les alternatives au desherbage chimique

1 février 2010

Les viticulteurs doivent aujourd’hui réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Pour respecter la réglementation, qui restreint de plus en plus le nombre de molécules actives autorisées. Pour tenir compte du Grenelle de l’Environnement. Pour répondre au souci de protection de la nature et des hommes. En Gironde la Chambre d’Agriculture de la Gironde, les Associations de Développement Agricole et Rural (ADAR) et le Pôle de Compétences Phytosanitaires* ont présenté différents matériels, des outils interceps pour des stratégies alternatives au désherbage chimique : travail mécanique, contrôle par tonte ou bien encore régulation thermique. Testés dans différentes configurations de vignobles et sur des sols variés allant du sablo-graveleux à l’argilo-calcaire compacté, les matériels proposés ont été mis à rude épreuve.

Les outils de travail mécanique

Arrizza : récemment distribué dans notre région. L’outil présenté était une lame montée sur un porte-outils susceptible de recevoir d’autres équipements (outil rotatif à axe horizontal ou vertical, tondeuse ou déchausseur à disques). Le porte-outils dispose de nombreuses possibilités de réglage dont le dévers indépendant pour chaque côté.

Belhomme : la sensibilité de son déclenchement électro-hydraulique a impressionné. Des lames de déchaussage sont proposées ainsi qu’un petit corps de chaussage qui permet de réaliser le chaussage en passant au plus près des ceps, sans altérer le passage des roues du tracteur. Il est à noter que ce constructeur travaille sur un outil qui permet en un seul passage de réaliser un déchaussage suivi d’un rechaussage, action plus agressive sur les adventices installées sous le rang que celle d’une simple lame.

Boisselet : parmi la panoplie particulièrement fournie des outils adaptables sur les servomoteurs, on notera également la présence de lames. Parfois montées sur l’Acolyte (porte-outils enjambeur tracté), les lames ont aussi été remplacées par des outils rotatifs de type Pétalmatic ou Starmatic, qui ont montré une efficacité satisfaisante dans les conditions de l’essai. On peut légitimement se poser la question de l’utilisation du porte-outils Acolyte dans des parcelles qui ne bénéficient pas d’allées très larges car les temps pour tourner atteignent souvent la minute.

Braun : avec ses nombreuses variantes allant du montage sur enjambeur à des adaptations à l’avant, à l’arrière ou latérales sur interlignes, la production allemande fait preuve elle aussi d’une intéressante polyvalence et permet également des vitesses d’avancement élevées, avec une bonne sensibilité de déclenchement. Les montages à l’avant ou latéraux libèrent l’arrière du tracteur pour les stratégies combinées.

Clemens : le retour. Après avoir quasiment délaissé le marché girondin, Clemens revient en force avec l’aide de M. Boireau (DEPAN’AGRIC Saint-Magne-de-Castillon) qui sur le cadre SB1 de sa conception, adapte derrière des lames classiques un dispositif rotatif de bineuse à doigts qui réalise l’émottage de la bande travaillée.

Egretier : présentation au cours d’une des journées de démonstration de leur porte-outils autostable, qui a démontré une capacité de travail à faible profondeur, avec une bonne régularité.

Guyard : présentation lors de deux journées d’un équipement sur enjambeur constitué d’une bêche roulante Cultisamp de leur fabrication, ayant une bonne efficacité dans l’inter-rang, associée à des lames interceps de chez Actisol, dont la particularité est un retour en position sous le rang par équilibre des forces sur les deux ailes de la lame. Cet outil ne demande aucun apport énergétique autre que la traction.

Pellenc : le Tournesol muni de couteaux minces réalise un travail très superficiel, mais peut occasionner quelques blessures aux bourrelets proéminents.

Souslikoff : présentation sur sa Décalex Air, outil de travail du sol à assistance pneumatique, de lames bineuses en remplacement des traditionnels corps de charrue décavaillonneuse en 8 pouces. Le dispositif de suivi de sol automatisé par jauge de contrainte équipait aussi ce matériel.

D’une manière générale, la limite d’efficacité de ces outils de travail mécanique peut être atteinte lorsque des interventions déstructurant peu le couvert végétal sont suivies d’une période pluvieuse favorisant la reprise de végétation.

la Montée en puissance des lames interceps

Les lames interceps (Arrizza, Belhomme, Braun, Clemens et Souslikoff) confirment leur retour en force, observé depuis quelques années. Les sols de Rauzan, certes peu envahis par les adventices mais particulièrement compactés par une forte tradition d’utilisation des herbicides chimiques, ont permis de démontrer une surprenante capacité de pénétration de ces outils. Dans ces conditions de forte compaction, les dents rigides qui précédaient la lame ont largement favorisé la pénétration de l’outil.

Les lames réalisent un travail moins profond que les décavaillonneuses classiques mais respectent mieux les ceps au système racinaire installé en surface et apparaissent de ce fait plus adaptées pour un retour au travail mécanique des sols. Elles permettent en outre d’envisager des vitesses d’avancement plus élevées, de l’ordre de 5 à 6 km/h, dans de bonnes conditions.

Actuellement, les constructeurs fournissent de gros efforts de recherche (conception des lames ou accessoires) afin d’optimiser cette technique et lui donner encore plus de polyvalence. De nombreuses variantes de lames sont par exemple conçues pour réaliser un pseudo décavaillonnage avec des lames équipées de déflecteurs, souvent appelés bavettes.

la Maîtrise des adventices par tonte

Les tondeuses à lames et rotofils connaissent actuellement un joli succès. Deux marques présentaient des tondeuses à lames, VitiMeca et Védélago, alors qu’Aviff 33 proposait sa version rotofil, pouvant également recevoir des lames. La version rotofil permet une meilleure approche du cep que la version à lames. Ces outils peuvent permettre d’intervenir en « urgence », en passant dans des vignes fortement envahies par l’herbe.

VitiMeca présentait également, en avant-première, le Rolojack, une variante de Rolofaca. Le Rolofaca, dérivé du rouleau landais, assure une régulation de la poussée des herbes par pincement des tiges, traditionnellement réalisé grâce au poids de l’outil. La particularité du Rolojack réside dans le fait que la pression sur le sol est assurée par un report de masse du tracteur sur le rouleau, par l’intermédiaire d’un vérin hydraulique. L’action de ce rouleau se fait sur une végétation déjà développée qui est pincée et couchée au sol, formant ainsi une sorte de mulch. Devant être livré à un client, ce tout nouveau matériel n’a malheureusement pas pu prendre part à la démonstration.

La Régulation thermique

Jaulent persiste dans le désherbage thermique de la vigne mais fait évoluer son matériel vers la polyvalence avec la possibilité de réaliser de l’effeuillage et de l’épamprage thermique. En option, une lance de finition manuelle superbement réalisée peut également équiper cet outil. Les conditions sèches lors de ces journées et la période d’intervention fort tardive n’ont pas permis de placer ce matériel dans des conditions normales d’utilisation. Une très bonne efficacité a cependant pu être notée sur prêle.

Vers une remise en cause des habitudes

Quelle que soit l’alternative envisagée, le temps de travail s’avère supérieur à celui d’une stratégie chimique. Habitués à un sol parfaitement « nettoyé » par des stratégies 100 % chimiques, bon nombre de viticulteurs s’inquiètent de ce fait du nombre de passages nécessaires pour obtenir une efficacité équivalente. C’est pourquoi l’acceptation d’un certain niveau de développement des adventices s’inscrit comme une condition indispensable pour faire évoluer les pratiques vers des alternatives plus respectueuses des hommes et de l’environnement. Dans cette optique, il convient de soigner les premiers passages au printemps pour ne pas être débordé par la suite, et de n’intervenir, le reste de la saison, que lorsque les adventices deviennent trop envahissantes, de manière à ne pas multiplier inutilement les passages. A noter que les stratégies de travaux combinés peuvent participer également à une nette réduction des temps de travaux, en association avec du rognage par exemple.

Maxime Christen (CA 33, Service Vigne et Vin)
Alain Martinet (Pôle Phyto de Blanquefort)

Des aides pour vous accompagner dans l’achat du matériel
Une subvention peut être accordée pour l’acquisition d’agro-équipements environnementaux pour le secteur végétal. Elle doit contribuer à préserver et améliorer l’environnement. Ce dispositif d’aides, appelé AREA-PVE, est mis en place depuis 2007 et continuera jusqu’en 2013.
Plusieurs axes d’intervention sont proposés régionalement, en lien avec l’utilisation de produits phytosanitaires, la mise aux normes des effluents vinicoles et l’irrigation. En particulier, l’ensemble du matériel permettant une alternative au désherbage chimique, comme les outils inter ceps sont aidés au taux maximum de 40 %.
L’accès à ces aides est lié au respect de normes environnementales.
Pour plus de renseignements, contacter votre ADAR de secteur ou la Chambre d’Agriculture de la Gironde.
Yann Montmartin
(Chambre d’Agriculture de la Gironde, Service Vigne et Vin)

 

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