Le monde change … la viticulture s’adapte

10 avril 2018

La Rédaction

Face à un changement venu progressivement de la société civile depuis deux dizaines d’années, seule une part minoritaire de la viticulture aura su être précurseur en matière d’environnement. L’INAO et l’IFV (Institut Français de la Vigne et du Vin) ont travaillé conjointement pour proposer à la filière viticole des mesures agroécologiques en vue de leur intégration dans le Cahier des Charges des indications géographiques viticoles. Au final, la publication d’un « Guide de l’agroécologie en viticulture » présentant un certain nombre de mesures agroenvironnementales, comprenant notamment les mesures prioritaires validées par  les Comités Nationaux viticoles de l’ INAO assorties de la validation de leur disposition de contrôle.


Le temps passant, la pression sociétale s’est renforcée avec la dénonciation de faits qui ne pouvaient plus être ignorés tels l’analyse de Génération Future faite en 2013 à Listrac sur les cheveux des riverains de vignobles, ou l’article de Sud-Ouest d’avril 2012 évoquant, dans la bouche d’une cancérologue de Bergonié,  un cancer du vigneron, ou encore les malaises d’élèves d’une école de Villeneuve-de-Blaye, ou l’analyse des maladies d’élèves d’une école de Preignac en Sauternais.


Même si l’exercice parait encore difficile pour beaucoup, aujourd’hui la viticulture a intégré qu’elle se devait de modifier ses comportements environnementaux. Elle cherche à mettre en place les bonnes pratiques qui pourront correspondre aux attentes de la société tout en répondant aux contraintes de l’entreprise viticole. C’est une page qui se tourne …


 


Un travail de réflexion pour faciliter la démarche des signes de qualité


 


Un travail de réflexion réalisé au départ conjointement par l’INAO et l’IFV a permis d’aboutir à des propositions permettant aux ODG d’avancer vers plus de viticulture durable, au travers de 8 mesures prioritaires pour lesquelles les mesures de contrôle ont déjà été validées.


Pour l’INAO le but était à la fois de proposer aux ODG viticoles des outils qu’ils pourraient s’approprier aisément (avec des mesures réfléchies au niveau national qui puissent convenir au plus grand nombre), et en même temps d’harmoniser leur contrôle avec des dispositions communes de contrôle (DCC) similaires dans toutes les régions françaises.


Sur le site de l’INAO ou sur le site de l’IFV , le Guide de l’agroécologie en viticulture peut être téléchargé pour prendre connaissance du choix des mesures agroenvironnementales proposées. Car s’il y a huit mesures-types, d’autres existent aussi qui peuvent permettre d’adapter l’agroécologie encore plus finement à son contexte et à son territoire. Et un outil pédagogique lié à ce guide permet de prendre connaissance des différentes réglementations selon les types de végétation, de paysages, de cours d’eau, …


 


Des pratiques culturales plus respectueuses de l’environnement


Car le but est bien pour l’INAO d’accompagner les Organismes de Défense et de Gestion des signes de qualité viticoles dans leur stratégie environnementale en leur proposant  des pratiques plus respectueuses de l’environnement, et cela sur cinq grand thèmes :


  • la préservation et le développement de la bio-diversité

  • la maîtrise et la réduction de la fertilisation

  • la limitation de l’usage des produits phytopharmaceutiques

  • une meilleure gestion de l’eau par les exploitations

  • un matériel végétal mieux adapté à l’agroécologie.

    C’est sur la base d’initiatives déjà mises en place dans certaines régions viticoles que l’INAO et l’IFV ont formalisé ces démarches dans le cadre de mesures agro-environnementales applicables à chaque signe de qualité viticole, et cela afin de permettre à chacun d’intégrer à son Cahier des Charges les mesures qui lui correspondent le mieux.

     

    Huit mesures-types

    8 mesures-types ont ainsi été reconnues par les comités nationaux viticoles des AOC et des IGP, et pourront rapidement être intégrées dans les cahiers des charges des ODG demandeurs selon une procédure simplifiée :

  • obligation d’enherbement du contour des parcelles,

  • interdiction de « désherbage chimique en plein » des parcelles de vigne,

  • enherbement des inter-rangs des vignes,

  • amélioration de l’efficience du matériel de pulvérisation,

  • réduction des quantités de produits phytosanitaires utilisées,

  • limitation des apports d’azote minéral de synthèse,

  • préservation des éléments constitutifs du paysage : murets, bosquets, terrasses, …,

  • respect de la séquence morphologique  des sols.

    En quoi ce Guide de l’agroécologie peut-il être un accélérateur de démarche environnementale pour les signes de qualité tels les appellations ou IGP ? Tout simplement parce que, outre l’établissement d’un catalogue de mesures, les conditions du contrôle de ces dernières ont été élaborées pour faciliter et accélérer leur application.

     

    Facilitation et accélération des procédures

    Ces huit mesures-types présentent en effet l’avantage d’avoir été déjà examinées en Comité National Vin de l’INAO et validées, ce qui permet leur intégration de manière quasi-automatique dans les Cahier des Charges des Organismes de Défense et de Gestion viticoles qui le souhaitent.

    Et non seulement la formulation de ces mesures agro-environnementales convient aux professionnels et experts réunis au sein du Comité National Vin INAO, mais leur contrôle a fait l’objet de concertation avec les organismes concernés. Les modalités de contrôle sont ainsi prévues et validées.

    Ce sont donc des mesures agro-environnementales à l’application facilitée qui sont proposées aux Organismes de Défense et de Gestion des SIQO viticoles (Signes d’Identification de la Qualité et de l’Origine) dont les AOP et IGP. 

    Certaines appellations françaises ne s’y sont pas trompées qui ont déjà avancé en réflexion, vote d’Assemblée Générale et demande auprès de l’INAO en vue de l’intégration de certaines de ces mesures au sein du cahier des charges de leur appellation, telles les AOC Bordeaux, Saint-Emilion, Saint-Emilion Grand Cru, Puisseguin Saint-Emilion et Lussac Saint-Emilion et Anjou-Saumur qui ont vu leurs mesures examinées (et validées pour lune grande partie) lors du Comité National Vin INAO du 15 Février.

     

    PRODUIRE DANS LE RESPECT DES POPULATIONS RIVERAINES

     

    Alors que des parents en sont aujourd’hui à réclamer des zones-tampons entre les vignobles et les écoles, le prix à payer pour les appellations viticoles passe sans doute par des contraintes liées à plus de respect des populations riveraines, et plus de communication.

     

    Urbanisation et impact social

    Jean Eynard, Vice-Président de l’ODG Côtesde-Bourg connait bien le problème de l’impact sur les riverains : il a eu à gérer le problème de l’école de Villeneuve-de-Blaye alors qu’il était président de l’appellation. Alors que l’urbanisation croissante multiplie les points de contacts entre les zones viticoles et les zones de vie sociale, il aime à rappeler la nécessité pour les maires d’être en contact avec les présidents d’appellation et regrette que la consultation lors de modifications de PLU n’oblige à consulter directement que l’INAO et les Chambres d’Agriculture.

    Aujourd’hui, en relation avec les élus locaux, l’ODG des Côtes de Bourg a identifié les sites sensibles (écoles, EPHAD, crèches, terrains de sport, …) et a mis en place (en concertation avec le département) un programme de plantations de haies ; une charte a été signée de même par l’ensemble des  parties (maires, viticulteurs, riverains) pour une meilleure communication autour des interventions phytosanitaires sur les parcelles concernées.

     

    Pression sociétale et médiatique oblige


Si l’INAO n’a pas encore eu à traiter de demandes de réglementations environnementales spécifiquement liées au voisinage pour la viticulture, des réflexions existent dans d’autres filières comme par exemple en pommiculture, où un ODG a élaboré une charte qui établit l’obligation de l’existence de haies en bordure des zones habitées, permettant de réduire la zone de non-pulvérisation, qui peut également être réduite en cas d’utilisation de matériels de pulvérisation efficients.


Bien sûr l’urbanisation est venue complexifier la situation et les contraintes de production. Et la pression sociétale et médiatique oblige aujourd’hui la viticulture à être attentive à l’environnement et bien sûr à son environnement sociétal proche.


C’est un monde qui change !


 


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