« L’Agriculture à Un Tournant »

24 février 2009

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Luc Servant, tête de liste FDSEA-JA en Charente-Maritime.

L’agriculture a un rôle à jouer dans les nouvelles filières bioénergétiques. Histoire de récupérer la valeur ajoutée que d’autres pourraient capter mais aussi de changer l’image de l’agriculture auprès de la société. Ce message, la FDSEA 17 le fait sien, dans le droit fil des positions de la FNSEA. Luc Servant conduit le tandem FDSEA-JA. Si la liste commune arrive en tête, il briguera le poste de président de la Chambre 17.

 

 

« Le Paysan Vigneron » – Qui êtes-vous ?

Luc Servant – J’ai 38 ans. En EARL avec ma femme, j’exploite 180 ha de terres sur la commune de Benon, en Aunis, entre La Rochelle et Niort, limite Marais poitevin. J’y produis ce que l’on produit traditionnellement sur une exploitation de grandes cultures, maïs, blé, pois, colza, orge de brasserie, blé dur. Après un diplôme d’ingénieur agro. obtenu à Rennes en 1990, je me suis installé puis, dans la foulée, engagé syndicalement. Cela me semblait naturel. On ne peut pas concevoir son métier sans vouloir participer à son destin, tant sur le plan des idées que sur le plan économique. Je suis d’abord rentré au CDJA, une organisation très présente sur le terrain, où le débat est largement ouvert. J’en fus le président pendant 4 ans. Une fois la limite d’âge atteinte (35 ans), j’ai intégré la FDSEA. Pourquoi avoir choisi les JA et la FNSEA ? Parce que je m’y retrouvais en terme de propositions et puis elles restent les organisations ayant le plus de poids aujourd’hui et autant militer dans des formations qui représentent un potentiel important. Deuxième vice-président de la Chambre d’agriculture, mes collègues m’ont désigné comme tête de liste de ces élections, en décidant que si notre liste l’emportait, je me présenterais comme président de la Chambre. Le message a le mérite d’être clair auprès des électeurs. En Charente-Maritime, l’équipe sortante de la Chambre connaît un renouvellement significatif. Environ les deux tiers des membres vont être renouvelés. Le président Jacques Maroteix a souhaité se retirer ainsi que le premier vice-président Francis Boizumault. En ce qui concerne notre liste, sur les 17 membres des collèges d’exploitants et d’organisations syndicales d’exploitants, 10 se présentent pour la première fois. C’est donc une nouvelle équipe qui brigue ce scrutin.

« L.P.V. » – Quel est le thème central de votre campagne ?

L.S. – Nous disons que l’agriculture est aujourd’hui à un tournant. Si sa mission essentielle reste toujours l’alimentation, un nouveau rôle se présente à elle depuis deux ou trois ans, celui lié aux matières premières énergétiques ainsi qu’aux aspects environnementaux (captage de CO2…). Ces nouvelles demandes, liées au renchérissement du pétrole ainsi qu’à la prise en compte du changement climatique, arrivent à un moment où les mécanismes de soutien et de régulation de la PAC sont en train de disparaître peu à peu. Ainsi dans un contexte où le budget européen se rétrécit, où des incertitudes pèsent sur son montant – rediscuté à partir de 2013 – cette nouvelle donne doit être perçue comme une opportunité pour compenser la perte de revenu lié à la baisse des aides. Plus la demande – alimentaire ou non-alimentaire – est forte, plus les prix ont des chances d’être rémunérateurs. Par ailleurs, en répondant aux attentes de la société en terme environnemental, l’agriculture ne pourra que renforcer ses positions. Nous avons une carte à jouer. Nous devons impliquer les agriculteurs dans la création de ces nouvelles filières.

« L.P.V. » – Quelles assurances avez-vous de la rentabilité des filières bioénergie ?

L.S. – Si les agriculteurs mettent en place ces filières, ils auront davantage de chances de récupérer la valeur ajoutée que s’ils s’en remettent à d’autres.

« L.P.V. » – N’existe-t-il pas un risque de concurrence entre satisfaction des besoins alimentaire et satisfaction des besoins énergétiques ?

L.S. – Les deux débouchés sont conciliables. La production de bioénergie ne passe pas uniquement par la transformation des graines. La biomasse a également sa place. En la matière, de nombreuses pistes sont à explorer, sachant qu’à chaque fois qu’une nouvelle filière se crée, un bilan énergétique est pratiqué entre ce qui reste dans le sol et ce qui est exporté. C’est une démarche un peu nouvelle.

« L.P.V. » – Au niveau départemental, quel rôle assignez-vous à la Chambre ?

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L’équipe FDSEA-JA.

L.S. – La Chambre le fait déjà mais nous souhaiterions renforcer ce rôle. Que la Chambre d’agriculture soit le lien naturel entre les agriculteurs et les collectivités territoriales, communes, communautés de communes, pays, conseil général, conseil régional. A l’heure où le nombre des agriculteurs tend à diminuer dans ces instances, la Chambre a vocation à travailler avec les élus locaux. Les agriculteurs peuvent fournir de la bioénergie aux collectivités locales. Ils sont aussi un rouage indispensable à l’équilibre des territoires. Un département comme la Charente-Maritime connaît une forte pression urbanistique. La Chambre est là pour faire prendre conscience de la place de l’agriculture dans l’utilisation des terres. Un autre point retient notre attention : la communication. Face à des attaques qui ne sont pas toujours justifiées, l’agriculture doit pouvoir expliquer clairement ce qu’elle fait. La Chambre de Charente-Maritime fut la première en France à se doter d’une chargée de communication. Même si ces débats avec la société ne sont pas aisés à organiser, il faut prendre le temps de le faire.

« L.P.V. » – Estimez-vous que la Chambre remplisse sa mission auprès des agriculteurs ?

L.S. – Sans doute en partie mais il y a toujours des améliorations à apporter. Un travail a déjà démarré, que nous voudrions intensifier : mettre en place un « référant Chambre » pour chaque agriculteur. Je m’explique. Il convient de recréer de la proximité entre les agriculteurs et l’équipe administrative. On s’aperçoit que les agriculteurs ont un peu perdu le réflexe de demander un conseil à un technicien Chambre. Alors, inversons le mouvement et que les conseillers rencontrent chaque agriculteur pour qu’en cas de problème, ce dernier sache à qui s’adresser, nominativement.

« L.P.V. » – En ce qui concerne les différentes filières – céréales, lait, viande, vin – quelles sont vos propositions ?

L.S. – Les céréales relèvent pour beaucoup de la PAC. La situation actuelle, issue de la réforme de 2003, n’est pas celle que l’on souhaitait. Mais comparativement à ce qui était pressenti de prime abord – le complet découplage des aides – nous avons pu effectivement « sauver les meubles », en évitant le pire. C’est pourquoi la FNSEA revendique son bilan en la matière, tout en se montrant critique vis-à-vis de la politique européenne.

Concernant la filière lait, le nombre d’éleveurs est en train de diminuer cruellement sur le département. La faute sans doute aux découplages des aides, qui provoque un désintérêt des éleveurs, des prix qui ont du mal à se redresser et une exigence de mise aux normes qui s’accompagnent d’investissements énormes. La filière est en danger. Attention qu’elle ne disparaisse pas d’une région berceau de la production laitière, connue pour son « beurre Charentes-Poitou ». La Chambre a déjà mené une opération « Bien vivre du lait ». Il va falloir suivre d’encore plus près cette production, en demandant aux pouvoirs publics de ne pas trop exiger en terme de mises aux normes et d’accompagner davantage les éleveurs.

En ce qui concerne la production bovine, la Charente-Maritime présente la particularité d’avoir 150 000 ha de zones humides. La Chambre a travaillé depuis plusieurs années déjà, avec l’appui de la FDSEA et du syndicalisme jeune, pour obtenir une indemnité zone humide, destinée à remplacer les CTE, CAD. C’est chose faite mais il va falloir être vigilant dans son application : que cette indemnité soit réellement versée, qu’il n’y ait pas de décalage dans le temps.

En viticulture, le Schéma d’avenir viticole se propose de soutenir la diversification qui s’est mise en place. La Chambre accompagne les viticulteurs dans leurs souhaits. J’ai découvert le milieu viticole que je connaissais peu. Que ce soit au CDJA, à la Fédé ou à la Chambre d’agriculture, j’y ai rencontré des gens dynamiques, bien organisés et très participatifs. Dans toutes les réunions, la viticulture est un sujet incontournable.

« L.P.V. » – Etes-vous confiants pour ces élections ?

L.S. – Oui. Dans un contexte agricole déprimé, notre formation a essayé de maintenir une ambition pour l’agriculture. Dans le département, nous avons obtenu l’indemnité zone humide, des diminutions de charges, comme celle sur la TIPP (taxe sur les produits pétroliers). Très présents sur le terrain, nous avons accompagné les agriculteurs dans la mise en place des CAD, des CTE, des DPU. L’équipe qui se présente aux élections est une équipe motivée, jeune, qui souhaite prendre son destin en main.

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