Nous n’évoquerons pas en ces lignes le « penser printemps ». La saisonnalité politique comme météorologique incite davantage à la prudence qu’à l’euphorie proposée par diverses organisations international(iste)s. La prudence demeure la vertu première du chef, devant la tempérance, la force et la justice.
Après nombre de pérégrinations dans les explications et les justifications, entre attestations, masques, traitements, et vaccinations, les passeports sanitaires commencent à être discutés, divulgués, comme dans une expérience sociale voire psychologique. Les premières déclarations, prises de position, articles, exemples, commencent à être publiées, avec un « certificat sanitaire » pour l’Union européenne et un passeport sanitaire pour la Chine. Y a-t-il dans ces présentations différentes une différence de fond ou bien une simple différence de degré ? Alors que l’Union européenne a présenté la fragilité de sa construction dans le traitement, finalement, par pays de la crise sanitaire, politique et économique, ce nouveau pas en avant vers une gestion supra-nationale viendra-t-il unifier un tant soit peu la gestion européenne ?
SUSPENSION DE QUATRE MOIS DES 25% SUPPLÉMENTAIRES DES TAXES AMÉRICAINES
De l’autre côté de l’Atlantique, l’administration américaine de Biden a déclaré le 5 mars dernier a suspendu pour 4 mois les droits de douane supplémentaires de 25%. Les dites « taxes Trump » augmentèrent de 25% à l’importation le 18 octobre 2019 une partie notable des vins français (vins tranquilles au TAV≤14% vol/ en récipient d’une contenance ≤ 2 litres).
Le 12 janvier dernier, l’USTR United States Trade Representative, Bureau du représentant américain du Commerce déclarait que « les produits concernés par ces taxes supplémentaires sont les pièces aéronautiques construites en France et en Allemagne, certains vins non effervescents issus de France et d’Allemagne, certains cognac et brandies de France et d’Allemagne. »
La suspension pour quatre mois à partir du 14 mars 2021 des dites taxes (avec une possibilité rétroactive jusqu’au 11 mars) vient soulager, un temps, les entreprises françaises et européennes de vins et spiritueux. Une certaine surprise car l’USTR avait initialement décidé de manière exceptionnelle, en février dernier, un statu quo par une non-révision des tarifs douaniers, qui seront de nouveau étudier autour du 9 août 2021.
François Mitterrand l’expliquait (relaté dans Le dernier Mitterrand, de Georges-Marc Benamou) : « La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l’Amérique. […] Oui une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort. Apparemment. » La relation conflictuelle entre le vieux monde européen et la jeune Amérique, avec l’Angleterre faisant le pont entre les deux continents, se poursuit sur fond douanier, sous couvert de pivot d’américanisme.
LES EFFORTS DÉPLOYÉS PAR L’AGRICULTURE, « FLEURON » DE LA FRANCE, SONT-ILS INVISIBLES ?
Toutes les filières, toutes les instances développent aujourd’hui des démarches institutionnalisant des pratiques mises en œuvre sur le terrain depuis toujours pour certains, plus récemment pour la plupart, mais dans le cadre d’une démarche bel et bien lancée.
La défiance et le déficit d’image vécus aujourd’hui par la filière, là où au XIIe siècle on définissait l’agriculture comme « l’art de cultiver la terre », sont d’autant plus désœuvrant qu’ils sont en décalage avec les efforts déployés – non par la contrainte mais mus par la volonté de protéger la terre, celle qu’ils transmettrons, dans l’immense majorité des cas à leurs enfants.
Les agriculteurs ne sont-ils pas, eux aussi, des citoyens soucieux de leur environnement, de leur entourage, de leur avenir et de celui des générations futures ?
Dans une société du tout, tout de suite, de l’immédiateté, ceux qui exigent, quelles que soient leurs exigences sont bien loin de la réalité du temps long nécessaire pour aboutir à un objectif que finalement tous partagent, bien qu’à degrés et horizons différents.
Si les agriculteurs bio, raisonnés et conventionnels peuvent échanger sur nos territoires, partager et apprendre les uns des autres – nombreux sont les groupes techniques qui mixent ces populations qu’on voudrait opposer dans certains médias – parlant donc le même langage. Comment alors expliquer une telle césure ?
LA LONGUE ATTENTE AVANT LES SAINTS DE GLACE
Loin encore de l’été, les températures hivernales font encore blanchir les premiers matins printaniers. Pourtant, les premiers pleurs de vigne se font voir dans la campagne charentaise. Tout comme les premiers bourgeons dans le coton et les premières pointes vertes, surtout dans les endroits où la vigne est protégée du vent. Malgré des après-midi très printaniers, les terrains encore gelés aux premières matinées de printemps laissent espérer des éclosions moins précoces des bourgeons, ou peuvent faire craindre une forte pression gélive pendant un mois et demi (selon la temporalité des tailles).
La tension rurale se poursuit jusqu’au les saints de Glace, et même jusqu’au 25 mai : « Quand la saint Urbain est passée, le vigneron est rassuré », dit le dicton. Les quelques jours voire les quelques semaines de risque gélif évités sont toujours une sérénité gagnée lors des premiers temps du printemps, et du début des travaux en vert.
Le 20 avril 2020, le stade 4 à 5 feuilles étalées avec les inflorescences était atteint dans beaucoup de parcelles. Ce cycle était en avance d’une quinzaine de jours par rapport à 2019, où deux matinées entre -2 et 0°C brûlèrent de froid 8000 hectares, quand 4 000 à 5000 autres hectares étaient partiellement touchés (après la grêle du 26 avril 2019). En 2016 il y eut « un peu de gel » et en 2017, certains domaines perdirent l’entièreté de leur récolte.
Ces mauvais souvenirs restent très vifs dans la région. Limiter, autant que faire se peut, ce risque sur les cinquante prochains jours, par l’action propre de la nature couplée à celle des mains qui s’affairent à la vigne, sera bénéfique.
À chaque millésime ses particularités, ses tensions et ses bonheurs. Si 2021 ressemble pour beaucoup à 2020 sa structuration sociale et sociétale, quelles en seront les spécificités agricoles ? La nature créée n’est jamais ingrate, elle demande labeur et questionnement. Les paysans s’y atèlent depuis bien des millésimes.
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