Le 22 août 2012, la Russie est devenue membre de l’OMC. Après dix-huit ans de négociations – un véritable marathon – elle a signé l’acte approuvant son entrée à l’Organisation mondiale du commerce.
C’est en 2015 que l’adhésion devrait revêtir tous ses effets. D’ici là, un processus de mise à niveau va s’enclencher. Pour le Cognac, cela se traduira notamment par une baisse progressive des droits de douanes. Dans trois ans (en 2015), le taux devrait atteindre 1,5 €/ litre, contre 2 €/l actuellement (source BNIC). Dans une note parue au Bulletin d’information permanent (BIP) du Bureau national du Cognac, accessible aux seuls ressortissants du Cognac, Lionel Lalagüe, responsable du service « Protection de l’AOC et Accès aux marchés », voit dans l’adhésion de la Russie à l’OMC d’autres avancées probables. Bien que plus ténues, moins visibles que l’abaissement des droits de douanes, elles sont sans doute plus fondamentales. Il s’agit de « la possibilité d’analyser la législation via les procédures d’évaluation « OTC » (obstacles techniques au commerce) de l’OMC » ainsi que « des moyens plus importants pour discuter des procédures là où des challenges subsistent. » Un style très diplomatique pour dire que les exportateurs espèrent un abaissement des barrières non tarifaires (tout ce qui ne relève pas des droits de douanes mais qui handicape sérieusement le commerce).
Obstacles techniques au commerce : un véritable casse-tête
Les petites maisons de Cognac ne s’embarrassent pas de périphrases pour dire combien les obstacles techniques au commerce pèsent sur leur quotidien. « Compte tenu du prix de nos Cognacs, ce ne sont pas les droits de douanes qui nous ennuient le plus. Dans tous les pays de l’Est et l’Amérique du sud, ce sont plutôt les bakchichs et les règles d’exportation, parfois démentielles. »
Cette propriétaire d’une petite marque présente partout dans le monde raconte comment les importateurs russes doivent acquitter des cautions très élevées auprès de leurs banques pour pouvoir commercer. Parfois des décisions unilatérales et arbitraires viennent bloquer les affaires. C’est le cas en Tchéquie récemment. La mort de 19 personnes pour cause d’alcool frelaté a gelé pour « un mois ou deux » toute importation d’alcool supérieur à 20 % vol., alors même « que le problème ne tenait pas au degré alcoolique mais à l’alcool frelaté. »
En Ukraine, tous les documents doivent être traduits dans la langue du pays. Un sacré travail. Si les pays baltes font partis de l’Europe, dans les faits, pas grand-chose a changé depuis l’élargissement. Les importateurs continuent d’exiger les documents d’avant. « Concrètement, commente l’exportatrice, la réglementation européenne s’arrête aux portes des pays européens de la première heure, Belgique, Allemagne… ».
Le 5 septembre, les exportateurs vers la Chine ont appris qu’ils ne pourraient plus expédier vers l’empire du milieu s’ils n’étaient pas au préalable enregistrés en Chine. Règle applicable à partir du 1er octobre. « Comment faire ? » s’est interrogé l’opérateur. Je ne parle pas chinois, je n’ai pas de clavier en chinois. » « Demandez à votre importateur un document et faites-en un copié-collé » lui a suggéré le BNIC. « Notre salut, c’est d’être extrêmement réactif face à toutes ces prescriptions » analyse le négociant charentais, qui se demande tout de même si cette somme de micro-barrières, mises bout à bout, ne signera pas, un jour, la fin des petites maisons de négoce.
Dernière contrainte en date, sur les Etats-Unis cette fois. A partir du 1er janvier 2012, les installations des exportateurs hexagonaux devront avoir fait l’objet d’un audit des Douanes. « Si nous ne le faisons pas, nos produits ne seront pas refusés mais mis dans un coin. » La propriétaire de marque a du mal à envisager son chai de coupe, en pleine campagne charentaise, équipé d’un digicode.
Dans ces conditions, les opérateurs ne sont pas loin de voir dans l’abaissement des droits de douanes en Russie un « effet d’annonce ». « Au quotidien, ce n’est pas ce qui nous impacte. »
