La technicité des pépiniéristes Charentais

12 mars 2010

La Rédaction

Le métier de pépiniériste est rentré dans une aire de technicité accrue conciliant à la fois la maîtrise de la qualité du matériel végétal et l’élaboration proprement dite des plants. Le Syndicat des pépiniéristes de la région de Cognac souhaite intensifier ses partenariats avec tous les acteurs de la région pour sensibiliser les viticulteurs à des sujets de préoccupations comme l’accès aux aides à la restructuration du vignoble, l’avenir de la recherche au niveau du matériel végétal et la lutte contre la flavescence dorée.

pepinieriste.jpgLes pépiniéristes de la région de Cognac connaissent depuis deux ans un net redressement de leur marché naturel car les faibles récoltes volumiques 2007 et 2008 ont fait prendre conscience aux viticulteurs de l’état de vieillissement d’un certain nombre de parcelles. La production de plants d’Ugni blanc représente actuellement 70 % de la production totale régionale et, à l’issue de l’année 2009, un taux de reprise inférieur en pépinière laisse entrevoir des disponibilités de greffés soudés légèrement inférieures à celles des deux dernières campagnes.

 

 

 

Seuls 25 à 30 % des viticulteurs sollicitent des demandes d’aides à la restructuration du vignoble

En ce début d’année 2010, beaucoup de pépiniéristes ressentent une véritable méfiance des viticulteurs charentais vis-à-vis des aides à la restructuration du vignoble. Didier Jallet et plusieurs de ses collègues du conseil d’administration du Syndicat des pépiniéristes de la région de Cognac souhaitent sensibiliser les responsables des propriétés sur ce sujet : « Les déboires liés aux aides à la replantation de surfaces destinées aux vins de pays ont laissé des traces dans l’esprit de beaucoup de viticulteurs. Le litige a porté sur la fraction d’aide supplémentaire abondée par l’Etat français alors que les aides européennes n’ont pas été remises en cause. Ce contexte a créé un climat de confusion dans la région qui perdure encore aujourd’hui. On nous pose beaucoup de questions sur les mécanismes d’aides à la restructuration du vignoble actuellement mis en place par FranceAgrimer. Nous expliquons que les aides à la restructuration proviennent de l’Europe et qu’il n’y a aucune raison qu’elle puisse être remise en cause. Le niveau de subvention de l’ordre de 8 500 €/ha ne sera pas éternel (voir tableau des aides page 7) et après 2013, il n’y aura plus aucune possibilité. Actuellement, les remontées du terrain que nous avons nous laissent à penser que seulement 1/4 à 1/3 des propriétés sollicitent des demandes de subvention. Dans le cadre de l’ODG, le nombre de ceps présents dans les parcelles sera important. Des taux de manquants supérieurs à 20 % auront des conséquences négatives sur l’affectation des surfaces à la production de Cognac. »

Constituer dès maintenant les dossiers d’aides pour les plantations 2011

Les procédures pour accéder aux aides à la restructuration du vignoble reposent sur la constitution de dossiers qui sont à retirer et à déposer auprès des services de FranceAgrimer. Pour les plantations 2011, les dossiers devront être constitués dans le courant du premier semestre 2010 avec des approches différentes pour les plantations anticipées et les plantations classiques après arrachage. Les techniciens de France
Agrimer tiennent des permanences au BNIC les 2e et 4e mardi après-midi de chaque mois. Plus les dossiers sont constitués tôt plus il sera facile de les traiter dans des délais correspondant aux attentes pratiques des viticulteurs pour réaliser les travaux d’arrachage et de replantation. Dans le cadre des procédures de constitution et de suivis des dossiers, les techniciens de FranceAgrimer se rendent sur les propriétés pour apprécier l’état des parcelles et valider le fondement de la demande. Ce n’est qu’après ces constats au vignoble que les travaux d’arrachage, de plantations pourront être mis en œuvre. La délégation FranceAgrimer Aquitaine Charentes qui a en charge l’instruction des dossiers d’aides à la restructuration du vignoble fait face à une charge de travail importante, d’où l’importance de ne pas attendre le dernier moment pour solliciter les aides. Les pépiniéristes souhaitent d’une manière générale que les viticulteurs anticipent leurs démarches de demandes d’aides pour que les travaux d’arrachage, de préparation des sols et de plantations puissent s’effectuer dans de bonnes conditions sur le plan agronomique.

Un gel d’automne brutal en octobre 2009 qui a fait des dégâts au niveau des plantations en première feuille

Les accidents liés à des gels d’automne précoces sur des plants de première feuille constituent aussi un sujet de préoccupation depuis plusieurs années. La réalisation de plantations de greffés soudés tardives (postérieures à avril) accentue les risques de sensibilité des plants à des chutes brutales de températures dans les premiers jours d’octobre. L’Ugni blanc a un cycle végétatif long et il arrive que les sarments des jeunes plants ne soient pas pleinement aoûtés à cette période de l’année. Les plantations très vigoureuses et des situations géographiques de parcelles en fond de vallée sont des éléments accentuant la sensibilité des greffés soudés aux effets de gels précoces. La phase d’aoûtement pour un plant en première feuille est très importante sur le plan de la constitution des réserves nécessaires au débourrement lors du printemps suivant.

A l’automne 2008, des gelées précoces les 3 et 4 octobre avaient occasionné une mortalité de plants inhabituelle. Le Syndicat des pépiniéristes estime qu’en 2009 de nouveaux dégâts de gels d’automne se sont produits. En effet, le 14 octobre 2009, le thermomètre est descendu entre –6 et –8 °C alors que la veille, en milieu d’après-midi, les conditions étaient quasiment estivales (des températures de 25 à 30 °C). Les jeunes plants, même dont l’aoûtement était bien avancé, étaient encore en pleine végétation avec une circulation de sève active. La variation de température très importante en moins de 48 heures semble avoir engendré selon les situations une dégradation des tissus végétaux dont les effets se révèlent actuellement. Les plantations tardives très vigoureuses situées dans des parcelles basses sont plus touchées par ce phénomène. Les plantations de plants en pot dont les mises en terre interviennent jusqu’à la fin juin, sont également sensibles à ces gels d’automne. Naturellement, un phénomène de décalage et de stagnation de la pousse des pots se produit dans les 2 à 3 semaines suivant leur plantation. L’incidence du climat pendant cette période d’acclimatation des jeunes plants au sol joue un rôle important sur la durée de stagnation de la pousse. Si le temps est chaud et humide, l’acclimatation est plus rapide alors que des conditions froides la retardent. Un plant en pot ne possède pas au niveau des soudures des tissus aussi solides que des greffés soudés. Leur résistance à des froids d’hiver dépassant – 5 °C est moindre et le fait de recouvrir le bourrelet de greffage d’une couche de terre à l’automne peut s’avérer une sage précaution. Au mois de septembre prochain, le Syndicat des pépiniéristes souhaite organiser une manifestation technique sur la mise en œuvre des plantations de vignes. Le souhait est de proposer aux viticulteurs une journée de réflexion sur la préparation des sols, la mise en terre des plants et l’entretien des jeunes plantations.

Une marque ENTAV-INRA pour financer la recherche sur le matériel végétal

La filière de production de plants de vigne au niveau national souhaitait depuis plusieurs années réinvestir dans la recherche au niveau du matériel végétal car, depuis l’intégration des activités de l’ENTAV au sein de l’IFV, l’insuffisance des financements s’avérait pénalisante. La Fédération française des pépiniéristes avait engagé une négociation sur ce sujet avec l’ensemble des producteurs de vins français au travers de l’AGPV (l’Association générale de la production viticole). Elle a débouché au mois de mars dernier sur la mise en place d’une taxe parafiscale ENTAV-INRA appliquée sur les ventes de greffés soudés dont les revenus seront exclusivement destinés aux recherches sur le matériel végétal conduites par les équipes de l’ENTAV. L’accord ne se limite pas seulement au seul prélèvement d’une cotisation supplémentaire. Les professionnels ont souhaité un engagement technique des pépiniéristes dans une charte de production de plants pour pouvoir avoir accès à la marque INRA-ENTAV. Des contrats de licence sont passés avec les pépiniéristes qui engagent leur responsabilité sur divers plans, le suivi sanitaire des vignes mères, l’utilisation de clones sous licences et la traçabilité de production. C’est un système d’adhésion volontaire qui repose sur l’utilisation de matériel végétal certifié et agréé pour les greffons et les porte-greffes. Actuellement, la très grande majorité des acteurs de la filière de production des plants s’y engage. D. Jallet ne cache pas que le fait de donner les moyens à la recherche d’améliorer la qualité du matériel végétal est fondamental. Les mécanismes de perception de la redevance reposent à la fois sur des droits d’entrée à la signature des contrats de licence (à la charge des pépiniéristes) et une taxe forfaitaire de 8 €/1 000 plants supportée à parité par les pépiniéristes et les viticulteurs. La fraction de taxe à la charge des viticulteurs sera mentionnée sur les factures de plants de vignes et les pépiniéristes acquitteront l’ensemble de la redevance au moment des déclarations annuelles de plants.

Les pépiniéristes souhaitent jouer un rôle « moteur » dans la lutte contre la Flavescence Dorée

L’autre sujet de préoccupation des pépiniéristes charentais concerne la flavescence dorée qui a connu en 2009 une nette extension dans de nombreux secteurs de la région délimitée. Didier Jallet, Freddy Fradin et François Bodin, trois membres du conseil d’administration, tiennent sur ce sujet un discours sérieux et responsable : « Il faut savoir que les pépiniéristes sont les premiers à s’investir dans la lutte contre la FD, et depuis longtemps. C’est indispensable sur tout le matériel de multiplication que les équipes de FranceAgrimer ne donnent les agréments que si le producteur de plants est en mesure de justifier de la réalisation des traitements insecticides préventifs et des prospections. Des contrôles inopinés sont effectués dans nos parcelles et dans les pépinières par les techniciens de FranceAgrimer. Compte tenu des risques que représente cette maladie pour notre métier, nous faisons les traitements insecticides sur l’ensemble des surfaces de nos propriétés. C’est la sagesse. Notre souhait pour les zones de production de plants qui vont se retrouver dans des secteurs contaminés est que tous nos voisins s’investissent dans la lutte insecticide et la réalisation des prospections chaque automne. Il faut se mobiliser pour à la fois lutter contre le vecteur et éliminer l’innoculum de FD des parcelles. Nous connaissons parfaitement les symptômes de la maladie, ce qui n’est peut-être pas le cas de tous les viticulteurs. Prévoir des formations pour reconnaître les symptômes et s’investir collectivement dans la lutte est indispensable. Cela doit être abordé comme un engagement responsable de chacun vis-à-vis de la pérennité de l’ensemble des ceps de vigne de la région. Le souhait du Syndicat des pépiniéristes est de se rapprocher des équipes du SRAL pour jouer en 2010 un rôle moteur dans la mise en œuvre de la lutte et la réalisation des prospections. »

Le traitement à l’eau présente des risques importants au niveau de la reprise

Le risque de transmission de la FD par les plants de vignes est aussi une préoccupation que les professionnels souhaitent aborder de façon objective : « La réalisation des traitements à l’eau chaude sur les greffés soudés rend les plants sains dans l’instant mais cette intervention n’est pas un vaccin. Dès la première année de sa plantation, il peut être contaminé par les cicadelles si la protection insecticide n’est pas correctement réalisée. Les réticences vis-à-vis de ce traitement que nous avons en tant que pépiniériste résident dans les dégâts qu’il engendre au niveau des tissus végétaux. Plonger pendant 45 minutes un plant dans une eau à 50 °C n’est pas anodin et provoque des taux de reprise beaucoup plus aléatoires. Nous avons conduit des essais de traitements à l’eau chaude pendant plusieurs années qui ont révélé des pertes de reprise importantes. Nous, il nous semble que l’enjeu majeur au niveau de la FD se situe ailleurs. Si un bon travail de lutte est effectué en amont et en aval, on n’a pas besoin du traitement à l’eau chaude. Il nous paraît aussi important de sensibiliser les viticulteurs dans les secteurs du PLO à ne pas oublier d’effectuer les traitements insecticides dans les plantations de 1ere, 2e et 3e feuille qui sont les plus sensibles. Dans notre région, les risques de transmission de la maladie par les plants de vigne ne sont pas très importants car, depuis des années, aucun pépiniériste de la région délimitée ne s’est fait déclasser sa pépinière suite à la découverte de symptômes de
FD. »

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