L’inconfort des viticulteurs vis-à-vis de la nouvelle réglementation sur les mélanges

14 mars 2009

pulvert_double.jpgL’introduction de la nouvelle réglementation sur les mélanges de produits phytosanitaires a suscité peu d’émoi au sein de la profession agricole, sauf dans les secteurs des cultures spécialisées comme la viticulture, l’arboriculture et le maraîchage. Les réactions de nombreux viticulteurs témoignent de leur adhésion sur le fond à cette démarche qui vise à sécuriser les conditions d’utilisation et d’application des produits phytosanitaires pour eux-mêmes et vis-à-vis des consommateurs ; mais, par contre, ils s’étonnent des conditions concrètes de sa mise en œuvre en raison de l’inadaptation technico-économique d’un certain nombre de solutions proposées. L’onde de choc liée a mis un peu de temps à se propager depuis la publication des mélanges autorisés dans le courant de l’été dernier, car sur les propriétés viticoles l’époque de réflexion sur les achats de produits phytosanitaires a lieu dans le courant de l’hiver. Depuis plusieurs semaines, bon nombre de vignerons prennent conscience des conséquences de la nouvelle réglementation sur les mélanges et ils ont le sentiment de subir complètement une situation à la fois justifiée sur de nombreux plans et aussi très mal maîtrisée sur d’autres aspects. La position d’utilisateur-consommateur de produits phytosanitaires devient de plus de plus inconfortable à la fois vis-à-vis du grand public et aussi maintenant dans le fonctionnement des structures professionnelles.

L’arrivée de cette nouvelle réglementation sur les mélanges représente sans aucun doute une évolution importante dans les méthodes de gestion de la protection du vignoble. Les très gros efforts de raisonnement des méthodes de lutte ont permis depuis maintenant plus de dix ans de « doser » à bon escient les interventions phytosanitaires et les viticulteurs ont dans leur ensemble renforcé dans leur démarche de production leur culture de respect de l’environnement. Par exemple, l’optimisation des conditions d’application des traitements et le respect de nouvelles exigences en termes de choix et de délais d’application des produits (vis-à-vis des risques de résidus ou des démarches HACCP) constituent des avancées importantes sur lesquelles la profession se montre souvent trop discrète. Traiter mieux pour traiter moins est devenu un axe majeur de réflexion sur les propriétés pour des raisons économiques et environnementales, et l’arrivée de la nouvelle réglementation des mélanges ne s’inscrit pas forcément dans cette même logique. Au niveau de la filière viticole, la rapidité de la mise en œuvre des mélanges autorisés et le manque de concertation sur des sujets importants peuvent conduire, sur certains aspects de la protection du vignoble, à une fragilisation des moyens de raisonnement de la lutte, voire à des impasses techniques et aussi à une hausse très significative des budgets « phytos ». C’est pour cet ensemble de raisons qu’il nous a paru important d’essayer de présenter les réflexions qui ont été à la base de la construction du projet de réglementation d’utilisation des mélanges.

Le premier projet de « chantier » sur les mélanges a été présenté au début de l’année 2001

La décision de lancer une réflexion technique sur l’utilisation des mélanges de produits phytosanitaires n’a pas été prise par les seuls services du ministère de l’Agriculture car ce projet a été soumis à l’approbation de la commission des produits anti-parasitaires au début de l’année 2001. Cette structure, qui regroupe des représentants du ministère de l’Agriculture, des agriculteurs (des représentants de la FNSEA), des industries phytosanitaires, de la distribution des produits agricoles, des associations de consommateurs et des associations de défense de l’environnement, a entériné la décision de lancer « le chantier » des mélanges et un avis a été publié au Journal officiel à la fin du premier semestre 2001. Le discours officiel des services du ministère de l’Agriculture sur la pratique des mélanges s’inscrit dans l’objectif double d’amélioration et de sécurisation de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques souhaités par la société civile (les consommateurs) et aussi d’optimisation des pratiques d’utilisation des agriculteurs. Plus simplement, l’action engagée par le ministère sur les mélanges tend à vouloir clarifier et simplifier ces pratiques vis-à-vis de la protection de la santé et des milieux écologiques. Avec le recul, on peut imaginer que les arguments de l’Administration et des associations de consommateurs au nom du « principe de précaution » ont sûrement pesé très lourd lors de ces débats ; mais, d’un autre côté, les professionnels de l’agriculture et des industries phytosanitaires ne se sont pas non plus opposés à cette démarche à l’époque. Apparemment, les représentants professionnels de l’agriculture n’ont pas pu ou n’ont pas souhaité développer une argumentation solide qui soit susceptible à la fois de concilier les enjeux de santé publique, de respect de l’environnement, les cahiers des charges de production raisonnée et la recherche de réalisme économique imposée par les conditions de marché. Cela a débouché sur la publication d’une liste positive de mélanges autorisés qui ne semble satisfaire pleinement aucun intervenant de la filière phytosanitaire (techniciens des services officiels, distributeurs et firmes phytosanitaires) et mécontente surtout les exploitants travaillant sur des cultures spécialisées. Les spécificités de lutte contre les parasites dans les cultures spécialisées comme la vigne et les vergers n’ont pas pu être suffisamment défendues au sein de la commission des produits anti-parasitaires, faute d’y être directement représentées, et la mise en place stricte de la réglementation soulève aujourd’hui de profondes inquiétudes chez les viticulteurs et les techniciens de la filière. Cette situation confirme les différences d’appréciation notables qui existent au sein de la grande famille des agriculteurs en France. Un céréalier qui au maximum effectue deux traitements fongicides par an n’est pas en mesure d’apprécier les conséquences d’une nouvelle réglementation sur les mélanges par rapport à un viticulteur qui en moyenne effectue près de dix applications de fongicides annuellement.

Avis au « journal officiel » du 21 septembre 2002

benoit_herlemont.jpgLa présentation de cette nouvelle réglementation sur les mélanges laisse à penser que les équipes de la Protection des végétaux aux niveaux national et régional déploient des moyens beaucoup plus importants sur les aspects de contrôle que sur les moyens techniques nécessaires au bon développement des pratiques agricoles. M. B. Herlemont, du SRPV Aquitaine, conteste cette vision de l’activité du service auquel il appartient, même s’il concède qu’actuellement les contrôles font désormais partie des missions du SRPV : « L’introduction de la nouvelle réglementation sur les mélanges ne doit pas laisser à penser qu’en 10 ans les équipes de la Protection des végétaux sont passées du statut de consultants techniques à celui de contrôleurs ayant un rôle répressif. La réduction des intrants phytosanitaires en agriculture correspond à une demande de la société civile. L’enjeu n’est pas d’en proscrire l’utilisation mais d’en sécuriser leur emploi en tenant compte à la fois des impératifs agronomiques et de sécurité alimentaire. Les équipes de la Protection des végétaux continuent de développer deux axes stratégiques, le premier étant le conseil technique sur le complexe parasitaire et les bonnes utilisations des produits phytosanitaires (par le biais des expérimentations, des avertissements agricoles et de l’information sur la réglementation) et le second étant bien sûr le contrôle. Ces deux pôles sont parfaitement équilibrés en Aquitaine puisque le conseil technique représente encore 60 % de notre activité. Dans d’autres régions, cet équilibre peut varier mais pas non plus dans des proportions extrêmes. »

L’absence de connaissances scientifiques sur le sujet a joué un rôle déclencheur majeur

En fait, M. Benoît Herlemont, le responsable du pôle surveillance du territoire et prévention des risques en Aquitaine et aussi expert vigne auprès de la DGAL (à ce titre, B. Herlemont siège en tant qu’expert associé au comité d’homologation des produits phytosanitaire), nous expliquait qu’à l’origine l’Administration a lancé ce projet sur les mélanges après avoir fait le constat suivant : « Il existe une procédure d’évaluation des risques des produits phytosanitaires qui débouche sur la démarche d’homologation et elle donne pleine satisfaction. Par contre, dans la pratique, les spécialités commerciales sont fréquemment utilisées en mélange et aucune procédure d’évaluation toxicologique pour l’environnement et l’application n’existe. Il s’est avéré que les organismes techniques et les firmes phytosanitaires ne disposaient d’aucune information scientifique et pratique sur le sujet. Ce vide complet a été l’élément déclencheur de la démarche d’évaluation sur les mélanges qui est actuellement en cours ». Le ministère de l’agriculture a engagé des discussions avec les différents partenaires de la filière agricole qui ont permis d’établir un avis d’information destiné aux opérateurs responsables de la mise en marché (les firmes et les distributeurs) et les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques. Ce document est paru Journal officiel du 21 septembre 2002. L’absence de capital de connaissances scientifiques sur les effets toxicologiques et environnementaux des mélanges a aussi influencé fortement les réflexions sur la mise en place d’une méthode d’évaluation des risques. Comment fallait-il aborder ce problème compte tenu d’une part du vide scientifique sur le sujet et d’autre part des réalités pratiques d’utilisation ? L’absence de processus d’homologation adapté à une évaluation scientifique des mélanges et le manque de consensus entre les acteurs siégeant au comité d’homologation a amené les responsables du ministère de l’agriculture a refusé de publier une liste négative sur les mélanges (c’est-à-dire un lexique de spécialités commerciales ne pouvant pas être utilisées en mélanges). C’est l’option d’une liste positive (spécifiant les mélanges autorisés) reposant à terme sur une méthode d’évaluation qui a été retenue.

Les méthodes d’évaluation scientifique des risques pour les mélanges n’existent pas à ce jour

le_niveau_francais.jpgLes responsables de l’Administration du ministère de l’agriculture, qui ont décidé depuis maintenant trois ans de mettre en œuvre cette nouvelle réglementation sur les mélanges de produits phytopharmaceutiques, ont abordé ce chantier en ayant une vision globale de la situation et sûrement pas assez technique et agronomique our les cultures spécialisées. Les experts de la Direction générale de l’alimentation (la DGAL) ont travaillé en concertation avec les instituts techniques de chaque filière agricole, l’ITV en viticulture, pour établir un état des lieux des mélanges présentant un intérêt agronomique pour chaque culture. Au début de l’année 2003, l’ITV a élaboré des listes de mélanges intéressantes sur le plan des critères agronomiques qui devaient être soumises à une évaluation dite « prioritaire ». Les dossiers de demandes de recevabilité des mélanges peuvent être déposés par les instituts techniques, les firmes phytosanitaires, les distributeurs et mêmes les viticulteurs. Ensuite les experts de chaque culture de la DGAL examinent la recevabilité des demandes en vue d’un enregistrement provisoire du mélange valant autorisation d’emploi. C’est une procédure globale qui englobe une vérification des aspects administratifs (validée par les instituts techniques) du dossier et l’analyse de critères agronomiques et toxicologiques. Par exemple, les mélanges comportant un produit classé T ou T + ou une substance classée CMR2 sont refusés systématiquement (ils ne peuvent prétendre à aucune procédure d’évaluation ultérieure) et leur uilisation en mélange avec d’autres spécialités n’est pas possible. Ceux mettant en œuvre deux produits comportant une phrase de risque R40, R43, R61, R62 ou R63 sont jugés irrecevables. Des mélanges contenant une seule spécialité classée R40, R43, R61, R62 ou R 63 sont autorisés. L’instruction technique de la demande est effectuée par les experts de la commission d’étude de la toxicité (des personnalités scientifiques indépendantes aux compétences reconnues) et les experts cultures qui réalisent une évaluation du risque sur la mise en œuvre de ce mélange. Les conclusions des experts de la commission des toxiques sont prises en compte par le comité d’homologation qui émet une proposition de décision positive ou négative sur l’enregistrement des mélanges. La démarche « d’agrément » des mélanges de produits phytosanitaires est en quelque sorte une seconde étape d’homologation devenue incontournable compte tenu qu’elle est spécifique aux conditions d’utilisation. L’approche théorique de cette nouvelle démarche paraît satisfaisante car elle repose sur une méthode d’évaluation scientifique toxicologique et environnementale des mélanges, mais, paradoxalement, la démarche et les méthodes scientifiques nécessaires à l’évaluation ne sont toujours pas finalisées. A ce jour, il n’est toujours pas possible d’un point de vue scientifique de procéder aux évaluations de risques des mélanges de produits phytosanitaires.

Une évaluation des mélanges fondée sur les données scientifiques issues les spécialités de base

Les experts scientifiques, les experts cultures et les représentants des firmes phytosanitaires n’ont pas encore réussi à construire ensemble une démarche scientifique d’évaluation sur des bases constructives. Cette situation unique d’autorisation d’utilisation des mélanges fonctionne donc sur des bases totalement inverses de celles qui existent pour les spécialités commerciales phytosanitaires. En effet, avant d’être commercialisée, une spécialité commerciale contenant une ou plusieurs matières actives doit être testée pendant plusieurs années et sur de nombreux sites, dans un cadre scientifique très précis sur le plan de l’efficacité et des critères toxicologiques et environnementaux. Les conclusions de ce travail sont soumises au comité d’homologation qui délivre ou pas l’autorisation de mise en marché. Pour les mélanges, les procédures d’évaluation scientifique n’existant pas, l’Administration a proposé – à la fois pour ne pas bloquer le système et sûrement aussi au nom « du principe de précaution » – d’établir les listes d’autorisation positive en prenant en compte les seules références qui existent, c’est-à-dire celles liées aux démarches d’homologation des spécialités commerciale. C’est la première fois qu’une réglementation nouvelle concernant l’emploi de produits phytosanitaires est mise en œuvre avant même que soient réalisées des expérimentations débouchant sur une homologation (une AMM). Il faut savoir aussi que la France est le premier et le seul pays européen à s’intéresser à la problématique des mélanges. On peut se demander pourquoi les fonctionnaires du ministère de l’Agriculture français ont ouvert le dossier des mélanges aussi rapidement, sachant que la directive européenne n° 91/414 régissant le processus d’homologation des produits phytosanitaire au sein des 25 Etats membres va être révisée prochainement. Plus concrètement, cela signifie que les méthodes scientifiques d’évaluation des risques toxicologiques et environnementauxs dans le cadre des processus d’homologation des produits phytosanitaires vont évoluer et seront renforcées afin de s’adapter à l’évolution des connaissances et des capacités d’analyse. Il est probable que les experts français de la DGAL vont sûrement défendre leurs démarches sur les mélanges en espérant l’intégrer dans la future directive réglementant le processus d’homologation des spécialités commerciales. Apparemment, la démarche de réglementation française d’utilisation des mélanges, qui a été déjà présentée à des responsables agricoles de divers pays de la Communauté européenne, aurait reçu un accueil favorable.

Le catalogue des mélanges autorisés disponible sur le site e-phy.agriculture.gouv.fr

Actuellement, le catalogue des produits phytosanitaires homologués et la liste positive des mélanges autorisés sur les différentes cultures sont consultables sur le site internet du ministère de l’Agriculture en se connectant à e-phy.agriculture.gouv.fr. Les mises à jour sont effectuées périodiquement après les réunions du comité d’homologation, mais certains mélanges peuvent être remis en cause entre la période des achats morte-saison et l’utilisation sur les cultures. La liste des mélanges autorisés mise en ligne par le ministère de l’agriculture constitue aujourd’hui le seul document à caractère officiel qui est consultable par l’ensemble de la filière (les agriculteurs, les distributeurs et les firmes phytosanitaires). Le fait de mettre en ligne toutes ces données représente en théorie un moyen efficace et rapide pour assurer la diffusion des informations. Sur le plan pratique, les choses semblent en être autrement car l’accès à la liste des mélanges autorisés en vigne était assez complexe et pas forcément en phase avec les attentes des utilisateurs. En effet, des techniciens de la filière et des viticulteurs soucieux de raisonner la construction de leurs programmes de protection en tenant compte d’une recherche d’efficacité des matières actives ciblée et différenciée restent sur leur « faim ». De nombreuses personnes aguerries aux pratiques informatiques considèrent que la base de données de diffusion des informations manque de convivialité et de fonctionnalité, et cela nuit à la transparence d’utilisation des différents mélanges. Quelques utilisateurs plus avertis des moyens informatiques estiment même que la base de données actuelle peut être considérablement améliorée après quelques journées de travail de programmeurs. Eh bien, en ce début d’année, ces doléeances ont été partiellement entendues puisque le catalogue est devenu plus accessible même si la présentation actuelle ne répond pas encore totalement aux attentes des viticulteurs soucieux de raisonner à partir des matières actives. On peut penser que la mise en ligne du catalogue des mélanges autorisée a été réalisée avec sérieux mais sans réellement tenir compte des attentes concrètes des utilisateurs que sont les viticulteurs et l’ensemble des techniciens de la filière. Les relations entre les services du ministère de l’Agriculture et l’ITV ont été au départ assez tendues car les approches et les méthodes d’établissement des listes de mélanges étaient fondamentalement différentes. Les spécialistes de la protection du vignoble de l’ITV ont attiré l’attention des fonctionnaires de la DGAL sur les conséquences de la mise en œuvre du chantier des mélanges notamment au niveau de certaines impasses techniques et ils ont souhaité qu’une liste de mélange négative soit établie. Les responsables du ministère en ont décidé autrement en optant pour une liste positive et les difficultés financières de l’ITV depuis trois ans n’ont pas permis à cet organisme de prendre en charge la diffusion de l’information, ce qui explique aussi le manque de fonctionnalité de la banque de données actuelle. Le souci d’efficacité technique de nombreux ingénieurs de l’ITV a contribué à gérer de façon plus constructive le chantier des mélanges, mais cette volonté d’avancer de manière positive ne doit pas faire perdre de vue que tous les problèmes de protection ne sont pas pour autant résolus. En grande culture, la diffusion du catalogue de mélanges autorisés est assurée par Arvalis, qui a conçu un outil adapté aux attentes des techniciens et des céréaliers. Ce centre technique s’est beaucoup investi dans le chantier des mélanges dès le départ et son approche a été facilitée en raison d’une part de la simplicité du complexe parasitaire et d’autre part des moyens financiers nettement plus conséquents dont dispose cet organisme.

Trois fois moins de mélanges homologués en vigne que pour les céréales

Actuellement, les 8 432 mélanges autorisés en viticulture ne concernent que les luttes mixtes anti-botrytis – anti-tordeuses et anti-mildiou – anti-oïdium. Pour le mildiou et l’oïdium, 7 839 mélanges de spécialités commerciales (à 95 % des mélanges binaires) ont reçu une homologation, ce qui, à première vue, peut paraître élevé. Or, on constate l’inverse, les gammes de spécialités commerciales à spectre unique anti-oïdium ou anti-mildiou se sont sérieusement contractées. A titre d’exemple, des produits majeurs qui étaient très employés, comme par exemple le Légend, l’Hélios, le Flint, le Prosper, le Propser, le Thiovit, le Dinocap, le Mikal, le Valiant, l’Eperon, le Panthéos, présentent une phase de risque, et l’Olymp est carrément classé CMR2. Il faut aussi tenir compte du fait que certaines spécialités phytosanitaires sont commercialisées sous plusieurs noms différents et les mélanges autorisés ne concernent qu’une seule dénomination commerciale. La contraction des gammes de spécialités vignes s’accentue dans des proportions importantes et inquiétantes pour la maîtrise de certains problèmes techniques. A titre de comparaison, les autorisations de mélanges pour les céréales à paille dépassent le niveau des 25 000, avec une pression cryptogamique beaucoup plus faible (deux traitements maximum par an) ; celles sur la betterave se situent autour de 16 000. Tous ces éléments confirment bien que la vigne est le parent pauvre, au même titre d’ailleurs que l’arboriculture où la situation est encore plus critique. Un éminent technicien d’un service spécialisé dans la protection du vignoble (n’appartenant pas au SRPV) estime pour sa part que les besoins en matière de mélanges autorisés en viticulture devraient dépasser le niveau des 30 000 pour faire face aux spécificités du complexe parasitaire des différents vignobles français. En effet, actuellement un certain nombre de créneaux de la protection du vignoble ne sont pas suffisamment couverts sur le plan technique par l’actuelle liste des mélanges autorisés.

Des carences techniques pour les luttes mixtes Nécrose bactérienne, black-rot, mildiou, oïdium

Au niveau de la lutte anti-oïdium, la nécessité de réaliser sur les zones sensibles au moins cinq traitements spécifiques est effectivement encore possible, mais à des niveaux de coût nettement plus élevés et en ne s’appuyant pas suffisamment sur des stratégies d’alternance de matière active. Par ailleurs, il faut souhaiter que le souffre mouillable continue de pouvoir être utilisé en mélange sans risque et au vu de la phrase de risque R43 du Thiovit Jet, les firmes phytosanitaires commercialisant des spécialités similaires non classées sont inquiètes. Si cette famille de produits commerciaux à base de souffre venait à disparaître, les viticulteurs bio ne disposeraient plus d’aucun moyen pour gérer la lutte anti-oïdium. Autre sujet de préoccupation pour plusieurs régions viticoles dont la nôtre, la nécrose bactérienne dont la protection cuprique doit se poursuivre jusqu’à la fin mai. En début de cycle, des spécialités toutes formulées permettent de lutter à la fois contre le mildiou, l’excoriose et la nécrose bactérienne, mais leur coût est nettement supérieur aux approches de complémentation à 2 % de bouillie bordelaise. Après la mi-mai, le complexe de protection intègre souvent l’oïdium, le mildiou et la NB, et pratiquement aucune solution n’existe pour satisfaire à cette cible parasitaire triple. Le nombre de mélanges autorisés associant trois fongicides est très limité, surtout quand on recherche une complémentation en cuivre. Autre sujet d’inquiétude, la gestion des calendriers de protection mildiou qui techniquement reste possible mais le classement de nombreuses spécialités à spectre unique gêne considérablement les viticulteurs qui poussaient le plus loin possible les approches de raisonnement. Ce sont les spécialités polyvalentes à spectre large mildiou, oïdium et black-rot qui vont en bénéficier, mais là aussi à des niveaux de coût bien supérieurs. Par ailleurs, ces spécialités polyvalentes ont un mode d’action unisite qui les prédispose au phénomène de résistance et les services officiels en ont précisé les limites d’utilisation dans la note nationale mildiou (parue dans le numéro précédent). Les propriétés viticoles d’une certaine surface qui réalisent leurs traitements avec de la main-d’œuvre salariée sont aussi obligées de tenir compte des contraintes d’organisation du travail dans leurs approches de raisonnement de la protection. Au mois de mai par exemple, les différents jours fériés compliquent sérieusement la mise en œuvre concrète des traitements et le fait d’être obligé de réaliser un passage complémentaire pour continuer à utiliser des spécialités commerciales anti-mildiou ou anti-oïdium classées à spectre unique constitue une lourde contrainte. Bon nombre de responsables de domaines sont donc confrontés à un dilemme important : soit l’introduction d’un traitement supplémentaire pour raisonner la lutte en fonction des risques réels (en utilisant des fongicides à spectre unique et en décalant ou reportant de plusieurs jours une intervention), soit opter pour des spécialités à spectre polyvalent et rentrer dans une stratégie de traitement à cadence fixe pour limiter les coûts de mécanisation. Pour la première fois, l’incidence économique du coût des applications risque de peser plus lourd que le choix des fongicides et des dates d’intervention dans les approches de raisonnement globales de la lutte. La forte contraction des gammes de fongicides et l’obligation de construire des calendriers à partir d’associations de spécialités homologuées représentent une contrainte supplémentaire pour les viticulteurs habitués à raisonner leur calendrier de traitements à partir de l’efficacité des matières actives. L’impact de la réglementation qui conduit au classement de 60 % des fongicides anti-mildiou et de 40 % des anti-oïdium (pour la plupart des produits à spectre unique) est-il cohérent vis-à-vis des efforts de raisonnement sur les deux maladies principales de la vigne ? La montée en puissance des spécialités commerciales à spectre large engendre aussi une augmentation des coûts significatifs qui risquent aussi de poser des problèmes. On peut également se demander si tous ces éléments associés au manque d’efficacité dans l’accès à l’information sur le catalogue des mélanges ne vont pas contribuer à créer encore plus d’opacité dans le dialogue entre les distributeurs et les viticulteurs ? Enfin, il faut aussi ne pas perdre de vue que nos régions sont particulièrement exposées à des effets millésime propices au mildiou (1999 et 2000 en sont des souvenirs récents), et cette réceptivité potentielle reste une composante essentielle de la construction des programmes de lutte.

Le problème de LA protection insecticide contre la Flavescence Dorée

Enfin, le dossier le plus délicat concerne la protection insecticide contre la FD dans les périmètres de lutte obligatoire. En effet, l’actuel catalogue des mélanges autorisés laisse très peu de latitude pour envisager l’association de fongicide anti-mildiou, anti-oïdium avec des insecticides pour réaliser des traitements de couverture générale et il serait donc obligatoire de traiter séparément cet insecte. Cette perspective risque de constituer un handicap majeur vis-à-vis de la lutte contre la FD, car bon nombre de viticulteurs, par manque de temps en juin et juillet, risquent de ne pas effectuer le cycle de trois traitements consécutifs avec toutes les conséquences que cela engendrera vis-à-vis de l’ensemble des zones contaminées. Il existe donc aujourd’hui un vide technique pour réaliser des traitements de couverture générale associant un insecticide spécifique à la cicadelle de la FD et deux fongicides, un anti-mildiou et un anti-oïdium. M. Benoît Herlemont, l’expert vigne national du SRPV en Aquitaine, nous a indiqué que sur ce dossier il se montrerait tolérant en 2005 et ferait preuve de bon sens en considérant que la priorité est la réalisation d’une lutte insecticide efficace et associée au traitement de couverture générale mildiou-oïdium (dans la mesure où ce sont des mélanges autorisés pour ces deux dernières maladies). Néanmoins, la prudence dans l’utilisation des spécialités commerciales insecticides est recommandée et elle doit s’appuyer sur les préconisations de risque toxicologique formulées par le comité d’homologation. Mme Nicole Couanon, qui est chargée des contrôles au sein de l’antenne SRPV de Cognac, suivra sur ce sujet les axes politiques définis par la hiérarchie du SRPV. Dans les années à venir, des demandes d’enregistrement de mélanges spécifiques aux approches de lutte triple FD-mildiou-oïdium feront sûrement leur apparition sur le catalogue officiel des mélanges. Les herbicides sont concernés par la réglementation sur les mélanges mais aucune association de spécialités commerciales ne sera enregistrée d’ici le printemps. L’utilisation d’équipements de pulvérisation assurant l’injection directe des produits ou leur séparation complète (avec deux cuves différenciées et deux circuits liquides) sont considérés comme des équipements assurant le mélange extemporané des différentes spécialités commerciales utilisées. Les aspects concernant les délais de ré-entrée dans les parcelles vont aussi faire l’objet d’une réglementation plus stricte dans les années à venir. La commission Tox a fixé de nouvelles règles qui entreront en vigueur dans le cadre du processus d’homologation. Les dossiers d’homologation intègrent un volet sur les délais de ré-entrée dans les parcelles après la réalisation des traitements. Ces nouveaux éléments sont clairement formulés lors de l’obtention des AMM et indiqués sur les emballages commerciaux. Le chantier des mélanges en viticulture soulève donc de nombreuses interrogations sur le plan agronomique et à moyen terme on peut se demander si les derniers acteurs majeurs de l’agrochimie vont continuer à investir sur un marché qui devient sur le plan financier beaucoup plus « coûteux » à travailler.

Le marché vigne est dominé seulement par trois sociétés phytosanitaires

Le marché vigne des produits phytosanitaires diffère profondément de celui des grandes cultures en raison du spectre parasitaire plus complexe et surtout des effets régions et terroirs importants. Les 800 000 ha de vigne en France ne constituent pas un marché homogène car les effets climatiques modifient considérablement la pression de parasitisme. Dans la grande zone méridionale, l’oïdium représente un danger majeur alors que dans les vignobles septentrionaux, le mildiou et le botrytis sont des préoccupations de premier plan. Ces grandes tendances sont en plus modulées localement par des effets (microclimat, cépages et conduite des vignes) et pratiquement chaque région possède une problématique spécifique comme par exemple le black-rot, la nécrose bactérienne, les pressions de vers de la grappe, la lutte contre la FD, les LMR, les spécificités eaux-de-vie… Les industriels de la phytopharmacie ont développé de longue date des gammes assez larges qui permettaient de satisfaire toutes les attentes, mais les dossiers d’homologation sont beaucoup plus lourds à constituer qu’en grande culture compte tenu de toutes ces spécificités. Depuis dix ans, l’univers de l’agrochimie a profondément évolué et il y a eu une forte concentration des entreprises. Au début des années 90, trente sociétés se partageaient le marché et une dizaine d’entreprises intégraient toute la filière, c’est à dire la recherche fondamentale de nouvelles molécules, le développement agronomique et la démarche de mise en marché. Cette évolution a été liée au départ au fait que beaucoup de grandes entreprises d’agrochimie étaient « adossées » à des groupes possédant plusieurs pôles d’activité : la chimie, la santé humaine et l’agriculture. Pour satisfaire les attentes de rentabilité des actionnaires, ces grands groupes se sont recentrés vers des pôles d’activité majeurs (et à forte valeur ajoutée) et un certain nombre de divisions agricoles ont été cédées. C’est ainsi que l’on a vu disparaître des noms très connus comme Sandoz, Ciba Geigy, Rhône Poulenc, Procida, Scheiring, Agrevo… Aujourd’hui, il en reste une quinzaine avec seulement 5 ou 6 majors qui sont en mesure d’intégrer toutes les composantes d’un métier très spécifique. Les autres entreprises de taille plus petite travaillent en s’approvisionnant en produits auprès d’acteurs mondiaux de la chimie auxquels ils « achètent » des licences d’utilisation de molécules. Des partenariats constructifs peuvent se créer entre ces deux univers d’entreprises et il arrive que les liens se pérennisent par des prises de participation capitalistique. Ces sociétés jouent un rôle important sur le marché des cultures spécialisées (la vigne, l’arboriculture et le maraîchage) car elles continuent de commercialiser des matières actives dites banalisées intéressantes sur les plans agronomique et économique.

Des gammes de spécialités vignes de plus en plus restreintes

nicole_couanon.jpgLa mise en œuvre de la nouvelle réglementation européenne d’homologation des produits phytosanitaire obligeant les sociétés à faire réhomologuer leurs matières actives a été aussi un élément qui a contribué à la contraction des gammes. Les sociétés majeures ont eu tendance à concentrer leurs efforts sur les produits récents et un certain nombre de matières actives anciennes n’ont pas été soutenues. Le contexte actuel du marché de l’agrochimie est donc beaucoup moins propice à l’innovation et ce phénomène est encore plus marqué en viticulture qui, sans être un secteur marginal, n’est pas non plus un axe majeur de développement. Ces derniers propos sont illustrés par le renouvellement des gammes de fongicides anti-mildiou et anti-oïdium où depuis maintenant quinze ans toutes les nouvelles spécialités qui ont obtenu des homologations sont issues de matières actives ayant déjà connu un développement en grande culture. Les IBS, les Strobilurines, sont des familles de produits développés à la base pour le complexe parasitaire des céréales. Les dernières grandes innovations spécifiques à la vigne sont le dimétomorphe, le fosétyl Al… et pourtant les besoins existent. Actuellement, le marché viticole est dominé par trois entreprises majeures, Bayer CropScience, BASF agro et Syngenta, qui proposent des gammes complètes, et ensuite 5 à 6 sociétés de taille plus petite sont en mesure d’apporter des réponses techniques intéressantes mais partielles. La mise en œuvre de la réglementation sur les mélanges pénalise plus les petites sociétés que les grandes firmes qui ont su mieux anticiper cette évolution. Le phénomène de concentration des acteurs de l’agrochimie et des gammes en viticulture modifient aussi considérablement les relations commerciales avec les distributeurs, les coopératives et les négociants. Les possibilités de proposer des calendriers de traitements reposant sur des stratégies de lutte nettement différenciées au plan technique sont beaucoup limitées et la marge de négociation des acheteurs confrontés pratiquement tous au même fournisseur se trouve considérablement limitée. La situation devient donc assez paradoxale, puisque l’offre de spécialités vignes de plus en plus réduite limite la marge de manœuvre des distributeurs et cela suscite certaines interrogations pour l’avenir. Dans la très grande majorité des situations, le service technique proposé par les coopératives et les négociants est intégralement financé par la marge prise sur la vente des produits phytosanitaires, mais l’harmonisation des gammes ne va-t-elle pas accentuer le climat de concurrence. Par ailleurs, les distributeurs doivent aussi être en mesure de répondre à de nouvelles attentes formulées par les viticulteurs comme la montée en puissance des contraintes plus administratives (réglementation du travail), des démarches de traçabilité et d’HACCP vins et eaux-de-vie qui occasionnent des coûts supplémentaires à priori non facturables à ce jour. Dans le cadre des démarches HACCP, les viticulteurs doivent disposer des fiches sécurité de chaque produit qu’ils utilisent et les distributeurs doivent être en mesure de fournir tous ces documents. La prestation des distributeurs, qui en matière de protection du vignoble se limitait jusqu’à présent aux seuls aspects de conseils techniques de terrain, devra désormais aussi englober un volet plus réglementaire. Ces nouvelles prestations engendrent des coûts qu’il va falloir financer et facturer d’une manière ou d’une autre. Le seul problème, c’est que les viticulteurs qui sont des consommateurs utilisateurs d’intrants phytosanitaires ont beaucoup de mal à vendre à leurs acheteurs les surcoûts du volet technique de « sécurité alimentaire ».

Un enjeu éminemment technique à cultiver au cœur de chaque bassin de production

L’intérêt fondamental pour la filière vins et eaux-de-vie de tous ces aspects environnementaux n’est nullement discutable mais les moyens et les méthodes par lesquels ils sont actuellement mis en œuvre par l’Administration, témoignent du manque de concertation avec les acteurs principaux à la base : les viticulteurs qui sont aussi les premiers consommateurs de leurs productions de vins et d’eaux-de-vie. De par leur parfaite connaissance du milieu, ils ont aujourd’hui dans leur très grande majorité une attitude responsable qui les conduit à gérer avec raison l’utilisation de leurs intrants phytosanitaires. Le milieu agricole a profondément évolué sur ce sujet au cours des dix dernières années, mais sans faire l’effort suffisant d’expliquer au grand public les changements fondamentaux de leur métier sur les plans technique et économique. La notion de dialogue entre les producteurs et les consommateurs paraît aujourd’hui beaucoup plus difficile à aborder compte tenu de l’évolution des modes de vie et de la société. Les consommateurs possèdent de moins en moins de culture rurale et sont aussi de plus en plus demandeurs d’informations sur les conditions de productions des produits qu’ils achètent. Cet état de fait est à la fois légitime et porteur d’espoirs pour les producteurs de base qui, du fait de l’évolution économique des filières agricole et viticole, sont souvent déconnectés des réalités de consommation. Un certain nombre d’excès des pratiques agricoles qu’il ne faut pas non plus nier ont conduit à véhiculer des images réductrices des métiers d’agriculteur et de viticulteur. Par exemple, dans les années 60, un vigneron passait beaucoup de temps à labourer ses vignes alors qu’aujourd’hui son activité principale serait devenue l’application d’intrants phytosanitaires. La présentation « de telles réflexions » traduit surtout le manque de connaissance d’un métier puisque dans la réalité, sur les 120 à 150 heures de main-d’œuvre nécessaires à la conduite annuelle d’un hectare de vigne, seulement une dizaine d’heures est consacrée à l’utilisation d’intrants phytosanitaires. Le décalage entre quelques images très médiatisées et la réalité s’avère donc important et pour pallier de telles situations l’accès à une information juste et cohérente doit constituer un axe prioritaire de transparence. C’est effectivement cet argument qui a été l’élément déclencheur de toute la réglementation sur les mélanges de produits phytosanitaires qui sur le fond est cautionnée par 99 % des viticulteurs. Or, les experts de la DGAL qui ont pensé le chantier des mélanges n’ont sûrement pas apprécié l’impact réel de leur projet sur la protection du vignoble, faute d‘avoir engagé une large concertation avec les responsables professionnels impliqués dans des démarches de protections du vignoble des 5 ou 6 bassins de production français. La complexité de la filière viticole n’a pas facilité les prises de contact et au final les viticulteurs les plus impliqués dans les démarches de lutte raisonnée ont le sentiment d’être les grands perdants de l’affaire puisque leurs efforts ne sont pas suffisamment reconnus. Leurs collègues viticulteurs bio ne sont pas mieux lotis car, avec la nouvelle réglementation sur les mélanges, l’utilisation de certaines spécialités à base de cuivre et aussi de soufre semble menacée. L’introduction de la réglementation sur les mélanges s’avère être une démarche éminemment technique dont la mise en œuvre aurait dû reposer sur une vaste concertation pour y intégrer les réalités de chaque grande région. Dans l’avenir, souhaitons que les approches concrètes débouchent sur des solutions très fonctionnelles et transparentes pour l’ensemble des acteurs de la filière.

Les viticulteurs sont demandeurs de meilleures conditions d’application au niveau de la pulvérisation

Un certain nombre de viticulteurs soucieux d’améliorer les conditions d’utilisation des produits de traitements ont pourtant des propositions à soumettre à leurs fournisseurs et à l’Administration pour transformer de manière fondamentale les méthodes d’applications. La technologie des pulvérisateurs viticoles utilisée actuellement s’appuie sur des principes développés à la fin des années 60 et qui ont certes été optimisés par le biais de rampes performantes et d’accessoires de maîtrise des circuits d’air et de liquide. Ces évolutions ont permis d’une part de tirer le meilleur profit de ces systèmes et d’autre part de mettre en évidence les limites techniques des équipements. Les pulvérisateurs viticoles actuels, parfaitement réglés et utilisés, ne permettent de positionner en pleine saison que seulement 30 % de la bouillie sur la végétation. A titre de comparaison, les pulvérisateurs utilisés en grandes cultures ont bénéficié, au cours des 15 dernières années, d’évolutions technologiques majeures qui ont permis d’optimiser les conditions d’application sur les plans agronomique et environnemental. Les constructeurs investissent régulièrement dans des programmes de recherche car le marché est jugé porteur alors que dans les cultures spécialisées, les spécificités régionales représentent des contraintes trop importantes vis-à-vis des approches de développement industriel. Ce constat montre à quel point le sujet « pulvé-vigne » est un domaine d’activité secondaire alors qu’il devrait constituer une priorité vis-à-vis des aspects du respect de l’environnement, de la santé des applicateurs et des approches de lutte. Or, les viticulteurs sont les seuls à considérer que la mise au point de nouveaux pulvérisateurs utilisant des principes innovants réduisant les phénomènes de dérives (et les pertes de produits dans l’atmosphère) de façon très significative serait une avancée majeure sur le plan des bonnes pratiques viticoles. Cette attente n’a pas été satisfaite à ce jour par les fournisseurs du machinisme agricole qui considèrent que le marché est trop étroit et trop segmenté pour lancer un investissement dans la recherche. Face à cette situation, les viticulteurs ne sont-ils pas en mesure de se demander si le rôle de l’Administration et notamment de la DGAL ne serait pas de créer un pôle de concertation technico-économique pour lancer une réflexion entre professionnels de la viticulture et constructeurs afin de constituer une « pulvé-pôle » soutenue financièrement en partie par l’Etat et les différentes interprofessions viticoles et les acteurs du machinisme qui auraient la volonté de s’impliquer dans la conception de nouveaux matériels.

Mélange De Produits Phytopharmaceutiques

Avis aux opérateurs responsables de la mise sur le marché, aux distributeurs et aux utilisateurs de produits phytopharmaceutiques paru au Journal officiel du 21 septembre 2002

Un mélange de produits phytopharmaceutiques consiste à associer, dans le cadre des pulvérisations, plusieurs spécialités phytopharmaceutiques. Ces spécialités bénéficient, dans la plupart des cas, d’une homologation en bonne et due forme à titre individuel. Il existe certaines pratiques qui associent à des spécialités homologuées des produits chimiques qui n’ont reçu aucune autorisation.

La technique des mélanges est mise en œuvre sur le terrain pour des considérations techniques (lutte simultanée contre plusieurs organismes nuisibles pouvant être présents concomitamment, recherche de réduction des doses, stratégie de gestion des résistances) ou économiques (réduction et optimisation du nombre de passages).

Toutefois, il convient de ne pas en sous-estimer les risques pour la santé ou pour l’environnement.

En application de l’article L. 253-1 du code rural, du décret n° 94-359 du 5 mai 1994 relatif au contrôle des produits phytopharmaceutiques (articles 6, 7 et 17) et de l’arrêté du 6 septembre 1994 portant application de ce décret (annexes II et III), seules sont autorisées les combinaisons de produits phytopharmaceutiques entre eux ou avec d’autres produits ayant fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché, précédée nécessairement d’un examen destiné à vérifier leur efficacité et leur innocuité à l’égard de la santé publique, des utilisateurs, des cultures et des animaux, dans les conditions d’emploi prescrites.

Ces textes, s’ils prévoient la possibilité technique de mélanges, n’autorisent ces pratiques que pour autant qu’elles aient été évaluées et enregistrées. Il convient en effet de rappeler :

– que la mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique n’est autorisée qu’après une procédure d’évaluation du risque et de l’efficacité du produit ;

– que si ce produit associe plusieurs substances actives, les effets combinés de ces substances font l’objet d’évaluations au plan toxicologique et écotoxicologique ;

– que si les adjuvants sont évalués et autorisés dans des conditions approchantes, une action est actuellement en cours pour en améliorer les modalités ;

– qu’en dehors des cas précédents aucun mélange de produits phytopharmaceutiques n’a donné lieu à une autorisation de mise sur le marché de la part du ministère chargé de l’agriculture, dans la mesure où les effets de préparations résultant de tels mélanges n’ont fait l’objet d’aucune évaluation préalable.

La pratique des mélanges ne doit pas apparaître en contradiction avec les objectifs d’amélioration et de sécurisation de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques défendus par les ministères chargés de l’agriculture, de la santé et de l’écologie et du développement durable, comme avec les efforts accomplis par la profession agricole pour améliorer les pratiques agricoles. Il est donc nécessaire d’en améliorer l’évaluation et la transparence.

L’action engagée sur le sujet par le ministère chargé de l’agriculture ne vise aucunement à méconnaître ce type de pratiques et ses avantages, mais à les clarifier comme à les sécuriser tant pour la protection de la santé que des milieux. Le ministère a engagé une consultation des différentes instances concernées afin de disposer d’une vision complète du sujet et d’engager une large consultation qui vise, en toute transparence, à replacer cette pratique dans un cadre sécurisé et transparent.

Ces concertations ont commencé et se déroulent selon un calendrier défini qui s’articule autour des principaux éléments suivants :

– juin 2002 : information des utilisateurs, distributeurs et fabricants, et plus généralement de tous les opérateurs susceptibles de fournir l’information ;

– mi-septembre 2002 : présentation par les industriels, les distributeurs et les préconisateurs des mélanges présentant un intérêt d’un point de vue agronomique ;

– octobre 2002 : présentation de l’avis de la Commission d’étude de la toxicité des produits antiparasitaires à usage agricole sur la méthodologie et les critères d’évaluation des mélanges en matière toxicologique et écotoxicologique ;

– novembre-décembre 2002 : définition, établissement et présentation d’un cadre d’action sur l’évaluation et l’enregistrement des mélanges.

Il importe que chaque fabricant, chaque prescripteur et utilisateur de produits phytopharmaceutiques veille à limiter les dérives sur le terrain en matière de mélanges. Sont concernés en particulier les mélanges associant insecticides et fongicides, dans l’attente de leur évaluation et de la fixation de mesures de gestion du risque appropriées.

Les démarches engagées par le ministère de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche et des affaires rurales permettront, dans le cadre du dispositif d’homologation, de conforter les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques en mettant à leur disposition un référentiel des pratiques de mélanges évaluées et enregistrées officiellement. L’objectif visé est la mise en place des premières décisions début 2003. La priorité portera sur insecticides et fongicides.

 

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