Les vins de Pays charentais la crise de la trentaine ?

27 août 2014

Depuis plus de 30 ans, les Vins de Pays Charentais (VPC) s’efforcent de trouver leur place dans le paysage viticole des Charentes et d’être reconnus aux côtés du cognac et du pineau. Le fait est que depuis le décret de 1981 qui a officiellement ratifié leur naissance, le destin des VPC est intimement lié aux variations du marché du cognac. Cependant, en dépit de la santé aujourd’hui florissante de l’eau-de-vie emblématique du terroir charentais, nombre de ces viticulteurs gardent l’amour du vin chevillé au corps et proclament un attachement viscéral pour ces vignes qu’ils entourent de tant de soins… Quelle que soit la taille de leurs exploitations, ils sont fiers de leurs produits. Pour dénoncer l’image souvent peu valorisante qui lui est attachée, ils mettent en avant les qualités du terroir, mais aussi leur travail, leur savoir-faire et leurs compétences.

« Le Paysan Vigneron » est allé à la rencontre de cette filière dynamique, pour donner la parole à quelques-uns de ces viticulteurs amoureux du vin et du terroir charentais.

Article de Sylvie Baré

Chiffres 2013
● 1 616 hectares.
● 611 déclarants.
● 79 101 hectolitres (volume porté sur les déclarations de récolte 2013).

 

La béotienne qui signe ce dossier a fait appel aux trente ans d’expérience de Jean-Jacques Häuselmann, l’un des permanents du Syndicat des producteurs et de promotion des vins de pays charentais, pour dresser ce chaleureux portrait d’ensemble de la filière et de ses acteurs.

« Les vins de pays charentais sont nés en 1981, grâce au décret qui
venait reconnaître la première récolte, en 1980, de deux coopératives qui se sont essayés à faire du vin… » raconte Jean-Jacques Häuselmann.

Ce dont il faut se souvenir, c’est que deux crises pétrolières successives ont abouti dans la région sur de graves problèmes pour les vignerons, une politique d’arrachage et des règles strictes de gestion des volumes.

Quelques vignerons visionnaires

« En 1975, poursuit Jean-Jacques Häuselmann, quelques vignerons, sans doute des visionnaires, se sont dit que tant qu’à arracher, ils pouvaient peut-être en profiter pour sortir du tout cognac et diversifier leur activité. C’est ainsi qu’est née cette nouvelle filière, avec l’idée de vinifier des vins pour les boire. Un gros challenge, car même si on fait du vin en Charente depuis l’époque romaine, c’était un produit nouveau. Il a fallu apprendre, faire des voyages d’études dans différentes régions de France. Mais les viticulteurs charentais en étaient capables et le vin qui est aujourd’hui produit en Charente est un produit honnête, franc et agréable : un bon produit. Parfois, il va même au-delà et là, on a des vins de très grande qualité.

Des quelques vignerons épaulés par des négociants du début, on est passé à un nombre à 3 chiffres, et aujourd’hui, nous produisons un peu plus de 60 000 hectolitres, pour lesquels sont cultivés 1 600 à 2 000 hectares de vignes, blanc et rouge confondus. Sur les 80 000 hectares (dont 4 000 en rouge) de vignes des deux Charentes, cela peut paraître peu mais ça existe : nous existons vraiment aux côtés du cognac et du
pineau.

Une part d’autonomie

Ceux qui sont encore là aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont ça dans le sang. Il y a 10 ans, le Vin de Pays Charentais rapportait autant que le cognac. Aujourd’hui, avec la demande de cognac qui s’est envolée, ça n’est plus vrai. Sans compter que le vin, c’est plus compliqué que le cognac : non seulement il faut faire pousser les raisins, mais il faut aussi fabriquer le produit et le vendre. Cela signifie des risques de fabrication, des risques commerciaux, mais aussi de passer beaucoup de temps pour un revenu moins important que celui du cognac… Il y a aussi ceux qui préfèrent faire des raisins de qualité et les vendre à la coopérative, cela dépend des sensibilités de chacun… mais réellement, les vignerons qui sont encore là, c’est parce qu’ils ont la fibre, qu’ils n’ont pas envie de lâcher la vigne qu’ils soignent depuis quelques décennies… Elle leur offre une part de liberté, d’autonomie.

Grâce à notre passage en IGP (Indication géographique protégée) le 1er août 2009, on ne fait plus partie des vins de table. Etre un vin de pays, c’est valorisant : notre travail est reconnu et protégé par l’Europe, c’est une approche plus moderne, plus sécurisante, qui entraîne de fait une augmentation de la qualité. A partir d’un cahier des charges précis, le produit est contrôlé tout au long de la chaîne : le syndicat peut intervenir chez le vigneron mais aussi chez le négociant vinificateur ou chez le négociant conditionneur… ça entraîne une amélioration permanente.

Et puis le vin fonctionne en parfaite synergie avec le pineau et le cognac, il les dynamise. Dans un pays béni des dieux comme le nôtre, le vin aide à ouvrir les portes aux gens qui viennent nous rendre visite. Vendre du vin, c’est vendre du plaisir, de la convivialité mais aussi du terroir et de l’histoire… »

 

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