France-Exportation de Vins et Spiritueux 2015 : La dynamique américaine

26 mai 2016

Le marché chinois se relève, mais c’estl’Amérique du Nord qui a permis auxVins & Spiritueux français de signer leurbelle performance 2015. Merci à l’effet dechange et à la mode des alcools bruns,véritables accélérateurs des ventes. Aeux seuls, Cognac et Champagne ontreprésenté les trois quarts de la croissanceexport des Vins & Spiritueux.

L’équivalent de 126 Airbus ! Que feraitl’économie viticole sans l’aéronautique.Depuis des décennies, les Airbus et autresgros porteurs servent de jauge, de mètreétalonaux exportations françaises de vinset spiritueux. En guise de « joke », ChristopheNavarre, le président de la FEVS,la Fédérération des exportateurs de Vins& Spiritueux, a assuré que Nicolas Ozanam,son directeur, était devenu un expertdes avions, petits ou gros, de chasse oude ligne. Quoi qu’il en soit, en 2015, lesexportations du secteur ont profité d’uneffet de change très profitable à la deviseeuropéenne et d’une économie américaineen grande forme (ce serait un peu moinsvrai aujourd’hui). Concernant l’effet devise,l’euro a perdu en un an (2015-2014) 16 %en moyenne par rapport au dollar et 10 %vis-à-vis de la livre sterling. Ce qui assureaux produits européens un avantage compétitifcertain.Globalement, sur une hausse en valeur desexpéditions de + 8,7 %, l’impact devisesserait de 6 %. Pas négligeable. L’autreélément marquant concerne un marchéaméricain très bien orienté, notammentpour les spiritueux. Après plus de dixans où les consommateurs ne jurèrentque par les alcools blancs type Vodka, lemarché a opéré un retour spectaculairevers les alcools bruns, version « craft »(artisanale), un courant finalement pas siéloigné de l’univers du Cognac. Si le Bourbonaromatisé au miel fait un tabac outre-Atlantique, la tradition et le savoir-faire duCognac profitent de cette dynamique du« roots », l’élégance en plus. « Cette tendancereprésente plutôt une bonne nouvellepour nous », a confirmé Ch. Navarre.

Rebond technique

Un autre pays a tiré la croissance des V&Sen 2015. Et c’est… la Chine. Bien que touchéepar la politique anti-extravagancelancée par le gouvernement il y a troisans, la Chine reste l’autre grand poumondes exportations de V&S. L’année 2015a coïncidé avec la sortie progressive dela phase de déstockage et le début d’unrebond « technique ». Les exportationsredémarrent mais sur un modèle différent.Le mix qualité a bougé. Les Chinoisparlent à cet égard d’une nouvelle normalité(new normal), avec plus de produitsd’entrée de gamme, même si des clientsexistent toujours pour le haut de gamme. Along terme, le marché chinois inspire auxopérateurs une confiance inaltérée, y comprissur les qualités ultrapremium, avectoutefois un « mais ». « Avant que nousretrouvions le niveau d’avant, il faudra dutemps. »A eux seuls, les marchés américains etchinois ont assuré l’an dernier, en valeur,75 % de la croissance des V&S et même84 % si l’on y ajoute Hong-Kong.

Manque de disponibilité des vins

Alors qu’à 11,7 milliards d’euros, le chiffred’affaires export V&S s’affiche en haussede 8,7 %, les volumes, eux, accusent unebaisse de – 3,6 % (188 millions de caissescontre 195 millions en 2014). Commentl’expliquer ? Les membres de la FEVSprésents à la conférence de presse de laFédération ont fléché le manque de disponibilitédes vins français, qui les rendraitmoins compétitifs par rapport à leursconcurrents internationaux. « On le sait !Nos vins tranquilles perdent des volumesdepuis quelque temps. Sur les trois dernièresannées, manque à l’appel 1,4 milliond’hl vol, soit 16 millions de caisses ouencore 5,3 millions de caisses par an. C’estl’équivalent d’un quart des exportationsannuelles de Bordeaux ou de 70 % desexportations de Bourgogne. Aujourd’hui,nous nous situons à peine au niveau de2008. Certes, depuis 2000, nos volumesde vins ont progressé de + 70 % mais, enmême temps, les autres progressaientplus vite que nous. Sur la période desquinze dernières années, notre part demarché export est passée de 25 à 14 %. »Comme déjà dit, les opérateurs vinspointent « l’absence de volumes, quiconstitue une faiblesse pour tout le secteur». Sans oublier de préciser malgrétout que la famille des vins – dont le Champagne– a représenté 68 % du chiffre d’affairesexport 2015, contre 32 % (3,7 millionsd’euros) pour les spiritueux.

Catégorie des VSIG

Évidemment, dans la famille des vins tranquilles,tout le monde n’est pas logé àmême enseigne. Le déficit volumique pèsesurtout sur la catégorie des VSIG. C’est cequ’a dit Antoine Leccia, président du directoired’Advini (groupe JeanJean, Laroche).« Sur le segment bataillé des vins sans IG,la maison France se fait tailler des croupièrespar l’Italie et encore plus par l’Espagneet le Chili. Nous sommes en train delaisser la place à des tiers. Attention à nepas passer sous les écrans radars. »Le négociant languedocien a cité l’exempledu marché japonais. « Une demandeconsommateurs existe pour des produitsà moins de 1 000 yens. Or, que constatons-nous ? La plupart des vins chiliens sesituent en dessous des 500 yens alors quenous ne sommes pas capables de tangenterle prix psychologique des 700 yens. »Nicolas Ozanam a évoqué l’importancedes négociations internationales autour dudémantèlement des droits de douane. Làencore, Chili, Australie et, plus généralement,pays du Nouveau Monde se révèlenttrès proactifs au niveau des accords delibre échange. Pour Christophe Navarre,« l’étiquette France doit être davantagemise en avant. Nos entreprises doivent yréfléchir ».Président du groupe Borie-Castéja à Bordeaux,Philippe Castéja est revenu surle marché des vins de Bordeaux. « Noussortons d’une période un peu difficile marquéepar un millésime 2013 compliquéet un ralentissement du marché chinois.Aujourd’hui, les prix se raffermissent et lesvolumes sont très nettement à la hausse.Nous avons un bon millésime 2014 ainsiqu’un millésime 2015 qui s’annonce intéressant.En Chine, le marché spéculatif estderrière nous. Nous entrons dans un marchéde consommation, avec un vrai professionnalismedes distributeurs. Avant, unpeu tout le monde voulait vendre du vin.Le marché chinois devient mature et lesera encore plus dans les 5-10 prochainesannées. Mais pour que la France continuede faire la course en tête, il est importantde pouvoir proposer une gamme complète.Les Chinois veulent l’ensemble desproduits. »

Bordeaux investit dans la distribution

Au sujet des Etats-Unis, le discours dunégociant bordelais ne diffère guère :« Nous avons beaucoup souffert ces dernièresannées. Sur les Etats-Unis, denombreux produits bordelais avaient unpeu disparu de la distribution. La dynamiquedu marché américain – le premiermarché mondial du vin aujourd’hui – afacilité notre retour. Mieux ! Nous assistonsactuellement à une reprise en maindu marché américain par Bordeaux. » Dequelle manière ? Le metteur en marché aexpliqué qu’outre-Atlantique certains distributeursavaient atteint une taille colossale(15 milliards d’euros pour le plusgrand d’entre eux). « Dans ces conditions,a-t-il dit, les vendeurs n’ont plus le tempsde s’occuper de nous. Alors, nous avonsl’obligation d’investir dans les hommespour aider à la distribution de nos produits.Certaines maisons l’ont fait en Chine.Pourquoi ne pas le faire aux Etats-Unis ? »Rebondissant sur ces propos, ChristopheNavarre, P-DG de Moët-Hennessy, l’activitéVins &Spritieux de LVMH, a évoquéla désirabilité des produits. « Quand onregarde la distribution, les gammes présententdes centaines, des milliers deréférences. C’est vrai ! Des marques ontplus de moyens que d’autres, mais nousvoyons aussi l’émergence de marquesdisposant de peu de moyens. Malgré tout,elles savent susciter de la désirabilité. Cen’est pas toujours une question de taille. Ily a une carte à jouer pour les petits commepour les grands. » Il a cité à cet égard lasucess story de Yellow Tail, la marque devin australienne qui imprime un kangourousur son étiquette.

Repères

• Champagne, Cognac, Bordeaux,Bourgogne : 67 % des exportationsen valeur, 28 % en volume

• Champagne : 2,7 milliards d’euros(+ 12 %)

• Cognac : 2,6 milliards d’euros(+ 19,6 %)

• V&S 2015 : 2e rang des excédents dela balance commerciale

La moisson des rosés

Aujourd’hui, les rosés préemptent 10 %de la consommation mondiale de vin,soit environ 25 millions d’hl vol. Bonnenouvelle ! La France arrive en tête de laproduction de rosés, dont un tiers portépar les Rosés de Provence. Exportés àhauteur de 2,5 millions d’hl vol., leurchiffre d’affaires progresse de 33 %.

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