Fiches techniques : vinification des vins blancs secs

7 octobre 2010

La Rédaction

La définition du type de vin que l’on souhaite élaborer est essentielle pour conduire les vinifications de manière efficace. Le style d’un vin commence à se formaliser dès la phase de maturation. Une date de récolte plus précoce ou plus tardive associée à deux itinéraires techniques de vinification peuvent conduire à obtenir des styles de vins ayant des arômes, un bouquet et une structure en bouche très différents. Globalement, trois types de vins blancs secs peuvent être élaborés : des vins blancs à esters amyliques (issus de la fermentation alcoolique) élaborés avec des cépages ayant peu de précurseurs d’arômes (Ugni blanc et Sémillon) ; des vins blancs typés par les arômes des cépages (Colombard, Sauvignon) ; et les vins blancs boisés. Faire des vins blancs de qualité nécessite une grande technicité et s’entourer des compétences d’œnologues de terrain est indispensable.

Conditions de maturité optimale à la récolte

La priorité :

– Attendre la pleine maturation en mettant en œuvre des pratiques viticoles préventives, protection botrytis, rendement maîtrisé, effeuillage précoce, éclaircissage de grappes…
– La pleine maturité correspond au compromis idéal entre le bon état sanitaire, des teneurs en sucres suffisantes, des niveaux d’acidité corrects et un potentiel aromatique intéressant.
– Les années où l’été est très sec, le suivi gustatif des baies est un moyen d’affiner la date de récolte en dehors du rapport sucres/acidité. Ne pas hésiter à avancer la date de récolte sur des cépages come le Chardonnay et le Sauvignon.
– La présence de botrytis constitue un danger majeur pour la structure et la richesse aromatique ultérieure des vins blancs secs.
– Récolter des raisins sains et de maturité homogène représentent des critères prioritaires.
– Adapter le niveau de maturité au type de vins blancs secs que l’on souhaite élaborer :
vins d’arômes de cépages => ne pas rechercher des maturités maximum
vins à ester et boisés => pousser la maturité sur souche si l’état sanitaire le permet

La dégustation des baies :

– Indispensable pour apprécier les caractéristiques organoleptiques et l’équilibre sucres/acidité.
– A réaliser dans les 10 jours précédant la récolte.
– Permet aussi d’anticiper la réflexion technique pour la conduite des opérations pré-fermentaires (l’extraction du potentiel aromatique).
– S’entourer des conseils d’un œnologue pour les dégustations de baies.

Maîtriser les opérations pré-fermentaires 

Les priorités :

– Protéger de l’oxydation la vendange le plus tôt possible et ensuite tout au long de la chaîne technologique =>  par un inertage ou un sulfitage (associé à de l’acide ascorbique).
– Adapter la cadence de récolte aux performances technologiques du chai en terme de débit de la chaîne de traitement de la vendange et aux capacités de maîtrise thermique.
– Valoriser les potentialités aromatiques des cépages comme le Chardonnay, le Sauvignon ou le Colombard, en réalisant (sur raisins sains) des macérations pelliculaires et des stabulations en phase liquide à froid.
– Conduire les cycles de pressurage avec douceur.
– Parfaitement maîtriser les débourbages.
– Assurer une excellente hygiène au niveau de l’ensemble de la chaîne de traitement de la vendange.

La protection de la vendange :

– Eviter l’oxydation de la vendange et des moûts.
– Le soufre demeure un produit très efficace pour protéger la vendange et les moûts de l’oxydation.
– L’inertage avec du CO2 présente de l’intérêt sur des lots de vendanges destinés à des macérations pelliculaires en substitution au soufre.

Les macérations pelliculaires :

– Les extractions aromatiques ne sont possibles que sur de la vendange parfaitement saine ayant atteint la pleine maturité. Les macérations pelliculaires en conditions inertes et en absence de sulfitage peuvent durer 24, 36 heures et même 48 heures.

– S’entourer des compétences d’un œnologue pour conduire les macérations pelliculaires.

La conduite du pressurage :

– La phase d’extraction des jus à basse pression doit être privilégiée et une sélection des jus de goutte est indispensable.
– Protéger les jus de l’oxydation dès leur écoulement (par un sulfitage ou un nouvel inertage). Ne jamais surcharger une cage de pressoir car cela favorise l’extraction de bourbes dans des proportions importantes.
– La vendange grasse (issue de raisins surmûris ou botrytisés) demeure très difficile à traiter => laisser le temps au jus de s’écouler avec des montées en pressions lentes et progressives.
– Les jus de presse doivent être séparés et traités d’une manière différente jusqu’à la fin de la fermentation alcoolique.
– L’utilisation de matériels de pressurage intégrant un procédé d’inertage représente un plus pour réduire les phénomènes d’oxydation.

Maîtriser les opérations pré-fermentaires

La conduite des stabulations à froid :

– Le maintien entre 5 et 10 °C des moûts additionnés d’enzymes spécifiques pendant plusieurs jours (une semaine) permet de renforcer la structure aromatique.
– Technique à ne réaliser que sur de la vendange saine.

La conduite des débourbages :

– Indispensable pour faciliter l’extériorisation des caractéristiques aromatiques des cépages, du terroir et l’implantation de levures sélectionnées. L’intensité du débourbage doit être suffisante sans pour autant rechercher le maximum de limpidité car cela peut ultérieurement gêner le déroulement de la fermentation alcoolique.
– Adapter l’intensité du débourbage à la qualité des jus et au type de vin que l’on souhaite élaborer.
– Débourbage statique d’une durée variant de 24 à 48 heures à réaliser sur des moûts protégés.

La conduite des débourbages

La priorité :

– La finalité d’un débourbage est de procéder à une décantation poussée des moûts afin d’éliminer une fraction importante des populations de levures indigènes, des bourbes, des débris végétaux… Des mesures de turbidité permettent de contrôler le processus de décantation et de gérer avec une meilleure maîtrise l’efficacité et la durée des débourbages.

– C’est durant le débourbage que l’on peut « éliminer » les effets néfastes de la vendange mécanique.

Les débourbages statiques :

– C’est la pratique la plus couramment mise en œuvre au niveau des propriétés du fait de sa simplicité.

L’adjonction de soufre :

– Apports de soufre sur la vendange en cas de macération pelliculaire ou sur des moûts aussitôt le pressurage.
– Doses variables selon l’état sanitaire et les moyens utilisés pour débourber : de 4 à 8 g/hl.

L’adjonction d’enzymes pectolitiques :

– Facilite la décantation et s’utilise en complément du soufre.
– Doses : 0,5 à 1,5 g/hl selon les marques commerciales.
– Bien meilleure efficacité entre 15 et 18 °C qu’à 10 °C. Peu d’intérêt d’associer refroidissement et enzymes pour débourber.
– Incorporation sur vendange si l’état sanitaire est parfait ou sur le moût aussitôt le pressurage.

L’utilisation du froid :

– Refroidissement des moûts entre 8 à 10 °C dans les heures qui suivent le pressurage.
– Les basses températures retardent le départ en fermentation mais ne facilitent pas la décantation.
– Procédé intéressant pour diminuer les doses de soufre, dans la mesure où un inertage est réalisé.

Le contrôle de la turbidité :

– Le contrôle de la qualité du débourbage est une opération capitale pour s’assurer que le niveau de décantation souhaité est atteint.
– Le contrôle visuel de la limpidité des moûts au moment du soutirage est une pratique courante.
– Un contrôle analytique en laboratoire par des mesures de turbidité (en NTU unité de trouble) pour quantifier le niveau de trouble des moûts : vins blancs secs de bouche 50 à 120 NTU.

Le démarrage de la fermentations alcoolique

Le bon déroulement de la fermentation alcoolique est une phase capitale vis-à-vis de la qualité des vins. La transformation des sucres en alcools s’accompagne de nombreuses réactions secondaires qui sont en mesure de valoriser ou d’amputer le potentiel de qualité. Des travaux de recherche mettent en évidence qu’un déroulement complet de la cinétique fermentaire est étroitement lié aux conditions de démarrage de la fermentation alcoolique.

La température des moûts :

– Les levures intéressantes sur le plan qualitatif ne peuvent se multiplier dans de bonnes conditions que si la température des moûts se situe entre 15 à 17 °C. Un moût trop froid (à 12 °C et moins) rend plus difficile l’implantation des levains de qualité au profit de
souches indigènes cryophiles générant des composés secondaires indésirables pas souhaitables pour la qualité des vins. Un moût trop chaud (20 à 22 °C) est un handicap pour toutes les productions de vins blancs car les levures indigènes se multiplient très rapidement et leur présence nuit à l’implantation des levains sélectionnés.
– La notion de mise à température des moûts (entre 15 et 17 °C en blanc) est capitale pour le lancement du processus fermentaire.
– Il est souhaitable d’anticiper les risques de « chocs thermiques » à la hausse comme à la baisse que pourront subir ultérieurement les levures dès le début du remplissage d’une cuve.
Conseils : – prendre la température des moûts de tous les lots de vendange ;- suivre de près la température ambiante du lieu où se trouve la cuverie.

Un mauvais état sanitaire « appauvrit » les moûts :

– Le développement du champignon Botrytis cinerea sur les baies ou les fractions de grappes même à de faibles taux « consomme » une partie des réserves alimentaires (les substances azotées) destinées aux levures.
– La présence de laccase et d’autres microorganismes consomme des quantités d’oxygène relativement importantes qui peuvent manquer aux levures en fin de fermentation et favoriser leur mortalité précoce.
– Une vendange et des moûts botrytisés représentent un milieu peu favorable à la multiplication des « bonnes » levures. Il convient alors de pallier les insuffisances en matières azotées, en oxygène de façon préventive pour faciliter l’implantation des LSA ou des pieds de cuve dans les meilleures conditions.

L’azote des moûts : l’aliment indispensable des levures :

– Les moûts issus d’une vendange riche en sucres à pleine maturité, voire à surmaturité, se seront naturellement appauvris en substances azotées.
– Faire une analyse des teneurs en azote assimilable dans les moûts des parcelles à risques lors des derniers contrôles de maturation est une sage précaution.
– L’azote est un nutriment essentiel au fonctionnement de toutes les cellules vivantes et les levures n’échappent pas à cette règle. Les principales sources d’azote dans les moûts qui sont assimilables par les levures sont l’azote
ammoniacal et les acides aminés (sauf la pioline). La nutrition azotée intervient sur le cycle de croissance des levures et par voie de conséquence sur l’activité fermentaire et la vitesse de fermentation.

Maîtriser les apports d’azote et d’autres activateurs :

– L’utilisation d’activateurs de fermentation ne doit pas être systématique mais au contraire raisonnée, en tenant compte des caractéristiques de la vendange et des résultats analytiques. Certains lots de vendanges et de moûts peuvent présenter une déficience en nutriments pour les levures. Quelques exemples de situation à risques :
• Vendanges très mûres, voire surmûries. • Moûts issus de vendange botrytisée.
• Moûts blancs sévèrement débourbés. • Vignes peu vigoureuses, enherbées en plein ou ayant subi un stress hydrique.

Le démarrage de la fermentation alcoolique

– L’adjonction d’activateur doit toujours être abordée de manière préventive (ne pas attendre une chute de l’activité des levures pour intervenir), de façon à créer des conditions favorables au bon déroulement de la phase de croissance active des levures (les multiplications cellulaires).
– En situation de carence avérée sur moût, l’apport en début de fermentation d’un complément azoté (en même temps que l’apport de LSA) va permettre d’augmenter la dynamique de multiplication des levures et d’accroître la capacité de fermentation des sucres par une présence importante de biomasse levurienne. En revanche, des apports tardifs d’azote suite à un ralentissement fermentaire ne sont pas assez efficaces pour assurer l’achèvement des fermentations.

Les LSA pour mieux maîtriser la F.A. :

– Un démarrage rapide des fermentations réduit considérablement l’implantation de flore de levures et bactéries indésirables. Le déroulement de la fermentation plus régulier améliore généralement le rendement en alcool et l’investissement dans les LSA se trouve alors bien valorisé. Pour les vins blancs, les rosés, l’utilisation de souches de LSA bien adaptées à chaque cépage permet de développer le potentiel aromatique des vins de façon très intéressante.
– D’une manière générale, il est intéressant d’utiliser dans un chai plusieurs souches de levures car cela contribue à
développer des typicités aromatiques différentes dans les vins et les eaux-de-vie. L’effet millésime qui s’avère tout de même plus déterminant sur les caractéristiques aromatiques des vins peut s’exprimer de façon différente grâce à l’effet souche de LSA.
– Se rapprocher des œnologues de terrain pour utiliser et choisir les souches de LSA les plus adaptées aux typicités
aromatiques recherchées.

Suivre le déroulement des fermentations alcooliques

Le mauvais déroulement de la fermentation alcoolique conduit à l’obtention de vins présentant des défauts majeurs qu’aucune intervention corrective ne permettra d’atténuer. La parfaite maîtrise du processus fermentaire est donc un acte œnologique primordial. Tous les vinificateurs peuvent être confrontés à « des cuves difficiles » ayant un démarrage trop lent, des montées en température plus importantes, des fins de F.A. languissantes… Dans de telles circonstances, un suivi quotidien des densités et des températures de fermentations permet de détecter tôt les prémices d’un accident fermentaire et d’en limiter les conséquences.
– Le contrôle quotidien des fermentations alcooliques est le seul moyen d’observer si la cinétique fermentaire se déroule normalement. Prendre les densités et les températures de chaque cuve tous les jours est vraiment « un geste » œnologique de base indispensable.

Températures de fermentation et arômes :

– Cépage aromatique : le fait de pouvoir maintenir les températures de fermentation entre 17 et 18 °C permet une pleine extériorisation du potentiel aromatique liés d’une part aux précurseurs d’arôme et d’autre part à l’utilisation de souches de levures aromatiques.
– L’idéal est de pouvoir maintenir les températures entre 17 et 18 °C pendant toute la première phase de la fermentation. A partir de 1020, laisser les cuves finir leur fermentation sans contrôler les températures facilite l’achèvement de la dégradation des sucres.
– Vin avec structure aromatique de type esters amyliques : choisir une levure spécifique (estérifiante) et tenir les fermentations en dessous 16 °C.

Surveillance des fins de fermentations :

● Surveillance des fermentations :
– Le déroulement des fe rmentations alcooliques à basses températures oblige les vinificateurs à être très attentifs vis-à-vis des densités.
– A partir de 1 020, un contrôle des densités 2 fois par jour est conseillé.
● Fin de fermentation :
– Contrôle des sucres résiduels et de l’acidité volatile pour s’assurer de la fin du processus fermentaire.
– L’opportunité d’un soutirage à l’abri de l’air est dépendante du type d’élevage envisagé (sur lies ou pas).
– Le sulfitage des vins ne doit intervenir qu’une semaine après la fin de la fermentation alcoolique.
● Dégustation des moûts et des vins :
– Durant la fermentation alcoolique, dégustez régulièrement chaque cuve pour apprécier la montée en puissance progressive du potentiel aromatique.

 

 

 

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