Il décroche son syndicat unique

17 mars 2009

En quelques mois, les trois syndicats du négoce – Syndicat des exportateurs, Progrès et Tradition et maintenant l’Union syndicale – auront réussi à édifier leur « maison commune ». C’est donc uni sous la bannière du Syndicat des maisons de Cognac que le négoce de Cognac va aborder les échéances de l’ADG et du renouvellement du BNIC. Tout en félicitant le négoce, le chef de famille de la viticulture, Bernard Guionnet, exprime son amertume : « Ce que le négoce vient de réaliser, nous ne sommes pas arrivés à le faire, alors que presque rien ne sépare les deux formations viticoles SGV et SVBC. »

ngoce_opt.jpeg

L’union paraphée par Antoine Cuzange, Jean-Marc Olivier et Yann Fillioux.

Le 19 décembre 2007, le Syndicat des exportateurs et Progrès et Tradition annonçait officiellement leur fusion en un seul syndicat, le Syndicat des maisons de négoce. Les protagonistes, Jean-Marc Olivier en tête, regrettaient alors de n’avoir pu convaincre leurs collègues de l’Union syndicale à les rejoindre, tout en précisant que « la porte restait grande ouverte ». Il n’aura pas fallu plus de cinq mois de date à date pour que cette porte soit poussée. Le 19 mai dernier, l’Union syndicale a rejoint le Syndicat des maisons de Cognac. Ainsi, le négoce s’est mis en ordre de marche pour aborder cette période élective, élection à l’ADG puis renouvellement du BNIC le 23 juillet prochain. Première manifestation concrète de cette union : le négoce va présenter une liste commune à l’ADG (voir encadré). La réussite de la démarche du négoce, Jean-Marc Olivier, président du SMC (Syndicat des maisons de Cognac) l’a met sur le compte du travail de longue haleine initié depuis de nombreuses années, la recherche de consensus et surtout, dit-il, « la grosse envie d’aboutir à un résultat ». Il y voit une évolution très positive « qui va faire évoluer les différents dossiers de l’appellation ». Yann Fillioux, chef de famille du négoce, insiste quant à lui sur l’intérêt commun de tous les négociants. « Nous avons beaucoup plus de choses qui nous rapprochent que de choses qui nous séparent. » Ceci étant, qui dit syndicat unique ne dit pas unicité de pensée. Pour Antoine Cuzange, président de l’Union syndicale jusqu’à présent, « les divergences qui s’exprimaient précédemment dans une instance plus publique s’exprimeront dorénavant dans une instance plus privée, en amont des décisions ». Une manière de procéder « plus efficace, qui permettra de gagner du temps ». Pour Jean-Marc Olivier, le principal gain tient peut-être à la crédibilité supplémentaire attachée à l’unité. « Beaucoup de nos membres sont représentés dans des instances nationales voire internationales. Le fait de parler d’une seule voix est toujours plus efficace et surtout plus crédible. Etaler des divergences, c’est brouiller le message professionnel envoyé à l’exétérieur. » Si tout concourait au rapprochement, pourquoi la concrétisation a-t-elle réclamée autant de temps ? C’est que tout n’allait pas de soi. Antoine Cuzange a abordé la question sensible des minorités, minorité numérique pour les grandes maisons et bien sûr minorité économique pour les petites. « Quatre, cinq voire six maisons parlent en millions de caisses quand le plus grand nombre parlent en milliers voire en centaine de caisses. Préserver les intérêts de chacun relevait de la quadrature du cercle. Mais nous sommes parvenus à nous mettre d’accord sur les votes qualifiés qui permettront de respecter les minorités. »

amertume

Bernard Guionnet ne le cache pas. Il ressent de l’amertume. Le chef de famille de la viticulture au BNIC avait fait du rapprochement des deux syndicats viticoles, SGV et SVBC, un des objectifs de son mandat. Même a minima, « au sein d’une fédération légère » proposait-il ces six derniers mois. Mais, apparemment, c’était encore trop demander. En cinq ans, il n’aura pas réussi à inverser le cours des choses. Ceci étant, la partie n’était pas forcément facile. On le sait bien, les fractures familiales sont les plus longues à cicatriser. Or les gens du SGV et ceux du SVBC se sont bien retrouvés, un temps, sur le même bateau, en 1999-2000, lors de l’émergence du syndicat unique de la viticulture. Et puis, très vite, le SVBC a fait sécession, au nom de l’affectation parcellaire, de la gestion des excédents et surtout d’une QNV trop basse trop longtemps. Ces motifs de rupture sont-ils toujours d’actualité ? Bernard Guionnet ne le pense pas et, dit-il, « comme moi une bonne partie de la viticulture se demande ce qui sépare aujourd’hui les deux formations ? » L’affectation parcellaire ? La gestion des excédents ? Le niveau de QNV ? Pour des raisons diverses et variées, soit réglementaire (l’affectation parcellaire), soit économique (le niveau de QNV, la gestion des excédents), « ces questions ne font plus vraiment débat ». Le chef de famille voyait un déclic possible dans le changement de mode de calcul de la QNV, « évoluant de l’empirique et du psychologique vers le rationnel ». Il a été déçu. « Cette façon de camper sur ses positions, sans doute plus ou moins savamment entretenue, est un peu ridicule » estime-t-il. Mais ce qui lui semble encore le plus dommageable, c’est que le négoce ait réussi là où la viticulture a échoué. « En moins de six mois, le négoce passe de trois syndicats à un seul alors que nous, sans vraiment de divergences d’opinion, nous sommes incapables d’y parvenir ! Il est plus facile de voir la paille dans l’œil de son voisin que la poutre chez soi. Le SVBC reproche au SGV de ne pas avoir augmenté la QNV Cognac suffisamment tôt, mais ce même syndicat ne prônait-il pas en 2003 l’arrachage de 12 000 ha ! Des erreurs, tout le monde en a fait, le SGV, le SVBC et le négoce qui, à un moment, a baissé ses prix, avec pour effet de crisper la viticulture. » Interpellés sur le thème du rapprochement syndical, les dirigeants du SVBC ne s’y montrent pas franchement hostiles. « On le fera après les élections à l’ADG. » Mais ce retard de timing a le don d’exaspérer le chef de famille de la viticulture. « N’aurait-il pas été plus intelligent de le faire avant. » Pour montrer sa désapprobation, B. Guionnet a choisi de figurer sur la liste des délégués du SGV pour l’élection à l’ADG alors qu’il aurait pu adopter une position de neutralité. « On me le reproche mais j’assume. » D’autant plus qu’il lui paraissait normal que le SVBC prenne l’initiative du rapprochement, lui qui fut à l’origine de la scission. Son regret à la veille de cette période élective : que la viticulture désunie regarde passer le train uni du négoce.

 

(1) Bache-Gabrielsen et Cie, Braastad Tiffon Philippe SARL, Camus et Cie, Chabasse Cognac, Château-Paulet S.A., Cognac Ferrand, D’Angeville, De Fussigny A., Dies Charentaises, Die de La Tour, Die de Matha, Die des Moisans, Die Tessendier et Fils SA, Domaine des Broix SAS, Dor Ste, Fillioux Pascal, Hardy Cognac, H. Mounier S.A., Larsen S.A. Ets, Prunier Cognac S.A., Roullet Maison, Maison A. Staub et Cie SAS, Royer Louis S.A.S., SARL Guy de Bersac, Tiffon Ets, Vinet Die.

(2) Francis Barat (H. Mounier), Jean-Pierre Cointreau (Chateau-Paulet), Philippe Coste (Die de Matha), Thierry Démoulis (Château de Cognac Otard), Yann Fillioux (Hennessy), David Gareyte (Bache-Gabrielsen), Jean-Marie Girardeau (Camus), Jean-Pierre Lacarrière (Rémy Martin), Jean-Marc Morel (Martell), Jean-Marc Olivier (Courvoisier), Patrick Peyrelongue (Delamain), Patrick Raguenaud (Marnier-Lapostolle), Jérôme Royer (Louis Royer).

Le SMC et l’ADG

Le nouveau Syndicat des maisons de Cognac compte une quarantaine de membres entre les 26 maisons de l’Union syndicale (1) et les 12 maisons « d’avant ». C’est ce syndicat qui a déposé le 20 mai dernier la liste unique des candidat négociants aux postes de délégués de l’ADG. Cette liste compte 13 noms (2) puisque, sur un nombre total de 17 sièges, 4 sont réservés aux bouilleurs de profession. A noter que contrairement à la viticulture qui a choisi une concordance exacte entre le nombre de délégués viticoles à l’assemblée générale et le nombre de sièges à pourvoir (68 au total), le négoce a opté pour une solution autre : doter chaque délégué de quatre voix. Au final, le nombre d’administrateurs à l’ADG sera égal de part et d’autre, 17 de chaque côté.
 

A lire aussi

L’appel à l’aide de l’US Cognac Rugby

L’appel à l’aide de l’US Cognac Rugby

C'est un constat qui a fait le tour des médias, sportifs ou non: l'US Cognac va très mal. Malgré les efforts de Jean-Charles Vicard pour tenter de redresser la barre, le club se retrouve dans une difficile situation financière.  La direction a de fait décidé d'envoyer...

error: Ce contenu est protégé