Le fascinant cadre légal de l’alcool au Japon

18 janvier 2023

Naviguant dans le monde des spiritueux, il est normal d’être au fait des lois et réglementations concernant l’alcool qui régissent notre marché, mais aussi notre vie. Que ce soit sa production, sa vente ou sa consommation, un cadre légal strict entoure ce marché. 

Par simple curiosité, ou dans le cadre d’un éventuel élargissement de sa distribution, il peut être intéressant de se pencher sur les différences légales, mais aussi culturelles qui régissent certains marchés étrangers; et l’un des plus intéressants à ce sujet est le Japon. 

A la fois plus strictes sur certains points et laxistes sur d’autres, les lois japonaises concernant l’alcool représentent pour nous un contraste qui semble attaché à tous les aspects de la culture nippone. Pour faire court : Si l’alcool semble très facile à se procurer au Japon et peut être consommé dans des endroits parfois incongrus, la frontière entre ce qui est légal ou non est extrêmement stricte. Et que dire de la volonté du gouvernement – à contre-courant de la grande majorité des nations- de promouvoir la consommation d’alcool, notamment auprès des jeunes générations face au déclin de l’industrie locale ? Découvrons cela plus en détails. 

Photo: wikipedia

Lorsqu’on survole la culture japonaise, il apparaît pourtant que ses habitants seraient qualifiés de « gros buveurs »; en témoigne la coutume du Nomikai, ou l’équivalent de « boire un verre à la débauche », mais souvent en bien plus extrême. Une manière de briser la glace et faire tomber les distances entre collègues dans un monde du travail extrêmement codifié, mais pas trop non plus: Ainsi, pour un jeune employé, il serait très mal vu de quitter le bar ou restaurant avant ses aînés ou ses supérieurs; ce qui conduit parfois à de véritables beuveries et se terminent, comme les centaines de photos qui font le tour du web l’illustrent, par des salarymen en costume-cravate ivre morts, endormis dans le métro, des bancs publics ou au coin des immeubles. 

Et c’est ici qu’une première différence avec notre pays apparaît: Contrairement à la France, l’ivresse sur la voie publique n’est pas une infraction au Japon. Bien qu’elle soit tolérée, surtout lors de manifestations festives, rappelons qu’une amende de 150€ peut être délivrée en cas d’ivresse manifeste. Au Japon, à moins que la personne en état d’ébriété présente un réel trouble à l’ordre public, la police n’interviendra jamais ou juste pour s’assurer que la personne ne nécessite pas d’assistance. Attention toutefois, si la justice est laxiste concernant l’ivresse piétonne, elle l’est beaucoup moins concernant l’alcool au volant: Au delà du seuil légal de 0,3 g/l (0,5 en France), le conducteur risque jusqu’à 5 ans de prison et une amende allant jusqu’à 10000€ ! Et il s’agit là de peines pour une première infraction, la récidive étant encore bien plus punie.

Il faut dire que la facilité de se procurer des boissons alcoolisées au Japon peut tenter certains: contrairement à la France, le principe de licence de débit de boisson n’existe pas ! (Avec toutefois l’exception des établissements souhaitant vendre de l’alcool après minuit). N’importe quel commerce peut ainsi vendre des boissons alcoolisées, ce qui amène à des situations qui peuvent nous sembler surréalistes comme des distributeurs de boissons automatiques vendant de la bière, du saké et des cocktails directement sur la voie publique.

Encore une fois dans un contraste singulier, si il est possible de procurer librement de l’alcool quasiment à chaque coin de rue, l’âge légal de consommation est l’un des plus élevés au monde, à 20 ans. Et ces jeunes consommateurs justement, sont ceux qui inquiètent particulièrement les producteurs locaux et le gouvernement.

Tournant ouvertement le dos aux traditions de leur aînés comme le Nomikai par exemple, les jeunes générations sont de moins en moins friandes d’alcool; en effet ses ventes (et surtout ses accises) ont toujours représenté une part importante des revenus de l’état; mais si ces taxes représentaient 5% du total en 1980, elles ont dégringolé à 1,7% en 2020. 

C’est pour cela que l’an dernier, dans une initiative qui peut paraître surréaliste, l’équivalent japonais du Centre des Impôts a lancé un concours invitant les 20-39 à proposer des slogans pour une campagne visant à redorer le blason de l’alcool auprès des jeunes. 

Le projet, baptisé «Sake Viva!», vise à «revitaliser l’industrie», ce qui est encore une fois en contraste avec d’autres messages du gouvernement comme celui du Ministère de la Santé qui, depuis le Covid19, tente de décourager les rassemblements et libations traditionnelles dans les bars et restaurants. 

Mais tout de même, à quand remonte la dernière fois que vous avez entendu parler d’un organisme de la bureaucratie gouvernementale encourageant les gens à boire plus ?

Il n’est pas certain que cette initiative portera ses fruits; à contre-courant des volontés internationales et des tendances de « vie saine », il est probable que les habitudes continueront; certains continueront à acheter leur bière dans un distributeur automatique de la gare avant de prendre leur métro, et d’autres se contenteront de thé vert. Tout en constraste, comme le reste de la société japonaise. 

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