L’euphorie chronique du début d’année 2019

5 mars 2019

La filière Cognac commence l’année 2019 dans une ambiance d’euphorie chronique portée à la fois par la viticulture et les acteurs du négoce. Les expéditions de Cognac continuent de progresser, la surface du vignoble est engagée dans un cycle d’expansion et l’abondance de la récolte 2 018 ne semble pas poser pour l’instant de problèmes. L’annonce d’un volume de production bien supérieur aux prévisions ne contrarie pas la belle dynamique actuelle. Bien au contraire, l’écoulement de toute la production semble bien se passer. Pourtant, le « bonus volumique » du millésime 2 018 fut une réelle une surprise. En effet, il se sera produit en moyenne 1 d’AP/ha de plus dans l’ensemble de la région délimitée, soit 70 000 hl d’AP. Le stock régional d’eaux-de-vie au 1er avril prochain va augmenter de 950 000 à 970 000 hl d’AP alors que les sorties de Cognac sont proches de 615 000 hl d’AP. Les besoins en eaux-de-vie pour faire face à la demande actuelle de Cognac se situent autour de 700 000 hl d’AP évaporation comprise.

 

             Au dire de certains observateurs, Il fallait peut-être cette abondance pour calmer « la peur de manquer » suite à une récolte 2 017 maigre et à la dynamique positive des expéditions. Les grands négociants ont pu rentrer l’intégralité de leurs volumes contractualisés (et parfois plus) à des prix nettement revus à la hausse. Les acteurs du petit et du moyen négoce ont également pu s’approvisionner normalement. Globalement, les prix des comptes OO demeurent encore fermes avant la dernière ligne droite de la campagne de distillation. Les transactions d’eaux-de-vie rassises jeunes restent dominantes dans tous les crus alors que celles des comptes plus âgés (de 4 à 10) concernent de moindres volumes et se concentrent dans le cœur de la région.

           

            La fraction production d’eaux-de-vie inattendue et supplémentaire est l’objet de divers commentaires souvent optimistes et aussi plus mesurés. Après le gel de 2017, le coefficient de rotation des stocks était descendu à 6,51 années au 31 juillet dernier. La belle récolte 2 018 serait donc arrivée à point nommé pour reconstituer le stock régional et satisfaire les attentes formulées par le business plan. Le bonus volumique est une véritable opportunité conjoncturelle pour permettre aux propriétés viticoles de reconstituer une réserve économique commercialisable. À la fin de la campagne de distillation, le coefficient de rotation des stocks se rapprochera de 7 années.  Pour d’autres, la production inattendue de 70 000 hl d’AP n’est pas réellement une « goutte d’élixir » ! Elle représente tout de même l’équivalent des ventes annuelles des qualités XO et la commercialisation de 2 millions de caisses de Cognac. C’est l’affectation de ce don de la nature dans le potentiel de récolte qui semble faire débat. N’aurait-il pas pu être envisagé de retirer ces volumes de la fraction commercialisable et de les intégrer dans la réserve climatique compte tenue des mises en stocks déjà importantes ? Cette « épargne » d’eaux-de-vie non mise en vieillissement constitue une véritable assurance économique qui fait l’unanimité. Pourquoi serait-elle sous-utilisée dans un contexte d’abondance ? Toutes ces réflexions incarnent aussi une forme de lucidité constructive et prospective vis à vis  de la stabilité à moyen terme du marché régional des eaux-de-vie.

 

            L’engouement de la consommation de         Cognac dans les deux principaux marchés mondiaux, les États Unis et la Chine s’est poursuivi tout au long de l’année 2018. Un nouveau record historique des expéditions a été atteint avec 204,2 millions de bouteilles vendues (en progression de 3,5 %) et un chiffre d’affaires de 3,21 milliard d’euros (en hausse de 2 %). Le continent Américain (États Unis, Canada et Mexique) a connu un développement volumique de 5,2 % et de + 0,7 % en valeur. La demande de Cognac dans ces trois pays est dominée par des stratégies de marques fortes, les qualités VS et une montée en gamme sur les VSOP. Le débouché Cognac aux États Unis est l’un des piliers de la stabilité de l’économie régionale, ce qui rend les acteurs du négoce très attentifs aux tensions politiques dans ce pays. L’Asie (la Chine, Singapour et Hong Kong) reste toujours dans une phase de développement forte avec des volumes en progression de + 5,6 % et un chiffre d’affaires en hausse de + 3,7 %. Après un cycle difficile, il y a quelques années, ce marché est redevenu un débouché très dynamique. La demande en matière de consommation est concentrée sur les VSOP et les qualités supérieures. La baisse du PIB en Chine au cours du dernier semestre 2018, le poids des exportations dans l’économie et l’évolution du contexte de guerre commerciale avec les États Unis représentent aussi des sources d’inquiétudes pour ce débouché générateur de fortes plus-values. Le continent Européen traverse une mauvaise passe puisque les expéditions ont diminué de 5,3 % en volume et 2,2 % en valeur. Les marchés historiques en Allemagne, au Royaume Unis sont considérés comme étant matures par beaucoup d’opérateurs qui pensent que la reconquête de parts de marchés passera par le recrutement de nouveaux consommateurs. En Europe du nord, la baisse des ventes régulière est liée au développement de la consommation des vins. La Russie est un marché assez stable en volume et prometteur. Le nectar Charentais bénéficie dans ce grand pays d’une grosse « cote ». D’une manière, les grands et les petits opérateurs de la filière Cognac semblent unanimes autour du fait que la demande croissante d’alcools bruns qualitatifs dans le monde est un gage de développement d’avenir pour la filière de production régionale. D’ailleurs l’objectif d’expansion volumique des expéditions de 3,5 à 4 % /an a été tenu en 2018.

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