Logique De Guerre, Logique De Marché

18 avril 2009

A près de 40 % le Cognac dépend des États-Unis. Dans ces conditions, on comprendra que toute « fâcherie » de la France et des États-Unis, sur fond de « logique de guerre » et de « stratégie de paix », inquiète les Cognaçais, même si c’est envisager les problèmes par le petit bout de la lorgnette. En ces temps de « pré-conflit » avec l’Irak, la France figure dans toutes les pages des journaux américains « et sur le mauvais côté de la page ». On le sait ! Les Américains sont patriotes et plutôt enclins aux réactions « binaires ». L’aura des produits français peut-elle être menacée outre-Atlantique ? Aux yeux de beaucoup d’étrangers, la France « est le pays qui sait dire non ». C’est même l’un de ses titres de gloire. En ce qui nous concerne, souhaitons que les Américains sachent toujours dire « oui » aux produits français et notamment au Cognac.

N’hésitons pas à le rappeler. Le rendez-vous des 26 et 27 février prochain au Comité national INAO risque d’être important pour la région. Si la modification du décret Cognac est votée, et avec elle le principe d’une affectation de surfaces selon les destinations, ce sera l’achèvement d’un système, celui de la double fin. Une page se tournera, une autre logique s’appliquera, avec ses règles, ses enjeux. Un nouvel effort de compréhension et d’adaptation sera nécessaire. Mais les viticulteurs charentais ont une certaine expérience en la matière.

Le 21 janvier dernier, lors d’une assemblée plénière exceptionnelle du BNIC, la famille de la viticulture a voté à l’unanimité sa participation à une rallonge d’enveloppe de la prime d’arrachage. Objet : permettre à tous les demandeurs qui avaient déposé leur dossier avant le 31 décembre 2002 (CTE, plus de 55 ans) de bénéficier de la bonification de prime à 100 000 F l’ha (15 000 euros), en dépit du dépassement des fonds de concours prévus au Contrat de Plan. La viticulture s’est engagée au versement d’un tiers de la somme, Etat et Région acceptant le principe d’un apport des deux autres tiers. Dans la pratique, la CVO (cotisation volontaire obligatoire) se matérialisera par un prélèvement de 2,40 e HT par hl AP, sur toutes les ventes de Cognac effectuées par la propriété (vins Cognac, eaux-de-vie) sur la période courant du 1er avril 2003 au 31 mars 2004. En ce qui concerne le paiement de la prime d’arrachage, ceux relevant de la « première file » peuvent s’attendre à un versement complet avant la fin de l’année 2003 (d’abord prime communautaire, complément ensuite). Par contre, pour les autres (la « seconde file »), le paiement définitif pourrait bien n’intervenir qu’en 2004, ne serait-ce que pour attendre l’ouverture des crédits 2004 du Contrat de Plan, nécessaires à abonder ceux de l’année 2003. A noter que toutes les demandes d’arrachage enregistrées au 31 décembre 2002 (portant sur 1 650 ha) n’aboutiront pas, suite à des renonciations des demandeurs eux-mêmes. Car le marché foncier viticole reste soutenu et c’est bien là l’un des paradoxes de la prime d’arrachage, comme le fait qu’elle soit imposable ou que la prime PAC n’existe pas derrière.

alambic : un patrimoine à défendre

La société Prulho vient d’être rachetée par Chalvignac, lui-même constructeur de cuves inox et d’alambics. La société Prulho, dont plus de 2 000 alambics fonctionnent dans la région délimitée et dans le monde, était confrontée depuis plusieurs années à des difficultés financières majeures. L’entreprise avait fait de la distillation sa spécialité et les diversifications vers la chaudronnerie inox n’ont pas été suffisantes pour compenser un marché en chute libre depuis le milieu des années 90. Après plusieurs mois d’attente, le groupe Chalvignac vient de reprendre l’ensemble des activités cuivre et inox de la société Prulho, et pour les salariés c’est sans aucun doute la moins mauvaise solution. En effet, Chalvignac (le seul repreneur potentiel) se propose de maintenir une quarantaine d’emplois sur les 70. Pour la production d’eaux-de-vie régionale, la disparition du groupe Prulho constitue une grosse perte en matière de savoir-faire car les principes de fabrication des alambics charentais vont à l’encontre de toutes les démarches de fabrications industrielles. L’alambic fait partie du patrimoine viticole régional et de multiples expérimentations ont démontré son rôle déterminant dans l’extériorisation de la typicité des eaux-de-vie. A l’heure où la notion d’appellation est sur toutes les lèvres, la profession n’a-t-elle pas à se soucier de la pérennité de la fabrication des alambics ? En 1985, la région comptait six constructeurs. Aujourd’hui, il ne reste plus que la SA Chalvignac et la sarl Montel qui sont en mesure de perpétuer la fabrication traditionnelle d’alambics charentais. Le constat est simple : la chaudronnerie cuivre est un marché aléatoire qui n’attire plus les vocations. Le nombre d’ouvriers qualifiés susceptibles de former un fond de chaudière, un chapiteau, un col de cygne ne dépasse pas une vingtaine de personnes et la moyenne d’âge de ces experts dépasse la cinquantaine. Se préoccupe-t-on assez du renouvellement et de la formation des chaudronniers dans la région de Cognac alors que, chaque hiver, 2 500 à 3 000 alambics fonctionnent ? La volonté de transmettre ce capital de savoir-faire et de technologie repose désormais sur deux responsables d’entreprises. Souhaitons que d’ici 5 à 10 ans, ce patrimoine soit « cultivé » et installé durablement au sein de notre région, car il serait tout de même choquant d’apprendre que la fabrication d’alambics charentais soit délocalisée au Portugal ou dans les pays de l’Est.

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