Comment mieux acheter le gaz quand on est un petit utilisateur isolé dans un village de Charente ou de Charente-Maritime ? Cette question, beaucoup de bouilleurs de cru se la posaient depuis longtemps sans vraiment croire qu’ils pourraient disposer un jour de moyens objectifs pour dialoguer avec leurs fournisseurs. L’idée a germé dans l’esprit de quelques bouilleurs de cru adhérents du SGV Cognac au début des années 2000 qui, en discutant entre eux, s’étaient rendus compte que les conditions des contrats et des modalités d’achats du gaz pouvaient être très différentes selon les fournisseurs. Finalement, c’est Benoît Stenne, le précédent directeur du syndicat, qui est arrivé à formaliser les choses. La volonté de mettre en commun les prix d’achats du gaz a débouché sur une initiative concrète et très appréciée des bouilleurs de cru. A l’origine, ce ne sont pas les différences de tarif du gaz liées aux volumes consommés qui avaient interpellé les bouilleurs de cru mais les modalités de location et de maintenance des citernes. En effet, suiv ant l’époque où avaient été signés les contrats, des différences significatives sur ces charges fixes existaient. Très souvent, les jeunes bouilleurs de cru travaillent avec la distillerie de leurs parents qui avaient eux-mêmes fait monter le propane dans les années 70 à 80. Forcément, les conditions de négociations du raccordement au gaz se sont effectuées à l’époque dans un contexte très différent avec des prix des tonnes de gaz modestes et des modalités de mises à disposition des citernes fluctuantes. Le travail du SGV Cognac sur ces aspects a permis d’apporter plus de transparence et les fournisseurs ont depuis harmonisé leurs prestations de locations et de maintenance des citernes.
Le SGV propose un observatoire des cours du propane
Chaque année à la fin du mois d’octobre, les 1 500 à 2 000 distillateurs à la propriété répartis dans l’ensemble de la région délimitée attendent avec beaucoup d’intérêt les résultats de la consultation tarifaire du SGV. M. Yves Auffret (bouilleurs de cru à Gimeux), l’un des professionnels qui a aujourd’hui en charge le dossier gaz au sein du SGV, considère que la hausse constante de ce combustible cautionne cette initiative : « A titre personnel, j’ai toujours été sensible à la consommation de gaz de mon alambic et ce n’est pas un hasard si cette initiative est très appréciée de nos adhérents distillateurs à la propriété. D’une manière générale, les bouilleurs de cru n’avaient pas l’habitude de rencontrer régulièrement les fournisseurs de gaz.
Jusqu’à ces dernières années, les seuls contacts se résumaient aux commandes quand la citerne allait être vide. L’initiative du SGV a rendu systématiques des rencontres avec les fournisseurs 2 à 3 fois par campagne, ce qui a permis de faire jouer la concurrence et de limiter les écarts de prix. » Les quatre principaux fournisseurs de propane Antargaz, Butagaz, Primagaz et Totalgaz, après avoir été au départ un peu surpris par cette initiative, adhèrent maintenant à la démarche.
Plusieurs consultations des fournisseurs chaque hiver
Au fil des années, un dialogue constructif s’est instauré avec les différents responsables commerciaux des quatre fournisseurs. Le dossier gaz est aujourd’hui géré par Emilie Chapelain, l’animatrice du SGV, qui chaque année au début du mois de septembre rencontre les sociétés : « En début de campagne, les premiers contacts courant septembre permettent de situer la tendance des cours du gaz. Les politiques commerciales des fournisseurs de propane sont différentes. Certaines sociétés proposent des prix de début de campagne qui sont ensuite réajustés au cours de l’hiver en fonction des cours mondiaux du gaz (liés aux fluctuations du Platt’s). D’autres entreprises déterminent un prix fixe du gaz du 1er octobre au 31 mars suivant. Lors de la première consultation, des écarts parfois importants apparaissent mais ils ont tendance à s’atténuer par la suite. La volonté de chaque société de défendre ou de prendre des parts de marché crée un climat de concurrence qui au cours des dernières années a permis de mieux contenir les hausses de cours du propane. Dans le courant des hivers, nous entretenons des contacts réguliers avec les fournisseurs qui nous informent de l’évolution du cours de cette matière première. On observe une certaine volatilité des cours et notre mission est d’aider les bouilleurs de cru à remplir leurs citernes au meilleur moment. Nous établissons un tableau de bord du prix du gaz durant toute la campagne de distillation qui est diffusé régulièrement à nos adhérents. »
D’une manière générale, les prix du propane ont augmenté puisqu’au cours de la campagne 2004-2005, ils se situaient entre 530 et 600 €/t en fonction des volumes consommés et l’hiver dernier ils atteignaient 600 à 800 €/t.
Des contacts avec Gaz de France pour le gaz naturel
La tendance haussière du cours du propane est un sujet de préoccupation dans le moyen terme vis-à-vis de l’évolution du coût des frais de distillation. D’une manière générale, les bouilleurs de cru utilisent encore peu le gaz naturel (beaucoup moins coûteux) car les distilleries sont très souvent éloignées des réseaux. Les responsables du SGV ont noué des contacts avec Gaz de France pour essayer de développer des alimentations au gaz naturel dans des zones où la densité de bouilleurs de cru justifie des niveaux de consommation suffisants.
Y. Auffret considère qu’une utilisation du gaz naturel plus intense par les bouilleurs est un moyen de limiter la hausse des frais de distillation dans le moyen terme : « Ce dossier gaz est vraiment un sujet de préoccupation important pour nous. Aujourd’hui, plus de 95 % des bouilleurs de cru utilisent du propane en raison de l’absence de réseaux de gaz naturel dans leurs villages ruraux. Gaz de France a développé ses réseaux à proximité des zones urbaines et beaucoup de distillateurs de profession ont ainsi pu se raccorder. Nous travaillons actuellement avec Gaz de France pour étudier une première initiative d’extension de réseau sur le secteur Thors- Sonnac en Charente-Maritime. L’étude de faisabilité est en cours et nous espérons que la densité suffisante de bouilleurs de cru dans ces communes va permettre de finaliser ce projet. L’autre problème du gaz naturel est pour les petites unités de moins de 500 hl d’AP/an, l’alimentation en 300 millibars qui oblige à modifier totalement l’installation gaz et les brûleurs qui au propane fonctionnent à 1,2 bar. C’est un investissement conséquent que beaucoup de viticulteurs hésitent à faire, surtout s’ils ont récemment réaménagé leurs distilleries. Nous souhaitons avoir une discussion avec Gaz de France sur ces problèmes de pressions d’alimentation des petites unités car si tout le monde pouvait être raccordé en 1,2 bar, cela faciliterait les choses. »
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