« Quelque Chose Ne Va Pas »

22 mars 2009

Que 10 % de son chiffre d’affaires passent dans le fermage représente quelque part une aberration pour J.-Ch. Baraud, installé à Vallet près de Montendre, en Bons Bois 17. Le représentant syndical évoque la nécessité de revoir la méthode de calcul des fermages viticoles de la région délimitée.

« Le Paysan Vigneron » – Que vous inspirent les montants de fermage parus à l’automne 2008, à échéance 2007 ?

baraud_opt.jpegJean-Christophe Baraud – Ils sont complètement illogiques. De tels niveaux se comprendraient face à des revenus de 7 000 € et plus mais nous en sommes loin. La méthode de calcul est à revoir. Le président du SGV, Christophe Forget, a l’intention d’aborder le sujet afin qu’à l’avenir de telles aberrations ne se reproduisent plus. Il va falloir certainement trouver de nouveaux curseurs. Aujourd’hui, les syndicats viticoles ne sont pas associés à la discussion des fermages viticoles. Ce sont les syndicats généralistes qui s’en chargent, UDSEA en Charente, FDSEA en Charente-Maritime.

« L.P.V. » – D’une certaine façon, n’est-il pas sain que les fermages manifestent une certaine réversibilité, à la hausse comme à la baisse. Pour diminuer quand la situation se dégrade, il faut bien qu’ils montent quand la situation s’améliore.

J.-C.B. – Oui et non. Je crois que l’intérêt bien compris de tous – propriétaires comme fermiers – serait que le prix fermage soit régulé dans le temps. Aujourd’hui, que se passe t-il ? Sous l’effet du fameux effet ciseau, nous allons payer en 2009 un fermage 2007 très élevé alors que nos recettes sont déjà en baisse par rapport à l’an dernier. Certes, ce décalage dans le temps est inhérent au mode de fixation et de paiement des fermages viticoles (fermages de l’année N calculés et payés l’année N + 2), mais inutile d’en rajouter dans l’élasticité. Il y a des bases de calcul qui mériteraient d’être révisées. En Bons Bois par exemple, est-ce normal que l’on retienne comme référence de prix les vins Cognac du second marché alors que pour tous les autres indices régionaux, c’est le prix des grandes maisons qui fait foi ? C’est vrai qu’en 2007-2008, dans notre cru, des vins Cognac sont partis à 850 € l’hl AP (compte 00 à 1 000 € l’hl AP sorti de l’alambic). Mais, dans le même temps, le prix des vins contractualisés ne dépassait pas 620 € l’hl AP. A mon sens, c’est la cote grande maison et non le prix du second marché qu’il faudrait intégrer, quels que soient les crus. Cette année, le second marché affiche une décote de 25 %. A trop relayer ces mouvements erratiques, on court à une impasse.

« L.P.V. » – Pourquoi ?

J.-C.B. – Dans l’absolu, quand une exploitation commence à consacrer plus de 10 % de son chiffre d’affaires au fermage, quelque chose ne va pas. Et puis la réalité ne se plie pas toujours aux règles de droit. Si le statut du fermage prévoit de mettre à la charge du propriétaire tous les frais d’établissement et d’entretien du vignoble (palissage, entreplantation…), dans les faits, cela ne se passe pas toujours ainsi. Verser un fermage élevé, d’accord mais il faudrait que le vignoble soit à l’unisson. Quand les vignes produisent 60 ou 70 hl/ha, un fermage d’1,3 hl AP/ha à 710 € est beaucoup, beaucoup trop cher. Votre chiffre d’affaires s’élève à environ 4 500 € de l’ha alors que les coûts de production publiés par l’étude économique du BNIC atteignent 6 000-6 200 € de l’ha. Vous êtes loin du compte ! Je me demande ce que les gens peuvent gagner quand ils versent des fermages de 2 hl AP/ha. Et ça existe dans certains crus !

« L.P.V. » – Autant que le montant, c’est peut-être l’amplitude de la variation enregistrée en un an qui a choqué en Bons Bois 17.

J.-C.B. – Absolument. A mon avis, le fermage devrait évoluer dans la même proportion sur tous les crus et les deux départements. Les Bons Bois sont les premiers à trinquer en cas de retournement de marché et pourtant ce sont leurs fermages qui connaissent les coups de butoir les plus importants : 70 % d’augmentation entre 2006 et 2007. Le prix fermage Bons Bois talonne celui de Grande Champagne – 710 € l’hl AP contre 733,86 € – mais, à ce que je sache, le prix des eaux-de-vie 00 des crus centraux ne diminuera pas de 25 % cette année. Surtout dans nos crus périphériques mais ailleurs aussi, les fermages ne doivent pas contribuer à amplifier des oscillations déjà difficilement supportables pour nos exploitations.

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