manquer de marchandises. D’où son souci constant de garder un volant de flexibilité. A cet égard, l’arrachage ne constitue pas une bonne réponse. »

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