Rendement agronomique / changement des règles

27 décembre 2008

vignoble_vendanges_opt.jpegAlerte ! C’est grave. Il y a des limites à la légèreté coupable. Non seulement l’arrêté de campagne sort avec six mois de retard sur la récolte, mais encore les circulaires d'application prétendument tirées de la lecture de l’arrêté bouleversent toutes les règles habituelles. Si cela ne s’appelle pas prendre les gens en traîtres, c’est les prendre pour des imbéciles.

Qu’apprend-on ? Que non seulement le mode de calcul du rendement agronomique donnant accès aux aides à l’enrichissement et au stockage a changé en cours de route, sans bien sûr que les viticulteurs en soient avertis à temps, mais que ce changement s’étendrait aussi au rendement agronomique applicable à la distillation article 28 (pour savoir à quel prix de distillation l’on peut prétendre). Dans ces conditions, ce n’est pas 50 mais 1 500 viticulteurs qui seraient concernés. Cela vous change la perspective, sans vouloir minorer l’impact auprès des adeptes de l'enrichissement ou du stockage à long terme. Et l’on ne parle pas, bien sûr, des conséquences financières liées au prix de distillation ni de l’effet quasi certain sur le respect des obligations communautaires et la délivrance de l’AROC. On nage en plein délire ! De fait, tout tourne autour de la double fin. Tout se passe comme si l’Administration, par ignorance, facilité ou volonté délibérée, avait décidé d’enterrer la double fin avant d’en avoir signé son arrêt de mort. Par anticipation et de manière régalienne en quelque sorte. Mais reprenons l’enchaînement des faits.

Le premier coin planté dans la cuirasse de la double fin remonte à l’automne. Ne sont encore concernées à l’époque que les exploitations « mixtes », produisant des vins de pays en plus des vins aptes. Il est dit que pour calculer le rendement agronomique applicable à ces exploitations, il convient de déduire non seulement les productions et les surfaces en vins de pays mais encore les productions de moûts pour Pineau et les surfaces afférentes, cadre par cadre. Quelque part, cela signifie que l’on veut extraire de facto le Pineau de la double fin alors que, jusqu’à preuve du contraire, il en fait toujours partie lorsque ses cépages s’appellent Ugni blanc, Colombard, ou Folle blanche. Monté au créneau sans tarder, le Syndicat du Pineau obtient des assurances verbales du ministère. « Rien ne change, tout reste en l'état » lui dit-on en substance. Fort de cette réponse, le Syndicat en remercie même par courrier le chef du bureau de la Viticulture, rue de Varennes. Fin du premier épisode. Vient le second sous la forme d’une circulaire d’application du 22 février 2002 visée par le ministère de l’Agriculture. Elle a trait au mode de calcul du rendement agronomique pour l’accès aux aides à l’enrichissement et au stockage. Cette note, destinée à servir de manuel de procédure aux organismes instructeurs, fait fi du rendement agronomique des 120 hl applicable aux cépages à double fin. Au lieu de raisonner « production globale de l’exploitation » – ce qui est l’essence même du rendement agronomique – elle raisonne produit par produit. Pour ouvrir droit aux aides, le rendement agronomique ne doit pas dépasser 120 hl vol. pour les vins aptes au Cognac, 110 pour les vins de table simple fin, 80 pour les vins de pays et 60 hl pour les moûts Pineau. Les surfaces à retenir seraient les surfaces en production et non les surfaces plantées. Qui plus est, la note du ministère fait passer à la trappe le bonus de 19 hl de non-vin applicable au plan national pour calculer le rendement agronomique des vins de pays. Non seulement l’instruction administrative change la donne en cours de jeu, mais pénalise gravement les Charentes. Les effets ne tardent pas à se faire sentir. Des viticulteurs ayant souscrit des dossiers d’aides à l’enrichissement se voient refuser qui 20 000 F, qui 30 000 F.

Cerise sur le gâteau

Emoi au vignoble. Mais la région n’a pas encore tout vu. La « cerise sur le gâteau » ou le «coup de grâce » – c’est selon – vient d’une nouvelle circulaire du 18 mars. Elle ne prévoit rien d’autre que de changer le mode de calcul du rendement agronomique applicable à la distillation article 28. Et dans les grandes largeurs s’il vous plaît. On ne retient plus la surface plantée mais la surface en production et l’on raisonne, comme pour l’accès aux aides à l’enrichissement et au stockage, produit par produit (décompte des ha Pineau pour 60 hl/ha, des ha vins de pays pour 80). En fait, la notion de surface plantée, utilisée jusqu’alors et découlant des textes communautaires, ne concernerait plus que le calcul de la QNV. Pour fonder sa circulaire, l’Administration cite « les dispositions de l’arrêté de campagne » et notamment son article 6 qui parle du rendement agronomique des « produits » issus de cépages à double fin. Ravi de l’apprendre, sauf que l’arrêté de campagne est arrivé six mois après la récolte, que l’administration a beau jeu de s’abriter sur des textes qu’elle a elle-même rédigés, un peu à la manière d’un pompier pyromane et qu’enfin, la double fin n’est toujours pas démantelée. Inutile de dire qu'après le premier mouvement de surprise, qui frise la stupéfaction, la colère monte lentement au vignoble. Non seulement il est cavalier de biffer d’un trait de plume la double fin, mais il est proprement irresponsable d’entraîner les viticulteurs sur de telles brisées. En pure bonne foi, des gens se sont engagés sur des volumes qui aujourd’hui sont remis en cause de la manière la plus inconséquente qui soit. A ce petit jeu, et si rien n’était fait, les producteurs risqueraient de payer le prix fort : pour la récolte 2001, perte du bénéfice de la distillation article 28 à prix élevé et perte des aides à l’enrichissement et au stockage ; pour la récolte 2002, non délivrance de l’AROC pour ne pas avoir livré en vin à l’article 28 des volumes qui auraient dû l’être (après redéfinition de l’assiette du rendement agronomique), avec les conséquences que cela entraîne.

Avant de connaître l’existence de la circulaire du 18 mars relative à l’article 28, les professionnels disaient vouloir « jouer l’apaisement afin de donner l’occasion à l’administration de se rattraper et négocier une sortie honorable ». Après ce dernier épisode, le propos risque de se durcir singulièrement.

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