Et les Charentes ? Elles aussi n’attendent qu’une chose : créer leur propre interprofession « Vignes autres ». Cette nouvelle « interpro. » existera à côté des deux autres, celle du Cognac et celle du Pineau. C’est l’un des grands chantiers de ces tout prochains mois. Philippe Guélin, président du Syndicat des vins de pays charentais, membre du SGV, en est l’un des principaux protagonistes et plus chauds partisans. « Je me cale sur le projet de réforme Bussereau pour défendre le statut interprofessionnel des vins », dit-il. « Chaque décision sera affectée à un organisme. Là aussi, le principe d’affectation s’appliquera. » Une première réunion « d’ouverture » a eu lieu le 18 avril dernier entre négoce, viticulture et représentants de l’Administration. Un groupe de travail à effectif plus réduit est programmé le 3 mai, pour essayer d’affiner les propositions. Car, selon le plan de marché établi par les pouvoirs publics, le dossier devrait être sur le bureau du ministre de l’Agriculture fin juin. A ce rythme, pas question de trop tergiverser. « L’important, c’est d’avancer », note le pugnace Ph. Guélin.
Un temps, avaient été évoquées quatre entités : Cognac, Pineau, vins de table, produits industriels. Et puis l’arbitrage a tranché en faveur du regroupement vins de table/produits industriels. Indéniablement, une certaine interférence existe entre ces débouchés et la plupart du temps les opérateurs sont les mêmes. Une question se pose pourtant. L’interprofession « vignes autres » a-t-elle vocation à faire l’amalgame entre les différentes destinations – « un pâté entre cinq-six produits » grince un observateur – ou à introduire un tant soit peu de raisonnement « filière » ? Il paraît assez difficile de faire l’économie de cette approche. Car personne n’a vraiment envie de passer à la trappe ou être la résultante de l’organisation des autres. C’est ainsi que des collèges ou commissions paritaires négoce/viticulture par types de produit (vins de pays, vins industriels, jus de raisin…) sont dans les tuyaux. Ceci étant, les opérateurs régionaux insistent bien sur la différence quasi « ontologique » qu’il existe pour eux entre une interprofession et une filière. « Soit l’on fait l’une, soit l’on fait l’autre mais on ne peut faire les deux ! » La question de – « qui s’assoit autour de la table » ? – est au centre de la problématique. L’orthodoxie interprofessionnelle et pour tout dire son statut veut que ce soient les opérateurs régionaux, membres de syndicats professionnels représentatifs. Maintenant, dans une vision progressiste des choses, une dose « filière » ne pourrait-elle pas être instillée au sein de l’interprofession, histoire d’avoir les interlocuteurs « métiers » en face de soi ? A ce compte-là, la région des Charentes ferait vraiment figure d’avant-gardiste. Pas sûr qu’elle y soit prête.
Faut-il créer une interprofession « charento-charentaise » ou se raccrocher à quelque chose d’existant, en l’occurrence l’ANIVIT (Association nationale interprofessionnelle des vins de table) par le biais d’une ANIVIT régionalisée ? Après la première réunion du 18 avril, la question ne semble plus vraiment faire débat. La solution qui consiste à être « maître chez soi » tient la corde. Des négociants vins manifestaient une certaine préférence pour l’ANIVIT régionalisée, comme étant quelque chose de plus rapide à créer et de plus simple en terme de prélèvement de CVO (cotisation volontaire obligatoire). La viticulture invoque les incertitudes pesant sur l’avenir de l’ANIVIT et celles concernant les circuits de financement. « On sait comment l’argent monte, moins comment il redescend. Nous sommes assez grands pour gérer nos propres ressources. » Manifestement, à un tournant « historique » de leur histoire, les vins charentais n’ont pas envie de changer de tutelle mais bien de s’en affranchir. Pour exister par eux-mêmes.
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