Le dynamisme local et le couperet national

18 décembre 2019

François Bodin, pépiniériste à Nercillac et président du syndicat de la région Cognac et trésorier de la FFPV, a commenté l’actualité de l’interprofession, les relations avec les instances gouvernementales et les viticulteurs enracinés.

Quel premier bilan faites-vous de ce 17e congrès national des pépinières viticoles ?

Deux images s’en dégagent. Le cognaçais est la région qui marche le mieux au niveau de la pépinière. Nous sommes plutôt satisfaits de la situation en terme de relation viticulteurs-pépiniéristes. La situation nationale est bien moins réjouissante, certaines sont en crises. Il a fallu en tenir compte dans ce congrès. Le gros point noir est la directive européenne sur le sanitaire.

 

France Agrimer va déléguer, fin 2020, ses contrôles sanitaires aux pépiniéristes qui devront obtenir le statut OPA, opérateur professionnel agréé. Comment avez-vous réagi à cette évolution de votre métier ?

Je l’ai sentie comme une délégation mal programmée. L’État se décharge de sa compétence qui était le sanitaire, envers une profession qui n’est pas préparée. Cela est très clairement assumé par France Agrimer. Nous ne sommes pas d’accord.

Cette compétence sanitaire sur le végétal est si importante qu’il est anormal que nous ayons moins d’un an pour nous y conformer. Il faudrait amener 100% de nos effectifs, afin de rester pépinières viticoles à être OPA. Nous n’avons pas les structures pour former le personnel à l’ensemble des maladies en moins d’une année. Je pense surtout aux structures de taille relative, aux structures familiales. Environ 150 000 pépiniéristes produisent 100 000 plants, comment les mettre à jour alors qu’ils travaillent dans un esprit familial ?

Ce sont de bons professionnels, très pragmatiques, moins en terme de suivi administratif. Il faudra être OPA au 14 décembre 2020, sinon vous ne pourrez plus exercer votre métier. La situation a été mal gérée. Les Italiens sont prêts car ils sont au courant depuis 2016. Un délai nous est donné, sans raisons ni moyens. C’est une délégation sans avoir le cadre. C’est inadmissible et impossible.

 

Pensez-vous que cette décision est immuable ou travaillez-vous à un report, une XXX ?

J’espère un dialogue avec France Agrimer, afin qu’il y ait une réflexion sur cette délégation de compétences. La règle pas appliquée de la même manière et dans le même délai dans les pays européens. Cela apparaît comme une distorsion de concurrence. Les Italiens sont prêts, et nous sommes justes informés.

Les explications de France Agrimer sont vaines. Le dialogue s’avère compliqué et obtus. Il va falloir que la FFPV et France Agrimer se rencontrent et discutent sur ce dossier brûlant.

 

Quelle part prend la sélection massale dans votre production par rapport à la sélection clonale ?

La sélection clonale représente 93% de notre production sur le matériel vendu en France. La sélection massale est davantage synonyme de « sélection château », pour des domaines voulant travailler avec leurs propres plants et vignes, dans un intérêt génétique et commercial. C’est un marché de niches qui n’est pas appelé à évoluer.

 

Quels échanges  entretenez-vous avec les autres pays producteurs de plants de vigne ?

Nous avons effectué des prospections de collègues européens vis-à-vis de la production de plants biologiques. Nous avons observé des interprétations de production pouvant varier d’un pays à un autre, et qui ne correspondent pas à l’exigence française, et ce dès la vigne-mère et greffon.

 

Comment se dessine l’avenir du plant biologique ?

La demande bridée par une fausse image d’impossibilité. Le vignoble biologique représente environ 10% la production, c’est donc notre potentiel éventuel. Ce n’est pas un frein à l’évolution du marché. Nous répondons à une demande, au marché existant, mais cela ne va développer davantage cette part commerciale. Les viticulteurs biologiques ont la philosophie de développer de l’amont à l’aval. Dans le cycle de production du plant, il faut l’imaginer dès le matériel végétal.

 

En guise de conclusion, quel sujet aimeriez-vous évoquer ?

Je ferai un point régional. Nous pouvons nous féliciter de l’entente viticulteurs-pépiniéristes. Il y a un an, lors de l’assemblée générale 2018, l’interprofession viticole a présenté le business plan avec la demande des 10 000 ha supplémentaires sur la mandature. Nous avons travaillé pour suivre cette évolution. La marche entre 1500 et 3500 hectares était important, et que les pépiniéristes n’étaient pas capables. Nous pouvions répondre aux nouvelles plantations, mais il était difficile de produire autant pour satisfaire également les replantations et complantations.

Nous avons proposé « business plan » pépinière, avec une augmentation de la production de 15% par an. Aujourd’hui, nous sommes au-delà, avec une augmentation de 18% sur l’Ugni blanc de production. Avec un dialogue efficient, nous pouvons produire en amont et honorer les demandes. 3500 ha au bout de trois ans, nous avons déjà une année d’avance.

Le prévisionnel était, sur les trois ans, 11, 13 et 17 millions de plants. Nous sommes déjà au-delà des 15 millions dès la première année. L’investissement des pépiniéristes a permis de planter davantage de vigne-mères d’ugni blanc.

Je félicite l’ensemble des collègues de leur professionnalisme et des efforts pour arriver cette quantité de plants produits en une année. Nous sommes présents, et avec les viticulteurs pour accompagner.

 

M. Bodin, qu’est-ce qu’un bon plan de vigne ?

– bonne sélection de variété végétale et sanitaire ;

– bonne traçabilité : tout produire à la base, un suivi certao, la certif du plan de vigne est un bon moyen de confiance de la pépinière au vignoble ;

– expertise française supérieure à la réglementation de l’Union européenne : 100% des contrôles maladies de quarantaine et émergentes, preuve de qualité sanitaire ;

– création d’une variété pour un besoin, par rapport à une attente, plus la qualité en terme de végétal et sanitaire (la plus importante en Europe) : multiplier variétés c’est bien, de façon pérenne c’est encore mieux ;

– Vitipep’s (« marque professionnelle de la pépinière viticole française ») permet la traçabilité complémentaire (et non substitutionnel), validé par un organisme extérieur, garantissant une attention supplémentaire de l’origine et de la traçabilité. L’interprofession reste attachée à la certif de France Agrimer, ce suivi validé.

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