L’Elevage Des Vins Rouges : Des Cliquages En Remplacement De Soutirages ?

15 mars 2009

La Rédaction

L’élevage des vins rouges est une étape importante devant permettre de stabiliser, conserver et valoriser les qualités acquises par le vin au cours de la vinification. L’objectif premier de cette étape est d’obtenir une évolution harmonieuse des constituants du vin, en particulier la couleur, l’arôme et la saveur.

 

Dans la pratique, le choix du mode d’élevage se fait en concordance avec le produit que l’on souhaite élaborer et commercialiser. De nos jours, de nombreuses variantes dans les pratiques d’élevage existent, il faut alors choisir l’itinéraire le mieux adapté au vin considéré.

Objectifs des essais mis en œuvre

Au cours des millésimes 2003 et 2004, nous avons mis en place des essais comparatifs de différents itinéraires d’élevage à partir d’un lot homogène de vin. L’objectif est d’évaluer, dans les conditions de ces essais, l’incidence analytique et organoleptique d’un élevage traditionnel avec soutirage et aération comparativement à un élevage sans soutirage pour lequel les apports d’oxygène sont réalisés par cliquage.

Protocole expérimental

Différentes modalités sont mises en œuvre à partir d’un lot homogène de vin après FML (cf. schéma 1 et tableau 1) :

Qu’est-ce qu’un cliquage ?

Un cliquage consiste à apporter des quantités connues d’oxygène au vin de manière ponctuelle, ce qui, par conséquent, le différencie totalement de la micro-oxygénation. L’appareil utilisé dans le cadre de nos essais est le cliqueur® de la société Oenodev. Il est muni d’un diffuseur d’oxygène céramique sur support inox.

Pour les deux millésimes, l’élevage des vins a duré dix mois. Différents paramètres analytiques sont contrôlés à chaque étape de l’élaboration des vins : après FML lors de la mise en place de l’essai (point zéro), avant et après chaque apport d’oxygène, en fin d’élevage puis après quelques années de conservation en bouteilles. Ces différentes analyses sont les suivantes :
– analyses physico-chimiques ;
– analyses polyphénoliques ;
– analyses microbiologiques ;
– analyses sensorielles ;
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Tableau 1 – Apport en oxygène en cours d’élevage – Essais Elevage 2003 et 2004 – IFV 33.

Résultats analytiques :

Dans les conditions de ces essais, l’itinéraire d’élevage (soutirages/sans soutirages + « cliquage ») a eu peu d’incidence sur la composition analytique des vins. On notera simplement une teneur en acidité volatile un peu plus faible pour les modalités sans soutirage + cliquage (modalités 2 et 4) lors du millésime 2003.

Au niveau polyphénolique, les vins sont semblables, on observe cependant, sur les deux millésimes, un indice de HCL un peu plus faible pour les vins issus des modalités sans cliquage pouvant indiquer la présence de tanins un peu moins polymérisés en fin d’élevage.

Contrôles microbiologiques :

Le suivi régulier de la microflore a été réalisé pour mettre en évidence une éventuelle incidence de l’itinéraire d’élevage sur l’évolution des populations de micro-organismes et notamment des flores d’altération.

Dans les conditions de ces essais, les résultats obtenus ne font pas apparaître d’incidence très marquée des itinéraires d’élevage comparés, sur le niveau de populations levuriennes et bactériennes des vins en fin d’élevage, à l’exception en 2004 de l’élevage en barrique. En effet, dans ce cas, la population de levures totales et de levures d’altération est sensiblement plus élevée pour la modalité sans soutirage avec cliquage.

Il est important de préciser que, lors de ces essais, la gestion du SO2 libre des vins en cours d’élevage est semblable pour les deux modalités d’un même essai.

Analyse sensorielle :

Les vins ont été dégustés après 4 mois de conservation en bouteilles, par un jury de professionnels.

Ces derniers sont appelés à juger les vins selon différents critères notés sur 5 et à donner une note globale sur 20.

Une analyse de variance et un test de Newman et Keuls sont réalisés sur la moyenne des notes pour l’ensemble des critères.

Les résultats des dégustations en vins jeunes font ressortir que dans le cas d’un élevage en cuve, l’élevage sans soutirage avec cliquage donne un vin un peu mieux apprécié par le jury de dégustateurs. Par contre, un élevage traditionnel semble mieux adapté lors d’un élevage des vins en barrique (cf. graphiques 1 à 4).

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Tableau 2 – Analyses des vins après stabilisation tartrique. Essais Elevage 2003 et 2004 – IFV Bordeaux-Blanquefort.

graphique_elevage.jpgConclusions pratiques

La simplification des pratiques d’élevage est observée dans de nombreux chais avec notamment l’utilisation du cliquage pour les apports d’oxygèn e. Le recul que nous avons sur ces techniques qui permettent de simplifier les opérations d’élevage et d’alléger les coûts de main-d’œuvre qui y sont afférents, est encore faible.

Ces essais ont permis d’obtenir des références sur l’incidence de deux itinéraires d’élevage sur la qualité des vins, l’un correspondant à un élevage traditionnel d’une durée de dix mois avec deux soutirages avec aération et le second un élevage de dix mois également sans soutirage, avec lies, mais avec positionnement de deux apports en oxygène par cliquage.

Dans les conditions de ces essais (Merlot AOC Montagne Saint-Emilion) et sur deux millésimes, les résultats montrent que pour les deux types d’élevage (cuve et barrique), les deux itinéraires d’élevage comparés ont eu peu d’incidence sur la composition analytique des vins, sur leurs qualités microbiologiques et sur leurs qualités organoleptiques. Il est, par ailleurs, prévu de suivre l’évolution de ces vins au cours de leur conservation en bouteilles.

Il reste cependant important, quel que soit l’itinéraire d’élevage choisi, d’être très vigilant sur le suivi du vin en cours d’élevage (contrôle régulier du SO2 libre et réajustement à un taux suffisamment élevé afin de maintenir un niveau de SO2 actif de l’ordre de 0,6 mg/l) pour éviter toute altération microbiologique. Des ouillages fréquents doivent être réalisés avec un vin sain d’un point de vue microbiologique. Cette vigilance doit, de plus, être redoublée lorsque l’on choisit un itinéraire d’élevage sans soutirage.

 

Résumé

L’élevage des vins rouges est une étape essentielle où différents process vont être à l’origine de phénomènes oxydatifs, plus ou moins intenses. Les soutirages mis en œuvre au cours de l’élevage traditionnel des vins peuvent être remplacés par des cliquages qui permettent non seulement d’apporter des quantités connues d’oxygène mais également de diminuer de manière significative les coûts de main-d’œuvre.

Afin de connaître l’incidence de cette technique sur les qualités analytiques, microbiologiques et sensorielles des vins rouges, l’IFV de Bordeaux-Blanquefort a mis en œuvre des essais comparatifs de différents itinéraires d’élevage (incluant soit des soutirages soit des cliquages) à partir d’un lot homogène de vin. Ces essais ont été menés au cours des millésimes 2003 et 2004 pour deux types d’élevage différents, élevage en cuve et élevage en barrique, sur Merlot en AOC Montagne Saint-Emilion.

 

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