Partenariat individuel, partenariat collectif…La Journée des partenaires, le nouveau format qui a prolongé cette année l’AG de la Sica de Bagnolet, a rassemblé tous les livreurs Hennessy autour de la stratégie de la Maison de Cognac. Bernard Peillon, Pdg de la société et Thomas Moradpour, directeur commercial et marketing d’Hennessy à l’international, ont introduit les viticulteurs dans les arcanes des leviers de croissance de la marque et de son modèle de développement, forcément « volontariste et ambitieux ».
« C’est la gorge nouée que je m’adresse à tous ceux – et ils sont nombreux – qui ont été très touchés par le gel ». C’est par ces propos que Guillaume Roy, le président de la Sica de Bagnolet, a introduit la partie de la rencontre consacrée à Bagnolet, la structure de vieillissement associée à la maison Hennessy. Et comment pouvait-il en aller autrement quand le matin même – le jeudi 27 avril – une forte gelée brisait l’espérance de récolte de tout un pan de la viticulture charentaise. Plus tard, au cours de l’après-midi, Bernard Peillon, le Pdg de l’entreprise comme d’autres intervenants, ont dit leur solidarité et leur soutien aux viticulteurs.
Dans le périmètre Hennessy, la Sica de Bagnolet a longtemps joué le rôle de navire amiral des filières d’approvisonnement, avec des volumes de stockage et de livraison annuels pas loin des 100 000 hl AP. Mais en 2016, des changements importants interviennent : progression des achats en eaux-de-vie 00, marchandises qui, par définition, ne passent pas par la case « coopérative de vieillissement » ; montée en charge des contrats pluriannuels, qui tendent à se substituer aux QR (quantités réservées), formes de relations commerciales traditionnellement en usage rue Richonne. Au final, l’empreinte de la Sica de Bagnolet s’est rétrécie même si elle reste un acteur majeur et incontournable de l’approvisionnement Hennessy. Alors, quand la maison veut s’adresser à l’ensemble de ses livreurs, que fait-elle ? Elle cré un nouveau format, la Journée des partenaires de la maison Hennessy. Cette rencontre, dont le 27 avril 2017 a vu la première édition, fut organisée en deux temps : une première partie statutaire dédiée aux adhérents de la Sica de Bagnolet rejoints, dans un second temps, par les autres livreurs. Au bas mot, plus de mille viticulteurs ont ainsi rallié à partir de 17 h, en deux vagues, la grande salle de l’Espace 3 000 à Cognac.
Projection dans l’avenir
« Quel que soit le relationnel qui vous lie à la maison, individuel, collectif, nous voulons vous entretenir du fonctionnement de notre maison et vous dire comment elle se projette dans l’avenir » a annoncé en préambule Bernard Peillon. Une entreprise de communication, d’explication, de conviction que le Pdg de la maison n’a pas voulu mener seul mais qu’il a souhaité partager avec le directeur marketing et commercial d’Hennessy à l’international, Thomas Moradpour. Moment forcément rare et toujours précieux d’entendre un cadre opérationnel de haut niveau s’exprimer sur un produit qui capte l’intérêt de l’auditoire. « Pour une marque, a noté Th. Moradpour, l’une des clés du succès consiste à surprendre, réenchanter, créer de la désirabilité. Mais pour cela, il faut casser les codes, faire bouger les lignes, apporter ce supplément d’émotion et de créativité. Auprès de qui ? Auprès de nos consommateurs mais aussi et surtout auprès de ces non consommateurs qui ne connaissent pas Henessy et qui, croyez le, sont les plus nombreux. Cependant, beaucoup d’entre eux sont « murs » pour nous rejoindre. Car l’appétence des consommateurs pour des produits « bien faits » ne cesse de progresser. Aujourd’hui, il ne suffit pas d’être beau et bon. Faut-il encore être « bien fait » et parfaitement positionné pour réussir dans ces tendances. »
Hennessy VS (au pluriel)
Pour illustrer son propos, l’homme des marchés a décliné la gamme des Cognacs Hennessy, en s’attardant cependant sur l’un d’entre eux, le Hennessy VS. « Le Hennessy VS, oui mais lequel ? Car c’est l’un des privilèges de cette maison que d’avoir plusieurs VS, selon les marchés, Europe, Afrique, Etats-Unis, Chine ». La Chine justement, où il identifie une nouvelle cible de consommateurs, jeunes urbains d’environ 25 ans, « tous issus de la règle de l’enfant unique. » « Ils ont deux parents, quatre grands-parents, ils doivent réussir, ils subissent une pression terrible. Ils ont envie de s’échapper, sortent beaucoup. Ils veulent explorer leur propre chemin. Nous allons leur proposer de nous rejoindre dans un univers où ils pourront sortir des sentiers balisés, mener leurs propres expériences. Avec le Cognac VS Classium, ils découvrent un mode de consommation un peu inattendu, « disruptif ». » En même temps que s’exprimait le directeur commercial, défilaient à l’écran des images de jeunes gens bondissants, sur fond de Classium VS en lettre romanes et d’idéogrammes d’un vert acidulé, loin des codes du rouge et de l’or. « La danse, elle incarne l’idée de liberté. »
Prémiumisation aux Etas-Unis
Mais la marque n’oublie pas non plus les « silos » de distribution. « A un moment, Hennessy Classium a pu être distribué exclusivement dans les bars et boîtes de nuit. Mais il s’adresse à un public de jeunes chinois qui doit pouvoir le trouver partout. C’est pourquoi nous avons élargi notre distribution au marché domestique, y compris dans le e.commerce car les jeunes ont l’habitude de faire leurs courses on line. »
Le directeur commercial a ensuite évoqué la stratégie de premiumisation à l’œuvre aux Etats-Unis « pour tirer la consommation vers le haut ». « Cette année, a-t-il dit, se déploie la première campagne de publicité VSOP depuis dix ans. Elle met en scène toute la complexité de nos métiers, assortis de contrôles et de maîtrise ». Et de revenir encore et toujours sur cette notion de « produit bien fait », si moderne, si intemporelle, si parfaitement synchro avec le Cognac.
Inviter une nouvelle génération de consommateurs à « ouvrir le blend », lui faire vivre sans attendre la découverte des spiritueux de luxe, de l’XO….Telle fut le sens de la campagne de publicité Hennessy Odissey lancée l’an dernier, réalisée de manière assez iconoclaste par le cinéaste d’origine danoise Nicolas Winding Refn (Drive). Cette année, la marque a demandé à un grand nom du design, Marc Newson – il a dessiné entre autres l’intérieur de l’Airbus A 380 pour la compagnie australienne Qantas Airways – d’interpréter ce à quoi pourrait ressembler une carafe Hennessy XO « dans les vingt prochaines années …et de la proposer dès maintenant. » « Marc a dessiné une carafe très épurée, donnant l’impression d’un accès direct au blend. »
Pilotage
En début de réunion, Guillaume Roy avait indiqué que les ventes d’Hennessy avaient dépassé « le chiffre symbolique des 7 millions de caisses ». Dans son propos, Bernard Peillon est à la fois revenu sur 2016 et s’est projeté sur 2017. « Nous avons vécu une magnifique année 2016, absolument record. Très clairement, le fameux plan Conquest lancé aux Etats-Unis voilà quelques années a créé une dynamique. Nous avons également profité d’un « alignement de planètes » : économie porteuse, taux de change en baisse…Outre atlantique, l’an dernier, Hennessy a connu une croissance à 2 chiffres – bien au-delà des dix points – sur une base déjà très élevée de plus de 3 millions de caisses. Ce rythme de croissance va-t-il se poursuivent au même niveau en 2017 ? Sans doute pas. Hennessy risque de connaître une légère décélération de ses caisses. Mais ça, ça relève de notre pilotage, de notre savoir-faire : comment piloter notre activité pour pouvoir exploiter au mieux toutes les possibilités. »
Le PDG d’Hennessy a évoqué les marchés émergents, pour certains déjà actuels relais de croissance : Nigeria, Afrique du sud, Mexique, Canada, Indonésie…Surtout, il a parlé de la méthode, du « modèle Hennessy », quelque chose qu’il a abordé régulièrement au cours de ces dix années passées à la tête de la maison de Cognac. « Face à un monde imprévisible, en permanence changeant, la meilleure façon me semble-t-il de nous y adapter est de se fixer un cap, un cap volontariste et ambitieux. Devant mes équipes, je reprends souvent l’image du crabe. Il se déplace un peu à droite, un peu à gauche mais une chose est sûre, il va toujours à la mer. »
Le manager a cité un acronyme utilisé par l’armée américaine et que le monde des affaires s’est approprié : VICA pour volatilité, incertitude, complexité, ambiguïté (VUCA en anglais). Il a surtout insisté sur la volatilité et l’incertitude. « La meilleure façon pour nous de répondre à la volatilité est d’avoir un modèle de développement le plus équilibré possible, tant en termes de zones géographiques que de composition de notre portefeuille de qualités. Nous sommes les seuls dans cette région à cultiver avec autant de constance cette position. Cette vérité, nous la proclamons depuis toujours et nous la déployons largement ». Quant à l’incertitude, « le Business Plan est le meilleur outil collectif pour se projeter dans l’avenir en retenant des hypothèses adaptées. Le Business plan est absolument fondamental à cette région. » Pour Bernard Peillon, pas de doute, la qualité VS constitue le « cœur du réacteur » de la marque. « Si le cœur d’activité est sain, tout le reste en découle. C’est comme les différents étages d’une fusée. Le premier étage booste les autres. » « Le VS est la carte de visite d’Hennessy, mais notre obsession est d’élargir notre jeu, à l’intérieur d’un portefeuille parfaitement diversifié. »
Bernard Peillon s’est servi du marché chinois pour défendre l’idée de l’alimentation des besoins du négoce. « A chaque fois que nous avons laissé le Whisky s’installer sur un grand marché, le Cognac a couru le risque de devenir invisible. Le marché chinois, nous avons pris le temps de le comprendre. Aujourd’hui, son accélération se renforce. Il ne faudrait pas qu’elle bute sur un problème de disponibilité. Nous ne devons pas louper le train. » Il a repris une phrase de Coluche – les portes de l’avenir sont ouvertes à ceux qui savent les pousser. » Une conclusion à son intervention qui avait été précédée d’une autre, sur les enjeux environnementaux. « La région ne peut se présenter devant les médias, les leaders d’opinion que si elle est en ordre de marche. Nous devons être irréprochables, exemplaires. »
Sica de Bagnolet : Les chiffres
A la Sica de Bagnolet, les entrées de la récolte 2015 s’étaient soldées par un total de 52 490 hl AP réparti comme suit : 5 546 hl AP pour la G.C, 10 900 (PC), 2 456 (B), 33 283 (FB), 305 (Cognac). Sur l’exercice portant sur la récolte 2016, les entrées à la Sica ont représenté un volume de 41 000 hl AP. Début avril 2016, la Sica avait vendu à la société Hennessy 82 489 hl AP pour une valeur de 118 millions d’€ (volume de vente globalement en hausse par rapport aux sorties de l’exercice 2015). Le 10 avril 2017 de cette année, les livraisons de la Sica à son acheteur ont représenté 83 900 hl AP, pour une valeur de 121 millions d’€.
Au 31 décembre 2016, les stocks à la Sica s’élevaient à 186 362 hl AP, pour une valeur de 220 millions d’€, hors frais financiers .
Sur l’exercice clos le 31 décembre 2016, le taux d’évaporation moyen du stock s’affiche à 2,47 %, un chiffre stable par rapport à l’exercice précédent. Le coût moyen de stockage à la Sica équivaut à 3,29 €/mois/ hl AP.
« Au service de la qualité »
Concernant des chais de stockage de Bas Bagnolet ou du nouveau site d’embouteillage du Pont neuf, en cours d’achèvement, la maison de Cognac revendique une « quête d’excellence ». « Il ne s’agit pas d’une simple extension capacitaire ».
Avec comme sparring partener Arnaud Camus, responsable de la communication viticole chez Hennessy, Alain Deret, directeur des opérations eaux-de-vie, Florent Morillon, directeur amont et Renaud Fillioux de Gironde, responsable des relations avec la viticulture ont présenté tour à tour les investissements en cours ainsi que l’accompagnement technique et autres actions tournées vers les livreurs. A. Deret a indiqué que le premier chai de Bas Bagnolet, baptisé G 3, était en service depuis le mois de mars. « C’est la quintessence même de notre savoir-faire en matière de vieillissement. Nous avons travaillé avec des chercheurs, des thermiciens…. Les études portèrent sur trois points essentiels : la sécurité au travail, la manutention des barriques, l’optimisation des conditions de vieillissement ». « Pour le site d’embouteillage, a-t-il ajouté, l’objectif était similaire : utiliser les techniques les plus pointues pour la préparation de la coupe finale comme pour la mise en bouteille. Un gros travail a été fait sur l’intégration paysagère, l’économie d’énergie, la charte HQE (haute qualité environnementale). Le site sera opérationnel courant de l’année prochaine. Ces projets très importants en termes financier et humain sont au service de la croissance mais une croissance qui est aussi un état d’esprit, tournée vers la quête d’excellence. Ces nouveaux équipements ne se résument pas à une simple extension capacitaire.»
Florent Morillon, le directeur amont, a évoqué les contrats pluriannuels, « un partenariat fort, pérenne avec la maison, qui permet aux viticulteurs d’investir en toute sérénité sur l’avenir. » Il a parlé de l’accompagnement technique au fil des saisons (forums etc…) et du programme de R&D (recherche et développement) conduit par la maison. « Depuis deux ans, nous menons par exemple des essais sur les drones. Pour dénombrer les pieds manquants, ils permettent de diviser le temps par cinq. » Au sujet de l’environnement, de la viticulture durable, le directeur amont est revenu sur le désherbage en plein, que la maison veut voir disparaître chez ses livreurs. « Une minorité de viticulteurs y recourt encore. Il faut poursuivre l’effort. » La maison va expérimenter sur le vignoble Hennessy un système de désherbage avec de l’eau sous haute pression.
Renaud Fillioux de Gironde a lancé quant à lui les premiers « Trophées de l’excellence » qui récompensent la qualité et la gestion de l’exploitation à travers plusieurs facettes : pratiques vitivinicoles, démarche environnementale, utilisation de nouvelles techniques, gestion des ressources humaines, santé, sécurité au travail. « Nous récompensons des partenaires exemplaires, qui mettent en valeur une démarche de progrès continu ». Un deuxième prix a été créé dans la foulée, le prix de la qualité, récompensant la meilleure eau-de-vie nouvelle. Pour les Trophées de l’excellence, le responsable des relations avec la viticulture a encouragé les partenaires Hennessy à déposer des dossiers.