Le Cognac côté pierre Vue d’ensemble …

2 mars 2017

La Rédaction

Cognac…un mot connu du monde entier et qui évoque bien des images : cocktail branché brandi par un rappeur dans l’ambiance survoltée d’une boîte new-yorkaise, liquide ambré au parfum de luxe, «so chic», dans le calme feutré d’un club anglais, partenaire des repas soignés sur les tables de Shanghai…Nous qui vivons sur ses terres, bien que toujours sensibles à la part de rêve inhérente à la «liqueur des dieux », nous connaissons la réalité du cognac : des vignes bien sûr et un secteur économique primordial pour notre territoire  mais  aussi de nombreux bâtiments qui émaillent nos villes et nos villages, maillons industriels indispensables pour que naisse la légende.

 

C’est à la découverte de ce précieux patrimoine que vous emmène aujourd’hui le paysan vigneron, autour de ces bâtiments souvent plus que centenaires…Certains sont restés outils de production, d’autres se sont réinventé une histoire, mais tous appartiennent à la mémoire de notre territoire.

Réalisé il y a quelques années par le service Inventaire et Patrimoine de Nouvelle Aquitaine, l’inventaire du patrimoine industriel des eaux de vie de cognac est disponible sur internet*. En nous appuyant sur ce minutieux travail, nous vous proposons de commencer ce dossier par une vue d’ensemble…

 

 

Un peu d’histoire…

 

Le cognac, tel qu’on le connaît aujourd’hui est élaboré depuis le 17ème siècle. Anglais et Hollandais, les premiers importateurs du produit, créent alors des comptoirs à Cognac et dans sa région. Ces maisons de commerce se concentrent le long de la Charente, en raison de l’ouverture qu’offre le fleuve vers la mer et le port de La Rochelle. Le succès des exportations entraine l’accroissement des plantations de vignes qui couvrent au 19e siècle une grande partie des terres de Charente et Charente-Maritime.

En 1880, l’épidémie de phylloxéra vient interrompre ce bel équilibre. Elle est surmontée par les négociants munis de stocks importants, mais ruine les petits exploitants bouilleurs de cru qui ne travaillent que leur propre récolte. L’organisation de la production s’en trouve bouleversée : les maisons de commerce créent leurs propres distilleries et la distillation industrielle se développe rapidement au détriment de la distillation agricole. La plus grande partie de la production passe alors aux mains de grandes maisons de commerce (Hennessy, Martell, Robin, Hardy, Hine) ; quelques petites entreprises, fermes-distilleries, demeurent cependant.

Le service inventaire décomptait fin 2007 quelques 120 distilleries d’eau-de-vie de cognac dont près des deux tiers situés en Charente et un tiers en Charente-Maritime. La plupart d’entre elles assurent l’ensemble de la chaîne de production, vinification, distillation, vieillissement et commercialisation.

A la fin du 19ème siècle, elles s’implantent plutôt au centre des villes (Cognac, Jarnac, Châteauneuf-sur-Charente, Saintes…) et à proximité du fleuve Charente ou de son affluent la Boutonne, pour des raisons pratiques de transport. Après les années 1930, nombre des distilleries industrielles quittent les centres villes, pour des contraintes de sécurité liées aux risques d’incendie, mais aussi pour des raisons de place. Elles s’installent alors à l’extérieur des agglomérations, souvent par la transformation d’anciennes distilleries artisanales ; le centre de la ville de Cognac, qui comptait plusieurs dizaines de distilleries à la fin du 19e siècle, n’en accueille plus que quatre en activité dans les années 1990.

…et d’architecture

L’élaboration et le commerce du cognac ont permis la construction d’importants complexes architecturaux, qui se caractérisent par de longues façades scandées de nombreuses ouvertures. Ces bâtiments aux murs noircis par la "part des anges" sont de construction soignée et pour certains d’entre eux d’une grande qualité architecturale.

Dans nombre de ces distilleries, l’architecture concourt à l’image de marque du produit qui y est élaboré, notamment par la qualité des matériaux, de leur mise en œuvre et du traitement ornemental. Les grandes maisons de cognac ont ainsi parfois fait appel à des architectes, tels Eugène Demongeat, qui a construit le complexe Martell vers 1850 à Cognac, et Marcel Oudin, maître d’œuvre des bâtiments Hennessy de 1930. Ces grandes firmes continuent aujourd’hui à promouvoir leur image à travers la création architecturale.

Dans les domaines viticoles, les bâtiments de ferme et de distillerie sont rassemblés autour de la maison de maître, qui est parfois un château. Cependant, depuis les années 1960, l’atelier de distillation s’installe à l’écart des autres bâtiments pour éviter la propagation d’éventuels incendies.

Construits en moellons de calcaire enduits, mais aussi en pierre de taille et en briques jusqu’au début du 20ème siècle, les distilleries industrielles adoptent alors le béton, qui permet la création de formes architecturales nouvelles, totalement différentes. C’est le cas des bâtiments construits en 1928 et 1929 à Cognac : la tour de mise en bouteilles Martell et le complexe bâti pour Hennessy, composé d’une tonnellerie, d’un chai des coupes, d’un atelier de mise en bouteille et d’un hall d’expédition. Tous les bâtiments construits à partir des années 1960-1970 allient le béton, l’acier et le verre.

Pour promouvoir la prestigieuse image de luxe du produit qu’elle fabrique, la distillerie de cognac est sans conteste l’édifice industriel le plus décoré par la sculpture ou la ferronnerie. La sculpture se déploie sur les frontons, l’encadrement des portes d’entrée et les linteaux des baies. Les motifs représentent le plus souvent des blasons, armoiries imaginées par les propriétaires. Parfois, il s’agit d’emblèmes des activités de distillation, comme le raisin, et de négoce.

 

*Vous retrouverez l’ensemble du travail réalisé par Madame Pascale Moisdon, sur lequel s’est largement appuyé cet article, sur www.inventaire.poitou-charente.fr

 

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