Une Démarche De Construction De Filière

17 mars 2009

La Rédaction

Profitant de la « mise à plat » suscité par la réforme de l’OCM vin, les jus de raisin s’engagent dans un projet de construction de filière. Les Charentes y auraient toute leur place, à condition de le vouloir.  

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Pierre Guyot.

Pour l’opérateur dominant de la filière française des jus de raisin, Foulon-Sopagly, il s’agit d’ailleurs d’une constante. Les Charentes font toujours potentiellement partie de son plan d’achat. « Une fraction de nos achats sera toujours réservée aux Charentes, si tant est que des possibilités existent naturellement » confirme Pierre Guyot. Pragmatique, le directeur des achats de l’usine de Mâcon sait pourtant que trois conditions doivent être réunies pour que « la mayonnaise prenne » : la réglementation en vigueur, l’envie des producteurs et la récolte. Lors de la dernière campagne, c’est un euphémisme de dire que le triptyque n’a pas fonctionné, mais alors pas du tout. Conséquence : le débouché jus de raisin a réalisé le millième de son volume d’antan, soit à peine quelques milliers d’hl. A ce sujet, P. Guyot se promet d’aller serrer la main des rares viticulteurs qui, dit-il, « ont prélevé un tout petit peu de leur récolte pour assurer leur camion de jus de raisin. Cela témoigne d’une fidélité et d’une vision à moyen terme qui méritent d’être salués ». Se disant « sans aigreur d’estomac ni rancœur à l’égard d’une région pour qui le Cognac fait tout de même office de pensée unique », l’acheteur jus de raisin souhaite « garder le contact avec le vignoble des Charentes ». « Nous attendons que le produit maître, le Cognac, s’organise et si, derrière, des opportunités se dessinent pour les jus de raisin, nous serons là. Notre stratégie n’a pas varié sur ce point. Par exemple, nous avons toujours besoin de moûts bio. » Ceci étant, pour la prochaine campagne, l’opérateur a encore prévu de faire sans les Charentes. Ceci étant, pour les prochaines vendanges, l’opérateur se fait peu d’illusions sur les Charentes. « Nous irons chercher ailleurs la marchandise, dont nous avons un besoin croissant, compte tenu des développements à venir. »

des cépages bas degré

Est-ce la disparition programmée du marché des excédents charentais ? La filière jus de raisin a mis à profit cette période charnière de la réforme de l’OCM vin pour s’engager dans une réflexion de fond. Il s’agit rien moins que de construire un socle durable à l’approvisionnement jus de raisin. De quelle manière ? Voilà une dizaine d’années que des chercheurs des centres INRA du Languedoc-Roussillon travaillent à l’obtention de cépages d’un genre nouveau, aptes à produire des vins d’un faible degré alcoolique (4-5 % vol.). Au départ, la demande émanait de la filière vin de bouche. Mais aujourd’hui la filière n’est plus très sûre que des vins de faible degré intéressent toujours le consommateur. Cette frilosité des vins, les jus de raisin l’ont saisi au vol. « Nous avons levé le doigt pour signaler notre intérêt » explique Pierre Guyot au nom de sa filière. Car pour les jus de raisin, le Graal, ce sont ces moûts présentant de petits taux de sucre. Or qui dit faible degré dit justement taux de sucre razimut. C’est ainsi que la filière jus de raisin s’est retrouvée porteuse d’un gros dossier « nouveaux cépages » auprès du ministère de l’Agriculture et de Viniflhor. Objectif : décrocher la plantation de 5 000 ha de vignes entièrement dédiées au jus de raisin, dans l’optique d’une production contractualisée. Si le Languedoc a vocation à constituer la base arrière de cette construction de filière, l’initiative ne s’arrêtera pas au Midi ni même peut-être aux frontières hexagonales. En Charentes, des opérateurs se disent potentiellement conquis à l’idée. Pour le rendement de ces vignes, P. Guyot conseille de penser « à un verger de pommes ». « Ces cépages spéciaux, en blanc comme en rouge, ne donneront ni du vin ni du raisin de table mais du raisin destiné à une production industrielle, c’est-à-dire sans limite de rendement. S’ils doivent concurrencer quelque chose, ce seront les prairies et non le vignoble. » Dans le Sud de la France, deux coopératives ont offert des surfaces pour un test grandeur nature. L’ICV (l’Institut coopératif du vin) suit l’opération ainsi que deux pôles scientifiques, les INRA de Montpellier et de Dijon. L’investissement recherche représente plus de 2 millions d’euros.

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