Fiches pratiques : Le botrytis et les pourritures : Un danger majeur

5 octobre 2010

Le développement du botrytis sur les raisins au cours de la maturation engendre toujours des déviations qualitatives majeures : pertes d’arômes, fragilité de la couleur, sensibilité des vins aux altérations bactériennes… La plupart des viticulteurs mobilisent des moyens au vignoble pour limiter l’apparition de la maladie, mais certaines années ce n’est pas suffisant. Vinifier des raisins sains doit être une priorité qualitative.

Le botrytis est d’autant plus nuisible qu’il s’installe tôt sur les raisins. En effet, au cours de la maturation, les pellicules des baies deviennent naturellement plus sensibles aux attaques de pourritures et le Botrytis cinerea peut prospérer de manière spectaculaire à la faveur de conditions climatiques chaudes et humides. Les conséquences de la maladie sont de deux ordres, l’une directe liée à la rupture des pellicules entraînant une altération de tous les composés contenus dans les baies, et l’autre indirecte découlant de la prolifération de microorganismes indésirables (levures, bactéries lactiques et acétiques) et de moisissures au sein des baies altérées. La dégradation de l’état sanitaire est liée à une famille de pourritures dont les conséquences sont diverses et jamais bonnes. Les travaux scientifiques importants réalisés sur la pourriture grise et la flore de microorganismes associés permettent actuellement de mieux en cerner les conséquences qualitatives. Les principaux moyens de lutte contre les différentes formes de pourriture reposent sur des stratégies au vignoble, mais la dégradation de l’état sanitaire ne se développe pas de manière homogène dans les parcelles. Les vinificateurs doivent être très attentifs à la qualité de la vendange, qui peut varier rapidement au sein d’une parcelle ou d’un îlot. L’identification des lots de raisins altérés et du type de pourriture représente un acte œnologique important pour justement séparer ces lots à risques et traiter la vendange avec les moyens qui s’imposent.

Les différentes familles de pourriture

– La pourriture grise Un brunissement des pellicules et leur rupture. La formation de laccase, perte en jus, perte en sucre, perte en acidité, perte d’arômes, perte de couleur.
– La pourriture grise peut évoluer vers d’autres formes de pourriture :
● Pourritures blanches, vertes, bleues
● Pourritures acides, aigres.
– Les pourritures blanches, vertes apparition d’odeurs et de goûts désagréables.
– Les pourritures acides, aigres présence de bactéries lactiques et acétiques, entraînent des altérations du type piqûres lactiques et acétiques sur souches.

Les acides du raisin dégradés :

– Les acides maliques et tartriques sont dégradés d’une façon proportionnelle à l’intensité du développement de la maladie :
● Une attaque faible à moyenne et courte aura peu d’incidence
● Une attaque précoce et intense aura des conséquences significatives
– La pourriture acide entraîne la formation dans des quantités importantes d’acides fixes (comme l’acide gluconique), d’acidité volatile et d’acétate d’éthyl.

Une aptitude à combiner le soufre :
– Les moûts et les vins issus de vendange botrytisée combinent davantage le soufre en raison de la présence en quantités nettement plus importantes d’acides cétoniques.
– Le déroulement du processus fermentaire issu de moûts botrytisés provoque la formation de quantités importantes de ces acides cétoniques.
– L’apport de thiamine, d’azote amoniacal, d’oxygène (par un remontage à l’air) et d’activateurs de fermentation permettent de limiter l’enrichissement en acides cétoniques au cours de la fermentation alcoolique.

Plus de composés minéraux et moins d’azote ammoniacal
– Le développement de la pourriture entraîne une augmentation de la concentration en composés minéraux (Na, K, phosphates…).
– Une diminution des composés azotés de la forme amoniacal qui constitue la base alimentaire des levures.
– Une augmentation des composés azotés sous la forme protéique.
– Une augmentation de la teneur en glycérol.
– Un enrichissement des moûts et des vins en substances colloïdales (dont le glucane qui peut être partiellement éliminé par l’apport de glucanase) qui gêne considérablement les clarifications naturelles (et les filtrations) et nuit à la qualité des lies.

Une perte de composés aromatiques :
– Le botrytis contribue directement à la dégradation des arômes variétaux.
– L’apparition de défauts bien connus de type moisi, phénolé, iodé… est très difficile à atténuer. Les déviations aromatiques peuvent mettre un certain temps à s’extérioriser dans les vins (2 à 3 mois), ce qui peut conduire les viticulteurs à sous-estimer les conséquences de la pourriture aussitôt les fermentations alcooliques terminées.
– Les déviations aromatiques liées au botrytis peuvent être accentuées dans les eaux-de-vie car l’alambic concentre naturellement les composés aromatiques des vins. Des vins de dist illation francs de goût à la dégustation mais issus de vendange botrytisé peuvent donner des eaux-de-vie avec un nez de « moisi ou de champignon ». Ne jamais utiliser des lies issues de vendanges botrytisées.

Un danger pour la structure des eaux-de-vie :
– Le botrytis provoque une libération de composés qui rendent les moûts plus riches en levures et bactéries indésirables.
– Si la pourriture s’installe précocement sur les grappes, la flore de champignons associée au Botrytis cinerea peut être à l’origine de déviations aromatiques (nez de champignon, moisi) dans les eaux-de-vie.
– En présence de fortes attaques de botrytis, de nombreuses interrogations existent au niveau de la qualité des lies.
– La décantation des moûts aussitôt le pressurage trouve son plein intérêt les années où la vendange est botrytisée.

La laccase détruit les polyphénols :
– Le botrytis provoque la formation en quantité importante d’enzymes pectolitiques dont la plus connue est la
laccase. Cette enzyme est localisée dans la pellicule des baies et lors de la récolte et du transfert de la vendange, elle est immédiatement dispersée.
– La laccase possède une action destructrice au niveau des polyphénols et elle constitue un danger majeur pour la qualité des pineaux rosés et des vins rouges. L’effet de la laccase a tendance à s’accentuer au fil des mois et des années d’élevage. Cela provoque un vieillissement accéléré et une usure prématurée de la couleur et de la structure des vins et des pineaux.
– L’isolement de lots, de vendanges, de moûts ou de vins présentant un niveau d’activité laccase anormalement élevé constitue une priorité pour le vinificateur.

Comment identifier efficacement la présence de pourriture au niveau de la vendange et des moûts :

L’observation de la vendange et la dégustation des moûts arrivant au chai doivent être complétées par d’autres moyens dès que le vinificateur doute de l’état sanitaire.
– Il faut essayer d’avoir une approche sur plusieurs paramètres pour identifier la présence des pourritures :
● Etre informé de l’état sanitaire des raisins sur les souches avant la récolte.
● Le dosage de la laccase caractérise l’activité du botrytis à un moment donné.
● Le dosage de l’acide gluconique caractérise l’effet cumulé du botrytis et des microorganismes secondaires engendrant la
pourriture acide. Sur vendange ou sur moût, il pourrait être systématisé.
● Le dosage de l’acidité totale est un indicateur de la pourriture acide en comparaison avec l’acidité totale de raisins sains.
● Le dosage de l’acide volatile est caractéristique de la pourriture aigre. A la récolte, des moûts issus de vendange saine ont une
acidité volatile inférieure à 0,10.

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